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Full text of "La France LICRAtisee"

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Anne Kling 



La France 



LICRAtisée 



préface d'Alain Soral 




Collection «politiquement incorrecte » dirigée par Philipp Randa 



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Anne Kling, fonctionnaire international, a été mise 
en examen en août 2000 à l'initiative du procureur 
de la République et sur dénonciation de la LICRA, 
pour incitation à la haine raciale. La raison ? Dans 
un tract intitulé « Nous avons droit à la sécurité », 
elle avait évoqué un lien possible entre immigration 
et délinquance des jeunes dans les termes suivants: 
« Non seulement les violences urbaines progressent, 
mais elles changent de nature, devenant de plus en 
plus le fait de mineurs, ce qui est nouveau et inquié- 
tant. Osons le dire: ces jeunes violents, dans une forte 
proportion, sont des Français issus de V immigration 
maghrébine et africaine, culture llement mal assimilés 
et socialement mal intégrés. C'est une réalité, pas un 
fantasme ». 

Elle comparait devant le Tribunal correctionnel de 
Strasbourg en février 2001 et elle est relaxée par ce 
même Tribunal en mars 2001, exactement une se- 
maine après les élections municipales et cantonales 
de Strasbourg où elle était candidate en 2 e position 
sur une liste de rassemblement identitaire. 
Elle préside l'association « Défendons Notre Iden- 
tité » créée en 2002 en Alsace. Cette association est 
à l'origine du collectif « Non à la Turquie en Euro- 
pe », qui a mené diverses actions, dont une vaste 
campagne de pétitions. C'est en raison de ces activi- 
tés qu'Anne Kling a été révoquée par l'organisation 
internationale où elle exerçait ses fonctions, en octo- 
bre 2002. Par décision judiciaire, elle a été réintégrée 
en mai 2004. 



La France 



LICRAtisée 



préface d'Alain S oral 



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77522 Coulommiers cedex 

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© Déterna - 2006 
I.S.B.N. 2-913044-63-8 



Enquête au pays de la Ligue internationale 
contre le racisme et l'antisémitisme 

Quelle est son origine ? 

Quels sont ses objectifs, ses méthodes, ses alliés ? 

Quel est le secret de son influence ? 



Sommaire 



Avant-propos 19 

Au commencement était la révolution bolchevique 27 

Un crime sensationnel à l'origine de la LICRA 49 

La shoah et le soutien inconditionnel à Israël 93 

La LICRA et la politique proche-orientale de la France 121 

La France est spécialement coupable 133 
Vichy ou les « heures les plus sombres » de notre histoire 145 

Les procès 159 

La LICRA et les révisionnistes 183 

Les noms de rue 203 

Vous avez dit racisme ? 213 

L'arsenal des législations antiracistes se met en place 227 

Vive l'immigration massive ! 255 
La mise hors circuit du Front national : 

une fatwa implacable... et intéressée 333 

La LICRA et ses alliés 381 

La LICRA et les médias 403 

Conclusion 417 

Notes 425 

Bibliographie 435 



«À Vencontre de bien des prévisions, de toutes 
les espérances, le progrès des arts et des métiers, des 
Sciences et des techniques n'a pas apporté à l'hu- 
manité un progrès intellectuel et moral parallèle, 
mais lui vaut plutôt une régression sensible. Les 
Lumières, comme on disait au XVIII e siècle, sont 
aujourd'hui en raison inverse des conquêtes de 
l'électricité. 

Tout ce qui devait éclairer la conscience de 
l'homme est employé à mieux tromper, à répan- 
dre les préjugés... Et le nombre décroît chaque 
jour des individus capables dépenser par eux- 
mêmes... » 

Boris Souvarine, 1937. 



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Préface 



On me demande de préfacer un livre critique 
sur la LICRA (pour un livre apologétique, je me 
doute qu'on n'aurait pas fait appel à moi). 

D'emblée je sais que je devrais dire non. Une 
préface pour un livre critique sur la LICRA c'est, 
outre un énième travail non payé, la certitude de 
m' attirer des ennuis. C'est qu'ils sont méchants, 
et organisés, les antiracistes professionnels, sur- 
tout envers les petits Français comme moi, qui ont 
le malheur d'être nés « de souche », peau 
claire et yeux bleus... 

Malgré la qualité évidente du bouquin, son 
objectivité morale, je devrais donc répondre non. 
Les gens qui me veulent du bien m'y incitent 
d'ailleurs instamment. N'ai-je pas déjà un procès 
pour « incitation à la haine raciale » sur les bras ? 

s 

Etrange République française, en effet, où un 
écrivain républicain, parce qu'il critique les 
communautarismes et un certain républicanisme 



10 Politiquement incorrect 

à deux vitesses qui, par sa jurisprudence, n'est 
pas pour rien dans la destruction de notre uni- 
versalisme citoyen, se voit pourchassé par la 
justice. Renvoyé au tribunal par le procureur de 
la République sur ordre d'une obscure associa- 
tion communautaire qui l'accuse d'avoir manqué 
de respect au fameux peuple élu ! De peuple de 
France, de citoyens, de République une et indi- 
visible qui ne reconnaît dans la sphère publique 
ni communauté ni lobby, il n'en est même plus 
question. Je sais bien que le droit, c'est le droit 
du plus fort, mais ces derniers temps, sur certai- 
nes questions, on se passe ouvertement du droit. 

Je devrais donc refuser d'écrire cette préface, 
par trouille, par soumission, parce que j'ai bien 
compris, moi aussi, comme tous ceux qui fré- 
quentent les hautes sphères et les cimes, pour 
qui tapine la raie publique dans la réalité... Mais 
voilà, je suis d'un naturel taquin, c'est plus fort 
que moi, je n'aime pas trop faire là où on me 
dit de faire. Péter de travers sur certains sujets 
me procure cette sensation orgueilleuse de me 
différencier des chiens. 

Je vais donc accepter de la rédiger, cette préface 
à emmerdes sur notre France licratisée... Pas 
parce que ça m'amuse, ni même parce que ça 



11 La France LICRAtisée 



m'intéresse particulièrement (ces derniers temps, 
je serais plutôt attiré par la plongée) mais, comme 
dirait maître Badinter, par principe. 

Qu'écrire ? 

Pour commencer par le commencement, 
LICRA ça veut dire : Ligue Internationale Con- 
tre le Racisme et l'Antisémitisme. Et puisqu'on 
nous dit que l'antisémitisme c'est du racisme, 
LICRA veut donc dire : Ligue Internationale 
Contre le Racisme et... le Racisme! Ce qui est 
pour le moins redondant ! 

A moins que l'antisémitisme ne soit tout autre 
chose... Mais je sens que je ne devrais pas per- 
sévérer dans cette voie ! Après tout, la logique ces 
derniers temps... On a bien vu avec la tribu Ka, 
dissoute en 24 heures pour avoir voulu imiter 
certains qui, eux, ratonnent impunément depuis 
25 ans sur le sol de France et qui s'en vantent, 
avec la bénédiction des autorités... 

Je dois bien admettre que des esprits fins, une 
certaine droite dont je ne viens pas, me répé- 
taient depuis 30 ans ce que je refusais de croire, 
parce que je trouvais ça trop dégueulasse et trop 
laid : à savoir que l' antiracisme institutionnel, 
c'était d'abord du racisme anti-français ! Comme si 
certains puissants voulaient faire payer ad 



12 Politiquement incorrect 

vitam aeternam à notre bon peuple - ou du 
moins ce qu'il en reste - sa trop grande obéis- 
sance au maréchal Pétain... En vertu de quoi les 
rappeurs peuvent insulter la France, là c'est de 
l'art, tandis que si le Français s'en plaint, là la 
LICRA se charge de lui rappeler le racisme, et la 
liberté, et le droit. 

Quoique... Ça change un peu ces derniers 
temps. 

J'ai fait un texte là-dessus, une commande 
pour une petite revue sans intérêt, un « spécial 
Léon Bloy », et comme la bande de petits 
mondains qui l'animait me l'a finalement 
censuré, moi qui suis du genre têtu et paresseux, 
je profite de l'occasion qui m'est offerte pour le 
recaser. Vous verrez à la lecture que ce n'est pas sans 
rapport avec le sujet... 



« Ce que cache le foulard 

(De la mauvaise foi, du conformisme et de 
V étrange évolution de V intellectuel français sur la 
question immigrée) 

Sous l'Ancien Régime, la « mauvaise foi » dési- 
gnait le non respect du dogme de l'Eglise, la 
mauvaise compréhension de l'ordre divin. De- 



13 La France LICRAtisée 



puis l'avènement de la Raison et de sa classe 
sociale, la bourgeoisie, la mauvaise foi signifie 
désormais le refus de suivre la Raison quand 
celle-ci vous met en porte à faux et vous montre 
du doigt. 

Le contraire de la mauvaise foi étant la bonne 
foi, que ce soit celle des Évangiles ou de l'honnête 
homme, la bonne foi m'impose de constater une 
certaine déraison sur la question de l'anticommu- 
nautarisme actuellement en vogue. 

Depuis les années 70 jusqu'au 21 avril 2002 (pour 
faire simple), le discours dominant, officiel, nous 
interdisait de nous plaindre des délinquants nord- 
africains sous prétexte qu'ils étaient jeunes (argument 
68), qu'ils étaient différents (argument commu- 
nautaro-différentialiste), qu'ils étaient pauvres(ar- 
gument marxiste) et surtout que leur ressentiment lé- 
gitime leur venait de l'odieuse colonisation française. 

Si le bourgeois de l'ascendance a forcé l'admira- 
tion de l'Histoire pour son sens critique (Voltaire, 
Rousseau.. .), le bourgeois de la décadence peut se 
définir par son conformisme. Comme nous l'a am- 
plement démontré Flaubert, il fait là où on lui dit 
de faire. Ainsi, en réponse à l'insupportable délin- 
quance nord-africaine subie par le beauf depuis 
qu 'il fut chassé des centres-villes, le bourgeois, pour- 



14 Politiquement incorrect 

tant responsable de son sort, le traitait invariable- 
ment de « facho » comme on le lui avait appris. 
«On » désignant plus précisément V intellectuel sou- 
vent issu d'une communauté très en pointe dans le 
secteur des idées depuis son émancipation des ghet- 
tos au XIX e siècle, et plus encore sur le terrain du 
discours après la défaite nazie. 

Or, chose étrange, depuis que le beur de banlieue 
n'aboie plus « sale français »: mais « sale feuj » pour 
cause de solidarité imaginaire (comme dirait Alain 
Finkielkraut) avec les Palestiniens de l'Intifada, ces 
mêmes intellectuels ( ...), eux qui nous avaient inter- 
dit de nous plaindre, eux qui exigeaient même que 
nous battions notre coulpe de vilains colons exploi- 
teurs, nous intiment V ordre, dans autant de médias 
à la botte, de châtier les vilains beurs, ni jeunes, ni 
différents, ni pauvres, ni victimes désormais, seleu- 
ment machos et antisémites. 

Message on ne peut plus clair... dans la Républi- 
que française, être anti-français ce n'est rien, mais être 
anti-israélien c'est impardonnable... surtout pour des 
intellectuels qui ne manquent pas une occasion 
d'afficher leur soutien à ce champion contemporain 
du racisme colonialiste et dont le chef vient d'être 
démocratiquement réélu haut la main, j'ai nommé 
l'État d'Israël du coolissime général Sharon ! 



15 La France LICRAtisée 

Une bouc-émissairisation des maghrébins de 
France qui s'est encore accrue depuis la chute de 
Bagdad, qu'on peut aussi comprendre comme la 
victoire des intérêts américano-sionistes et la défaite 
des non-alignés, défenseurs des petits peuples et de 
la cause palestinienne (...) 

Pour en revenir au conformisme bourgeois, prétexte 
à cette diatribe, n'y aura-t-il bientôt plus en France 
que Brigitte Bardot pour oser s'offusquer de ce que 
certains malins envoient des immigrés transformer les 
églises, symbole de notre histoire chrétienne, en lieux 
d'aisance ? Ces mêmes malins qui, n'en doutons pas, 
n'hésiteront pas demain à retourner l'opinion agacée 
contre les sans-papiers, si d'aventure l'idée leur vient 
d'aller chier dans des synagogues ! ». 

C'était avant la mésaventure Dieudonné. Recon- 
naissez que le texte était prémonitoire, parce que le 
racisme ces derniers temps... un coup c'est blanc, 
un coup c'est noir ! Et les mêmes qui défendaient 
les immigrés du sud contre les méchants Européens 
au nom de la solidarité des minorités opprimées, 
nous proposent aujourd'hui, sans vergogne, l'union 
sacrée contre les « arabo-bamboulas violeurs et 
assassins », au nom de la solidarité des judéo- 
chrétiens ! Signé Finkielkraut et Bernard Kouchner, 



16 Politiquement incorrect 

même Le Pen n'aurait pas osé. Il doit en falloir du 
réseau, du pognon et de la soumission d'élite pour 
faire gober cette parfaite escroquerie au peuple de 
notre beau pays. Un pays où un avocat français, à 
double, voire triple passeport, se voit chargé par un 
ministre de l'intérieur de nous expliquer comment 
on doit s'y prendre avec nos immigrés, lui qui 
rentre à peine d'un stage de ratonnade en Palestine 
sous l'uniforme israélien ! Le métissage, il nous en 
gave, le petit- fils d'officier de la Wehrmacht, mais 
il n'en mange pas ! 

Eh oui, c'est comme ça : la définition du racis- 
me ça change... en fonction des intérêts bien 
sentis de certains, toujours les mêmes, et qui 
non contents de faire profession d' antiracisme, 
prétendent au surplus exister par le droit divin 
et le droit du sang ! Difficile de faire pire dans 
la méprise du sens... et de la justice. 

Vous ne me ferez pourtant pas dire que le 
racisme n'existe pas. Le racisme existe, c'est même 
la vilaine chose la mieux partagée du monde. 
Partout, toujours, il y a eu ceux de la tribu, du 
clan et à l'extérieur les sauvages, les barbares. En 
vertu de quoi les blancs se méfient des noirs, les 
noirs se méfient des blancs et la seule chose qui 
les différencie au fond, c'est l'exploitation. Car il 



17 La France LICRAtisée 



faut bien reconnaître que depuis des siècles, et 
quelle que soit leur animosité réciproque, ce sont 
plutôt les blancs qui bottent le cul des noirs et qui 
les exploitent, pas l'inverse. 

Quant à en concevoir de la culpabilité, ça 
dépend des valeurs. Moi qui fus communiste, 
j'en ressens un peu, mais d'autres vous diront 
qu'après tout, il n'y a pas de honte à être le plus 
fort ? Quand une équipe nationale en écrase une 
autre au football, elle ne se met pas à chialer en 
demandant pardon. (On pourrait même se de- 
mander d'où nous vient cette tendance expo- 
nentielle à la jérémiade, mais c'est une autre 
question...) 

Pour en revenir à la LICRA, en fonction des 
valeurs qu'elle affiche et qu'elle prétend défendre, 
là on se situerait plutôt dans l'exploitation... de la 
crédulité humaine ! C'est d'ailleurs la vertu de ce 
livre, et son sérieux, de l'expliquer très bien. Il 
existerait donc sur notre terre humaniste et 
chrétienne, deux saloperies : le racisme, qui est une 
idée assez laide, et l'antiracisme institutionnel. 
Contre la première, je ne crois pas qu'on puisse 
faire grand chose, sinon permettre aux peuples de 
vivre séparés, afin qu'ils s'apprécient de loin, par 
petites touches, d'exotisme à exotisme... Le métis- 



1 8 Politiquement incorrect 

sage forcé et l'antiracisme de, flic étant la matrice 
même de la haine. Contre la seconde, cette manip 
historique, cette histoire de réseau dont le martyre 
médiatique d'un Dieudonné nous a bien permis 
d'apprécier toute la duplicité, on peut aider les 
gens à être moins naïfs et moins cons. En aidant 
par exemple ce livre argumenté, lucide et précis à 
se faire connaître, ce que je fais par cette préface, 
dans la faible mesure de mes moyens. 

J'espère qu'au jour de justice, là-haut, au ciel, 
ce petit acte de morale et de courage ne sera pas 
retenu contre moi, parce qu'ici-bas, dans notre 
belle République laïque et égalitaire, j'avoue ces 
derniers temps que j'ai cessé d'y croire. 

Bonne lecture... 

Alain S oral 
www.alainsoral. com 



Alain Soral est l'auteur d'un certain nombre 
d'essais, notamment Sociologie du dragueur, So- 
crate à Saint- Tropez : Texticules, Abécédaire de 
la bêtise ambiante, Misères du désir, Chute ! : 
Éloge de la disgrâce, etc. 



Avant-propos 



Le 26 octobre 1927, un procès retentissant trouve 
son épilogue à Paris. Accusé du meurtre du 
nationaliste ukrainien Simon Petlura, Samuel 
Schwartzbard est triomphalement acquitté. Il est 
vrai que le mobile officiel du crime - venger les 
victimes des pogroms en Ukraine imputés à Petlura 
- a suscité l'émotion des milieux juifs mondiaux et 
entraîné une forte mobilisation au bénéfice de 
l'accusé. En France, sa défense a été prise en main 
par le journaliste Bernard Lecache qui crée dans ce 
but la Ligue internationale contre les pogroms. 

Le 17 octobre 1927, soit quelques jours à 
peine avant cet acquittement fortement média- 
tisé, le même Bernard Lecache présidait un 
meeting organisé pour fêter le 10 e anniversaire 
de la révolution bolchevique, survenue en Russie 
en octobre 1917. 

Quelques mois plus tard, en janvier 1928, il 
entrera au comité national de l'Association des 
amis de l'Union soviétique et débutera sa 



20 Politiquement incorrect 

collaboration à la revue L'Appel des Soviets. Tou- 
jours en 1928, Bernard Lecache transforme sa 
Ligue contre les pogroms en Ligue internationale 
contre l'antisémitisme. 

La LICA, qui deviendra quelques années plus 
tard la LICRA, vient de naître. Son fondateur 
restera à sa tête jusqu'à son décès en 1968, soit durant 
quarante ans. 

Ce bref rappel permet de comprendre ce 
qu'est et ce que deviendra la LICRA. 

La Ligue internationale contre l'antisémitisme a 
été créée, dans un contexte très particulier et en 
une période très troublée, par des communistes 
de la première heure. Ce qui n'est certes pas un 
crime. Simplement une information. Mais une 
information qui projette un éclairage singulière- 
ment révélateur sur l'action que la Ligue mènera 
avec constance à partir de ce moment-là 

D'avoir été créée par des personnes, et en des 
circonstances fortement politisées, n'a nullement 
empêché la LICRA, dès le départ, de se déclarer 
apolitique, ou plus exactement, selon ses propres 
termes, « au-dessus des partis ». Elle s'est décla- 
rée de même non confessionnelle. Cette appa- 
rente neutralité lui a permis d'étendre son réseau dans 
toutes les directions et d'afficher une vitrine 



2 1 La France LICRAtisée 

universaliste et morale derrière laquelle elle a pu 
exercer en réalité une influence politique impor- 
tante et bien ciblée, quoique méconnue ou sous- 
estimée du public. 

La LICRA a ainsi réussi au fil des années à 
s'imposer comme un partenaire obligé et incon- 
tournable de toute action politique dans un cer- 
tain nombre de secteurs-clés de la vie de notre 
pays. Elle a notamment à son actif : 

- la mise en place d'un arsenal législatif anti-raciste 
particulièrement dissuasif. 

un soutien permanent à l'immigration de 
peuplement arabo-musulmane. 

- l'exclusion instrumentalisée de tous les partis 
défenseurs de l'identité, et notamment du Front 
national. 

Il s'agit là de domaines éminemment politiques 
où ses continuels pressions, incitations et vetos 
ont fortement contribué à orienter des choix qui 
pèsent très lourdement sur la vie des Français. Ces 
derniers ont aujourd'hui de plus en plus nette- 
ment conscience d'être arrivés à une impasse, 
à un blocage qui ne permet même plus d'entrevoir des 
solutions à une situation générale très dégradée 
qui a échappé au, personnel politique, lequel se 
Contente en réalité de gérer au jour le jour. Une 



22 Politiquement incorrect 

partie non négligeable de la population se trouve 
privée de représentation nationale et de toute 
participation à la vie publique, ce qui est l'exact 
contraire de la démocratie. Il n'existe plus aucune 
liberté d'expression ou de possibilité de débat sur 
les sujets sensibles et engageant l'avenir, à savoir 
ceux évoqués plus haut. Pendant ce temps, s'ins- 
talle dans le pays un communautarisme qui n'ose 
pas dire son nom, mais que chacun peut cons- 
tater. Et qui est très lourd de menaces pour l'ave 
nir. 

Certes, la LICRA n'est pas seule responsable 
de cette situation. D'autres associations l'ont 
accompagnée dans le combat dit antiraciste, qui 
est en réalité le combat anti- identitaire. Et en fin 
de compte, c'est bien le pouvoir politique qui a, 
bon gré mal gré, inscrit dans la réalité ses 
propositions et ses diktats. La LICRA a cepen- 
dant joué un rôle d'impulsion majeur que l'on 
ne peut sous-estimer. 

Comme on le verra, elle disposait, pour réussir 
à imposer ses vues, d'un atout décisif. 

Dès 1932, la Ligue s'est dotée d'un journal 
intitulé Le Droit de Vivre qui n'a jamais cessé de 
paraître depuis lors, sauf durant les années 1940- 
1945, et qui est aujourd'hui encore son organe of- 



23 La France LICRAtisée 

ficiel. A travers ce support de combat s'expriment 
toutes les actions, réactions, thèmes et anathèmes 
d'une association puissante au point d'avoir im- 
primé une marque très forte sur notre pays. 

Le présent ouvrage se propose de mettre en évidence 
cette influence à partir de faits précis, 
en retraçant tout l'historique d'un pouvoir qui 
plonge ses racines au confluent de deux événe- 
ments majeurs du XX e siècle: la révolution bol- 
chevique et la Seconde Guerre mondiale. Deux 
événements complexes et puissamment liés l'un 
à l'autre. Deux événements dont nous subissons 
encore fortement les retombées. 

Ce détour par les origines de la LICRA est 
capital pour comprendre son action ultérieure. 
Tout comme sera déterminante à cet égard la 

s 

création de l'Etat d'Israël en 1948. 

L'action plus directement contemporaine de la 
LICRA a été examinée sur la base de tous les 
Droit de Vivre ayant paru depuis 1967. Pourquoi 
1967 ? C'est qu'à bien des égards, cette date 
inaugure une nouvelle période de notre histoire. 

Elle est celle de la guerre des Six Jours, qui voit 
l'Etat d'Israël triompher de ses voisins arabes. 
Cette victoire va entraîner de fortes évolutions au 
sein de la communauté juive mondiale. Et par 



24 Politiquement incorrect 

conséquent aussi chez nous, la France abritant la 
plus forte communauté juive d'Europe. 

A cette date, notre pays est également à la veille 
de profondes mutations. Mai 68 n'est pas loin. La 
gauche ne réussira pas cette révolution-là, mais elle 
a déjà investi le pouvoir culturel, via les médias, et 
posé les jalons qui la conduiront à la victoire de 
1981. Elle sera largement aidée et accompagnée 
dans cette longue marche par la LICRA. 

Enfin, l'immigration - qui a réussi à transfor- 
mer le visage de la France - va réellement 
démarrer et s'intensifier à partir de ces années. 

Précisons qu'il sera question ici de la seule LICRA et 
en aucun cas de la communauté juive 
française, dont les membres représentent toutes 
les sensibilités, notamment politiques. Il serait 
donc parfaitement abusif, et faux, de confondre 
LICRA et communauté juive. 

LICA ou LICRA ? 

En 1928, s'est créée la LICA ou Ligue interna- 
tionale contre l'antisémitisme. 

En 1932, la Ligue change son intitulé pour 
devenir Ligue internationale contre le racisme et 
l'antisémitisme sans modifier cependant son sigle : 
LICA, déjà bien connu. 



25 La France LICRAtisée 

Ce n'est qu'en 1979, que tout en conservant son 
précédent intitulé, elle modifiera cette fois son sigle et 
deviendra la LICRA. 

C'est la raison pour laquelle, suivant les dates des 
événements mentionnés, on pourra lire LICA ou 
LICRA. 

Le journal de la LICRA, Le Droit de Vivre, 
sera fréquemment désigné dans les pages qui sui- 
vent sous l'abréviation de DDV. 



Au commencement 
était la Révolution bolchevique 



La LICRA est née en 1927 dans un contexte 
historique bien précis. Elle est issue en droite 
ligne du communisme théorisé par Karl Marx et 
appliqué à la Russie par les bolcheviques à partir 
d'octobre 1917. 

Ce régime politique nouveau, né de la Révo- 
lution d'octobre, sera d'une rare perversité. A la 
fois antérieur et postérieur au nazisme qui va s'en 
inspirer à bien des égards, le régime communiste 
se soldera par un désastre total, à la fois humain 
et économique. Malgré ses crimes immenses et ses 
échecs avérés, il continue à peser aujourd'hui 
encore sur une bonne partie du monde, y com 
pris, idéologiquement, sur notre pays. 

On attend toujours sa repentance. 

Les liens de la LICRA avec le parti révolu- 
tionnaire sont très étroits dès le début de son 
histoire. Bernard Lecache, son fondateur et pre- 
mier président de 1927 à 1968, ne cachait pas 



28 Politiquement incorrect 

son admiration pour la révolution bolchevique. 
Il sera l'un des premiers à adhérer au Parti com- 
muniste français qui se crée dès 1920. Et 
l'anarchiste Schwartzbard, dont le crime sera le 
prétexte à la création de la LICRA, était lui- 
même très lié aux vainqueurs de la révolution. 
Par la suite, des brouilles liées essentiellement 
au conflit israélo-palestinien et au sort des juifs 
en Union soviétique, donc à des manifestations 
supposées d'antisémitisme ou d'antisionisme, 
vont survenir et assombrir les relations entre la 
LICRA et le parti communiste. Elles ne condui- 
ront cependant jamais à l'ostracisme absolu qui 
frappe en revanche - et a priori - les défenseurs 
d'idéaux identitaires ou patriotiques, et notam- 
ment le Front national. 

Jamais le régime communiste, totalitaire et 
sanglant, n'a été désavoué en tant que tel par la 
LICRA, pourtant championne des droits de 
l'homme. 

Pour comprendre les raisons d'une telle rete- 
nue, il faut impérativement faire un bref détour 
du côté de la révolution bolchevique, de ses 
financiers, de ses instigateurs, de ses dirigeants. 



* * 



29 La France LICRAtisée 

-e 



En ce tout début de XX siècle, la Russie tsa- 
riste témoigne d'un certain dynamisme écono- 
mique mais mène sur le plan des libertés publi- 
ques une politique résolument rétrograde qui 
fera son malheur. Faute d'avoir entrouvert à 
temps la porte à un début de démocratie, elle 
encouragera l'émergence des mouvements révo- 
lutionnaires et terroristes qui lui mèneront une 
guerre implacable et finiront par l'abattre. La 
première guerre mondiale se chargeant d'accé- 
lérer le naufrage. 

Absolutiste, le régime tsariste est aussi, dans 
une large mesure, antisémite. Il nourrit, comme 
d'ailleurs une bonne partie de la population, 
méfiance et hostilité envers ce groupe particulier 
qui ne veut pas se fondre dans le moule national. 
Cela se traduit essentiellement par des mesures 
discriminatoires, voire des pogroms qui survien- 
nent régulièrement, entraînant dès la fin du XIX e 

s 

siècle une forte émigration vers les Etats-Unis, 
l'Europe occidentale ou la Palestine. Une émi- 
gration que viendra renforcer l'écrasement de la 
première révolution de 1905. 

Malgré ces départs, les juifs restent nombreux 
dans l'empire tsariste : de l'ordre de 5 à 6 mil- 
lions de personnes. Cependant, bien que ne 



30 Politiquement incorrect 

représentant qu'environ 4 % de la population 
russe totale, ils vont jouer un rôle moteur dans 
les mouvements terroristes et révolutionnaires 
qui se développent dès la fin du XIX e siècle pour 
déboucher finalement sur la prise de pouvoir des 
bolcheviques en 1917. 

Le Bund, Union générale des travailleurs juifs, 
socialiste, marxiste, antisioniste, figurera, dès sa 
création en 1897, parmi les groupes les plus 
actifs. Son indépendance fera plus tard de l'om- 
bre aux bolcheviques, qui finiront par le liquider 
au nom du centralisme révolutionnaire. 

Il n'y a aucun mystère à cette intense activité 
révolutionnaire de la part des juifs : ces derniers 
exècrent un régime qui les persécute et aspirent, 
comme d'ailleurs beaucoup d'autres sujets de 
l'empire, à une révolution libératrice. Principale- 
ment installés dans les villes, ils sont généralement 
plus instruits que la moyenne de la population 
russe, encore semi- analphabète. Ce qui fait d'eux 
une sorte d'intelligentsia, maltraitée par le pouvoir. 
Rien d'étonnant, dans ces conditions, à ce que 
les ferments de la révolution, théorisés en Alle- 
magne par deux autres juifs, Karl Marx et Frie- 
drich Engels, trouvent parmi eux un terreau 
idéal. 



31 La France LICRAtisée 

La situation dans les campagnes est quelque 
peu différente. La population juive y vit depuis 
des siècles repliée sur elle-même, parlant princi- 
palement yiddish. Pour toucher cette population 
moins instruite, le Manifeste du parti communiste 
de Karl Marx sera très rapidement traduit en 
yiddish, qui deviendra également une langue 
d'agitation. 

Cette forte présence juive dans les mouve- 
ments révolutionnaires russes et allemands était 
à l'époque un fait parfaitement établi et reconnu. 
Theodor Herzl lui-même en fournit une preuve 
Dans ses efforts pour promouvoir le sionisme et 
attirer les émigrés en Palestine, le père du mou- 
vement sioniste rencontre en 1895 le ministre de 
l'Intérieur du tsar, Viacheslav von Plehve, res- 
ponsable de nombreux pogroms. Il tente de le 
convaincre de faciliter la sortie massive des juifs 
de Russie vers la Palestine, arguant que ce départ 
serait de nature à affaiblir considérablement le 
mouvement révolutionnaire, cauchemar perma- 
nent de Plehve. Qui finira d'ailleurs sous les bal- 
les d'un terroriste en 1904. 

En 1898, Theodor Herzl rencontre de la 
même manière et pour les mêmes raisons le Kai- 
ser Guillaume II, lui laissant entendre qu'une 



32 Politiquement incorrect 

fois les juifs émigrés en Palestine, ses troubles 
intérieurs s'apaiseraient d'autant. 

Car le mouvement sioniste - qui prône le re- 
tour du peuple juif vers la terre de ses origines - 
naît à peu près à la même époque. En 1895, 
Theodor Herzl publie L'état juif, et en 1897 se 
crée l'Organisation sioniste, dont le principal 
objectif est désormais d'inciter les juifs européens 
à émigrer vers la Palestine^. Elle n'y parviendra 
que très difficilement jusqu'à la seconde guerre 
mondiale. 

Le nerf de la révolution 

Pour faire la guerre, ou la révolution, surtout 
mondiale, il faut de l'argent. Et même beaucoup 
d'argent. Où donc une poignée de révolution- 
naires, pour la plupart exilés, ont-ils trouvé les 
moyens financiers nécessaires pour abattre un 
régime, certes affaibli, mais malgré tout encore très 
puissant ? 

Argent et soutien leur seront fournis en 
grande partie par des financiers juifs américains 
et européens, notamment allemands et suédois. 
Des sponsors qui n'avaient d'ailleurs pas attendu 
1917 pour agir car ils aidaient déjà les mouvements 
révolutionnaires antérieurs. 



33 La France LICRAtisée 

Il faut se souvenir que la communauté juive 
américaine était passée de 15 000 membres en 
1840 à 3 500 000 en 1920 ! Une formidable 
explosion due essentiellement à la très forte émi- 
gration en provenance d'Europe de l'est, prin- 
cipalement de Russie et d'Allemagne. Les liens 
qui unissaient les émigrés, Américains de fraîche 
date, à leurs frères demeurés sur le vieux con- 
tinent restaient donc puissants. Même si certains 
d'entre eux avaient édifié depuis de véritables 
fortunes, ils n'oubliaient ni leurs origines ni leur 
détestation de régimes qui les avaient contraints 
à l'exil. 

La raison essentielle du soutien d'un certain nombre 
de capitalistes juifs américains à la révo- 
lution bolchevique fut donc leur haine envers un 
régime tsariste antisémite et leur désir de le voir 
renversé à tout prix. Le changement de régime 
offrait un double avantage : outre la suppression 

s 

de l'antisémitisme d'Etat, il permettait l'ou- 
verture d'un immense marché. En prime, il était 
également de nature à déstabiliser l'Europe en- 
tière, qui se trouvait alors engagée dans une 
guerre terriblement meurtrière. Et ceci pour le 
plus grand profit de la puissance américaine 
émergente. 



34 Politiquement incorrect 

Car ces riches émigrés nourrissaient également 
des sentiments plutôt mitigés à l'égard de cette 
vieille Europe tissée de nationalismes et traversée 
elle aussi d'antisémitisme - n'oublions pas l'af- 
faire Dreyfus alors toute récente. Dans leur es- 
prit, n'avait-elle pas, finalement, fait son temps ? 
C'est que l'incendie libérateur allumé en Russie 
était bel et bien destiné à embraser toute l'Eu- 
rope. L'idéal révolutionnaire de fraternité et de 
justice universelles - car en théorie, c'était cela, 
le communisme - pouvait donc, dans ce con- 
texte, sembler digne d'être soutenu. Et financé. 

Le moment était propice. A l'extérieur, la 
Russie était en guerre contre l'Allemagne, et sur 
le plan intérieur, le pouvoir affrontait des mou- 
vements révolutionnaires de plus en plus actifs 
entraînant une répression de plus en plus féroce. 
Les Protocoles des Sages de Sion, fable inventée par 
des officines tsaristes et promise à un bel avenir, 
datent de cette époque. 

Le principal bailleur de fonds américain sera 
Jacob Schiff, dirigeant de la puissante banque 
Kuhn, Loeb et Cie de New-York. Né à Francfort 
dans une famille de banquiers, il avait émigré en 
Amérique à l'âge de dix-huit ans et fait fortune 
principalement dans les chemins de fer. Il sera 



35 La France LICRAtisée 

l'un des membres les plus importants de la com- 
munauté juive américaine de 1880 jusqu'à sa 
mort en 1920. En 1903, lui et d'autres juifs 
influents avaient déjà incité le gouvernement 
américain à adresser des remontrances officielles à 
la Russie et à la Roumanie au sujet de la situation 
des juifs dans ces pays. Jacob Schiff était conscient 
de l'antisémitisme provoqué, même en Amérique, 
par de trop fortes concentrations de juifs dans de 
mêmes lieux et, s'agissant des nouveaux arrivants 
d'Europe de l'est, par des habitudes et une appa- 
rence trop différentes de celles des autres Améri- 
cains. Pour y remédier, il avait mis sur pied en 
1907 le Galveston Immigration Plan dans le but 
d'inciter les juifs à s'installer au Texas et dans le 

s 

sud-ouest des Etats-Unis plutôt que de se diriger 
systématiquement vers le nord-est urbanisé 
surtout à New- York - où ils étaient déjà très 
nombreux. Ce Plan échouera finalement, moins 
de 10 000 juifs européens ayant choisi cette voie 
d'émigration. Mais on peut penser que cet échec 
sera l'une des raisons qui le conduisirent à sou- 
tenir une révolution qui, dans son esprit, devait 
notablement améliorer le sort des juifs de Russie, 
et donc régler le problème de l'antisémitisme à la 
base. 



36 Politiquement incorrect 

II ne sera pas le seul. Bien d'autres financiers 
juifs vont transférer durant ces années des fonds 
importants de leurs firmes de Wall Street vers les 
caisses des mouvements révolutionnaires. Léon 

s 

Trotski arrive en personne aux Etats-Unis en 
janvier 1917 et en repart au mois de mai à bord 
du bateau Kristianiafjord, muni d'un passeport 
américain et de compagnons juifs prêts au combat 
recrutés dans les villes américaines. Mais aussi et 
surtout, riche d'un pactole en or et en dollars. 

Dès son arrivée en Europe, il retrouve en Suis- 
se ses compagnons Lénine, Staline, Lazare Kaga- 
novitch et Maxime Litvinov. De là, aidés par les 
Allemands, et notamment par le chef de la 
police secrète allemande Max Warburg , les ré- 
volutionnaires gagnent la Russie avec leur arme- 
ment, à bord d'un train spécialement affrété. 

Car la révolution d'octobre sera également 
aidée par l'Allemagne qui souhaitait à la fois 
l'arrêt de la guerre contre la Russie et l'ouverture 
d'un nouveau marché, elle aussi. 

L'harmonie universelle qui devait naître de la 
révolution bolchevique se fera attendre. Par con- 
tre, un point du programme se réalisera tout de 
suite : à peine installé, le nouveau pouvoir 
attribue de nombreuses concessions et passe 



37 La France LICRAtisée 

d'importants marchés avec certaines firmes 
américaines. Et c'est le banquier suédois Olaf 
Aschberg, lui aussi généreux contributeur, qui 
dirige après la révolution la Ruskombank, 
première banque internationale soviétique. 

Ce n'était donc pas un soutien totalement 
désintéressé, qui s'en étonnera? 

Les vainqueurs de la révolution 

La révolution d'octobre fut tout sauf une 
révolution populaire. Les révolutionnaires, et 
spécialement les bolcheviques, étaient très mino- 
ritaires dans le pays, et la plupart d'entre eux 
vivaient d'ailleurs en exil. 

« Je crache sur la Russie », disait Lénine. C'était 
vrai pour les autres aussi. Les vainqueurs de la 
révolution ne se sentaient pas Russes, n'aimaient 
pas le peuple russe, et ils ne tardèrent pas à le 
lui prouver. C'étaient avant tout des intellectuels 
qui avaient une vision théorique et abstraite de 
la révolution. Et qui admiraient par-dessus tout 
la révolution française, référence absolue, qu'ils 
connaissaient bien pour avoir vécu à plusieurs reprises 
en exil à Paris. 

Les analogies ne manquent d'ailleurs pas entre 
les deux révolutions : toutes deux menées par 



38 Politiquement incorrect 

une minorité au nom du peuple, elles se sont 
toutes deux accompagnées de terreur comme 
moyen de gouvernement - une terreur destinée 
dans les deux cas à « régénérer » l'humanité en 
éliminant les nuisibles -, elles se sont toutes 
deux réclamées des droits de l'homme pour 
mieux les violer systématiquement, elles ont 
toutes deux espéré propager l'incendie aux pays 
voisins, elles ont toutes deux massacré leurs rois 
pour, du passé, faire table rase et construire un 
ordre nouveau. 

Et enfin, elles ont toutes deux été favorables 
aux juifs : la révolution française les a émancipés 
en 1791, la révolution bolchevique a interdit 
l'antisémitisme sous peine de mort dès 1918. 

On peut même affirmer que la révolution 
bolchevique est l'enfant monstrueux et abouti de 
la révolution française. Et que c'est là la vraie 
raison pour laquelle le régime qu'elle a engendré 
continue à bénéficier, aujourd'hui encore, malgré 
ses crimes et ses faillites, d'une secrète tendresse 
d'une coupable indulgence de la part de ceux 
qui, en France, n'ont pas eu à le subir. 

Dans l'esprit des vainqueurs de la révolution, 
la Russie n'était d'ailleurs que la première étape : 
Leur but, c'était la mondialisation de la révolu- 



39 La France LICRAtisée 

tion. Ce dont ils ne faisaient nul mystère. L'am- 

s 

bassadeur des Etats-Unis en Russie, David R. 
Francis, écrit à Washington en janvier 1918 : 
« Les dirigeants bolcheviques ici, dont la plupart 
sont des juifs et dont 90 % sont des exilés de retour, 
font peu de cas de la Russie ou de tout autre pays, 
mais sont des internationalistes et ils essayent de 
déclencher une révolution sociale à l'échelle 
mondiale ». 

Des internationalistes. Il s'agit là d'un mot-clé 
pour comprendre la haine que manifesteront 
sans relâche par la suite tous les mouvements de 
gauche à l'encontre de tout ce qui ressemble de 
près ou de loin à un mouvement national ou 
patriotique, à un souhait d'enracinement ou 
d'identité. Ces aspirations, qui sont de l'ordre de 
la tradition, de l'émotion, du sentiment plutôt 
que de l'intellect ou de l'abstraction, ont 
toujours été immédiatement et abusivement 
assimilées au racisme, tout particulièrement par 
la LICRA. 

Trotski lui-même exprimera très clairement 
cette aversion pour le fait national : « J'ai déjà 
mentionné que l'instance nationale, si importante 
dans la vie de la Russie, n'avait jamais joué aucun 
rôle dans ma vie. Dans ma jeunesse, les élans 



40 Politiquement incorrect 

nationaux et les préjugés irrationnels me sem- 
blaient déjà incompréhensibles et, en certaines oc- 
casions, ils me répugnaient. Mon éducation mar- 
xiste a conforté cet état d'esprit et l'a converti en 
internationalisme actif. Le fait d'avoir vécu dans 
plusieurs pays et d'en avoir connu la langue, la 
politique et la culture, m'ont aidé à absorber l'in- 
ternationalisme dans ma chair et mon sang ». 
Les mouvements révolutionnaires étant dans 
une large mesure dirigés par des juifs - qui 
avaient pour caractéristique d'être socialistes et 
athées - il n'y a rien d'étonnant à les retrouver 
en grand nombre parmi les dirigeants qui 
s'emparent du pouvoir en 1917. Parmi les plus 
influents d'entre eux, au sein de la toute pre 
mière équipe, on peut citer: Léon Trotski, qui 
invente le concept de « révolution permanente », 
organise et dirige l'Armée rouge, crée la police 
secrète appelée tchéka, Yakov Sverdlov, président 
du comité central exécutif, qui devient le 
premier président de la nouvelle URSS, Grigory 
Zinoviev, chef du Komintern (organe chargé 
d'exporter la révolution), Karl Radek, commis- 
saire à la presse, Maxime Litvinov, commissaire 
aux affaires étrangères, Lev Kamenev, ou encore 
Lazare Kaganovitch, beau-frère de Staline. 



41 La France LICRAtisée 

Le Times du 29 mars 1919 souligne également 
la chose. « Une des caractéristiques les plus inté- 
ressantes du mouvement bolchevique est le haut 
pourcentage d'éléments non russes de V équipe diri- 
geante Sur environ trente commissaires ou diri- 
geants qui forment V appareil central bolchevique, 
75% pour le moins sont des juifs ». 

Parmi ces dirigeants, Lénine fait presque figure 
d'exception, lui qui n'était qu'à un quart juif. 
Son grand-père maternel était un commerçant 
juif d'Odessa, nommé Sender Blank qui s'était 
converti à la religion orthodoxe^. 

Cette importante présence juive à la tête du 
nouveau pouvoir sera confirmée indirectement 
par le DDV qui, en 1977, dans un article sur 
l'antisémitisme, « socialisme des imbéciles », écrira, 
à propos des luttes internes au parti après la 
prise du pouvoir par Staline. « Toutefois, le Parti 
se garda de tout recours systématique à l'anti- 
sémitisme politique jusqu'aux grandes purges des 
années 1936-1938 qui liquidèrent la vielle garde 
au sein de laquelle les juifs jouaient un rôle 
particulièrement important ». 

Dans le même ordre d'idées, le DDV consacre, 
en 1990 un grand dossier à l'Europe gangrenée 
par l'antisémitisme. Nous sommes à l'époque de 



42 Politiquement incorrect 

la perestroïka de Gorbatchev, et les juifs sont 
enfin autorisés à quitter le pays. 

Alexandre Adler, politologue spécialiste des 
pays de l'est, invité à délivrer son analyse, déclare 
ceci : « Les juifs ne sont plus perçus comme la 
grande puissance culturelle et intellectuelle qu'ils 
étaient. Ils n'ont plus d'influence et ils s'en 
vont. Des Russes qui seraient tout à fait prêts à 
pogromer si les juifs étaient vraiment un obstacle à 
leurs désirs, n'ont aucune raison de le faire alors 
que tout le monde s 'en va ». 

Une manière de confirmer que les juifs ont bel 
et bien été dans le passé une puissance culturelle 
et intellectuelle en Union soviétique. 

Ce peuple qui empêche le monde de dormir 

Un éclairage intéressant sur les rapports entre la 
révolution russe et les juifs est apporté en 1971 par 
l'académicien français Thierry Maulnier dans son 
essai, L'honneur d'être juif qui fait l'objet d'un 
large commentaire dans les pages du DDV. 

Partant de la constatation que de nombreux 
juifs ont dans tous les domaines contribué à l'es- 
sor de l'humanité, l'auteur en avance la raison 
suivante : « La première qualité de ces hommes 
"d'ici et d'ailleurs" a été, du fait de leur cosmo- 



43 La France LICRAtisée 

politisme, d'avoir dépassé les pensées strictement 
nationales pour s'établir u dans le monde de l'uni- 
versalité ". 

Dans les expressions majeures et décisives pour 
l'histoire de la pensée humaine en ce siècle, le génie juif 
nous apparaît comme contestataire, novateur et 
créateur, orienté vers les mutations audacieuses, 
proprement révolutionnaires ». 

Thierry Maulnier poursuit : « Il est remarquable que 
les juifs aient pu sortir de l'isolement défensif où ils 
étaient enfermés pour devenir au XIX e siècle des 
moteurs de V éclatement des cadres établis... le para- 
doxe majeur du juif apparaît alors. Un peuple dont 
l'histoire est une splendide image de continuité et de 
fidélité, se trouve être un facteur de rupture très bien 
adapté à l'accélération des changements qui marque 
le monde contemporain ». 

Thierry Maulnier, ajoute le DDV, constate 
l'énigme posée à l'humanité par « ce peuple qui 
empêche le monde de dormir ». 

Dans un domaine apparemment différent, 
celui de la révolution « intérieure », il est inté- 
ressant de noter que c'est également un juif, Sig- 
mund Freud, qui sera à l'origine d'une nouvelle 
approche de la médecine qui débouchera sur la 
psychanalyse^. 



44 Politiquement incorrect 

Ses travaux sont très exactement contempo- 
rains des bouleversements politiques qui se pro- 
duisent à l'est. 

En 1978, le DDV présente la réédition du 
Freud de Stephan Zweig, qui avait paru en 1931 
et reçu à l'époque l'approbation du Maître, et 
qui met parfaitement en évidence les prolon- 
gements « révolutionnaires» de cette découverte, 
bien au-delà de la médecine: 

« On voit le caractère révolutionnaire d'une telle 
approche. Le moi étant la composante du collectif, 
Freud n'allait-il pas u frapper de son marteau les fonde- 
ments de la morale d'Etat et less complexes familiaux... 
(et) dissoudre par ses acides violemment caustiques 
l'idée de patrie et même l'esprit religieux ? " 

C'est en effet [commente le DDV] l'effraction 
que Freud allait rendre possible dans les idées reçues 
de son temps, qui regardaient "toute anomalie de 
l'âme uniquement comme une déviation des nerfs. "». 

Le rêve vire tout de suite au cauchemar 

Mais revenons à 1917. La révolution bolche- 
vique illustre de manière éclatante le principe 
selon lequel une politique, pour réussir, doit 
faire rêver. Génialement menée au nom du 
« prolétariat », notion parfaitement abstraite et 



45 La France LICRAtisée 

donc inoffensive, elle a su, à un degré suprême, 
offrir aux masses un rêve désincarné - virtuel, 
dirions-nous aujourd'hui - de fraternité et de 
justice universelles. Derrière ce mirage se dissi- 
mulait en réalité une soif de pouvoir absolu, la 
même soif qui anime tous les dictateurs, passés, 
présents et à venir. Et au nom de ce rêve, elle 
réalisa un cauchemar. 

Pour asseoir un pouvoir fragile, sans base 
populaire, la répression est féroce dès le départ 
et les accusations redoutables d'ennemi du peu- 
ple ou de contre-révolutionnaire servent à liquider 
systématiquement tous les opposants, ou sup- 
posés tels. 

Dès la fin de 1917, Trotski, commissaire du 
peuple à la guerre, l'annonce très clairement : 
« Dans un mois, la terreur va prendre des formes très 
violentes, à l'instar de ce qui s'est passé lors de la 
grande révolution française. Ce ne sera plus seu- 
lement la prison, mais la guillotine, cette remar- 
quable invention de la grande révolution française, 
qui a pour avantage reconnu celui de raccourcir un 
homme d'une tête, qui sera prête pour nos ennemis ». 

Il ne se vantait pas. En tant que commissaire 
à la guerre, Trotski va ordonner des massacres et 
des déportations à grande échelle. La terreur 



46 Politiquement incorrect 

devient un mode de gouvernement et s'abat sur 
des populations entières. Une guerre sans merci 
est livrée à la paysannerie. Les cosaques sont 
exterminés ou déportés. Des centaines de mil- 
liers d'ouvriers, qui osaient réclamer, par la grève 
et les manifestations, les droits théoriquement 
prévus par la révolution, sont massacrés entre 
1918 et 1922. 

Pour éviter toute possibilité de retour en 
arrière, l'un des actes fondateurs de l'ordre nou- 
veau sera le massacre du tsar et de toute sa famil- 
le, le 16 juillet 1918. Cette tuerie sera perpétrée 
par la tchéka, sur ordre de Lénine et de Yakov 
Sverdlov. 

« Nous rejetons les vieux systèmes de moralité et 
d'" humanité " inventés par la bourgeoisie dans le 
but d'opprimer et d'exploiter les u classes inférieures ". 
Notre moralité n'a pas de précédent, notre huma- 
nité est absolue car elle repose sur un nouvel idéal : 
détruire toute forme d'oppression et de violence. 
Pour nous, tout est permis car nous sommes les pre- 
miers au monde à lever l'épée non pas pour oppri- 
mer et réduire en esclavage, mais pour libérer l'hu- 
manité de ses chaînes... Du sang ? Que le sang 
coule à flots ! Puisque seul le sang peut colorer à 
tout jamais le drapeau noir de la bourgeoisie pirate 



47 La France LICRAtisée 

en étendard rouge, drapeau de la Révolution. Puis- 
que seule la mort finale du vieux monde peut nous 
libérer à tout jamais du retour des chacals ! » 

Quelle haine et quelle soif de vengeance dans 
cet éditoral du premier numéro du journal de la 
tcheka, Le Glaive rouge, paru le 18 août 1919 ! 
Quel cynisme et quel mépris de toute notion 
d'humanité ! 

Et impossible de mettre ça sur le dos bien 
commode de Staline. Nous sommes en 1919 et 
cette volonté de faire disparaître toute trace de 
l'ordre ancien en massacrant des pans entiers de 
la société, c'est bien celle de la première équipe. 

Qui l'avait d'ailleurs dûment annoncé : dans 
l'esprit des révolutionnaires, la prise de pouvoir 
devait obligatoirement s'accompagner de la 
guerre civile. Une guerre civile qui sera théorisée, 
planifiée et livrée sans faiblir. 

Famine, fusillades, déportations, camps de 
concentration, tous les moyens seront bons pour 
s'installer durablement au pouvoir - en écrasant 
par la même occasion les autres fractions révolu- 
tionnaires rivales - notamment les syndicalistes et 
les anarchistes, et pour consolider une révolution 
qui prétendait transformer le monde au nom d'un 
idéal d'émancipation humaine et sociale ! 



Un crime sensationnel 
à l'origine de laLICRA 



L'onde de choc provoquée par la révolution 
bolchevique va très vite se répandre dans l'Eu- 
rope entière. Elle trouvera notamment en Fran- 
ce, pays pionnier en matière de révolution, un 
large écho. 

Il faut se souvenir que Paris est, dans les années 
1900-1930, une «petite Russie» que le journa- 
liste-écrivain Joseph Kessel, lui-même d'origine 
russe, fréquentera assidûment et saura magnifi- 
quement faire revivre dans ses romans. 

La capitale française est alors le refuge de toute 
une pépinière d'émigrés et de révolutionnaires de 
tous poils et tendances, qui s'y agitent et s'y 
croisent. Trotski, Lénine, Zinoviev, y séjourneront 
avant 1917. Lokhrana, police secrète du tsar, puis 
la tchéka, police secrète des bolcheviques, plus 
tard la guépéou, y auront leurs agitateurs. 

C'est donc tout naturellement à Paris que va 
se jouer le dernier acte d'une histoire très com- 



50 Politiquement incorrect 

plexe qui plonge ses racines bien loin à l'est. Et 
qui sera le prétexte à la création de la LICRA. A 
ce moment-là - 1926 - le pouvoir bolchevique 
règne d'une main de fer sur l'URSS depuis huit 
ans, et le parti communiste français existe depuis 
cinq ans. Il est totalement aligné sur Moscou, 
et son plus vif souhait est d'importer les bienfaits 
de la révolution russe en France. 

Ce 25 mai 1926, en plein Paris, Samuel 
Schwartzbard vide son chargeur sur Simon Petlura 
et se constitue prisonnier. Il déclare aux policiers 
avoir agi pour venger ses frères juifs victimes des 
pogroms perpétrés en Ukraine par Petlura. 
Bernard Lecache, journaliste au Quotidien, 
membre de la Ligue des Droits de l'Homme 
- association de gauche créée en 1898 à la suite de 
l'Affaire Dreyfus - mobilise aussitôt en sa faveur 
un certain nombre de personnalités et demande à 
l'avocat d'Henry Torrès d'asssurer sa défense. 

Le choix d'Henry Torrès ne doit rien au 
hasard. Juif originaire d'Afrique du nord, « dé- 
fenseur puissant des communistes français et des 
communistes d'importation » comme l'indique à 
l'époque Le Figaro, membre lui aussi de la Ligue 
des Droits de l'Homme il a déjà par le passé 
assuré la défense d'anarchistes célèbres. Il sera 



51 La France LICRAtisée 

assisté durant le procès par Boris Souvarine, 
proche de Bernard Lecache, et l'un des fonda- 
teurs du parti communiste français. 

Le procès de Schwartzbard fait sensation et 
attire la foule, y compris de l'étranger. La popu- 
lation et la presse juives, surtout américaines, 
prennent fait et cause pour le meurtrier et ren- 
dent le monde entier responsable, par son 
silence, des pogroms. 

Dès le départ, il est clair que ce sera le procès des 
pogroms et qu'on ne jugera pas le coupable 
du meurtre, mais sa victime. 

Henry Torrès, ténor du barreau, va tirer des larmes au 
public et aux jurés. Il racontera plus tard 
dans ses Mémoires : « Il ne me resta plus après, dans 
un court appel aux jurés, véritable acte de foi dans 
la justice du peuple français, qu'à résumer à larges 
traits ce que nous venions d'entendre, à rappeler 
qu'en Ukraine, dans les longues nuits d'hiver, lorsque 
les petits enfants ne dormaient pas, les mères en les 
berçant leur disaient : u Dépêche-toi de t' endormir; 
sans quoi Petlura va venir" et je conclus en quelques 
mots, après avoir évoqué la Révolution Française 
dont aucun homme vivant ne peut dire qu'il n'est 
plus ou moins le fils : "Qu'il sorte libre cet homme 
qui porte sur son front comme un sceau terrible toute 



52 Politiquement incorrect 

la tragédie d'un peuple! Vous êtes aujourd'hui, mes- 
sieurs, responsables du prestige de notre nation et des 
milliers de vies humaines qui dépendent du verdict 
de la France " ». 

Ce morceau d'anthologie mérite d'être cité en 
entier. 

Aux yeux du public, Samuel Schwartzbard 
n'avait fait que venger ses coreligionnaires, victi- 
mes innocentes d'épouvantables atrocités. 

Il est donc triomphalement acquitté le 26 oc- 
tobre 1927^. 

C'est une grande victoire pour la Ligue inter- 
nationale contre les pogroms constituée pour 
l'occasion par Bernard Lecache afin d'assurer la 
défense de l'accusé et le battage médiatique adé- 
quat. Ce sera d'ailleurs sa seule victoire, puisque 
la Ligue contre les pogroms se transformera dès 
l'année suivante en Ligue internationale contre 
l'antisémitisme, ou LICA. 

Mais n'anticipons pas, et revenons sur les 
acteurs, étonnants, de ce drame. 

Qui étaient Schwartzbard, Petlura, Makhno 
et les autres ? 

Au procès, les projecteurs furent braqués sur 
un seul point de la scène, et un certain nombre 



53 La France LICRAtisée 

de faits pour le moins troublants furent soigneu- 
sement escamotés. 

Samuel Schwartzbard fut présenté comme un 
tranquille horloger, poète à ses heures. Il était 
horloger, c'est vrai, mais on oublia de préciser 
qu'il était également membre du groupe anar- 
chiste juif « L'autodidacte ». 

Né en 1886 en Bessarabie, il avait connu la 
guerre civile russe de 1905, puis s'était réfugié à 
Paris. Il avait combattu durant la première guerre 
mondiale pour la France dans les rangs de la 
Légion étrangère et était retourné en Ukraine en 
1917, l'année de la révolution, à bord d'un bateau 
où il avait distribué de la propagande bolchevique 

Après trois années passées en Ukraine, il était 
rentré à Paris en 1920. 

Qu'avait-il fait en Ukraine durant ces trois 
années ? Sûrement pas de la villégiature car peu 
d'endroits au monde étaient alors plus troublés que 
cette immense région - les quatre cinquièmes de la 
France - âprement disputée, Une région agricole ri- 
che : jadis appelée « le grenier de l'Europe », mar- 
quée depuis toujours par un fort esprit d'indé- 
pendance. 

Durant ces trois années, de 1917 à 1920, la 
guerre civile faisait rage en Ukraine, où pas 



54 Politiquement incorrect 

moins de quatre armées s'affrontaient et dévas- 
taient les campagnes : les « blancs », c'est-à-dire 
ce qu'il restait de l'armée tsariste, l'Armée rouge 
bolchevique qui essayait de s'emparer de cette 
région rebelle, les anarchistes, tantôt alliés, tantôt 
ennemis des rouges, et pour corser le tout, les 
nationalistes de Simon Petlura. 

Ce dernier avait adhéré très jeune au parti 
révolutionnaire ukrainien qui militait pour l'in- 
dépendance vis-à-vis de la grande Russie. 

En 1919, Simon Petlura devient le chef d'une 
très éphémère république indépendante d'Ukraine 
qui parvient à se créer à la faveur des troubles liés 
à la révolution. A ce titre, il est chef des armées et 
lutte évidemment contre les autres fractions. 

Il sera finalement battu, comme les blancs et 
les anarchistes, par les bolcheviques, qui tente- 
ront de l'assassiner. Il s'enfuit de son pays et 
trouve refuge à Paris en 1924. 

Les anarchistes, quant à eux, étaient dispersés 
en un certain nombre de mouvements dont le 
plus important fut celui de Nestor Makhno, qui 
réussit à entraîner à sa suite d'importantes mas- 
ses paysannes, ce qui n'était pas le cas des 
bolcheviques dont la population se méfiait. A 
juste titre d'ailleurs, comme elle ne tardera pas à 



55 La France LICRAtisée 

le vérifier. Les bolcheviques firent tout pour 
évincer les anarchistes, en qui ils voyaient une 
dangereuse concurrence, et y réussirent finale- 
ment, en les trahissant, en 1921. 

Pendant ces trois années, de 1917 à 1920, le 
paisible horloger Samuel Schwartzbard combattit 
en Ukraine, c'est une certitude. Mais aux côtés 
de qui ? de l'Armée rouge ? des anarchistes ? 

Ce qui est sûr, c'est qu'il continua à fréquenter 
Nestor Makhno quand, après la défaite des 
anarchistes, ils se réfugièrent, eux aussi, à Paris. 

Simon Petlura et les pogroms en Ukraine 

Les pogroms, mot qui signifie « destruction 
totale » en russe, étaient des actes de violence, 
voire des massacres perpétrés par le régime 
tsariste contre les juifs, particulièrement nom- 
breux en Ukraine. Le tiers de la population juive 
mondiale est alors concentré dans cette région, 
qui faisait partie de la « zone de résidence » 
autrefois imposée aux juifs. 

Mais nous sommes dans les années 1917- 
1920. La révolution d'octobre est passée par là, 
et, Il ne devrait donc plus y avoir de pogroms ? 
D'autant que dès juillet 1918, le gouvernement 
bolchevique a interdit toute manifestation d'an- 



56 Politiquement incorrect 

tisémitisme, désormais passible de la peine de 
mort. Une mesure qui sera d'ailleurs considérée 
par les juifs du monde entier comme une preuve 
de la libéralité du régime ! 

Il ne devrait effectivement plus y avoir de po- 
groms, et pourtant, ils continuent. C'est qu'en 
Ukraine, comme on l'a vu, la guerre civile fait rage, 
et dans l'esprit des habitants des campagnes, juifs et 
communistes forment bien vite un duo inséparable 

Le nouveau pouvoir a en effet recruté l'essen- 
tiel de ses cadres et de sa bureaucratie, qui est 
d'emblée très importante, dans la population 
urbaine juive, traditionnellement plus instruite. 
Il va sans dire que l'aversion des Russes - surtout 
dans les campagnes - pour la bureaucratie bol- 
chevique ne tarde pas à renforcer leur anti- 
sémitisme « traditionnel ». 

Un antisémitisme aggravé encore par le rôle 
que joue la tchéka, police secrète de sinistre 
mémoire chargée d'éliminer les « contre-révolu- 
tionnaires », au sein de laquelle les juifs sont très 
nombreux à s'enrôler. Notamment en Ukraine, 
où ils constituent environ 80 % de ses effectifs. 

Le rôle de la tchéka avait été défini sans 
périphrases par le Comité central: c'était un 
« organe de combat qui opère sur le front intérieur 



57 La France LICRAtisée 

de la guerre civile. Il ne juge pas l'ennemi, mais il 
l'extermine. Il ne pardonne pas celui qui est de 
l'autre côté de la barricade, il V écrase ». Un pro- 
gramme radical qui sera suivi à la lettre. 

Donc, l'Ukraine est a cette période et pour 
son malheur, le théâtre de violents combats. Le 
désordre le plus complet y règne, et dans ce cli- 
mat d'anarchie, toutes les bandes armées sans 
exception se livrent à des exactions et à des 
pogroms, en tâchant si possible d'en faire porter 
la responsabilité à d'autres. 

« S'il se produit des cas de brigandage dans 
l'Armée rouge, il est indispensable de les imputer 
aux petluristes. L'Ukraine doit être soviétique et 
Petlura effacé de la mémoire pour toujours ». 

Qui adresse cette recommandation en 1920 
aux agitateurs envoyés en Ukraine ? Léon Trots- 
ki, commissaire du peuple à la guerre. 

La part réelle de la responsabilité de Simon 
Petlura dans les pogroms perpétrés par son 
armée ne sera même pas établie durant le procès 
de Schwartzbard. Un certain nombre d'histo- 
riens sont d'avis qu'il a au contraire tenté de les 
limiter et de punir les coupables. 

Une chose est sûre : les rapports entre juifs, 
bolcheviques et nationalistes ukrainiens étaient 



58 Politiquement incorrect 

très complexes en cette période troublée. Le 
Droit de Vivre sera amené à le reconnaître 
implicitement en 1975 à l'occasion suivante : 

En novembre de cette année-là, la Bibliothèque 
Ukrainienne de Paris décide de prendre le nom 
de Simon Petlura. La LICA s'en émeut et envoie 
derechef une lettre de protestation aux respon- 
sables qui répondent que Simon Petlura avait été 
un grand patriote ukrainien et qu'il n'était pas 
antisémite. Le DDV commente l'affaire en ces 
termes : « On peut estimer, à l'extrême limite, que 
Simon Petlura, socialiste-révolutionnaire, n'était pas 
antisémite. Mais l'armée ukrainienne qu'il comman- 
dait était composée d'une grande majorité d'indivi- 
dus dont le patriotisme et le nationalisme se con- 
fondaient avec la haine à V encontre de tout ce qui 
n'était pas authentiquement ukrainien. La popula- 
tion juive était considérée par ceux-là comme un 
corps étranger. De plus l'armée de Petlura luttant 
contre l'Armée rouge du juif Léon Trotsky pour une 
Ukraine indépendante avait tendance à considérer 
tous les juifs comme les alliés objectif du bolchevisme 
dont plusieurs dirigeants étaient en effet de confes- 
sion israélite ». 

Auteur de pogroms ou pas, il n'en demeure 
pas moins que Simon Petlura constituait un dan- 



59 La France LICRAtisée 

ger pour les bolcheviques car il était nationaliste. 
Il avait déjà échappé à une tentative d'assassinat 
en Ukraine, et à présent, Il entendait poursuivre 
son combat politique à Paris, où il avait créé un 
journal. Il représentait donc une menace à 
éliminer. 

Ce crime « passionnel », pour ne pas dire 
« moral » , fut-il en réalité un crime politique et 
Samuel Schwartzbard un agent soviétique ? Un 
certain nombre d'indices donnent à le penser et 
c'est là une question toujours ouverte. 

Il est en tout cas établi que Christian Ra- 
kovsky, qui était depuis 1925 ambassadeur des 
soviets en France, après avoir été chef de la tché- 
ka en Ukraine en 1918 et gouverneur de 
l'Ukraine de 1919 à 1923, avait rencontré l'avo- 
cat de Schwartzbard, Henry Torrès, sur la 
Riviera française, quelques mois avant le début 
du procès. 

La Ligue internationale contre les pogroms 

Bernard Lecache avait donc pris en main la 
défense de Samuel Schwartzbard et créé à cet 
effet, pour lui donner tout l'impact médiatique 
possible, la Ligue internationale contre les 
pogroms. Journaliste de gauche, il avait logique- 



60 Politiquement incorrect 

ment mobilisé dans les milieux de gauche : outre 
l'avocat Henry Torres, les personnalités suivantes 
vont former le premier noyau de la nouvelle 
Ligue : Victor Basch, président de la Ligue des 
Droits de l'Homme, Gérard Rosenthal, avocat, 
futur collaborateur de Trotski, Georges Pioch, 
anarchiste puis socialiste, Caroline Rémy, dite 
Séverine, journaliste socialiste-anarchiste-com- 
muniste, Léon Jouhaux, secrétaire général de la 
CGT, Maxime Gorki, qui retourne en URSS en 
1928 pour présider l'Union des écrivains soviéti- 
ques, l'écrivain Joseph Kessel. 

Bernard Lecache va pousser très loin son sou- 
tien puisqu'il se rendra lui-même en Ukraine du- 
rant l'été 1926 dans le but très précis de 
rassembler, afin de les produire au procès l'année 
suivante, le maximum de témoignages à charge 
contre Petlura. Ardent supporter des bolchevi- 
ques, il est largement aidé par les autorités 
durant son voyage et bénéficie d'une grande 
couverture de presse dans les Izvestia. 

A son retour, il publie un livre intitulé Quand 
Israël meurt... Au pays des pogroms qui constitue 
un véritable réquisitoire contre le nationaliste 
ukrainien et assène des chiffres que les recher- 
ches historiques ultérieures reverront largement à 



61 La France LICRAtisée 

la baisse. Durant ces années, les pogroms n'ont 
pas fait en réalité, comme il le dénonce, 300 000 
victimes, mais entre 60 000 et 120 000, selon 
un rapport de la Croix-Rouge. 

La LICRA reprendra d'ailleurs plus tard à son 
compte l'estimation la plus basse, dans les 
circonstances suivantes : en 1992, de très vives 
protestations sont adressées par diverses commu- 
nautés juives au président de l'Ukraine, Léonid 
Kravtchouk, car la ville de Lvov a décidé de 
baptiser l'une de ses rues du nom de Simon 
Petlura. Le DDV relate l'affaire en précisant : 
« Simon Petlura, ancien chef de l'armée ukrainien- 
ne, avait massacré 60 000 juifs en 1918 et 1919 
lors de pogroms qui ont ensanglanté 87 villes 
ukrainiennes, dont la capitale, Kiev ». 

La LICRA décide de s'associer à la protesta- 
tion adressée au président ukrainien, « elle qui a 
justement été initialement créée après ces pogroms 
et l'assassinat de Petlura par un jeune juif dont la 
famille avait été décimée^ ». 

Un «jeune juif» qui avait quand même qua- 
rante ans lors de l'assassinat. 

Des extraits du livre de Bernard Lecache vont 
être publiés durant tout le mois de février 1927 - 
soit quelques mois avant le procès qui aura lieu 



62 Politiquement incorrect 

en octobre - dans son journal Le Quotidien. Ils 
contribueront largement à créer le climat voulu. 

Ce que Bernard Lecache ne précise pas dans 
son livre, c'est qu'aux pogroms proprement dit 
violences expressément dirigées contre les 
juifs - s'ajoutaient de toute manière les ravages 
« classiques » causés par les armées en Ukraine. 
Et tout particulièrement par l'Armée rouge, qui 
exercera une terreur particulière contre les masses 
paysannes suspectées de soutenir les anarchistes 
Plus de 200 000 paysans et ouvriers vont être 
exécutés à cette époque, et à peu près autant 
déportés vers la Sibérie ou emprisonnés. 

Des morts dont il ne sera plus jamais ques- 
tion. Mais qui peuvent contribuer à expliquer un 
certain climat antisémite dans l'Ukraine d'alors 

Un livre de Serge Melgounov intitulé La 
terreur rouge en Russie, 1918-1924 dénonçant les 
exactions de l'Armée rouge avait d'ailleurs paru à 
Londres en 1924. Il rapportait les témoignages 
recueillis par la commission d'enquête sur les 
crimes bolcheviques, créée en 1919 par le géné- 
ral blanc Denikine. 

Et il décrivait les atrocités commises en masse 
en Ukraine par les tchékistes dès 1918, contre 
« les ennemis du peuple ». 



63 La France LICRAtisée 

Le livre de Bernard Lecache, très similaire dans 
sa conception, et paru deux années plus tard, en 
1926, semble destiné à effacer cette fâcheuse 
impression en faisant porter tout le poids et la res- 
ponsabilité des exactions sur les seuls nationalistes. 

s 

Etait-ce une façon de faire oublier d'autres 
crimes ? 

Qui était Bernard lecache, fondateur de la 
LICRA ? 

A ce point du récit, il devient impératif de 
s'intéresser de plus près à l'homme qui créa la 
LICRA et la présida jusqu'à sa mort en 1968, 
soit durant quelque quarante années ! 

La Ligue et le DDV sont étonnamment dis- 
crets sur ce personnage, dont n'apparaît qu'une 
légende officielle plutôt avare de détails : jour- 
naliste « de gauche », grand humaniste - natu- 
rellement, puisque de gauche -, homme fort 
modeste de surcroît, puisqu'il refusera toujours 
tout mandat politique, ce qui constitue une 
rareté à la LICRA. 

Bernard Lecache, comme son nom ne l'indique 
pas est né en 1895 à Paris dans une famille juive 
d'origine ukrainienne. Ses parents, tous deux nés 
en Ukraine, avaient émigré en France en 1890. 



64 Politiquement incorrect 

Il sera journaliste dans divers organes de la 
presse de gauche et d'extrême gauche, notam- 
ment à La Volonté et au Journal du Peuple, « le 
premier journal bolcheviste français ». Il fondera 
même un hebdomadaire, Le cri des peuples, qui 
disparaîtra après quelques mois d'existence. Dans 
les années qui suivent la révolution, il fréquente les 
milieux socialistes et communistes franco- 
russes, et notamment Boris Souvarine, comme 
lui juif d'origine ukrainienne, comme lui né en 
1895, comme lui journaliste. Boris Souvarine 
sera l'un des créateurs, en décembre 1920, du 
parti communiste français. Il assistera Henry 
Torrès au procès Schwartzbard. 

Bernard Lecache fréquente également avec 
assiduité une célébrité de la presse de l'époque, 
bien oubliée aujourd'hui : Séverine, dont il écrit 
même la biographie en 1931 et dont il épouse 
la petite-fille, Denise Montrobert. 

Séverine, de son vrai nom Caroline Rémy, est 
alors une journaliste féministe-anarchiste-com- 
muniste particulièrement tonitruante. Ancienne 
égérie de Jules Vallès, elle est toujours en quête 
d'une cause flamboyante à défendre et pourfend 
systématiquement l'ordre établi. Son slogan fa- 
vori : «Avec les pauvres toujours, malgré leurs er- 



65 La France LICRAtisée 

reurs malgré leurs fautes, malgré leurs crimes ! » 
dépeint assez bien la révolutionnaire telle qu'elle n'a 
jamais cessé d'être. 

Ce qui ne l'empêche pas de collaborer durant 
plusieurs années - et c'est là tout le sel de l'his- 
toire - au journal antisémite La Libre Parole 
d'Edouard Drumont, par ailleurs auteur à succès 
de La France juive- 1 . Ce qui, pour la future 
belle-grand-mère du fondateur de la LICRA, est 

s 

assez original. Edouard Drumont, qui l'appré- 
ciait beaucoup, ira jusqu'à lui dédier, en des ter- 
mes très affectueux, un de ses livres, consacré à 
l'affaire de Panama, De l'or, de la boue, du sang. 

La révolution de 1917, qualifiée de «grande 
annonciation », est saluée avec enthousiasme par 
ces milieux d'intellectuels parisiens de gauche, et 
Bernard Lecache est l'un des premiers à adhérer, 
dès 1921, à la section française du parti com- 
muniste. Séverine aussi, d'ailleurs. Il collabore à 
partir de ce moment-là à L'Humanité, où il tient 
la rubrique antimilitariste. 

Deux ans plus tard, le PC fait le ménage, à la 
demande de l'Internationale Communiste, le Ko- 
mintern. Nombreux sont en effet les Francs- 
maçons, surtout au Grand Orient, à avoir rejoint 
le parti communiste. Or cette affiliation maçon- 



66 Politiquement incorrect 

nique est mal vue à Moscou. Les « intellos », ou 
présumés tels, sont donc sommés de choisir entre 
l'appartenance à la franc-maçonnerie, à la Ligue 
des Droits de l'Homme - assimilée à la maçon- 
nerie en raison de ses liens avec elle - ou au Parti, 
et ce, avant le 1 er janvier 1923 : « La dissimulation 
par quiconque de son appartenance à la franc- 
maçonnerie sera considérée comme une pénétration 
dans le Parti d'un agent de l'ennemi et flétrira 
l'individu en cause d'une tache d'ignominie devant 
tout le prolétariat ». 

Bernard Lecache, qui est membre de la Ligue 
des Droits de l'Homme et proche de la franc- 
maçonnerie, dont il sera membre un peu plus 
tard, refuse de se soumettre à cet ukase, 
ainsi que d'autres. Il est exclu du Parti en 1923. 

Cela ne l'empêche apparemment pas de rester 
un communiste convaincu, ni de garder des liens 
étroits avec ses anciens camarades, puisque le 17 
octobre 1927, soit quelques jours avant l'acqui- 
tement de Samuel Schwartzbard, on le voit 
présider un meeting célébrant le 10 e anniversaire 
de la révolution russe. A partir de janvier 1928, 
il adhère par ailleurs à l'Association des amis de 
l'Union soviétique, et collabore à la revue l'Appel 
des soviets. 



67 La France LICRAtisée 



Dépend-il d'eux financièrement ? Dans son 
livre Les professionnels de V antiracisme, paru en 
1987, Yann Moncomble reproduit une note 
n° 56249 adressée le 18 janvier 1936 par Joseph 
Paganon, du ministère de l'Intérieur, au président 
du Conseil, Pierre Laval^, rédigée en ces termes : 

« Bernard Lecache, le secrétaire de la LICA, est 
subventionné par les soviets depuis 1927. A cette 
époque, il était très lié avec l'ambassadeur Rakovs- 
ky, qui le fit nommer comme rédacteur au journal 
Le Soir fondé par M.L.O. Frossard^ 1 , actuel- 
lement ministre du Travail. Après la disparition de 
ce journal, Lecache, de sa propre initiative, publia 
une feuille intitulée Le Cri des Peuples et fut aidé 
par l'ambassade soviétique, en la personne du 
conseiller Arens. (...) Actuellement, pour la pu- 
blication de son nouveau journal Le Droit de 
Vivre, Bernard Lecache reçoit chaque mois 10 000 
francs de l'ambassade soviétique ». 

Pendant la guerre, Bernard Lecache sera arrêté 
par la police de Vichy à la suite d'un article paru 
dans Marianne et intitulé « Rien n'est fini ». 

Il est transféré en Algérie, au camp de Bossuet, 
où il se retrouve compagnon d'infortune de 
Roger Garaudy, futur célèbre révisionniste. Il est 
libéré en décembre 1942 par les troupes alliées 



68 Politiquement incorrect 

débarquées en Afrique du nord. Après la guerre il 

reprend ses activités de journaliste et restera à 

la tête de la LICA jusqu'à sa mort, en 1968, à 
l'âge de 73 ans. 

La Ligue internationale contre l'antisémi- 
tisme (LICA) 

Il est indéniable que le succès de la révolution 
d'octobre et sa conséquence, l'arrivée au pouvoir 
en Russie d'un régime perçu comme philosémite - 
du moins à ses débuts car il va évoluer par la suite 

s 

vers l'antisémitisme d'Etat - ont servi de détona- 
teur et d'encouragement à la création d'organisations 
telles que la LICA. 

Tout comme l'exemple de la République de 
Weimar qui, de 1917 à 1933, va voir les juifs 
jouer un rôle important dans la vie politique et 
culturelle de l'Allemagne. 

Jusque-là, en effet, les juifs de France ne se 
considéraient pas eux-mêmes comme paticu- 
lièrement combatifs ou militants. L'Affaire 
Dreyfus, qui constituera un révélateur à bien des 
égards, illustre parfaitement cette attitude effa- 
cée. Revenant une fois de plus, en mars 1987, 
sur « l'Affaire », le DDV parle du « Silence des 
juifs » : 



69 La France LICRAtisée 

«Au milieu de cet immense affrontement dont 
ils étaient l'objet, le rôle et la réaction des juifs de 
France furent dérisoires. On voit à quel point ils 
n'existaient pas en tant que communauté struc- 
turée, combien était active et efficace l'idéologie de 
l'assimilation (...) Enfin, l'Affaire eut un rôle 
déterminant sur les juifs eux-mêmes, Ce n'est pas 
Theodor Herzl seulement qui prit mieux conscience 
de la nécessité d'un État juif, quand il vit dégrader 
Dreyfus aux cris de "Mort aux juifs !": Ce sont les 
juifs du monde entier, qui se sentirent confortés 
dans leur détermination de réaliser le vœu bi- 
millénaire "l'an prochain à Jérusalem" ». 

C'est donc dans ce contexte de prise de cons- 
cience nouvelle, à la fois de l'identité juive et de la 
possibilité de la défendre politiquement avec 
succès, qu'est créée dans un premier temps la Ligue 
internationale contre les pogroms. Son but atteint 
-la défense et l'acquittement de Samuel Swchartz- 
bard - elle va se transformer dès l'année suivante, 
en 1928, en Ligue Internationale contre l'antisémi- 
tisme (LIC A), dont le champ d'action est plus 
vaste . Il s'agit dorénavant de prendre la défense des 
juifs partout où ils se plaignent de persécutions. 

Les statuts de la nouvelle Ligue insistent sur 
son caractère résolument apolitique et non con- 



70 Politiquement incorrect 

fessionnel. Elle se place d'emblée, non pas « en 
dehors », mais « au-dessus » de tous les partis 
politiques, un positionnement qu'elle n'aban- 
donnera jamais et qui en dit long sur son propre 
sentiment de puissance. 

Un apolitisme affiché qui paraît des plus rela- 
tifs, si l'on en juge à la qualité de ses membres 
fondateurs. Au comité d'honneur de la LICA 
nouvellement constituée, outre le premier noyau 
issu de la Ligue contre les pogroms, prennent 
place un certain nombre de responsables politi- 

s 

ques, dont Edouard Herriot, leader des radicaux 
de gauche, et Léon Blum, chef des socialistes. 

D'ailleurs, cet affichage apolitique ne trompe 
personne. Dans son ouvrage Les juifs à Paris 
1933 à 1939, publié en 1974, David H. Wein- 
berg indique clairement : « Pourtant, la période 
tourmentée que constitue le début des années trente 
en France amena la création de plusieurs organi- 
sations politiques chez les juifs français. La plus 
importante fut la Ligue internationale contre l'an- 
tisémitisme, ou LICA ». 

Apolitique, la LICA se prétend également non 
confessionnelle, souhaitant réunir « des hommes 
de bonne volonté, venant de tous les horizons philo- 
sophique, politique et religieux qui veulent militer 



71 La France LICRAtisée 

pour V égalité des races et des familles ethniques 
dans le respect total des différences ». 

C'est la raison pour laquelle apparaîtront tou- 
jours en vitrine et bien en évidence, un certain 
nombre de personnalités non juives. A l'étage de 
la direction, en revanche, les véritables dirigeants 
de la LICRA seront, quant à eux, toujours juifs. 
C'est encore le cas aujourd'hui. 

A l'instar des communistes, la LICA organise 
très vite des groupes d'autodéfense qui n'hésitent 
pas à faire le coup de poing contre les « fascis- 
tes ». Elle acquiert ainsi dès le départ une répu- 
tation d'agressivité qui ne la quittera plus, n'hé- 
sitant pas à recruter les durs chargés de son 
service d'ordre dans le Milieu et dans les salles 
de boxe. 

1932 marque une nouvelle étape dans la 
montée en puissance de la LICA : elle décide, 
tout en conservant son sigle d'origine, LICA, 
déjà bien connu, d'étendre son champ d'action 
au racisme en général; Cette extension est la 
conséquence de sa pénétration dans les colonies 
françaises, notamment en Afrique du nord, où 
juifs et arabes se retrouvent solidaires du mêmes 
combat. Une solidarité pourtant sujette à des 
crises très violentes, comme en témoigne le 



72 Politiquement incorrect 

pogrom de Constantine, en Algérie, qui fait 
plusieurs dizaines de morts dans la communauté 
juive en 1934. 

C'est également en 1932 que Bernard Lecache 
crée Le Droit de Vivre, qui se proclame premier 
journal antiraciste du monde. 

Le soutien de la LICA au Front populaire 

Les émeutes et la grève de février 1934 récon- 
cilient socialistes de la SFIO et communistes. 
Une réconciliation exigée par Moscou dans son 
objectif de conquête du pouvoir en Europe 
occidentale. La LICA appelle, elle aussi, au ras- 
semblement de toutes les forces de gauche « con- 
tre le fascisme ». Un comité de liaison se cons- 
titue, qui aboutira au Front populaire. 
Cette alliance va porter ses fruits. En avril 
1936, en dépit de son apolitisme officiel, la 
Ligue appelle à voter pour le Front populaire de 
Léon Blum. La gauche gagne les législatives, et 
parmi ses nouveaux élus figurent quatre mem- 
bres du comité central de la LICA : Jean Pierre- 
Bloch, André Philip, Gaston Monnerville, Salo- 
mon Grunbach. 

Deux d'entre eux imprimeront plus tard une 
très forte marque sur la Ligue : 



73 La France LICRAtisée 

Jean Pierre-Bloch, tout d'abord, le plus jeune 
député du Front Populaire. Après avoir milité 
aux jeunesses socialistes et à la Laurs - Ligue 
d'Action Universitaire Républicaine et Socialiste, 
qui regroupe les étudiants de gauche - il est 
entré comme journaliste au Populaire de Léon 
Blum. L'importance de Jean Pierre-Bloch sera 
déterminante par la suite puisqu'il succédera à 
Bernard Lecache à la tête de la LICA à la mort 
de ce dernier, en 1968. Il y restera à son tour 
jusqu'en 1993. 

Ce qui signifie que la LICRA, de 1927 à 
1993, soit durant 66 ans, a connu en tout et 
pour tout deux présidents. Journalistes tous les 
deux. De gauche tous les deux. 

Une remarquable et éclairante continuité. 

Jean Pierre-Bloch écrira bien plus tard dans ses 
Mémoires, intitulées Jusqu'au dernier jour : «Je 
crois que jusqu'à ma mort, le virus de la politique 
ne me quittera pas » 

On le croit sur parole. 

Le second de ces jeunes espoirs de 1936 est 
Gaston Monnerville, radical de gauche, qui 
accompagnera la Ligue tout au long des décen- 
nies suivantes, Son soutien constant sera très 
important, puisqu'il occupera la haute fonction 



74 Politiquement incorrect 

de président du Sénat de 1948 à 1968, ce qui 
fera de lui le deuxième personnage de l'Etat. Il 
siégera ensuite au Conseil constitutionnel. 

Tout au long de son histoire, bien qu'officiel- 
ement apolitique, la LICRA ne va en réalité 
jamais cesser d'être intimement liée au monde 
politique, et plus précisément à la gauche. 
La présence au sein de la Ligue de membres 
issus de la droite constitue surtout un bon moyen 
d'occuper le maximum de terrain politique et 
d'escamoter une appartenance trop marquée au 
camp de la gauche, qui serait préjudiciable aux 
objectifs et aux intérêts de l'association. Elle 
permet également de donner une apparence de 
crédibilité à l'ouverture prônée dans les statuts. 

Les années d'avant-guerre 

Durant ces années d'avant-guerre, la LICA est 
donc déjà bien implantée et jouit de nombreux 
relais dans la presse et dans le monde politique 
grâce à ses élus et à ses appuis. 

Cette visibilité lui permet de faire bruya- 
ment entendre sa voix et de déployer un acti- 
visme politique dont s'inquiète une bonne partie 
de la communauté juive française, nettement plus 
modérée. 



75 La France LICRAtisée 

C'est ainsi qu'en juillet 1937, l'imprimeur 
Georges Lang adresse au Consistoire une lettre^ 
s'inquiétant du tort que la LICA causerait aux juifs 
par son agitation désordonnée et conclut : « C'est 
bruyamment, par tous les moyens possibles, que le 
judaïsme devrait renier la LICA (...) Un Lecache 
justifierait, si c'était possible, un Darquier de Pelle- 
poix, mais un Lecache est bien plus dangereux pour 
les juifs qu'un Darquier de Pellepoix ». 

Dès 1937, la LICA réclame le vote d'une loi 
contre le racisme. Du fait de sa forte implan- 
tation en Afrique du nord, elle milite pour 
l'adoption du projet Blum-Viollette dont Jean 
Pierre-Bloch est rapporteur à l'Assemblée natio- 
nale. 

Dans un premier temps, en 1870, le décret 
Crémieux^ avait accordé la citoyenneté fran- 
çaise aux juifs d'Algérie. Les musulmans, quant 
à eux, pouvaient également demander cette 
citoyenneté, mais dans ce cas, ils devaient renon- 
cer au statut coranique, jugé incompatible avec 
la Déclaration des droits de l'homme. Peu d'en- 
tre eux avaient alors effectué cette démarche. 

Le projet Blum-Viollette vise, lui, à octroyer la 
citoyenneté française à une « élite » de 21 000 
musulmans francisés d'Algérie, sans obligation 



76 Politiquement incorrect 

cette fois de renoncer à la loi coranique. Ce 
projet sera violemment combattu par les colons 
et finalement retiré. 

Curieusement, durant ces années, la LICA 
contribue fortement à la diffusion du livre 
d'Adolf Hitler, Mein Kampf C'est Marcel 
Bleustein-Blanchet^ qui le racontera bien plus 
tard dans son livre de souvenirs Les mots de ma 
vie : « Dans les années 30, j'ai reçu la visite de 
plusieurs personnalités très connues, avocats, méde- 
cins, hommes d'affaires, parmi lesquels le président 
de la Ligue contre l'antisémitisme, la LICA, Pierre- 
BlocH—*-, et mon ami Lucien Racket. Ils m'ont 
dit : "Hitler a publié en Allemagne un livre abo- 
minable, Mein Kampf, qui se veut la bible de la 
haine contre la France et contre les juifs. Il faut 
absolument le faire connaître, aux leaders d'opi- 
nion. Nous avons trouvé un éditeur qui accepte de 
l'imprimer, mais qui refuse de mettre son nom, par 
peur des représailles. Acceptez-vous de nous ai- 
der ?: J'ai dit oui. Le livre a paru. 

Nous l'avons envoyé notamment à tous les dépu- 
tés et sénateurs. C'était V époque où il ne se passait 
guère de jour sans qu'on entende à la radio les 
hurlements du Fuhrer annonçant le nouvel ordre 
nazi et la destruction du monde occidental. J'ai 



77 La France LICRAtisée 

fait un sondage auprès d'une bonne vingtaine de 
destinataires de notre envoi, aucun n'avait lu Mein 
Kampf. Ils l'avaient reçu comme un calendrier et 
rangé dans un coin. Les hommes ont une étrange 
faculté d'aveuglement ». 

Le 7 novembre 1938, un juif allemand de 17 
ans réfugié à Paris, Herschel Grynzpan, abat 
Ernst von Rath, secrétaire de l'ambassade d'Alle- 
magne. Ce meurtre sera le prétexte aux violences 
de la Nuit de cristal en Allemagne, trois jours 
plus tard. 

A la suite de cet événement, un nouveau flot de 
réfugiés arrive en France. « Ouvrez les fron- 
tières ! » titre le DDV en janvier 1939, en récla- 
mant la création d'un ministère de l'immigra- 
tion. Si la LICA n'obtient pas satisfaction sur ce 
point - du moins pas encore - elle réussit à faire 
sortir en avril 1939 le décret-loi Marchandeau, 
qui introduit pour la première fois dans le droit 
français la notion de « délit d'injures et de 
diffamation racistes ». 

Bien plus tard, en octobre 1971, le DDV pu- 
bliera sous le titre « La LICA vue par les Nazis », 
un article présenté comme un hommage du vice 
à la vertu, mais qui illustre assez bien ses métho- 
des, déjà à cette époque-là. 



78 Politiquement incorrect 

Cet article commente plusieurs rapports sur la 
Ligue établis par les services de renseignements 
allemands pendant les années d'avant-guerre, et 
s'étend longuement sur un ouvrage intitulé Un 
coup porté à la paix, relatant justement 1' affajre 
Grynzpan. 

L'auteur de cet ouvrage, Wolfgang Diewerge 
présenté comme un proche collaborateur de 
Joseph Goebbels, émet à propos de la LICA le 
jugement suivant: « La politique de la LICA 
représente une permanente et incroyable intervention 
dans la politique intérieure et extérieure .française: 
vive attaque contre les décrets .français frappant les 
étrangers, contre les expulsions de juifs et les restric- 
tions aux droits politiques des naturalisés, vives atta- 
ques contre les organisations nationalistes ». 

Le DDV, qui rapporte ce jugement, conclut 
son article en ces termes: « Les nazis, comme on 
le voit, ont redouté la perspicacité et l'action de la 
LICA bien avant la guerre » ! 

Cet interventionnisme incessant se voit confir- 
mé par ces quelques lignes extraites d'un dossier 
consacré par le DDV en août 1986 à la xénopho- 
bie et à l'antisémitisme dans les années 1930 : 
«A partir de 1935, les rapports de police, mais aussi 
les nombreuses lettres que le président de la LICA 



79 La France LICRAtisée 

adresse au préfet de police de la Seine (hommage 
involontaire : une note ultérieure de ces services se 
plaint des démarches incessantes de la LICA en 
faveur des étrangers), font état d'incidents graves 
provoqués par les: membres de mouvemens: d'extrême 
droite dans différents quartiers de la capitale ». 

Le DDV omet de préciser à ce propos ce qu'il 
souligne avec fierté en bien d'autres circons- 
tances, à savoir que la LICA, qui avait elle-même 
créé des groupes d'auto-défense, n'hésitait pas à 
donner largement et brutalement la réplique aux 
« fascistes », et que les violences étaient très lar- 
gement partagées. 

Que se passe-t-il en Union soviétique pen- 
dant ces années d'avant-guerre? 

Dès sa création, la LICA a choisi son ennemi, 
qui se trouve être le même que celui des com- 
munistes : le fascisme, qui devient le mal absolu. 
Et qui va le rester, même quand le fascisme 
proprement dit ne sera plus qu'un lointain 
souvenir historique. Car le mot de fasciste sert 
en fait à désigner l'ennemi de la gauche, quel 
qu'il soit. Contre cet ennemi, tous les moyens 
- absolument tous les moyens - sont bons. On 
le constate aujourd'hui encore. 



80 Politiquement incorrect 

Si le totalitarisme hitlérien constitue en ces 
années une menace réelle, la LICA ne semble pas 
s'apercevoir qu'un peu plus à l'est, dans ce qui 
n'est plus la Russie mais désormais l'URSS, s'est 
installé depuis deux bonnes décennies un régime 
qui n'a rien à lui envier sous l'angle de la terreur 
et du mépris des droits de l'être humain. 

Mais il est vrai que le nazisme s'attaque prio- 
ritairement aux juifs, et même le revendique, 
tandis que le communisme choisit, lui, d'autres 
victimes. Tuer au nom de la race est une abomi- 
nation. Tuer au nom de la révolution mondiale 
est (presque) permis. 

André Malraux, gaulliste de gauche, écrira à 
cet égard une phrase extraordinaire qui illustre 
parfaitement la coupable indulgence dont bé- 
néficiera toujours un régime sanglant sous pré- 
texte qu'il prétendait œuvrer pour le progrès 
social : « Le communisme en URSS n'a pas sup- 
primé la souffrance, mais il lui a donné un sens ». 
Un sens qui a certainement échappé à ses dizai- 
nes de millions de victimes. . . 

C'est l'époque aussi où le poète communiste 
Louis Aragon, tant admiré des intellectuels, 
chante le « romantisme » bolchevique, dont il 
n'aura pas, lui, à souffrir : 



8 1 La France LICRAtisée 

« Pour l'anéantissement de cette bourgeoisie, 
L'éclat des fusillades ajoute au paysage 
Une gaieté jusqu'alors inconnue : 
Ce sont des ingénieurs et des médecins qu'on 
exécute » 
Le régime soviétique ne sera donc finalement 
critiqué - mais jamais réellement condamné 
pour ses crimes, encore moins diabolisé comme 
le seront le nazisme et le régime de Vichy - que 
des années plus tard, dans un contexte politique 
particulier. Lorsque l'URSS manifestera son 

s 

hostilité à l'égard de l'Etat d'Israël et s'opposera 
à l'émigration des juifs russes. 

Pourtant, comme on l'a vu, dès les premières 
années du nouveau régime, terreur, purges, gou- 
lags, déportations, sont érigés en système de gou- 
vernement. Les victimes se compteront - bien 
plus tard, et plutôt discrètement - par dizaines 
de millions. 

A la mort de Lénine, en 1924, une lutte sans 

s 

merci se livre au sommet de l'Etat pour le 
pouvoir. Staline en sort vainqueur et réussit à 
évincer Trotsky qui est banni d'URSS en 1929. 
L'un des principaux artisans de la terreur bol- 
chevique se voit ravalé au rang de vulgaire 
contre-révolutionnaire . 



82 Politiquement incorrect 

Un certain nombre de dirigeants juifs de la 
première heure sont éliminés en même temps 
que Trotski, mais pas le beau-frère de Staline, 
Lazare Kaganovitch, qui cumule plusieurs fonc- 
tions faisant de lui le maître du pays en second. 

The Jewish Post de Londres ne s'y trompe pas, 
qui écrit en date du 27 juin 1933 : « Pratique- 
ment, Kaganovitch et Staline détiennent le pouvoir 
dans ce pays gigantesque qui couvre la sixième 
partie du globe et a une population de 160 mil- 
lions d'habitants ». 

Mais si les têtes changent, la situation de la 
population russe ne s'améliore pas. 

Le génocide ukrainien 

L'Ukraine, décidément région martyre, va être 
le théâtre principal, durant ces années d'avant- 
guerre, d'un épouvantable crime contre l'huma- 
nité qui disparaîtra promptement dans un trou noir 
de l'histoire. 

Malgré les guerres, elle reste une région agri- 
cole riche et sa population continue à manifester 
un vif esprit d'indépendance, que le pouvoir va 
s'employer à briser. En représailles contre la 
résistance des populations paysannes à la collec- 
tivisation forcée, le régime bolchevique organise 



83 La France LICRAtisée 

délibérément une abominable famine en 1932- 
1933. Cette famine provoquée touchera princi- 
palement l'Ukraine, mais sévira aussi dans le 
Caucase du nord et dans le Kazakhstan. 

Pour accomplir ce forfait, qui sera toujours nié 
par le pouvoir, Staline envoie sur place les commis- 
saires Viatcheslav Molotov et Lazare Kaganovitch 
ainsi que Genrikh Yagoda, chef de la tchéka. Leur 
mission est « d'accélérer les collectes » et d'em- 
pêcher à tout prix les paysans de fuir vers les villes. 
Plus de six millions de personnes, dont envi- 
ron deux millions d'enfants, vont mourir de 
faim, ainsi que du typhus, durant cette famine 
sciemment organisée par le pouvoir bolchevique. 

Le cannibalisme réapparaîtra. Des affiches re- 
présentant une femme et son enfant, sous le slo- 
gan « Manger son enfant est un acte barbare », 
seront placardées. 

Pendant ces deux années où il affame volon- 
tairement toute une population, le gouverne- 
ment des soviets exportera à l'étranger dix-huit 
millions de quintaux de blé. Cette tragédie est 
connue en Europe occidentale. Des journaux 
publient des témoignages de rescapés, et des voix 
s'élèvent pour dénoncer cette barbarie. Mais 
Edouard Herriot^ souhaite mener, en sa qua- 



84 Politiquement incorrect 

lité de président du Conseil - jusqu'en décembre 
1932 - une politique de rapprochement avec 
l'Union soviétique. Ces révélations sont gênan- 
tes. Il convient d'effacer cette mauvaise impres- 
sion par un témoignage incontestable : le sien. 

Devenu en février 1933 président de la com- 
mission des affaires étrangères à l'Assemblée 
nationale, il se rend donc en Ukraine en août 
1933, accompagné de la journaliste Geneviève 
Tabouis. Et fait à son retour cette déclaration 
historique : « J'ai traversé l'Ukraine. Eh bien! je 
vous affirme que je l'ai vue tel un jardin en plein 
rendement. On assure, me dites-vous, que cette 
contrée vit à cette heure une époque attristée ? Je ne 
peux parler de ce que je n'ai pas vu. Pourtant 
je me suis fait conduire dans des endroits éprouvés. 
Or je n'ai constaté que la prospérité... » 

Toute une mise en scène destinée à lui per- 
mettre de ne rien voir d'indésirable et donc de 
mentir avec un semblant de vérité, a en effet été 
déployée. Après tout, qu'est-ce que la vérité, 
surtout en matière politique? Ne disait-il pas 
lui-même : « Une vérité est un mensonge qui a 
longtemps servi » ? 

Ce crime gigantesque commis par les bolche- 
viques est donc connu par la gauche française, 



85 La France LICRAtisée 

mais occulté. Seul l'antisémitisme de Hitler est, 
durant le même temps, dénoncé à longueur de 
colonnes dans le DDV. En 1932, alors que ce 
dernier n'est pas encore chancelier, le DDV pro- 
clame déjà : « La clef de l'antisémitisme est en 
Allemagne et chaque voix gagnée par Hitler est une 
voix gagnée par l'internationale du pogrom ». 

Pour gigantesque qu'il soit, le génocide ukrai- 
nien n'est cependant pas, et de loin, le seul cri- 
me bolchevique. Juste avant la guerre, en 1937- 
1938, neuf millions de Russes au moins sont 
détenus dans les goulags ou les prisons. 

L'antisémitisme d'Etat en URSS 

Une loi punissant l'antisémitisme de mort est 
votée par le nouveau pouvoir soviétique dès 
juillet 1918. Mais si bon nombre de ses diri- 
geants sont juifs, ils sont aussi athées et consi- 
dèrent que le problème juif sera finalement réglé 
par l'assimilation. Dans leur esprit, toutes les 
particularités - et notamment les religions - doi- 
vent être impitoyablement éliminées pour faire 
place à l'homme nouveau issu de la révolution. 
Au robot voué au seul service du pouvoir. 

La religion juive ne sera donc nullement 
avantagée et se verra maltraitée comme les au- 



86 Politiquement incorrect 

très. Dès 1922, les autorités ferment synagogues 
et écoles religieuses et interdisent toutes les 
activités communautaires non communistes. 

L'arrivée au pouvoir de Staline va marquer une 
étape supplémentaire : le début de la montée en 

s 

puissance d'un véritable antisémitisme d'Etat bien 
pire que celui du régime tsariste. Cet antisé- 
mitisme se manifestera avec éclat en 1936-1938 
lors des procès de Moscou, qui s'accompagneront de 
véritables hécatombes éliminant un grand nombre 
de compagnons de la première heure, juifs pour la 
plupart. Les juifs seront chassés des services 
gouvernementaux. Des numerus clausus seront 
rétablis dans les écoles. En 1939, le pacte conclu 
entre Staline et Hitler conduira à la déportation, 
vers l'Oural et la Sibérie, sur ordre de Staline, 
600 000 juifs polonais pris dans la zone soviétique. 
Peu en reviendront 

La logique, l'honnêteté et le respect des droits 
de l'homme constamment invoqués voudrait 
donc qu'en ces années d'avant- guerre, Staline^ 
soit pour le moins aussi infréquentable qu'Hitler. 
Et que les deux totalitarismes soient pareillement 
dénoncés. Or, il n'en est rien. On ne pipe mot 
à Paris, ou si peu. Il semblerait qu'on ne veuille 
surtout rien voir, ni rien savoir. 



87 La France LICRAtisée 

Il existe pourtant bien des moyens de 
connaître la situation réelle en Union soviétique, 
car les contacts et les voyages sont fréquents. 

Boris Souvarine, communiste de la première 
heure, s'il en est, puisqu'il participe à la création 
du parti communiste français en 1920, est aussi 
un homme honnête, qui ne va pas tarder à 
comprendre la véritable nature, perverse et 
inhumaine, du régime. Il aura le grand courage 
de faire son mea culpa, mais il restera bien seul 
de son espèce. 

De retour d'un de ses fréquents voyages à 
Moscou, il essaie dès 1933 d'ouvrir les yeux de 
ses contemporains. Il publie en 1935 une biogra- 
phie de Staline, Staline, aperçu historique du 
bolchevisme, puis en 1936 Bilan de la terreur en 
URSS (faits et chiffres) où il remarque notam- 
ment : « On n'aperçoit plus de limite à la sauva- 
gerie déchaînée ». 

En 1938, il fait paraître dans la revue La Vie 
intellectuelle un texte qui définit la nature intrin- 
sèque du communisme et qui na rien perdu de 
son acuité : «L'URSS est le pays du mensonge, du 
mensonge absolu, du mensonge intégral Staline et ses 
sujets mentent toujours, a tout instant, en toute 
circonstances, et à force de mentir ne savent même 



88 Politiquement incorrect 

plus s'ils mentent. Ils baignent dans une atmosphère 
saturée de mensonge. Et quand chacun ment, per- 
sonne ne ment plus en mentant. Là où tout ment, 
rien ne ment (...) Unique réalité: la terreur qui 
décompose les esprits et empoisonne les consciences ». 

Ce n'est là qu'un court extrait d'un texte 
saisissant qui développe ce thème du mensonge 
sous tous ses aspects et dépeint un univers tota- 
lement déshumanisé. Et nous ne sommes qu'en 
1938. 

Peine perdue. Socialistes et radicaux français ont 
trop besoin des communistes pour garder le 
pouvoir. Ils garderont donc le silence par la 
même occasion. 

Gare aux intellectuels qui osent les fausses 
notes. Comme André Gide, par exemple, qui 
sera lui aussi communiste, mais pas pendant 
longtemps. Revenu d'URSS et de son aveugle- 
ment, il déclare en 1936 : « Et je doute qu'en 
aucun autre pays, aujourd'hui, fût-ce dans l'Alle- 
magne de Hitler, l'esprit soit moins libre, plus 
courbé, plus craintif, plus vassalisé ». 

Seul résultat ? ses anciens « amis » s'empressent 
de disqualifier son témoignage. 

La LICA est bien ancrée à gauche malgré son 
apolitisme proclamé. Ses dirigeants, ses compa- 



89 La France LICRAtisée 

gnons de route, sont pour l'essentiel des gens de 
gauche, socialistes ou communistes. Même si des 
dissensions peuvent apparaître ponctuellement 
ici et là, ils restent tous fondamentalement du 
même camp. 

Solidaires dans la désignation d'un seul et même 
ennemi et dans l'occultation délibérée du reste. 
La seule bête immonde sera donc à jamais la bête 
fasciste. Les crimes, horreurs et même persécutions 
antisémites commis par le monstre communiste, 
qui dureront pourtant bien plus longtemps et 
feront bien plus de victimes, ne compteront pas 
vraiment et n'entameront même pas la légitimité 
internationale du régime. Ne verra- t-on pas, suprê- 
me dérision, l'Union soviétique se faire procureur au 
Tribunal de Nuremberg ? 

Ce négationnisme dure depuis des décennies. 
Il empoisonne aujourd'hui encore en France le 
non-débat politique. 

Il est la démonstration éclatante du triomphe 
culturel de la gauche. 

Les années de guerre et d'après-guerre 

La guerre voit évidemment la dispersion des 
militants de la LICA. Fuites, arrestations, incar- 
cérations, évasions, sont le lot qu'ils partagent 



90 Politiquement incorrect 

avec bien d'autres Français. De nombreux li- 
gueurs rejoignent divers réseaux de résistance. 

Moscou espère toujours ardemment voir écla- 
ter une guerre civile en France. D'où un climat 
d'attentats et d'activisme insurrectionnel entre- 
tenu dans le pays par le parti communiste, qui 
invente à cette occasion la légende du parti des 
75 000 fusillés. Alors qu'il est avéré qu'il y a eu 
en tout et pour tout 29 000 Français fusillés 
pendant l'Occupation, couvrant de surcroît tout 
l'éventail des sensibilités politiques, de l'extrême 
droite à l'extrême gauche. 

Notre pays a jeté un voile pudique sur l'été 
1944. Pourtant, une épuration sauvage va se 
déchaîner, à côté de l'épuration légale, extrême- 
ment active elle aussi. Une violence proprement 
révolutionnaire, menée principalement par les 
communistes, auxquels De Gaulle s'est allié 
C'est l'occasion en or de liquider les adversaires, 
de s'emparer des leviers du pouvoir. A partir de 
ce moment-là, l'emprise des communistes sur la 
vie du pays sera très lourde. En septembre 1944 
le Comité national des écrivains (CNE), qu'ils 
contrôlent, interdit à 160 écrivains et journa- 
listes d'exercer leur profession. Encore ceux-là 
peuvent-ils s'estimer heureux car de nombreux 



9 1 La France LICRAtisée 

autres journalistes et écrivains sont purement et 
simplement fusillés ou emprisonnés. 

Le terrorisme intellectuel a visée idéologique 
plonge là ses racines. 

Et encore, d'aucun trouveront que la «puri- 
fication » n'a pas été suffisante. Lors d'une réu- 
nion de la LICA en janvier 1950, le député 
socialiste Daniel Mayer aura ces mots à propos 
de l'épuration : « Il y eut beaucoup de crânes 
tondus, mais pas assez de têtes coupées ». Daniel 
Mayer présidera la Ligue des Droits de l'Homme 
de 1958 à 1975. Il sera nommé à la tête du 
Conseil constitutionnel en 1983 par François 
Mitterrand, ce qui donnera à Jean Pierre-Bloch, 
président de la LICRA, l'occasion de décla- 
rer : « Tous ceux qui le connaissent, amis politiques 
ou adversaires, se réjouiront de la nomination d'un 
homme qui ne connaît pas le sectarisme ». 

Les excès de l'épuration vont conduire les plus 
sensés à appeler à la réconciliation des Français et 
même à demander, notamment en 1948, la libéra- 
tion de Philippe Pétain. Cette réconciliation sera 
refusée. La LICA, notamment, réagira très vigou- 
reusement et s'opposera dès cet instant à toute 
tentative de réhabilitation des responsables, à 
quelque niveau que ce soit, du régime de Vichy. 



92 Politiquement incorrect 

Son veto formel ne fera que se durcir au cours 
des années, jusqu'à aboutir, à l'heure actuelle, à 
un tabou complet jeté sur cette période com- 
plexe de notre histoire. 

La LICA inaugure également, en ces années 
d'après-guerre, son combat de tous les instants 
contre le révisionnisme. Le premier ouvrage à 
classer dans cette catégorie est en effet publié en 
1950 par Paul Rassinier, ancien communiste et 
ancien déporté lui-même. Il s'agit du livre Le 
mensonge d'ulysse. 



La shoah 
et le soutien inconditionnel à Israël 



Deux événements majeurs se produisent 
durant la décennie 1940-1950. Tous deux seront 
déterminants pour l'action future de la LICRA. 

Il s'agit tout d'abord de la tentative d'exter- 
mination des juifs par le régime hitlérien, événe- 
ment qui sera par la suite appelé holocauste, puis 
shoah. Et de sa conséquence historique et poli- 

s 

tique directe, la création de l'Etat d'Israël. 
Les effets de ces deux événements se font tou- 
jours sentir avec acuité. 

L'ensemble du monde occidental est coupable 

Il est clair que le monde occidental, tout 
entier engagé dans une guerre meurtrière, ne 
s'était pas particulièrement mobilisé pour secou- 
rir les juifs d'Europe persécutés par les nazis. Les 
archives s'ouvrant, il devient difficile de nier que 
les puissance alliées, Etats-Unis et Grande- 
Bretagne en tête, connaissaient à très haut niveau 



94 Politiquement incorrect 

l'existence des camps d'extermination et des 
massacres à l'est, mais que, pour des raisons di- 
verses, elles s'étaient abstenues d'intervenir. 

La Croix-Rouge internationale, de son côté, 
n'avait pas fait preuve de beaucoup de diligence 
ni de curiosité. Elle sera amenée des années plus 
tard à le reconnaître publiquement. 

Certes, le président américain Théodore 
Roosevelt avait bien convoqué en juillet 1938 à 
Evian une conférence internationale sur les 
réfugiés, afin de leur trouver des pays d'accueil, 
en dehors du sien, naturellement. Mais la confé- 
rence s'était terminée sur un échec. Les trente- 

s 

deux Etats participants, parfaitement au courant 
des persécutions nazies et les condamnant verba- 
lement, dans de grands discours emplis de com- 
passion, s'étaient pourtant bien gardés d'accueil- 
lir sur leur territoire les trop nombreux réfugiés 
qui auraient inévitablement afflué d'Allemagne 
et d'Autriche. 

Le New York Herald Tribune pouvait donc titrer 
dès le 8 juillet : « 650 000 exilés juifs refusés par tous 
à Evian », et la presse allemande ironisait : « Juifs 
à céder à céder à bas prix. Qui en veut ? Personne ». 

En mars 1970, le DDV parle longuement d'un 
livre « cruel » qu'il qualifie cependant d'apport 



95 La France LICRAtisée 

fondamental à l'étude du nazisme, Il s'agit de La 
diplomatie du Ille Reich et les Juifs 1933-1939, 
d'Eliahu Ben Elissard, que le journal commente 
en ces termes : 

« On y voit en effet que les intentions du Fuhrer 
étaient bien sûr de se débarrasser des juifs, mais 
plutôt en les expulsant qu'en les exterminant, d'où 
de multiples tentatives pour obliger les démocraties à 
accepter d'importants transferts de juifs d'Allemagne. 

On pensa d'abord à la Palestine où de 1933 à 
1939 émigrèrent 50 000 Israélites, mais cette solu- 
tion fut considérablement limitée par la Grande- 
Bretagne à partir de 1937. Quant aux Etats-Unis, 
l'auteur démontre qu'ils auraient pu accueillir un 
million de juifs supplémentaires sans pour cela 
transgresser les lois sur l'immigration ». 

Les années passant, la culpabilité débordera 
même le monde occidental pour s'étendre à l'hu- 
manité toute entière. En 1978, l'écrivain André 
Néher publie un essai intitulé Le dur bonheur 
d'être juifs, qui sera largement commenté par le 
DDV, essai dans lequel il exprime cette idée de 
culpabilité de toute l'humanité, qui sera reprise 
sous bien d'autres formes par la suite : 

« Auschwitz, c'est l'échec de Dieu qui a voulu 
que Vhomme fût libre. Mais l'homme a mésusé de 



96 Politiquement incorrect 

sa liberté. La conséquence, c'est qu'il y a eu rupture 
définitive entre les juifs et l'humanité. La majorité 
de l'humanité a trahi. "Imaginez une grève géné- 
rale de tous les médecins, de toutes les infirmières, 
de tous les techniciens des appareils thérapeutiques : 
ce serait la mort instantanée de millions de mala- 
des. C'est ce qui est arrivé à Auschwitz" ': Une grève 
générale de toute la civilisation ». 

Il est évident que dans ce contexte, l'Améri- 
que, pas plus que les autres pays, n'échappera à 
la culpabilité. Bien au contraire. En mars 1987, 
Le Droit de Vivre s'interroge sur une pleine 
page : « Pourquoi l'Amérique avait-elle abandonné 
les juifs d'Europe ? ». Cette interrogation survient 
à l'occasion de la sortie du livre, qualifié d'ex- 
plosif, de l'historien américain David S. Wy- 
man L'abandon des juifs - les Américains et la 
solution finale. Un ouvrage d'autant plus inté- 
ressant qu'à cette date, de nouvelles archives 
viennent d être ouvertes. 

Le DDV commente en ces termes les travaux 
de David Wyman : « Par antisémitisme, les Amé- 
ricains ont longtemps refusé de laisser entrer 
librement les juifs ; par esprit bureaucratique, ils 
ont sciemment saboté des plans de sauvetage sous 
prétexte qu'Hitler aurait pu les gêner en leur 



97 La France LICRAtisée 

livrant non pas quelques-uns, mais tous les juifs, 
des grandes questions, sinon la principale, qui 
paraît en effet est celle-ci: "Si Hitler nous les 
donne, qu'en fait-on ? N'importe où, mais pas chez 
nous ": Ni les Américains, ni les Anglais ne veulent 
des juifs chez eux et la seule solution envisageable, 
la Palestine, est exclue ». 

Il ressort également de ce livre, toujours selon 
l'analyse du DDV, que : « Les organisations juives 
américaines essayaient d'agir, d'alerter l'opinion mais, 
divisées sur le problème du sionisme, gênées par leurs 
rivalités internes, elles n'ont guère été efficaces. Les 
juifs américains craignaient aussi d'envenimer le 
climat d'antisémitisme aigu régnant aux Etats- Unis 
dans les années trente (climat qu'on découvre avec 
stupeur dans ce livre) et ils ont capitulé ». 

Ainsi donc, il régnait un climat d'antisémitisme 

s 

aigu aux Etats-Unis dans les années trente ? Pour 
quelle raison ? On apprend par ailleurs avec 
étonnement que : « Quant aux médias, en parti- 
culier la presse, ils donnaient le minimum de place, 
sinon aucune, à ces informations, y compris dans 
les grands journaux appartenant à des juifs(le 
New York Times, par exemple) ». 

En 1993, le DDV commente divers livres 
récents parus sur la shoah, notamment Hitler et 



98 Politiquement incorrect 

les juifs - Genèse d'un génocide de Philippe Bur- 
rin, et là encore, revient sur cette éternelle culpa- 
bilité : 

« Une lacune considérable subsiste dans l'étude 
de Burrin : la passivité des démocraties occiden- 
tales, du pape et d'autres soi-disant "forces morales" 
et "spirituelles" devant les atrocités antisémites. 
C'est cette passivité, cette connivence, cette compli- 
cité qui ont encouragé Hitler après 1933, et permis 
la promulgation des lois anti-juives, l'ouverture des 
camps de concentration, les exécutions en masse 
Sonderkommandos opérant sur les arrières et avec 
la collaboration de la Wehrmacht. 

On se souviendra que les démocraties étaient au 
courant de ce qui se commettait à Auschwitz, mais 
ont refusé d'intervenir, même quand elles en ont été 
mises en demeure par les institutions juives. 

C'est cette complicité qui a sans doute constitué 
la cause primordiale du passage à l'acte d'Hitler ». 

L'Etat d'Israël apparaît comme une compen- 
sation 

La guerre finie, les problèmes des juifs 
n'étaient pas terminés pour autant. Les survi- 
vants des camps, un demi-million de personnes 
environ, se voyaient rejetés, parqués dans des 



99 La France LICRAtisée 

camps de personnes déplacées et ballottés de 

s 

pays en pays. Les Etats-Unis, favorables a l'ins- 
tallation des juifs en Palestine, avaient refusé 
d'augmenter leurs propres quotas d'immigration 
pour les réfugiés européens. A titre d'exemple, 
seuls 4 767 survivants avaient été admis sur leur 
territoire durant les huit premiers mois de 1946. 

Les Anglais, quant à eux, redoutant les réac- 
tions arabes, limitaient toujours strictement l'im- 
migration en direction du foyer juif de Palestine, 
alors sous leur contrôle. 

C'est dans ce contexte que se place l'odyssée 
de l'Exodus, bateau transportant 4 500 juifs vers 
la Palestine, qui furent finalement honteusement 
refoulés et débarqués de force après de nombreu- 
ses péripéties à Hambourg, en 1947, par les 
paras anglais. 

Bref, deux ans après la fin de la guerre, aucune 
solution n'avait encore été trouvée au problème 
des réfugiés juifs qui souhaitaient massivement 
quitter l'Europe et recommencer leur vie en 
Palestine. 

Jusque-là, le sionisme - ou retour des juifs sur la 
terre d'Israël - ne faisait pas vraiment recette. Après 
la dispersion, aux temps bibliques, n'étaient restées 
en Palestine que de petites communautés juives qui 



100 Politiquement incorrect 

avaient survécu. Les premières vagues d'immigrants 
étaient arrivées de Russie vers la fin du XIX e siècle, 
à la suite des pogroms, puis en 1905, à la suite de 
l'échec de la première révolution russe. Eux avaient 
été, véritablement, les premiers pionniers. Mais leur 
nombre était encore bien insuffisant aux yeux des 
sionistes, dont certains allaient jusqu'à espérer le 
retour de tous les juifs du monde sur la terre-mère. 
Il est vrai que les conditions de vie dans le foyer 
juif de Palestine installé en 1917 par les Britan- 
niques étaient très difficiles. Ce qui conduisait les 
candidats à l'émigration à choisir prioritairement 

s 

les Etats-Unis et l'Europe occidentale. 

Mais à l'issue de la seconde guerre mondiale, 
la situation est totalement différente. Cette fois, 
un grand nombre de survivants veulent à tout 
prix fuir l'Europe des mauvais souvenirs et 
rejoindre la Palestine coûte que coûte. 

La solution que les occidentaux vont trouver 
pour sortir de l'impasse et offrir une compensation à 
cette population sans abri sera le partage 
de la Palestine, événement historique majeur 
Une solution en forme de poudrière, toujours 
menaçante soixante ans plus tard. 

Le partage sera voté de justesse - avec pressions 
et menaces - en novembre 1947 par l'ONU 



101 La France LICRAtisée 

S 

nouvellement créée. L'Etat d'Israël proprement dit 
voit le jour l'année suivante, en mai 1948. Ce 
vote mémorable imposera aux arabes palestiniens, 
qui représentaient alors 92% de la population 
totale de la Palestine, de partager leur territoire 
avec les juifs venus d'Europe. 

Ceux-ci revenaient sur une terre qu'ils avaient 
quittée depuis les temps bibliques et qu'ils con- 
sidéraient comme leur appartenant de plein 
droit. 

Les palestiniens s'estimaient lésés et punis pour 
un crime commis par les nations occidentales. 

Le dernier soldat anglais parti, un conflit qu'il 
était facile de prévoir éclata immédiatement et 
n'a jamais cessé depuis lors. 

La shoah, pièce maîtresse du soutien à Israël 

Aussi étonnant que cela puisse paraître aujour- 
d'hui, la tentative d'extermination des juifs par 
le III e Reich est, immédiatement après la guerre, 
pratiquement passée sous silence. 

Le monde entier se trouve knock-out après 
une guerre terrifiante qui a fait cinquante mil- 
lions de morts, dont dix- sept millions de Sovié- 
ques et neuf millions d'Allemands. Le malheur 
juif, même aux yeux des survivants des camps, 



102 Politiquement incorrect 

n'apparaît alors que comme l'un des malheurs de 
cette période de fer et de sang. 

Les organisations juives de par le monde n'ont 
pas encore pris la mesure de l'extraordinaire 
levier qu'elles détiennent et de l'usage qui pourra 
en être fait. 

Cette situation va considérablement évoluer 
par la suite, car la diaspora - l'ensemble des juifs 
dispersés dans le monde - va devoir soutenir 
l'Etat d'Israël, en butte à l'hostilité du monde 
arabe. La guerre des Six Jours^, en juin 1967, 
constitue à cet égard un puissant révélateur, à la 
fois pour la diaspora et le reste du monde. La 
communauté juive mondiale considérera que 
lors de ce conflit avec les pays arabes, Israël au- 
rait bel et bien pu disparaître. Devant cette me- 
nace, les juifs dans leur ensemble vont redoubler 
de solidarité et de vigilance. 

s 

Cependant, pour que l'Etat hébreu vive 
et se développe, les efforts de la diaspora ne suffisent 
pas. Il faut aussi que les puissances occidentales, 
qui ont permis sa naissance parce qu'elles se 
sentaient coupables, continuent également à le 
soutenir. Il est donc vital pour Israël que le 
sentiment général de culpabilité qui a abouti à 
sa création ne faiblisse pas, car il est en grande 



103 La France LICRAtisée 

partie le garant de sa survie. Ce sentiment sera 
par conséquent entretenu sans relâche. 

C'est à partir de ce moment-là, et dans ce 
contexte particulier, que la shoah va prendre au 
fil des années une importance nouvelle et mon- 
ter régulièrement en puissance. Son évocation et 
sa commémoration vont s'amplifier de plus en 
plus, à mesure que l'on s'éloignera de l'événe- 
ment proprement dit. 

La shoah va finir par devenir la pièce maîtresse 
de la stratégie de soutien des organisations juives 
à Israël. Pour des raisons évidentes, elle va cesser 
d'être l'affaire des seuls juifs pour devenir celle 
de toute l'humanité. De toute une humanité 
coupable de la shoah, et ayant contracté à ce 
titre une dette inexpiable à l'égard des juifs. 

Dans ces conditions, il est clair que toute 
contestation ou même toute comparaison avec 
d'autres épisodes sanglants de l'histoire de l'hu- 
manité, qui pourtant n'en manque pas, ne sont 
pas tolérables car elles portent atteinte au carac- 
tère unique et même « sacrificiel » que la shoah 
doit obligatoirement revêtir. 

Quitte à prendre l'une ou l'autre liberté avec 
la vérité comme le démontre l'exemple ci-après. 



104 Politiquement incorrect 

Le nombre des victimes d'Auschwitz 

En mars 1970, Le Droit de Vivre dénonce 
« une odieuse imposture » : « Selon Varsovie, il n 'y 
avait pas de Juifs à Auschwitz ! ». Les autorités 
polonaises sont accusées de vouloir « récupérer » 
Auschwitz pour en faire un drame exclusivement 
polonais et en évacuer la spécificité juive. Trois 
ans plus tôt, en avril 1967, un monument dédié 
à la mémoire des victimes avait été inauguré. Il 
portait - et il portera jusqu'en avril 1990 - une 
plaque sur laquelle on pouvait lire : « Ici, de 
1940 à 1945, 4 millions d'hommes, de femmes et 
d'enfants ont été torturés et assassinés par les meur- 
triers hitlériens ». 

La plaque ne faisait pas expressément mention 
de victimes juives, mais, précise Le Droit de 
Vivre : « Ce jour-là, 200 000 personnes s 'étaient ras- 
semblées, venues de quinze pays d'Europe, d'Israël et 
des Etats-Unis pour témoigner de leur fidélité à la 
mémoire des suppliciés et de tous ceux qui avaient 
été exterminés dans les divers camps de la mort. Sur 
les quatre millions d'êtres humains tués à Auschwitz, 
des documents irréfutables reconnaissent que plus de 
trois millions étaient juifs ». 

Or cet article est daté de mars 1970 et à cette 
date, les historiens occidentaux savent pertinem- 



105 La France LICRAtisée 

ment que ces chiffres sont faux. En 1961, déjà, 
Raul Hilberg, dans son Bilan de la destruction des 
juifs d'Europe, estimait à 5,1 millions le nombre 
total des victimes juives de la shoah, dont 1 mil- 
lion pour Auschwitz. 

L'estimation la plus récente et la plus fouillée 
du nombre des victimes du camp nazi est celle 
de Franciszek Piper, directeur du département 
d'histoire du musée d' Auschwitz. Elle date de 
1994, confirmée en 1998, et donne le chiffre 
d'un minimum de 1,1 million et d'un maximum 
de 1,5 million de personnes tuées à Auschwitz, 
dont 90 % de juifs. 

A ce niveau d'horreur, est-il besoin d'en rajou- 
ter ? 

Depuis 1995, une nouvelle plaque est apposée 
dans le camp d'extermination, sur laquelle on 
peut lire cette fois : « Que ce lieu où les nazis ont 
assassiné un million et demi d'hommes, de femmes 
et d'enfants, en majorité des Juifs de divers pays 
d'Europe, soit à jamais pour l'humanité un cri de 
désespoir et un avertissement ». 



106 Politiquement incorrect 

Le devoir de mémoire, sans cesse recommencé 

Pour remplir le rôle spécifique qui lui est 
assigné, la shoah doit demeurer hors d'atteinte 
de toute évaluation critique, échapper à toute 
recherche contradictoire. De la même façon, 
toute contestation, toute critique à l'égard 
d'Israël, menacent un équilibre soigneusement 
élaboré et doivent être étouffées dans l'œuf. 

En 1975 paraît un livre d'Israël Shahak, pro- 
fesseur à l'université hébraïque de Jérusalem 
intitulé Le racisme de l'État d'Israël qui dénonce 
les tortures, les destructions de villages, la répres- 
sion, etc. qui seraient perpétrées par l'armée 
israélienne à l'encontre des palestiniens. 

Le livre, paru aux éditions Guy Authier dans 
la collection Vérités dirigée par Michel Rachline, 
déclenche le scandale que l'on peut imaginer, et 
la LICRA en particulier, se déchaîne. 

Sous le titre « Un peu de pudeur, MX... », le 
DDV parle d'un livre « infâme », rempli de 
« contre-vérités insensées » et poursuit : « Pour 
nous, le scandale n'a pas été d'entendre vanter sur 
les ondes les mérites de l'auteur car nous sommes 
suffisamment tolérants pour écouter des commen- 
taires qui ne nous plaisent pas. Le scandale se situe 
au niveau du personnage qui apportait sa caution 



107 La France LICRAtisée 

à ce livre. En mémoire de son père qui fut un mili- 
tant actif et exemplaire de la LICA et un résistant 
de la première heure nous tairons son nom. 

S'il se reconnaît dans ces lignes qu'il sache que 
nous le méprisons d'autant plus qu'il n'a pas la 
décence de se rappeler que son père que nous conti- 
nuons, nous, à aimer, a vécu en homme de bien et 
respecté de tous pour ses convictions antiracistes et 
son attachement à Israël ». 

On peut admirer dans cette réaction l'esprit 
parfaitement sectaire d'une association qui n'ad- 
met, malgré ses dires, aucune opinion divergente 
et qui considère apparemment que les convic- 
tions du père doivent se transmettre telles quelles 
au fils comme un dépôt sacré. 

Pour lever un suspense insoutenable, précisons 
que M. X.., autrement dit « le personnage qui 
apportait sa caution à ce livre », était justement 
Michel Rachline, éditeur et écrivain, fils de Laza- 
re Rachline, dit Lucien Rachet soutien de la 
première heure de la LICA. 

Michel Rachline, qui se qualifie de «juif 
libre » encourra les foudres de la LICRA en bien 
d'autres occasions. 

En 1981, un Rassemblement mondial des 
survivants juifs de l'holocauste auquel le DDV 



108 Politiquement incorrect 

donne un très large écho, est organisé en Israël, 
ses objectifs sont parfaitement clairs : «Au-delà 
des émouvantes retrouvailles qui ne manqueront 
pas de se produire entre ces hommes, ces femmes 
qui ont traversé ensemble les pires épreuves que la 
barbarie humaine ait jamais imaginées, la portée 
historique de cet ultime témoignage est immense. Il 
entend rappeler au monde la signification de 
l'Holocauste et réaffirmer que celui-ci ne devra être 
ni oublié, ni falsifié ». 

Le Rassemblement réunit pour la première 
- et la dernière fois - douze mille anciens dépor- 
tés, pour moitié vivant en Israël et pour moitié 
venant de vingt-trois pays. 

Pour donner une idée de l'importance de 
l'événement, disons que la délégation française 
comptait à elle seule plus de trois cents partici- 
pants, dont René Sirat, grand rabbin de France, 
Simone Veil, Serge Klarsfeld, Georges Wellers 

C'était, numériquement, la plus importante 
après les Israéliens et les Américains venus, 
à 3 200 ! 

De son côté, la LICRA ne fait pas mystère de 
cette culpabilité qu'il faut entretenir sans relâche. 
Elle l'exprime à plusieurs reprises et notamment en 
février 1985 à l'occasion du 40 e anniversaire de la 



109 La France LICRAtisée 

libération du camp d'Auschwitz : « ...Il faut en 
dégager les leçons, mettre en lumière le martyrologe 
juif et la passivité du monde libre ; il faut rappeler 
au monde civilisé la dette encourue envers le peuple 
juif et dénoncer tous ceux qui, à nouveau, suscitent 
et alimentent la haine raciste et antisémite » 

L'affaire Kurt Waldheim 

Au milieu des années 80 se situe une affaire 
emblématique de la puissance du Congrès Juif 
Mondial (CMJ) et de sa capacité à peser sur la 
politique, même européenne. Cette affaire trou- 
ve, elle aussi, sa place dans la stratégie visant à 
maintenir la shoah au cœur des préoccupations 
des Européens et à contrecarrer le révisionnisme. 
C'est d'ailleurs le président du CMJ depuis 
1981, le milliardaire américain Edgar Bronfman, 
qui l'affirmera sans complexe dans son auto- 
biographie The making of a Jew, qui paraîtra en 
1996. Et qui se félicitera de la formidable publi- 
cité faite ainsi au CMJ. 

Kurt Waldheim est ministre des affaires étran- 
gères d'Autriche de 1968 à 1970, puis secrétaire 
général des Nations Unies de 1972 à 1981 011 . 
C'est donc un homme politique d'envergure qui 
se présente à la présidence de son pays, l'Autri- 



110 Politiquement incorrect 

che, en 1986. C'est à ce moment-là qu'éclate 
l'affaire qui va dorénavant le poursuivre sans 
relâche. Elle démarre en Autriche où les socia- 
listes, qui occupaient la présidence autrichienne 
presque sans discontinuer depuis la fin de la 
guerre, s'inquiètent. Kurt Waldheim est un 
concurrent redoutable. Une campagne à base de 
rumeurs sur son supposé passé nazi démarre. 
Mais elle ne rencontre aucun écho en Autriche 
Il faut faire plus et mieux, et orchestrer la cam- 
pagne depuis l'étranger. Le CJM va prendre les 
choses en mains. Cette fois-ci, c'est une in- 
croyable campagne de haine et de contre-vérités 
qui déferle, sur la base d'une photo représentant 
Kurt Waldheim en uniforme de la Wehrmacht^ 
sur l'aérodrome de Podgorica au Monténégro, en 
compagnie d'un général S S et d'un commandant 
italien. Le New York Times prend la tête des opé- 
rations médiatiques. Tout sera tenté pour ef- 
frayer les Autrichiens et les inciter à renoncer à 
voter pour Waldheim. 

Mais Béate Klarsfeld aura beau mener camp- 
pagne contre lui en Autriche, c'est l'effet inverse 
qui se produit. Loin de se laisser intimider, les 
Autrichiens élisent Waldheim avec un score 
excellent. La « militante exemplaire » de la LICRA 



111 La France LICRAtisée 

ira, le jour de l'investiture du nouveau président, 
déployer une banderole portant ces mots: « Non 
au président criminel de guerre », Sous le titre 
L'honneur perdu de l'Autriche », le DDV consacre 
une page entière à l'élection de Kurt Waldheim et 
donne la parole à « un juif de Vienne, M Léon 
Zelman, rescapé d'Auschwitz, jusque-là chargé des 
relations extérieures de la communauté juive, qui 
résume le drame.. « Nous n'en avons pas encore fini 
avec Hitler. Il nous extermine pour la deuxième fois. 
Il a tenté de nous éliminer physiquement, et il veut 
désormais nous faire disparaître moralement ». 

Cette victoire ne marque cependant pas la fin 
des ennuis de Waldheim, mais bien plutôt leur 
commencement. Prétendant détenir des preuves, 
qui ne seront jamais divulguées, le CJM obtient 
dès l'année suivante des autorités américaines que 
le président autrichien soit inscrit sur la liste des 

s 

personnes indésirables aux Etats-Unis, ce qui équi- 
vaut a un verdict de culpabilité. Du coup, pour ne 
pas indiposer les Américains - ou le CJM - il est 
mis en quarantaine à peu près partout. Parmi les 
rares responsables qui auront le courage de le 
recevoir officiellement, malgré les pressions et les 
critiques virulentes, figurent le pape Jean-Paul II et 
le chancelier allemand Helmut Kohi. 



112 Politiquement incorrect 

Kurt Waldheim terminera son mandat en 
1992 dans l'isolement et presque le déshonneur. 

Le 27 avril 2001, les dossiers de la CIA sur les 
présumés criminels de guerre nazis seront rendus 
publics. Le dossier constitué sur Kurt Waldheim 
en 1972 lorsqu'il devint Secrétaire Général des 
Nations Unies ne contenait aucun élément 
défavorable. 

En fait, au-delà du cas Waldheim, c'était l'Au- 
triche entière qui était coupable, et qu'il fallait 
mettre en quarantaine, car elle avait le grand tort 
de n'avoir jamais fait repentance, elle. Contrai- 
rement à l'Allemagne. 

Les élections d'avril 2000 seront l'occasion de 
faire resurgir une nouvelle fois cette culpabilité. 
Cette année-là, coup de tonnerre ! Les électeurs 
autrichiens font entrer « l'extrême droite » de 
Jôrg Haider au gouvernement. C'est aussitôt le 
délire dans les rangs fournis des bien-pensants de 
tous bords, et comme entre les deux tours de 
l'élection présidentielle française de 2002, un 
nombre incalculable de sottises et de contre- 
vérités seront proférées. Sans compter les insultes 
qui accableront les Autrichiens. 

Sous la plume de Philippe Benassaya, on 
pourra lire dans le DDV ces propos condescen- 



113 La France LICRAtisée 

dants : « Ce petit pays, reliquat d'un empire 
englouti dans lequel cohabitaient des dizaines de 
nationalités, ne se fait pas à l'idée de ne plus comp- 
ter dans le concert des nations, comme on disait 
autrefois. Il est certain que de passer de Sissi à 
Haider... le choc est rude. En outre, et c'est là le 
plus grave, l'Autriche est passée entre les gouttes du 
devoir et du travail de mémoire. Comment oublier 
l'affaire Waldheim ? Incontestablement, ce petit 
pays n'a pas procédé à un véritable examen de son 
passé, de son histoire, de sa mémoire. Il devrait 
prendre exemple sur son grand voisin allemand...» 

Le président de la LICRA, Patrick Gaubert, 
adressera au Parlement européen ainsi qu'aux 
présidents des pays membres de l'Union 
européenne un courrier les incitant à la plus 
grande fermeté à l'égard d'un pays aussi cou- 
pable : « Le devoir de l'Europe entière doit être de 
mettre l'Autriche en dehors de l'Europe ». 

Mais revenons aux débuts de l'affaire Wald- 
heim. Il est clair qu'elle constitue également un 
avertissement de nature à faire réfléchir les autres 
dirigeants des pays européens. Qui ne brilleront, 
comme à l'accoutumée, ni par leur solidarité ni 
par leur courage... C'est qu'ils ne tiennent pas à 
se retrouver, eux aussi, d'une manière ou d'une 



114 Politiquement incorrect 

autre, sur la sellette, comme leur collègue autri- 
chien. 

Mieux vaut donc relayer le message correct. 
Jacques Chirac, alors premier ministre, se rend 
en Israël en novembre 1987 et déclare devant la 
Knesset : 

« La passivité dont a fait preuve l'occident voici 
près d'un demi-siècle justifie qu'aujourd'hui nous 
soyons attentifs et résolus à tuer dans le germe les 
signes, quels qu'ils soient, où qu'ils soient, de la 
violence, du racisme, de l'antisémitisme. La mé- 
moire si douloureuse d'Israël est devenue la nôtre ». 

L'année suivante, en 1988, l'organisation d'un 
grand événement permettra de stimuler à nou- 
veau une mémoire qu'il ne faut surtout pas 
laisser faiblir, car elle est source d'influence, pour ne pas 
dire de pouvoir. Le magnat de la presse 
britannique Robert Maxwell, lui-même né dans 
une famille juive de Tchécoslovaquie, fait orga- 
niser à Oxford, par son épouse, Elizabeth 
Maxwell, un gigantesque Colloque intitulé « Se 
souvenir pour l'avenir ». 

Cinq cents universitaires de haut niveau - his- 
toriens, juristes, théologiens, psychologues, etc- 
de vingt-quatre pays, se réuniront pour débattre 
d'un sujet unique : la shoah. L'ambition avouée 



115 La France LICRAtisée 

est « d'ouvrir les voies pour que la shoah reste pour 
le monde un sujet perpétuel d'enseignement et de 
réflexion ». 

Le colloque va permettre l'élaboration d'une 
nouvelle image de la shoah qui sera imposée au 
monde entier: désormais, l'accent sera mis sur son 
caractère absolument unique dans l'histoire de 
l'humanité et, par conséquent, sur son « mystère ». 

L'un des participants, français et membre de la 
LICRA, ira jusqu'à dire : « La shoah est un évé- 
nement historique, mais elle n'est pas à la portée 
des historiens ». 

A l'occasion de ce colloque, le DDV consa- 
crera d'ailleurs une page entière aux différentes 
écoles d'historiens face à la shoah : il y a les 
intentionnalistes, qui considèrent que l'extermi- 
nation des juifs était programmée dès la publi- 
cation de Mein Kampf en 1924 ; les fonction- 
nantes, « extrêmement dangereux » aux yeux du 
DDV, qui considèrent que les nazis ont fini par 
exterminer les juifs parce qu'ils n'arrivaient pas à 
s'en débarrasser autrement ; les relativistes, enfin, 
qui considèrent que la shoah peut être comparée 
à d'autres événements. 

Aux yeux de la LICRA en tout cas, le pro- 
blème ne se pose pas : la shoah est un événe- 



116 Politiquement incorrect 

ment unique et incomparable. Qui confère par 
là-même aux juifs un statut à part. D'ailleurs 
Elie Wiesel, membre d'honneur de la LICRA, 
l'affirme sans détours dans un de ses livres : 
« Tout en nous est différent ». 

Les participants au colloque vont recenser 
également tous les moyens d'entretenir la trans- 
mission, car, de gré ou de force, personne n'a le 
droit d'oublier. 

Comme le dit si bien le DDV, « Quarante-trois 
ans après la fin de la deuxième guerre mondiale, 
l'humanité n'en a pas fini d'interroger les cendres 
qui ont ravagé son âme ». 

Au fil des ans, le message se renforce sans 
équivoque : les occidentaux, peu ou prou, sont 
particulièrement responsables de la shoah - qui 
est présentée comme l'expression inouïe et incom- 
préhensible d'une haine pathologique et irration- 
nelle à l'égard des juifs - soit pour l'avoir perpé- 
trée eux-mêmes, soit pour avoir laissé faire. Ils ont 
donc une dette éternelle à l'égard de tous les 
survivants, qu'ils vivent en Israël ou hors d'Israël. 
Cette dette imprescriptible leur impose des de- 
voirs particuliers : d'une part, ils doivent soutenir 
Israël, et d'autre part, ils doivent relayer à l'in- 
térieur de leurs propres frontières, l'action des 



117 La France LICRAtisée 



organisations dites antiracistes. En d'autres ter- 
mes, ils ont l'obligation morale d'infléchir leurs 
politiques dans le sens souhaité par ces mêmes 
organisations. Faute de quoi ils courent l'énorme 
risque d'être traités de racistes, de fascistes, 
et cloués au pilori comme Kurt Waldheim. 

Délégitimant à l'avance toute critique à ren- 
contre d'Israël ou même des juifs en général, la 
shoah finit par constituer un formidable instru- 
ment de pouvoir politique. 

Il ne fait pas bon contester le caractère unique 
de la shoah. Alfred Grosser, professeur à l'Insti- 
tut des Sciences Politiques de Paris, d'origine 
juive allemande, écrit en 1990 un essai, Le crime 
et la mémoire, qui déplaît fortement à la LICRA. 
Il y démontre que la souffrance est hélas univer- 
selle, que l'histoire des tragédies humaines est 
particulièrement bien fournie, et qu'en un mot 
comme en cent, la shoah n'a pas constitué la 
seule horreur perpétrée par des humains à ren- 
contre de leurs semblables. 

Le DDV sera très sévère pour « l'universitaire 
donnant depuis sa chaire une leçon de mémoire à 
V humanité » 

Plus les années passeront et plus le devoir de 
mémoire se fera insistant et même envahissant. 



118 Politiquement incorrect 

Auschwitz va finir par devenir le symbole même 
de la shoah. Les commémorations prendront de 
plus en plus d'ampleur, jusqu'à culminer en 
janvier 2005 pour le 60 e anniversaire de la libé- 
ration du camp, en un déluge de manifestations 
diverses et un matraquage télévisuel assez im- 
pressionnant. 

Ces commémorations vont s'efforcer égale- 
ment d'accorder une place de plus en plus gran- 
de à la résistance juive pendant la guerre afin de 
gommer l'image négative d'êtres passifs s'étant 
laissés conduire à la mort sans broncher, qui 
avait prévalu jusque-là. 

Dès le départ, la LICRA soutient incondi- 
tionnellement Israël. Certes, elle refuse d'être 
qualifiée d'association sioniste, car elle tient à sa 
posture apolitique. Il n'en demeure pas moins 
que toute critique à l'égard d'Israël est immé- 
diatement taxée d'antisionisme, lui-même assi- 
milé par elle à de l'antisémitisme pur et simple. 

Ce soutien inconditionnel à Israël va être à 
l'origine d'une fracture à l'intérieur du camp de 
la gauche en France, car une partie notable de 
celle-ci défendra la cause palestinienne, ce qui 
sera considéré par la LICRA comme un acte 
d'hostilité envers Israël. Et même d'antisémi- 



119 La France LICRAtisée 

tisme. La fracture se dessine dès 1967 et ne ces- 
sera de s'élargir par la suite. 

Une pleine page du Droit de Vivre, titrée 
« Quand la gauche n'est plus la gauche » est con- 
sacrée en février 1970 aux « fathomanes », ou 
défenseurs des palestiniens. Elle est intéressante en 
ce que, sous la plume de Roger Ikor, elle donne la 
définition suivante du fascisme tant exécré : 

« Jusqu'à nouvel ordre, le fascisme, c'est le mélange 
d'un vrai nationalisme avec un faux socialisme, sous la 
dictature d'un parti unique esclave d'un homme 
divinisé, quant à son esprit, si j'ose dire, il se ramène 
à la passion guerrière, au militarisme, à l'intolérance, 
au fanatisme et au mépris de l'homme. La gauche - 
eh bien ! c'est le contraire, point pour point ». 

La gauche serait le contraire, point pour 
point ? Voire. Cette description du fascisme est 
pourtant le portait robot, hurlant de vérité, du 
régime communiste dès ses débuts. 

Gauche dénaturée, gauche dévoyée, les épithè- 
tes ne vont pas manquer sous la plume des chro- 
niqueurs du DDV. La guerre du Kippour, en 
octobre 1973, marque un cran supplémentaire 
dans l'escalade : « Comment ose-t-on appeler 
hommes de gauche ceux qui pensent que s'attaquer 
à des innocents est légitime mais que se défendre 



120 Politiquement incorrect 

contre ceux qui préparent des meurtres est un 
crime, ceux qui confondent agression et légitime 
défense. Et aussi ceux qui maudissent l'argent et 
suivent les cyniques qui ne crachent pas sur les dollars 
de Khadafi, ou s'alignent sur les gouvernants 
français qui pensent qu'un bidon de pétrole vaut 
bien la peau d'un Israélien ». 

s 

Les Etats-Unis soutenant massivement Israël, 
et l'URSS les pays arabes, l'ombre portée des 
deux super-grands ne participe pas, on s'en 
doute, à l'apaisement des esprits. 



La LICRA 
et la politique proche-orientale de la France 



Le conflit permanent au Proche Orient ne va 
pas manquer d'avoir des répercussions importan- 
tes dans notre pays, et les relations que la 
LICRA entretiendra au fil des années avec le 
pouvoir politique français vont être étroitement 
tributaires de la politique menée à l'égard d'Is- 
raël et des pays arabes. Autant dire que ce sera loin 
d'être un long fleuve tranquille. 

Contre le général De Gaulle 

Nous sommes loin de l'époque de la Résis- 
tance et de la France Libre. La guerre des Six 
Jours vient d'avoir lieu, et en novembre 1967, 
lors d'une conférence de presse, le général De 
Gaulle qualifie les juifs de «peuple d'élite, sûr de 
lui dominateur et conquérant ». 

Curieusement, alors que ces propos sont 
Plutôt flatteurs, et que dans l'esprit du Général, 
ils devaient sans doute l'être, ils suscitent une 



122 Politiquement incorrect 

condamnation virulente. C'est qu'Israël ne doit 
pas quitter son statut de victime, qui lui accorde 
une place tout à fait à part dans le concert des 
nations. La LICA somme tous les membres de 
l'Assemblée nationale, par courrier, de prendre 
position sur cette déclaration et annonce que 
leurs réponses figureront dans le DDV. Bien 
évidemment, la gauche se déchaîne tout parti- 
culièrement. Rares sont ceux qui, comme Pierre 
Clostermann, député de Seine-et-Oise, auront le 
courage de dire : « Le combat du général De 
Gaulle pour la libération de l'homme et la dignité 
humaine est trop évident pour que ce genre de 
calomnie mérite réponse (...) Il serait excellent de 
suggérer aux israélites de nationalité française de 
s'abstenir de manifestations à l'égard de la politique 
menée par la France au Moyen-Orient ». 

Ce n'est là que le début d'un conflit qui va 
s'étendre et s'envenimer avec l'embargo « de la 
honte» décrété par le Général en janvier 1969 sur 
les armes et avions à destination d'Israël. Le ton à 
l'égard du pouvoir devient virulent. On peut lire en 
février dans Le Droit de Vivre : « Qu'il se soit agi de 
"la France de Dunkerque à Tamanrasset" ou "d'Israël 
notre ami, notre allié": le Machiavel du Faubourg 
Saint-Honoré a toujours menti à tout le monde. Il a 



123 La France LICRAtisée 

menti aux Français d'Algérie et à ceux de la métropole. 
Il a menti à ses partenaires de la Communauté euro- 
péenne. Il a menti à ses interlocuteurs anglais et alle- 
mands. Il a trahi la confiance du peuple israélien ». 
Le conflit va culminer avec la crise du référen- 
dum sur la régionalisation et la réforme du 
Sénat, qui se solde, le 27 avril 1969, par un non 
des Français. Se considérant désavoué, le chef de 

s 

l'Etat démissionne immédiatement de ses fonc- 
tions, situation demeurée inédite dans les anna- 
les de la République. 

Armand Bérard, chef de la délégation française 
à l'ONU, accuse publiquement « les milieux pro- 
israéliens en France d'avoir répandu des sommes 
importantes pour amener la défaite du général De 
Gaulle ». Une accusation publique totalement 
impensable aujourd'hui ! 

Le Droit de Vivre s'indigne sur une page 
entière titrée «Armand Bérard ou le scandale de 
"l'or juif" », qui dresse un portrait peu flatteur 
du diplomate, c'est le moins que l'on puisse dire, 
et qui demande sa mise à la retraite immédiate. 

Contre Georges Pompidou 

Alain Poher, grand ami de la LICA - il recevra 
en 1979 la médaille d'or du B'nai B'rith^ pour 



124 Politiquement incorrect 

son action en faveur d'Israël - est candidat à la 
présidence de la République. 

Mais c'est Georges Pompidou qui est élu en 
juin 1969. Avec lui, les relations ne s'arrangeront 
pas, bien au contraire. Sa politique jugée pro- 
arabe lui attire à plusieurs reprises les foudres de 
la LICA qui appelle sans relâche à « la défense de 
la petite nation menacée de génocide ». 

« Israël ne sera pas un nouveau Biafra », titre le 
DDV en février 1970. Georges Pompidou est 
accusé d'armer les ennemis d'Israël. Le mois sui- 
vant, ce sera «Israël ne sera pas l'enjeu d'un nou- 
veau Munich ! ». La LICA appelle les Parisiens à 
manifester en masse leur solidarité avec Israël. 

Elle menace : « Le président de la République 
ne saurait ignorer que le peuple de ce pays se 
dresserait tout entier contre lui, que les pavés des 
villes se soulèveraient si, ayant conclu un sordide 
marché avec les colonels de Lybie, il livrait encore 
les courageux citoyens d'Israël au poignard des as- 
sassins massés à leurs portes ». 

Nous sommes en 1970 et le souvenir des 
pavés est encore frais. 

L' antisionisme devient « le cheval de Troie des 
néo-nazis », qu'ils soient de gauche ou de droite. 
Dès cette période, antisionisme et antisémitisme 



125 La France LICRAtisée 

ne font plus qu'un. Antisémitisme et fascisme ne 
font qu'un, eux aussi. Donc antisionisme et 
fascisme ne feront qu'un désormais. De quoi 
donner le tournis. 

En octobre 1973, c'est la guerre du Kippour 
- offensive égyptienne et syrienne contre Israël - 
qui débouche sur un choc pétrolier mondial. 
Les pays producteurs de pétrole profitent en effet de 
ce conflit pour imposer une hausse des prix sans 
précédent et se servent de cet argument massif 
dans leur conflit avec Israël. La LICA n'a pas de 
mot assez durs à l'égard du gouvernement français 
et de son attitude « aberrante », « équivoque » et 
« partisane ». Manifestations et meetings aux cris de 
« Israël vivra » sont organisés. 

Le président de la LICA, Jean Pierre-Bloch, se 

s 

rend dans l'Etat hébreu et fait à son retour cette 
déclaration : « Retour de ce voyage éclair en Israël, 
je tiens à dire combien nous avons admiré encore 
une fois la politique hardie, constructive et fidèle à 
V idéal démocratique de nos amis de l'Etat d'Israël. 
Ces plaines arides, ces monts grillés, Israël les a 
connus et les connaît encore, mais il sait comment 
les vaincre, les transformer en terres fertiles et 
donner à ses habitants la joie de vivre. Cet exem- 
ple, il le propose au monde. 



126 Politiquement incorrect 

Au plan des événements, les Israéliens estiment 
que la guerre du Kippour est une "affaire Dreyfus" à 
l'échelle mondiale ». Victimes, toujours. 

Contre Valéry Giscard d'Estaing 

Le septennat de Giscard ne verra aucune 
amélioration dans les relations avec la LICA, et dès 
novembre 1974, le DDV titre : « Israël livré aux 
assassins ». La France vient en effet de reconnaître 
officiellement l'Organisation de Libération de la 
Palestine (OLP). L'article se termine par une 
menace à peine voilée : « La conscience universelle 
ne permettra pas ce nouveau génocide. On a vu les 
réactions provoquées en France par la politique 
aberrante de notre gouvernement. C'est une armée 
innombrable qui, le cas échéant, se mobiliserait aux 
côtés d'Israël pour défendre son droit à la vie ». 

Afin d'appuyer sa démonstration, la LICA 
organise un gigantesque meeting le 5 décembre 
1974 à Paris «pour faire comprendre au gouverne- 
ment et au monde que la France populaire (est) 
décidée à ne pas permettre de sacrifier le peuple 
d'Israël aux intérêts des pétroliers arabes ». 

On peut lire dans Le Droit de Vivre de ce 
même mois de décembre 1974 des phrases qui 
dramatisent fortement la situation des juifs de 



127 La France LICRAtisée 

France : «A la suite des déclarations de Yasser 
Arafat, le représentant français lui a serré chaleu- 
reusement la main : comment les juifs français se 
sentiraient-ils à l'aise sous un gouvernement dont le 
représentant vient d'applaudir les propos négateurs 
sur l'Etat d'Israël ? On touche ici du doigt la 
précarité de la situation des juifs de la diaspora. 

En période normale la plus grande partie de la 
population française repousse l'antisémitisme, sou- 
vent avec horreur, mais qu'adviendrait-il en des temps 
troublés sous des instances politiques à ce point pro- 
arabes ? » 

Pourtant, le soutien de la LICA à l'immigra- 
tion de populations arabes en France, qui débute 
justement en ces années, est, durant ce même 
temps, total. Pour quelle raison ? 

François Mitterrand, alors premier secrétaire 
du parti socialiste et membre du comité d'hon- 
neur de la LICA, séjourne en Israël en 1976 
et accorde à son retour une longue interview au 
DDV dans laquelle il affirme : « Israël doit vivre 
et disposer des moyens d'assurer son existence ». 

En constatant le soutien permanent de la 
LICRA^ à l'État d'Israël, on pourrait être tenté 
d'en conclure qu'elle adopte une position sio- 
niste, ce qui du reste n'aurait rien de bien sur- 



128 Politiquement incorrect 

prenant. Mais c'est là une interprétation qu'elle 
récuse fermement. 

Un article paru en décembre 1979 dans le DDV 
et intitulé « Pourquoi "Non à Yasser Arafat 
à Paris" », nous apprend en effet ceci : « Contraire- 
ment à l'interprétation donnée par plusieurs lecteurs, 
le titre du Droit de Vivre de novembre.. "Arafat à 
Paris? Non" n'est pas et ne peut pas être considéré 
comme une prise de position sioniste de la LICRA ». 

La LICRA développe ses arguments dans ce 
sens et parvient à transmuer le politique en 
humanitaire: « En s' opposant résolument à la 
présence en France du chef de file de l'organisation 
palestinienne, la LICRA fait œuvre humanitaire. 
Elle repousse énergiquement tout règlement, même 
négocié, qui mettrait tôt ou tard en péril la vie des 
rescapés des chambres à gaz, des orphelins des 
déportés juif morts dans les camps de concentration 
nazis qui ont trouvé refuge en Israël ». 

Toute la fin du septennat Giscard est dominée 
par le conflit israélo-palestinien. Lors d'un voya- 

s 

ge dans les Emirats, le chef de l'Etat aggrave 
considérablement son cas en parlant « d'auto- 
détermination du peuple palestinien », ce qui 
achève de le brouiller avec les organisations 
juives de France. 



129 La France LICRAtisée 

Un grand meeting de protestation a lieu en mars 
1980, qui permet à l'opposition de gauche - nous 
sommes à un an des présidentielles - d'exprimer 
tout le bien qu'elle pense d'Israël et tout le mal 
qu'elle pense de la politique de Giscard : 

L'article du DDV relatant le meeting se ter- 
mine sur une menace parfaitement claire : « II 
faudra que très bientôt quelque chose change 
dans la politique étrangère de la France. Sinon, cette 
foule, soucieuse ou pas de constituer un lobby, sera 
appelée, comme l'a dit le président Pierre-Bloch, à 
« aller à la pêche à la ligne un certain dimanche 
de 1981 ». 

Est-ce pour le dissuader d'aller à la pêche à la 
ligne ? Toujours est-il que le 8 janvier 1981, le 
président de la LICRA, Jean Pierre-Bloch, est 
élevé à la dignité de grand officier de la Légion 
d'honneur au palais de l'Elysée, par Valéry 
Giscard d'Estaing, président de la République. 

Enfin la gauche au pouvoir ! 

La LICRA se réjouit sans mélange de l'élection 
de François Mitterrand en 1981. Pour la pre- 
mière fois, Le Droit de Vivre adresse ses plus 
chaleureuses félicitations au nouvel élu de la 
nation et, lui rappelant sa qualité de membre de 



130 Politiquement incorrect 

son comité d'honneur, lui recommande derechef 
de donner sa pleine efficacité à la loi condam- 
nant le boycott arabe contre Israël, et de refuser 
de livrer du matériel de guerre aux pays arabes 
du champ de bataille. 

Mais la lune de miel ne va pas durer très long- 
temps - dans ce domaine du moins - car dès 
l'année suivante, la LICRA recommence à se 
plaindre de la poursuite de la politique toujours 
jugée pro-arabe de la France. Le Droit de Vivre 
s'en fait l'écho en des termes certes mesurés, dès 
le mois de mai 1982 : « C'est avec regret que nous 
constatons qu'au niveau diplomatique, la France 
observe une politique de continuité exemplaire, 
consistant à encaisser des coups racistes sans bron- 
cher afin, semble-t-il de ne pas nuire à de soi- 
disant bonnes relations internationales ». 

Jamais, au long des décennies suivantes, la 
LICRA ne va cesser de soutenir Israël, envers et 
contre tout. En juin 2002, son président, Patrick 
Gaubert, réaffirme de la manière la plus claire : 
« Je tiens à le répéter ici, une fois de plus, la 
LICRA, fidèle à ses engagements historiques est de 
manière indéfectible aux côtés d'Israël seul État de 
la planète dont l'existence est toujours remise en 
question, par des guerres successives, par le terro- 



131 La France LICRAtisée 

risme aveugle... (...) La détresse des Palestiniens est 
instrumentons ée par des dirigeants arabes sans 
scrupules, plus soucieux de leurs comptes en banque 
que du bien de leurs peuples. 

Bien sûr les Palestiniens doivent pouvoir décider 
de leur destin, dans un pays souverain et démocra- 
tique à l'image d'Israël dont ils se revendiquent 
comme un miroir de souffrance. Nous soutenons ce 
droit, mais pas au détriment du droit imprescrip- 
tible et plurimillénaire des juifs à vivre en paix 
dans leur pays ». 



La France est spécialement coupable 

Oui, notre pays a participé à la shoah par 
l'intermédiaire du régime de Vichy et il va en 
payer le prix, en terme de culpabilité toujours 
renouvelée. La LICRA, qui ne cessera tout au 
long des années de rappeler la dette impres- 
criptible de la France à l'égard de sa population 
juive, va tirer l'essentiel de son pouvoir de ce 
sentiment de mauvaise conscience diffus dans le 
pays, mais présent surtout dans sa classe politique. 

Elle veillera donc avec la plus scrupuleuse vigi- 
lance à ce que le nœud coulant placé autour de 
cette période complexe de notre histoire ne se 
relâche jamais, mais au contraire se resserre de 
plus en plus. Se plaçant elle-même, du fait de 
plus en plus. Se plaçant elle-même, du fait de son 
ancienneté et de ses liens avec la Résistance, 
dans une situation d'arbitre moral incontesté, 
elle va définitivement et totalement diaboliser le 
régime de Vichy. Qu'elle va aussi, au mépris de 
toute vérité historique, systématiquement asso- 
cier a la « droite ». Cela lui permettra de disqua- 



134 Politiquement incorrect 

lifier d'avance cette dernière et de la mettre à la 
merci de la gauche, qui lui dictera sa conduite 
et ses choix. 

Entretenir sans relâche la culpabilité est une 
façon de se mettre à l'abri de futures mauvaises 
surprises, toujours possibles. Il n'en demeure pas 
moins que la meilleure assurance, aux yeux de la 
LICRA, est encore de voir son camp politique 
naturel, la gauche, arriver au pouvoir. Car la gau- 
che est internationaliste, comme elle l'est elle- 
même, et extirper les racines, les identités, les 
appartenances, est l'essence même de son combat. 

La LICRA, gauche « morale », va donc s'allier 
tout naturellement à la gauche politique et au- 
tres forces dites de progrès pour mener de con- 
cert, au nom de l'antiracisme et des droits de 
l'homme, l'offensive en faveur d'une immigra- 
tion massive, considérée à juste titre comme le 
meilleur moyen de diluer une identité et une 
cohésion « nationales » jugées menaçantes à 
divers titres. Envers ceux qui s'y opposeraient, 
l'argument est tout prêt et imparable : ils sont 
forcément racistes, nostalgiques de Vichy, pire 
peut-être. En réalité, l'objectif est que la France 
se transforme en profondeur. Que sa population 
- et partant son électorat - se modifient dans un 



135 La France LICRAtisée 

sens favorable à la gauche. Qu'elle devienne plu- 
rielle, de gré ou de force. 

Dans ce jeu de rôles, chacun des partenaires 
saura fort bien utiliser les points forts et les spé- 
cificités de l'autre. La LICRA offrira la caution 
morale inattaquable, les partis et responsa- 
bles politiques sauront, le moment venu, adopter 
les mesures favorables à l'objectif poursuivi. 

Mais pour que la dimension « morale » produise 
son plein effet paralysant, il était nécessaire que le 
débat se déplace. Les questions sensibles seront 
donc extraites du champ politique, qui a le tort de 
permettre l'expression d'opinions divergentes, et 
introduites dans une sphère qui n'admet, elle, au- 
cune contradiction : celle de la défense obligatoire 
et inconditionnelle des droits de l'homme. 

Opération présentant le très grand avantage de 
délégitimer par avance toute velléité de débat. 

Afin de verrouiller définitivement toute oppo- 
sition, ce déplacement du champ politique vers le 
champ moral va logiquement s'accompagner de 
l'installation d'un arsenal juridique antiraciste 
extrêmement dissuasif, que la LICRA s'emploiera 
à inspirer et à imposer dès les années 1970. 

Il suffira désormais d'un rien pour se faire trai- 
ter de raciste, et la définition qui en sera imposée 



136 Politiquement incorrect 

- en gros, est raciste celui ou celle qui, pour 
défendre son identité, s'oppose à l'immigration 
massive de populations arabo-musulmanes et à 
l'implantation de l'islam en France - n'aura plus 
aucun rapport avec celle du petit Larousse. 

Enfin, le Front national, lorsqu'il apparaîtra 
réellement sur la scène politique, en 1983, sous 
le premier septennat de François Mitterrand, se- 
ra largement instrumentalisé par la gauche, 
qui saura s'en servir comme repoussoir absolu et 
réussira à stériliser tous les suffrages qui se por- 
teront sur lui en interdisant tout rapprochement 
avec la droite classique, au nom de l'antiracisme. 
Et de la démocratie. 

L'influence de la LICRA va pleinement s'exer- 
cer dans ces différents domaines, fortement liés. 
Tous convergent, malgré les habillages moraux et 
humanitaires dont ils sont revêtus, vers un unique 
objectif commun aux différents partenaires : la 
conquête, puis la conservation du pouvoir. Ou 
tout au moins d'une très forte influence. 

Avant de les passer en revue, il est utile de se 
pencher sur la personnalité de l'homme qui va 
diriger la LICRA d'une main de fer durant ces 
années d'intenses pressions et de transformations 
capitales pour notre pays. 



137 La France LICRAtisée 

Jean Pierre-Bloch, second président de la 
LICRA de 1968 à 1993 

L'histoire de la LICRA durant les années qui 
nous occupent prioritairement se confond avec 
celle de son président, Jean Pierre-Bloch, qui res- 
tera à sa tête durant une très longue période : de 
1968 à 1993. Un président quasiment inamo- 
vible dont les rancunes, pour ne pas dire les hai- 
nes, plongeant leurs racines dans les années de 
guerre et même d'avant-guerre, ont marqué très 
fortement la Ligue. 

Jean Pierre-Bloch succède en 1968 à Bernard 
Lecache, lui même président de la LICA pen- 
dant quarante ans. Une continuité, comme on 
l'a vu, tout à fait remarquable : ils sont tous les 
deux journalistes, tous les deux de gauche, tous 
les deux indéboulonnables. 

Né en 1905, Jean Pierre-Bloch adhère tout 
jeune au parti socialiste et entre comme jour- 
naliste au Populaire créé par Léon Blum. 

Il entame très tôt une carrière politique qui 
sera couronnée de succès dans les années 
d'avant-guerre, mais qui sera nettement moins 
heureuse après la guerre. 

Il est élu pour la première fois conseiller général 
SFIO de l'Aisne en 1934, puis maire adjoint de 



138 Politiquement incorrect 

Laon en 1935 et député Front populaire de 
l'Aisne en 1936. Il sera le plus jeune député du 
Front populaire, et figurera dès cette époque 
parmi les instances dirigeantes de la LICA. 

Pendant la guerre, il est arrêté, s'évade et 
rejoint Londres, où il est affecté à l'état-major 
particulier du général De Gaulle. 

Lui aussi, comme Bernard Lecache, se retrou- 
ve à Alger en 1943, en tant que délégué général 
à l'Intérieur du Comité d'Alger. Il se signale 
notamment par son zèle d'épurateur des pétai- 
nistes et exige la condamnation à mort de Pierre 
Pucheu, ministre de l'Intérieur de Vichy, à qui 
pourtant la vie sauve avait été garantie. Violem- 
ment anticommuniste, Pierre Pucheu sera fusillé 
en mars 1944 à Alger, première victime du 
premier procès de l'épuration. 

Ce zèle s'était déjà manifesté l'année précé- 
dente lors d'une démarche pour le moins éton- 
nante. Cinq parlementaires réfugiés à Londres, 
dont Pierre-Bloch, avaient écrit au président 
américain Roosevelt à la suite du débarquement 
anglo-saxon en Afrique du nord en novembre 
1942, pour réclamer, déjà, une épuration, au 
motif que : « L'opinion française ne comprendrait 
point que les complices et les serviteurs de l'ennemi 



139 La France LICRAtisée 

puissent continuer à exercer une autorité quelcon- 
que dans les territoires libérés ». 

De retour en France en 1944, il est réélu 
député et fait partie des jurés à la Haute Cour 
devant laquelle comparaîtra Philippe Pétain. Il 
vote la mort. 

A partir de 1946, il est installé, par la grâce 
de trois ministres socialistes^, sous la prési- 
dence socialiste de Vincent Auriol^ 1 , dans un 
formidable fromage dont il saura largement 
profiter, avant de s'en faire expulser : la prési- 
dence de la SNEP, ou Société Nationale des 
Entreprises de Presse. 

Il avait, dans un premier temps, été rapporteur 
de la loi Defferre sur la presse, qui venait de 
charger la SNEP de liquider tous les biens de 
presse saisis ou confisqués aux pétainistes, ou 
présumés tels. 

Rapporteur de cette loi, il en deviendra le 
grand bénéficiaire, car la SNEP se retrouvait à la 
tête d'un véritable trésor de guerre : 165 immeu- 
bles, 286 imprimeries, la liquidation de 482 
journaux et agences, sur lesquels cet homme de gauche 
aura désormais la haute main. 

Dès lors, la SNEP va mener grand train, son 
président s'octroyant un traitement passant de 



140 Politiquement incorrect 

1 300 000 francs de l'époque en 1946 à 

2 645 370 francs en 1952, puis à 4 134 542 
francs en 1953. Sans compter les frais et indem- 
nités divers, naturellement. 

La gestion de la SNEP était un scandale 
public dès 1947, mais il faudra attendre encore 
plusieurs années avant qu'une enquête sur la 
gestion de Pierre-Bloch ne soit officiellement 
diligentée. Le résultat en sera accablant, mais 
afin d'éviter un scandale plus grand encore, Jean 
Pierre-Bloch et son équipe se verront simple- 
ment limogés, avec de très substantielles indem- 
nités, en 1953. 

Débarqué de la SNEP, il tente de se refaire 
une santé politique, mais en vain. Il sera dès lors 
constamment battu. Il reste bien évidemment 
socialiste et, en cette qualité, participe à des 
réunions de campagnes électorales. Le « virus de la 
politique » dont il parlait lui-même dans ses 
Mémoires ne l'a certes pas quitté. Mais la LICA 
n'est-elle pas officiellement apolitique ? Il envoie 
donc en mai 1974 - pendant la campagne des 
présidentielles - un démenti au Monde, qui a 
rapporté une intervention de Jean Pierre-Bloch, 
président de la LICA, faite au cours d'une 
réunion électorale. Il tient à préciser que c'est 



141 La France LICRAtisée 

exclusivement en tant qu'adhérent du Parti 
socialiste qu'il a pris la parole. La nuance est 
effectivement importante . . . 

N'étant plus élu politique, son influence va 
s'exercer désormais à travers d'autres canaux, et 
notamment par le biais d'un certain nombre de 
présidences : celle de la LICRA en tout premier 
lieu, mais aussi celle du B'nai B'rith France, de 
1974 à 1981, sans oublier celle de la Commis- 
sion nationale consultative des Droits de 
l'Homme, de 1986 à 1989. 

Il écrira par ailleurs un certain nombre de 
livres consacrés à ses souvenirs politiques. 

Il collectionnera aussi les médailles, dont celle 
du Soviet Suprême. 

Décoré en janvier 1981 de la Légion d'Hon- 
neur au grade de grand officier par Valéry 
Giscard d'Estaing, il le sera une nouvelle fois en 
avril 1993. François Mitterrand l'élèvera à la 
dignité de grand-croix de la Légion d'Honneur, 
manière élégante de saluer son départ de la 
présidence de la Ligue, en 1993, à 88 ans. 

Ne se résignant décidément pas à partir pour 
de bon, il sera encore élu à ce moment-là par ac- 
clamations président d'honneur de la LICRA de 
France et président de la fédération internatio- 



142 Politiquement incorrect 

nale de la LICRA. Ce « départ » ne l'empêchera 
pas, en outre, de conserver pendant quelque 
temps encore la direction du DDV et d'en signer 
des éditoriaux. 

Sa dernière apparition publique sera pour le 
procès Papon, où il est témoin à charge. 

Il meurt en 1999, à l'âge de 94 ans. 

Soucieuse sans doute d'éviter à l'avenir une 
telle constance dans la continuité, la LICRA 
s'empresse de modifier la règle du jeu au départ 
de Jean Pierre-Bloch. Caché au milieu des nou- 
veaux statuts, on peut lire cet article : « Le prési- 
dent est élu pour deux ans. Son mandat est renou- 
velable successivement deux fois ». Dorénavant, ce 
sera six ans maximum. 

Son successeur, Pierre Aidenbaum, ne faillira 
pas à la règle. Certes, il n'est pas journaliste 
comme ses deux prédécesseurs, mais bien de 
gauche lui aussi. 

Et fortement engagé dans la vie politique, 
quoique Le Droit de Vivre se soit toujours 
montré plutôt discret sur la question. 

Précisons donc que le président de la LICRA 
« apolitique » se trouve être de 1993 à 1999 
Pierre Aidenbaum, socialiste, conseiller de Paris 
et conseiller régional d'Ile de France. Il devient 



143 La France LICRAtisée 

également maire socialiste du III e arrondissement de 
Paris en 1995. 

C'est Patrick Gaubert qui lui succède en 
1999. Dentiste de formation, il est également 
ancien chargé de mission de Charles Pasqua de 
1993 à 1995. Depuis 2004, il est député 
européen UMP d'Ile-de-France. Oui, UMP, et 
non pas, pour une fois, « de gauche ». Mais y a- 
t-il désormais la moindre différence ? 



Vichy ou les « heures les plus sombres » 
de notre histoire 



La communauté juive de France compte à 
l'heure actuelle environ 600 000 personnes, 
ce qui en fait la première d'Europe occidentale. Elle 
s'est considérablement accrue lors des événe- 
ments d'Algérie, dans les années 1960, en raison 
de l'arrivée massive des juifs d'Afrique du nord, 
dont peu ont alors choisi d'émigrer vers Israël. 

En 1940, la population juive vivant en France 
s'élevait à environ 330 000 personnes, dont 
190 000 Français et 140 000 étrangers qui, en 
provenance essentiellement de l'est, s'étaient 
réfugiés dans notre pays entre 1930 et 1939. 

400 000 juifs vivaient par ailleurs en Afrique 
du nord dans la mouvance française. 

Sur ce total de 730 000 personnes, 75 000 
Juifs vivant en France furent déportés: 20 000 
Français et 55 000 étrangers. 



146 Politiquement incorrect 

Une haine implacable 

A la Libération, Jean Pierre-Bloch, futur deu- 
xième président de la LICRA, sera, en tant que 
député, l'un des 27 jurés au procès du maréchal 
Pétain et se dira toujours fier d'avoir voté sa 
condamnation. 

Dès ce moment, la LICRA va poursuivre les 
responsables du régime de Vichy d'une haine 
implacable qui culminera des décennies plus tard 
en un certain nombre de procès tardifs, mais 
retentissants. 

Elle s'opposera toujours- avec la dernière énergie à 
toute tentative de réhabilitation du Maréchal et 
imposera sa propre lecture de cette période. 

Jamais ne sera pris en compte le fait que 
Philippe Pétain, âgé de quatre-vingt quatre ans 
au début de l'Occupation, ne pouvait guère 
prendre la mesure des totalitarismes intrinsèque- 
ment pervers et inédits qui se levaient, à l'est 
comme à l'ouest. Et l'on feindra d'oublier que 
les pleins pouvoirs votés à Pétain en 1940 le 
furent aussi par l'Assemblée nationale du Front 
populaire, soit par une large majorité de socia- 
listes et de radicaux. 

D'ailleurs, Philippe Pétain, justement en raison 
de son grand âge le mettant à l'abri des ambitions 



147 La France LICRAtisée 

personnelles à long terme, inspirait confiance non 
seulement à la droite mais aussi à la gauche. Dès 
1935, le radical de gauche Pierre Cot réclame pour 
la France, un sauveur. De qui peut-il bien s'agir ? : 
« Cet homme, il faut que nul ne puisse le soupçonner 
de vouloir faire une action personnelle. Il faut qu 'un 
des traits dominants de son caractère soit le loyalisme. 
L'homme existe : c'est Pétain. ... Avec lui, aucun trou- 
ble à craindre. Un mot aux Anciens Combattants et 
l'ordre est assuré et le calme renaît. ... Certains trouve- 
ront mon idée étrange ou dangereuse, je pense être 
approuvé par tous ceux qui ont vu cette chose 
étonnante... le regard du maréchal Pétain^ 1 ». 

En 1977, toute une page du DDV intitulée 
« Un dossier pour l'Histoire » est consacrée au der- 
nier livre de Jean Pierre-Bloch, Le temps d'y penser 
encore, dans lequel le président de la LICA revient 
sur ses années de guerre. Divers épisodes de sa 
résistance avec son épouse Gaby sont relatés. Mais 
les voilà arrêtés, et le DDV nous apprend ceci : 
«Arrêtés à Marseille, incarcérés à Périgueux, ils y 
Souffriront toutes les brimades qu'un régime sadique 
et faible réservait à ses ennemis. Gaby Pierre-Bloch 
obtient cependant sa liberté provisoire., elle est mère 
de trois enfants. Et tandis que son mari part pour 
camp de Mauzac, aidée de Lucien Rachet, ancien 



148 Politiquement incorrect 

de la LICA, elle organisera pour Jean Pierre-Bloch 
et onze de ses compagnons une évasion qui demeure un 
classique du genre ». 

Libérée car mère de trois enfants et relâchée 
dans la nature pour préparer une évasion, on ne 
peut s'empêcher de se demander si pareille man- 
suétude, étonnante de la part d'un « régime sadi- 
que et faible », se serait exercée en Union sovié- 
tique... 

Quoi qu'il en soit, aujourd'hui encore, il est 
quasiment impossible d'aborder sereinement le 
régime de Vichy, sujet qui demeure totalement 
passionnel et diabolisé. 

Dans l'entreprise manichéenne de relecture de 
l'histoire, il faut que Vichy reste éternellement 
stigmatisé et assimilé au nazisme. Relativiser ses 
actes, tenter de leur fournir une explication 
acceptable, les replacer dans le contexte difficile 
de l'époque, reviendrait à mettre le doigt dans 
un engrenage redoutable. A « banaliser ». 

Il faut aussi que le régime de Vichy soit syno- 
nyme de droite et d'extrême droite. Peu importe 
que cette filiation établie d'emblée soit une contre- 
vérité historique. Et que nombre de gens de 
gauche, comme Pierre Laval, Jacques Doriot ou 
Marcel Déat, aient été collaborateurs et antisémites. 



149 La France LICRAtisée 

On mesurera cette hargne au procès au long 
cours qui fut intenté au Monde par deux 
associations d'anciens résistants proches de la 
LICRA. Tout commence en 1984, par un pla- 
card publicitaire publié par le quotidien et inti- 
tulé « Français, vous avez la mémoire courte ». Ce 
texte demande la révision du procès Pétain, la 
réhabilitation du Maréchal et le transfert de ses 
cendres à Douaumont. Il se termine par un ap- 
pel à la réconciliation nationale. 

Plainte est déposée contre les auteurs du texte 
et contre le quotidien. Les prévenus sont relaxés 
en 1986. Mais les associations ne se tiennent pas 
pour battues. Elles font appel et perdent une 
seconde fois. L'affaire va en Cour de cassation 
qui casse l'arrêt de la Cour d'appel en 1988 et 
le renvoie devant la même chambre de la Cour 
d'appel. Cette fois, en 1990 - soit six ans après 
les faits - le verdict est enfin conforme aux sou- 
haits des associations : la même Cour d'appel 
qui avait une première fois relaxé les prévenus, 
dont André Laurens, ancien directeur du 
Monde, et M e Jacques Isorni, avocat du maréchal 
Pétain, les condamne cette fois pour «panégyri- 
que sans nuance et sans restriction de la politique de 
collaboration ». 



150 Politiquement incorrect 

La population française ne savait rien 

La loi d'octobre 1940 relative au statut des 
juifs est votée alors même que l'exode vient de 
jeter neuf millions de Français sur les routes : 
toute une population en détresse dont l'unique 
souci est alors de survivre dans un environne- 
ment hostile. 

Une population qui ne pouvait rien connaître 
des camps d'extermination, qui n'existaient pas 
en 1940. Ils ne commencent à fonctionner qu'en 
1942 et constituent un secret bien gardé. A telle 
enseigne que jamais les lignes de chemin de fer 
qui menaient les déportés vers l'est ne furent 
sabotées. Aucun des 74 convois^ de juifs qui 
quittèrent la France - pour une destination 
gardée strictement secrète - ne subit la moindre 
tentative dans ce sens, ni de la part de la 
résistance communiste juive ou non juive, ni de 
la part de la résistance gaulliste. Et ce, alors 
même que les cheminots multipliaient les actes 
de sabotage durant l'été 1944. 

Simone Veil elle-même confirmera cette 
ignorance totale de la population, en déclarant 
en février 1985 : « J'avais seize ans et demi lors- 
que j'ai été déportée de Drancy à Auschwitz avec 
ma famille. Après deux jours et demi de voyage en 



151 La France LICRAtisée 

train, je suis arrivée à Auschwitz-Birkenau. C'était 
le 15 avril 1944. On nous a poussés hors des 
wagons, de nuit, sous la lumière d'immenses projec- 
teurs. Sur le quai, on nous a crié en allemand de 
nous mettre par files de cinq. Cela a été très vite. 
Puis hommes et femmes ont été séparés (...) Nous 
ne croyions pas alors aux histoires de chambres à 
gaz. Pour nous, il ne pouvait s'agir que d'un 
effroyable mensonge ». 

Un autre membre éminent de la LICRA, 
Georges Wellers, scientifique et historien, dira la 
même chose en d'autres termes à son interlo- 
cuteur, dans les pages du DDV : « Oh bien sûr 
quand j'étais à Drancy et que j'attendais le départ, 
car nous devions partir, je savais bien que nous 
n'allions pas vers une partie de plaisir, je savais 
bien qu'on nous mettrait peut-être, disions-nous, à 
construire des bâtiments, ou peut-être à cultiver des 
terres gelées, dans des conditions terribles, mais 
jamais, jamais, jamais, nous n'aurions pu imagi- 
ner concevoir le mécanisme qui était celui d'Ausch- 
witz... » Je lui ai dit: « Vraiment, vous... » « Oui, 
nous V ignorions ». 

Bien des années plus tard, le président de la 
LICRA, Jean Pierre-Bloch publiera un livre de 
souvenirs intitulé Londres, capitale de la France 



152 Politiquement incorrect 

s 

libre. Evadé, il avait en effet rejoint le général De 
Gaulle dans la capitale anglaise. Dans ce livre, il 
relate ses retrouvailles avec sa femme Gaby à 
Londres le 17 juin 1943, en ces termes : « (...) 
Je la regardais comme si je la voyais pour la pre- 
mière fois mais l'une des premières questions que je 
Imposai après ces étreintes sans fin fut : 

- Où sont mes enfants ? 

- Ils sont en Auvergne, sous un faux nom, à 
l'abri, tranquilles. 

- Et ma mère ? 

- Elle vit à Bergerac, elle n'est pas du tout 
inquiétée. Tout le monde est aux petits soins pour elle. 
Dès qu'il y a un danger, elle est prévenue par le 
gendarme Paterno, celui-là même qui a participé à 
ton évasion. Si tu parles à la radio, dès la fin de 
l'émission, quelqu'un vient lui dire qu'il t'a entendu. 
Et l'épicier Boyer qui a caché nos officiers anglais en 
41 lui donne tout ce qu'elle veut sans ticket. Ta mère 
est tranquille, elle n'est aucunement menacée, et tout 
le monde sait qu 'elle est la mère de Pierre-Bloch. 

Me voilà rassuré. J'étais un homme heureux. Un 
éclair de soleil depuis si longtemps ! » 

Ce passage, qui illustre une véritable solidarité de 
la part de la population française, de surcroît parfai- 
tement consciente, donne quand même un éclairage 



153 La France LICRAtisée 

étonnant à une période et à une population dénon- 
cées par la suite dans les termes que l'on sait. 

Georges Pompidou sera sévèrement condamné 
par la LICRA lorsqu'il accordera, en 1971, sa 
grâce à l'ancien chef milicien Paul Touvier, en 
déclarant : « Le moment n'est-il pas venu de jeter 
le voile, d'oublier ces temps où les Français ne s'ai- 
maient pas, s' entredéchiraient et même s' entre- 
tuaient, et je ne dis pas ça, même s'il y a ici des 
esprits forts, par calcul politique, je le dis par 
respect de la France ». 

Malgré les vives pressions, Georges Pompidou 
refusera de céder et de revenir sur la grâce accor- 
dée. 

La repentance de Jacques Chirac 

La LICRA a toujours considéré que la France 
avait occulté le martyre juif et n'avait pas 
manifesté une repentance suffisante. Elle fera 
tout ce qui est en son pouvoir pour rompre ce 
qu'elle appelle « la loi du silence » et pour que 

s 

les plus hautes autorités de l'Etat finissent par 
reconnaître officiellement la faute de la France 
dans la déportation des juifs. 

Rendant compte, en 1992, des cérémonies 
marquant le 50 e anniversaire de la rafle du 



154 Politiquement incorrect 

Vel' d'Hiv - qui eut lieu les 16 et 17 juillet 1942 
- le DDV écrit : « Ce refus de reconnaissance per- 
siste. N'entend-on pas aujourd'hui des voix - y com- 
pris dans des milieux que l'on ne pourrait soupçon- 
ner d'antisémitisme - insinuer que décidément, ces 
juifs cherchent encore, à la faveur d'une reconnais- 
sance officielle des crimes de Vichy à bénéficier de 
dédommagements financiers, de réparation maté- 
rielle de l'État français, soupçon qui transparaissait 
déjà lors de l'affaire des fichiers juifs retrouvés ». 

Malgré sa proximité avec la LICRA, et bien 
qu'étant membre de son comité d'honneur, 
François Mitterrand refusera toujours de se livrer 
à cette repentance. 

Lors de ce 50 e anniversaire précisément, en 
juillet 1992, il rappellera que la République 
française ne peut être tenue pour responsable des 
crimes du régime de Vichy. 

Il instaure cependant en 1993, conformément 
au souhait pressant formulé par la Ligue, une 
Journée nationale de commémoration des persécutions 
racistes et antisémites de Vichy, qui est fixée au 16 
juillet, date anniversaire de la rafle du Vel' d'Hiv. 

C'est cette même année que la LICRA finit 
également par obtenir un succès qui lui tient à 
cœur. Depuis 1987, le chef de l'Etat faisait 



155 La France LICRAtisée 

déposer régulièrement tous les 11 novembre une 
gerbe de fleurs sur la tombe du maréchal Pétain 
à l'île d'Yeu, honorant par ce geste le héros de la 
guerre 1914-1918^. Un geste considéré com- 
me tout à fait choquant et déplacé par la 
LICRA, qui ne cessera de s'en plaindre. En 
1993, sous les pressions incessantes, François 
Mitterrand finit par y renoncer. 

Les relations ambiguës de François Mitterrand 
avec le régime de Vichy - il existe une photo de 
lui avec le Maréchal, il a reçu la francisque en 
août 1943, il restera l'ami de René Bousquet - 
n'ont curieusement jamais conduit à un ostra- 
cisme à son égard de la part de la LICRA. Jamais 
il ne sera diabolisé, comme d'autres le seront, et 
en particulier comme le sera Jean-Marie Le Pen, 
qui n'a pourtant jamais eu le moindre lien avec 
Vichy, étant né en 1928. Reste qu'il s'agit là de 
faits gênants, mais comme il est président de la 
République, socialiste, et - cerise sur le gâteau - 
membre de la LICRA. . . il sera amnistié. 

Jean Pierre-Bloch parviendra même à fournir 
à ces relations compromettantes une explication 
aussi ingénieuse qu'invérifiable. Dans son livre 
De Gaulle ou le temps des méprises, il relate la 
première rencontre entre le général De Gaulle et 



156 Politiquement incorrect 

François Mitterrand, à Alger, au début de 1944, 
rencontre qui se termine aigrement. 

Il poursuit : «A partir de ce moment-là, V entou- 
rage de De Gaulle se chargea de faire la publicité de 
Mitterrand. Quand on parlait de lui, on le présen- 
tait comme un vichyste mal repenti, un Camelot du 
roi décoré de la francisque. C'étaient là des calomnies 
intéressées. C'est sur notre ordre que François Mit- 
terrand était resté dans les services de prisonniers de 
Vichy. Lorsqu'il avait été proposé pour la francisque, 
nous avions été parfaitement tenus au courant. Nous 
lui avions conseillé d'accepter cette "distinction" pour 
ne pas se dévoiler. La calomnie sert toujours ; vingt- 
cinq ans plus tard, on ressortira les mêmes arguments 
au cours de la campagne présidentielle. Les services 
gaullistes ont de la suite dans les idées ». 

Sauf que cette version est des plus contes- 
tables. Mitterrand fut bel et bien de ces « résis- 
tants pétainistes » proche avant-guerre de l'Ac- 
tion Française et de la Cagoule, une association 
secrète dirigée par Eugène Deloncle. François 
Mitterrand sera du reste embauché après la 
guerre par un des responsables de la Cagoule, le 
patron de l'Oréal, Eugène Schueller. 

Ce vif souhait de la LICRA de voir reconnue la 
responsabilité du pays, c'est finalement Jacques 



157 La France LICRAtisée 

Chirac qui va l'exaucer, à peine élu, en juillet 1995. 
Le 16 juillet de cette année-là, lors de la com- 
mémoration de la rafle du Vel' d'Hiv, le nouveau 
président de la République fait pour la première 
fois ce que tous ses prédécesseurs avaient refusé de 

s 

faire : il reconnaît la responsabilité de l'Etat français 
et la « faute collective» commise contre les juifs. 

Il déclare notamment : « Oui, la folie criminelle 
de l'occupant a été, chacun le sait, secondée par des 
Français, secondée par l'Etat français (...) Nous 
conservons à l'égard (des déportés juifs de France) 
une dette imprescriptible ». 

Cet acte est qualifié par la LICRA de « tour- 
nant historique » : « En reconnaissant publique- 
ment, pour la première fois, la responsabilité de 
l'Etat français dans la déportation des juifs pen- 
dant la seconde guerre mondiale, Jacques Chirac a 
enfin rétabli la vérité historique pour laquelle la 
LICRA se bat depuis toujours. 

Par ses propos sur le devoir de "transmettre la 
mémoire " et de ne "rien occulter des heures sombres de 
notre histoire" le chef de l'Etat conforte en outre 
le travail quotidien opéré en milieu scolaire, dans 
toute la France, par les sections de la LICRA qui 
voient là l'une des meilleures méthodes de prévenir 
le racisme et l'intolérance ». 



158 Politiquement incorrect 

Ce faisant, Jacques Chirac accomplissait la 
promesse faite durant la campagne électorale. 
Pressenti lui aussi d'accomplir le cas échéant le 

s 

même geste, Edouard Balladur, comme François 
Mitterrand auparavant, s'y était refusé. 

Dans la foulée, en 1997, l'Eglise de France va 
faire, elle aussi, repentance. 

Le 3 octobre 1997, au mémorial du camp 
d'internement de Drancy, l'évêque de Saint- 
Denis, Mgr Olivier de Berranger, présente une 
« déclaration de repentance » sur l'attitude de 

s 

l'Eglise sous Vichy. Il déclare notamment : 

« Devant l'ampleur du drame et le caractère 
inouï du crime, trop de pasteurs de l'Église ont, par 
leur silence, offensé l'Église elle-même et sa mission. 
Aujourd'hui, nous confessons que ce silence fut une 
faute. Nous reconnaissons aussi que l'Eglise en France 
a alors failli à sa mission d' éducatrice des consciences 
et qu'ainsi elle porte avec le peuple chrétien la respon- 
sabilité de n'avoir pas porté secours dès les premiers 
instants quand la protestation et la protection étaient 
possibles et nécessaires, même si, par la suite, il y eut 
d'innombrables actes de courage ». 

Une polémique s'installera autour de cette re- 
pentance. 



Les procès 



Si la détestation à l'égard du régime de Vichy 
a été virulente dès la fin de la guerre, ce n'est 
curieusement qu'à partir du début des années 
1970, soit plus de vingt-cinq ans après les faits, 
que la LICA va commencer à traquer sans répit 
ceux qu'elle nomme les criminels nazis, mais qui 
sont essentiellement des responsables, à des 
degrés divers, du régime lié au maréchal Pétain. 

En fait, à travers ces procès et bien au-delà des 
individus, il s'agit de juger - et de condamner - 
toute une époque, tout un pays, et même, dans 

s 

le cas de l'affaire Touvier, l'Eglise de France. 

A propos de cette même affaire Touvier, le 
DDV assène : « La France avait cinquante ans 
pour faire toute la lumière sur la période sombre 
de Vichy et se réapproprier son histoire. Elle a 
manqué à ce devoir de vérité. 

Il ne restait plus que les prétoires pour faire œu- 
vre de mémoire et de pédagogie, par dessus l'épaule 
d'un Paul Touvier ». 



160 Politiquement incorrect 

On va arriver ainsi à des procès se déroulant 
quarante, voire cinquante ans après les faits, le 
manichéisme de leur traitement croissant en pro- 
portion de leur éloignement dans le temps. 

Sous prétexte de juger la Collaboration, les 
mesures prises par le gouvernement de Vichy, 
l'administration de Vichy, on va obliger les Fran- 
çais, de gré ou de force, à remettre la shoah au 
cœur de leurs préoccupations, et surtout, on 
ravivera de la sorte un sentiment de culpabilité 
- dont bénéficie Israël - qui pourrait s'émousser 
à la longue. 

Séances d'auto-flagellation collective, forte- 
ment relayées et dramatisées par les médias, ces 
procès au caractère politique et médiatique mar- 
qué n'auront plus qu'un lointain rapport avec la 
justice. 

Les époux Klarsfeld, qualifiés par la LICRA de 
« militants exemplaires », s'en feront une spécialité. 
Elle, Béate Klarsfeld, conscience d'un pays incons- 
cient [il s'agit de l'Allemagne, ndla] , selon les 
termes du DDV, débusquera partout dans le mon- 
de les criminels à grand renfort de publicité. Lui, 
Serge Klarsfeld, avocat, assurera la partie « procès ». 
Les deux enfants du couple, tous deux avocats, ne 
tarderont pas à rejoindre le combat familial. 



161 La France LICRAtisée 

Des pages entières seront désormais consacrées 
dans le DDV aux exploits de ces débusqueurs 
d'un genre nouveau, et cette chasse va durer des 
années. 

L'affaire Klaus Barbie 

En septembre 1971, le DDV titre : « Voici 
comment la LICA a déclenché l'affaire Klaus Bar- 
bie ». En juin de cette année-là, le procureur de 
Munich décide d'arrêter les poursuites contre 
l'ancien chef de la gestapo de Lyon, caché en 
Amérique du sud, et de classer l'affaire. La nou- 
velle à peine connue, les époux Klarsfeld déclen- 
chent une intense campagne de lobbying auprès 
de la presse allemande, mais surtout française. Le 
DDV décrit du reste très précisément les étapes 
de cette campagne, qu'il est intéressant de suivre 
car elle sera bien souvent répétée par la suite : 
« Béate [Mme Klarsfeld, ndla] se rend au siège 
parisien du Progrès de Lyon. 

Le 28 juillet, le Progrès publie un long article 
sur la question. La LICA locale demande aux 
Lyonnais « épris de justice » d'écrire une lettre 
de protestation au procureur général. 

Les jours suivants, le quotidien se fait l'écho 
de toutes les démarches des diverses associations. 



162 Politiquement incorrect 

Puis toute la presse nationale, ainsi que l'AFP 
et l'ORTF, emboîtent le pas au Progrès. 
Le DDV poursuit : « Dimanche 15 août, Phi- 
lippe Bernert, journaliste de L'Aurore, prépare, avec 
les Klarsfeld qui l'ont alerté, un article sur la mort 
de Jean Moulin torturé par Barbie (...) Le 17 août, 
le spécialiste des questions allemandes du Monde 
reçoit à son tour le dossier Barbie des mains des 
Klarsfeld. L'après-midi l'affaire Barbie est réelle- 
ment déclenchée si l'on tient compte de l'impor- 
tance du Monde dans les milieux politiques ». 

Le moins que l'on puisse dire, à la lecture de 
ces démarches, c'est que la LICA est remarqua- 
blement introduite auprès de la presse, tant 
régionale que nationale. 

Le problème, c'est qu'il faut un élément nou- 
veau pour rouvrir le dossier. La LICA se met 
immédiatement en quête de cet élément. Un té- 
moin est opportunément retrouvé, Me Raymond 
Geismann, directeur régional de l'Union des juifs 
de France pendant l'occupation allemande, qui 
fournit un certain nombre de documents impli- 
quant Barbie dans des opérations de déportation. 

Le président de la LICA, accompagné de 
Béate Klarsfeld, se rend à Munich pour remettre 
les pièces accusatrices au procureur allemand 



163 La France LICRAtisée 

«A leur descente d'avion, nos amis étaient chaleu- 
reusement accueillis par des délégations de la B'nai 
B'rith », indique le DDV. 

Ils n'ont pas fait le voyage pour rien, le dossier 
est rouvert sur le champ. 

Jean Pierre-Bloch annonce dans la foulée avoir 
« demandé une audience au ministre français des 
affaires étrangères, Maurice Schumann, pour lui 
rendre compte de sa mission et l'inviter à tout met- 
tre en œuvre pour que le parlement allemand rati- 
fie dans les plus brefs délais la convention germano- 
française sur la poursuite des criminels de guerre ». 

La LICA obtient ensuite du gouvernement 
français qu'il demande l'extradition de Klaus 
Barbie, réfugié en Bolivie, extradition qui ne 
deviendra effective que douze ans plus tard, en 
1983, à la faveur d'un changement de régime 
dans ce pays. Barbie a alors soixante-dix ans. 

La LICRA ne cache pas que le procès de Klaus 
Barbie doit être l'occasion de faire rendre justice à 

s 

la communauté juive de France, par l'Etat français. 
A la veille de l'ouverture du procès, en 1987, 
Un sondage est réalisé, que la Ligue commente 
en ces termes : « Ce procès aura valeur pédagogi- 
que, historique pour les Français, particulièrement 
pour le quart d'entre eux qui ont répondu, dans ce 



164 Politiquement incorrect 

même sondage, qu'il ne fallait pas faire ce procès. 
Mais aussi pour tous ceux qui connaissent mal la 
"shoah", le massacre des juifs par les nazis. 14 % 
seulement des personnes interrogées ont pu dire que 
Klaus Barbie était "un tueur de juif" dont il a 
organisé la déportation et 22 % seulement ont pu 
dire qu'il était jugé pour la déportation et le 
génocide des juifs. C'est donc une grande leçon 
d'histoire au pays qui sera donnée à Lyon ». 

Mais avant d'arriver à son terme, la procédure 
avait été longue et mouvementée et fait surgir 
quelques cadavres des placards. L'avocat de Klaus 
Barbie, M e Jacques Vergés, avait notamment fait 
des déclarations qualifiées d'« ignominieuses » à 
propos de Jean Moulin. 

Ce qui avait conduit le président de la 
LICRA, dans une Lettre ouverte adressée en dé- 
cembre 1983 au procureur général et au bâton- 
nier de la Cour d'appel de Paris, à demander en 
toute simplicité... sa radiation de l'Ordre des 
Avocats. Après s'être étonné qu'il ait pu même y 
accéder : « Comment se peut-il qu'on ait pu en 
arriver là et qu'un M. Vergés dont tout le monde 
sait qu'il dissimule une tranche de huit années de 
sa vie (où dit-il "il s'est aguerri" !) ait pu, dans ces 
conditions, être seulement admis au Barreau ? » 



165 La France LICRAtisée 

La procédure avait également été marquée par 
la décision de la Cour de cassation, à la fin de 
1985, d'élargir la notion de crime contre l'hu- 
manité et d'inclure certains crimes de guerre 
- notamment ceux liés à la Résistance - dans le 
procès Barbie, qui ne sera donc pas poursuivi 
uniquement pour ses crimes contre les juifs. 

Cette décision est qualifiée de regrettable par 
M e Serge Klarsfeld, qui représente soixante-dix 
parties civiles dans le procès, car, selon lui, « en 
introduisant les adversaires actifs [les résistants, ndla] 
d'un pareil pouvoir (nazi) parmi les victimes 
éventuelles de crimes contre l'humanité [les juifs, 
ndla] , les magistrats de la Cour de cassation ont 
affaibli la protection des innocents telle que l'ont 
envisagée les rédacteurs de la charte de Nuremberg ». 

M e Vergés, quant à lui, réagira en ces termes : 
« Le corpus juridique bâti depuis quarante ans par 
les juristes sionistes à la suite de la jurisprudence de 
Nuremberg équivalait à ne considérer comme crimes 
contre l'humanité que ceux dirigés contre les juifs... ». 

Le DDV qui rapporte ces propos, conclut : 
« Une belle démonstration par Vergés que V anti- 
sionisme est la nouvelle forme d'antisémitisme ». 

Cette décision de la Cour de cassation d'étendre 
la notion de crimes contre l'humanité à certains 



166 Politiquement incorrect 

crimes de guerre est importante et fera naître une 
vive polémique à la LICRA. En février 1986, Le 
Droit de Vivre publie à ce sujet une libre opinion 
de Georges Wellers, dont il est bien précisé qu'il est 
membre du Comité directeur de la LICRA et dont 
on sent qu'il reflète l'opinion des dirigeants de la 
Ligue dans leur ensemble. Il est indigné par cette 
décision, qu'il qualifie d'aberrante, car elle ouvre la 
voie à la redoutable « banalisation » : « Comment, 
dans ces conditions, la Cour de cassation a[-t-elle] pu 
mélanger les victimes des crimes de deux catégories de 
nature profondément différente, les uns pratiqués avec 
plus ou moins de brutalité depuis que l'humanité pra- 
tique les guerres, et les autres sans précédent, à peine 
croyables et qui risquent dans l'avenir d'ouvrir une 
voie épouvantable si on les banalise ! Or, en France, 
la Cour de cassation les a banalisés. Pour le bien de 
l'humanité tout doit être fait, désormais, pour que 
cette décision ne soit pas contagieuse ». 

Klaus Barbie est condamné à la réclusion à 
perpétuité en 1987 pour crimes contre l'hu- 
manité. Il meurt en prison en septembre 1991. 

L'affaire Paul Touvier 

En novembre 1971, Georges Pompidou accor- 
de sa grâce à Paul Touvier, responsable de la mi- 



167 La France LICRAtisée 

lice de Lyon, qualifié par le DDV de « répugnan- 
te bête de proie qui, ayant abattu ses innocentes 
victimes, s'est enrichie de leurs dépouilles ». 

Il est vrai que le président Pompidou, que la 
fin de la guerre « avait trouvé préparant une ver- 
sion critique de Britannicus », selon le mot per- 
fide de Jean Pierre-Bloch, n'aurait de surcroît pas 
eu « de sensibilité particulière au dossier des colla- 
borateurs et des miliciens ». Une manière délicate 
d'indiquer qu'il a refusé de faire preuve à leur 
égard de la haine voulue. 

La LICA se scandalise de cette grâce et 
menace : « C'est donc ce silence que M. Pompidou 
doit rompre sous peine de voir le scandale s'établir, 
déborder, se répandre jusqu'à l'éclabousser en même 
temps que gronderait la colère de tous ceux qui 
furent à la pointe du combat anti-nazi et qui, 
déjà, de Paris comme des hameaux les plus reculés 
du pays, élèvent la voix et réclament bonne et 
prompte justice. Pour eux. Pour leurs morts ». 

Mais nous sommes en 1971. Georges Pom- 
pidou ne cédera pas et maintiendra sa grâce. 

La LICA ne s'avoue pas vaincue et, de campa- 
gne de pétitions en manifestations et témoi- 
gnages divers, parvient à rassembler les éléments 
d'une accusation de « crimes contre l'humanité » 



168 Politiquement incorrect 

à rencontre de Paul Touvier, qui fait finalement 
l'objet d'un mandat d'arrêt en 1981. L'année de 
l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand. 

Il ne sera cependant arrêté et inculpé qu'en 
1989. Il est alors âgé de soixante-quatorze ans. 

Son procès se déroule à Lyon et, coup de 
théâtre !... débouche sur un non-lieu en 1992 ! 

Sous le titre « Les nouveaux révisionnistes », le 
DDV s'étouffe d'indignation et accuse les juges- 
historiens de réécrire l'histoire de Vichy. 

N'ont-ils pas osé dire qu'« on n'arrivera jamais, 
dans la France de Vichy, à la proclamation offi- 
cielle que le juif est l'ennemi de l'Etat, comme ce 
fut le cas en Allemagne », ou que « aucun des dis- 
cours du maréchal Pétain ne contient de propos 
antisémites » ? 

Le magistrat ayant ordonné le non-lieu, Jean- 
Pierre Henné, publie en 1995 un livre intitulé 
Un étrange combat, dans lequel il indique : 
« Exemple peut-être sans précédent d'acharnement 
judiciaire, cette affaire prend place a l'évidence 
dans une stratégie destinée à rendre la France col- 
lectivement responsable du terrible destin des juifs 
pendant la seconde guerre mondiale ». 

Mais l'affaire n'est évidemment pas terminée. 
La LICRA dépose immédiatement un recours 



169 La France LICRAtisée 

devant la Cour de cassation afin d'obtenir l'an- 
nulation du non-lieu qui, selon ses dires, « cons- 
titue une insulte à la mémoire des nombreuses 
victimes du milicien Paul Touvier ». 

L'arrêt sera partiellement cassé. Dix des onze 
chefs d'accusation tombent pour de bon, mais 
reste le onzième, l'affaire de Rillieux-la-Pape : 
Touvier avait effectivement fait fusiller sept per- 
sonnes au lieu des cent, puis des trente exigées 
par les Allemands en représailles à l'assassinat, 
par un groupe de résistants, de Philippe Henriot, 

s 

secrétaire d'Etat à l'Information et à la Propa- 
gande du gouvernement de Vichy. 

Paul Touvier est renvoyé en Cour d'assises 
pour crime contre l'humanité. Il est à ce 
moment-là - nous sommes en 1994 - le premier 
Français passible d'une telle accusation. C'est 
donc par excellence un procès « aux vertus péda- 
gogiques ». 

Le DDV rapporte en ces termes la plaidoirie 
de l'un des avocats de la LICRA, chargé de 
conclure au procès : « M e Quentin se présente. Il 
est catholique. Il a été élevé par les frères maristes. 
Il s'honore d'être l'un des conseils de la LICRA qui 
s'appelait, en 1927, la Ligue contre les pogroms. 
Pour illustrer les ravages de l'antisémitisme, il se 



170 Politiquement incorrect 

rapproche des jurés, raconte sa jeunesse et sa ren- 
contre avec une jeune fille qu'il aime. Tous deux 
évoquent leur avenir et elle, timide, comme effrayée 
d'une impossibilité : "Mais... je suis juive": 

Sa future belle-mère, revenue du camp d'exter- 
mination d'Auschwitz, lui dira un jour avoir 
durant plusieurs semaines déshabillé les enfants 
avant qu'ils ne soient dirigés vers les chambres à 
gaz. "Je comprends qu'elle n'ait pas eu la force de 
prendre notre petite fille dans ses bras durant plus 
d'un an": conclut M e Quentin ». 

Patrick Quentin, secrétaire général de la 
LICRA, et Philippe Bataille, tous deux avocats 
de la LICRA au procès Touvier, rédigeront une 
plaquette sur cette affaire, qui sera largement dif- 
fusée dans les établissements scolaires par l'inter- 
médiaire des inspecteurs d'académie et des ensei- 
gnants. 

Blanchi une première fois en 1992 pour onze 
chefs d'accusation, Paul Touvier est cette fois 
condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour 
un seul de ces chefs. 

Satisfaite du verdict, - « Touvier est le premier 
Français à être condamné pour crime contre 
l'humanité. C'est la reconnaissance de la complicité 
de Vichy avec les nazis », - la LICRA demande 



171 La France LICRAtisée 

immédiatement que Maurice Papon soit lui aussi 
enfin déféré devant ses juges : «Au nom de 
l'impérieux besoin de justice des victimes et au nom 
de la mémoire et de l'honneur de la France, la 
LICRA l'exige ». 

La LICRA l'exige. 

La finalité de ces procès à répétition apparaît 
clairement à la lecture de l'éditorial du Droit de 
Vivre de mai 1994 : «La mémoire a des droits 
imprescriptibles, Il ne fallait pas que les sept fusillés 
de Rillieux-la-Pape soient tués une seconde fois, 
comme il ne faut pas effacer de la mémoire collective 
les 75 000 juifs de France déportés et exterminés et 
les six millions de juifs européens anéantis ». 

Paul Touvier meurt en prison deux années 
plus tard. Lors de ses obsèques, l'abbé Philippe 
Laguérie aura ces mots : « (...) De soulagement 
aussi, car nous pensons que le sort de Paul Touvier 
est plus enviable entre les mains d'un Dieu qui 
pardonne et qui pour cela nous a envoyé son propre 
fils, qu'entre les mains des hommes qui ne pardon- 
nent jamais quand leur intérêt reste en jeu, même 
cinquante ans après (...) Quand Paul Touvier 
réduit de trente à sept les victimes nazies de Ril- 
leux, il nous semble qu'il n'est pas immoral de 
parler des vingt-trois qui lui doivent la vie ; 



172 Politiquement incorrect 

comme il n'est pas immoral de parler des quarante- 
deux prisonniers qu'il fait libérer du 21 au 24 
août 1944 pour que l'horreur nazie n'ait plus ce 
vivier humain à ses crimes ». 

L'affaire Louis Darquier de Pellepoix 

Louis Darquier de Pellepoix, ancien commis- 
saire général aux questions juives du gouver- 
nement de Pétain, est condamné à mort par 
contumace en 1947 pour « intelligence avec une 
puissance étrangère ». Il se réfugie en Espagne. 
C'est là qu'il accorde, en 1978, un entretien à 
un journaliste de l'Express. Il nie le génocide des 
juifs et déclare que les chambres à gaz n'ont servi 
à détruire que les poux. Parlant de la rafle du 
Vel' d'Hiv, il charge René Bousquet : « C'est lui 
qui a tout fait », ce qui déclenchera la plainte de 
Serge Klarsfeld. L'interview provoque le scandale que 
l'on peut imaginer. 

Il est intéressant de noter que la LICA, en prin- 
cipe simple association, s'est, selon ses propres 
termes, « immédiatement adressée au gouvernement 
espagnol pour demander l'extradition du criminel de 
guerre français réfugié en Espagne depuis la fin de la 
dernière guerre ». Cette extradition ne pourra pas 
être obtenue, car Darquier de Pellepoix n'a 



173 La France LICRAtisée 

justement pas été condamné comme criminel de 
guerre. Il finira ses jours en Espagne en 1980. 

La LIC A menace par ailleurs L'Express, qui 
appartient alors à Jimmy Goldsmith, de poursuites 
judiciaires, à moins qu'il ne publie, dans ses 
prochains numéros, les deux types de documents 
qu'elle lui décrit avec précision en ces termes : 

- le premier de nature historique pour répondre 
fondamentalement à la tentative de falsification de 
l'histoire des nazis et de leurs collaborateurs présents 
et passés. 

- le second pour dénoncer par une enquête 
journalistique approfondie la tentative de bana- 
lisation du nazisme et des racistes qui se manifeste 
dans divers domaines. 

Nous sommes en 1978. C'est l'époque du 
feuilleton américain Holocauste que la télévision 
française a dans un premier temps refusé d'ache- 
ter, au grand dam de la LICA, au motif que les 
français étaient suffisamment et amplement 
informés sur ce sujet et qu'il n'était pas utile d'en 
rajouter. Une époque décidément difficile à 
imaginer aujourd'hui. 

La LICA profite de l'« affaire Darquier » pour 
réitérer sa demande auprès des responsables de la 
télévision et du ministre de la communication, 



174 Politiquement incorrect 

Jean-Philippe Lecat, et annonce : «A défaut 
d'une réponse positive dans un délai convenable, la 
LICA se fera un devoir de prendre V initiative de 
la projection de ce film dans une salle parisienne 
pour répondre à la propagande ». 

Le chroniqueur du DDV renchérit : « Il n'en 
reste pas moins que, après Darquier, la télévision 
française se voit dans l'obligation impérieuse de 
projeter le film Holocauste. Puisqu'on a de nou- 
veau ouvert la plaie, il faut aller jusqu'au bout. Il 
s'agit, pour la télévision française, de pure conscience 
professionnelle. Ne pas projeter Holocauste, 
c'est couvrir Darquier ». 

Pour ne pas « couvrir Darquier », on projettera 
donc Holocauste. Le Droit de vivre peut ainsi 
annoncer dès janvier 1979 : « Holocauste sera 
programmé sur Antenne 2 grâce à l'action de la 
LICA ». Il poursuit : « Nous pouvons considérer que 
la projection en France sur une chaîne télévisée de 
Holocauste est une grande victoire remportée par la 
LICA, qui était intervenue auprès des pouvoirs publics 
et des directeurs de télévision, qui avait usé de tout 
son poids et de toute son influence pour que la France 
devienne le trentième acheteur des droits de 
reproduction du film ». 

Mission accomplie. 



175 La France LICRAtisée 



L'affaire Maurice Papon 

Elle sera particulièrement emblématique pour 
la LICRA qui déclarera : « L'événement majeur 
permis par ce procès est la condamnation par une 
Cour d'assises d'un ancien ministre de la V e Repu 
blique ». 

Ancien secrétaire général de la préfecture de la 
Gironde de juin 1942 à août 1944, chargé des 
questions de police et des affaires juives, Maurice 
Papon poursuit après la guerre une carrière bril- 
lante, devenant préfet de police, député RPR, 
puis ministre du budget de Valéry Giscard d'Es- 
taingdel978àl981. 

L'affaire éclate en mai 1981, entre les deux 
tours de l'élection présidentielle. Maurice Papon, 
âgé de soixante-dix ans, est brusquement accusé de 
complicité dans la déportation de 1 690 juifs 
de Bordeaux entre 1942 et 1944. 

Il est curieux de noter que ses homologues de 
Toulouse, Montpellier et Marseille, par exemple, 
ne seront pas poursuivis, alors que de chacune 
de ces villes partiront pourtant en moyenne 
6 000 à 8 000 déportés, soit nettement plus que 
de la Gironde. 

S'il est inculpé dès 1981, ce n'est pourtant 
qu'au terme de dix-sept années de batailles juri- 



176 Politiquement incorrect 

cliques que son procès s'ouvrira enfin en 1997, 
dans un climat de lynchage médiatique intense. 

Maurice Papon avait demandé dès 1981 la 
constitution d'un jury d'honneur composé de 
résistants, dont fit notamment partie le R.P. 
Michel Riquet, membre de la LICRA. Le jury 
d'honneur parvint à une conclusion modérée, 
reconnaissant la qualité de résistant de Maurice 
Papon à partir de 1943, mais considérant qu'il 
aurait dû démissionner de ses fonctions en 1942. 
Le R.P. Riquet réagira en 1986 à une présen- 
tation faite par Le Droit de Vivre des conclusions 
du jury d'honneur, présentation qu'il juge « ma- 
nipulatrice ». Il adresse donc au journal une 
lettre qu'il conclut en ces termes : « On peut 
avoir une idée différente au sujet de la démission 
que M. Maurice Papon aurait dû donner, mais il 
est certainement contraire à toute objectivité com- 
me à toute équité de le poursuivre pour des crimes 
contre l'humanité qu'il n'a jamais commis ». 

À la fin de 1991, pendant l'instruction, et 
dans le but d'alourdir encore le dossier Papon, la 
LICRA publie un communiqué rappelant sa 
responsabilité dans les événements de la nuit 
tragique du 17 octobre 1961 à Paris, pendant la 
guerre d'Algérie : « Souvenons -nous : le 17 octobre 



177 La France LICRAtisée 



1961, il y a trente ans, sur directives du préfet 
Maurice Papon, des milliers d'Algériens furent 
pourchassés dans les rues de Paris, matraqués, abat- 
tus comme du gibier; noyés dans la Seine ou arrêtés 
et torturés dans les commissariats. (...) Cet épisode 
sinistre de notre proche histoire, comparable à bien 
des égards à la Nuit de cristal en Allemagne nazie 
ou à la rafle du VeV d'Hiv, n'a laissé aucune trace 
dans la mémoire officielle... » 

Si cet épisode est effectivement peu glorieux, il 
faut considérer qu'il s'est déroulé dans un contexte 
très particulier : 22 policiers français étaient 
tombés au cours des mois précédents sous les 
balles du FLN, qui multipliait les attentats en 
France. Les syndicats policiers avait réclamé 
davantage de fermeté au préfet de police, Maurice 
Papon, qui avait donc décrété, le 5 octobre 1961, 
le couvre-feu pour les travailleurs algériens. C'est 
pour protester contre ce couvre-feu que le FLN 
organisera une manifestation massive, que le 
général De Gaulle donnera l'ordre au préfet de 
police d'interdire et de disperser par tous les 
moyens. Ce qui fut fait. Quant au nombre de 
morts c'est par dizaines qu'on les comptera, et 
certainement pas par centaines ou par milliers, 
comme la LICRA voudra le faire croire. 



178 Politiquement incorrect 

En 1997 arrive enfin l'heure tant attendue de 
ce procès qualifié d'historique. Les avocats de la 
LICRA, qui le préparaient depuis des années, 
sont présents comme parties civiles. L'accent est 
mis cette fois sur le « crime de bureau », celui 
du haut-fonctionnaire qui ne prend pas lui- 
même part aux actes, mais qui donne les ordres 
et signe les papiers. 

A l'issue de six mois de procès, Maurice Papon 
est condamné en 1998 à 10 ans de réclusion 
pour complicité de crimes contre l'humanité. 

Il est libéré pour raison de santé en 2002, une 
décision que la LICRA juge « navrante » : « Nous 
avons toujours dit qu'il devait rester en prison car 
il a commis des crimes impardonnables. Sa déten- 
tion était plus douce que le sort de ceux qui ont 
subi ses décisions à Bordeaux et n'ont pas eu comme 
lui la chance même de rester en prison ». 

En Israël, le responsable du centre Simon 
Wiesenthal qualifie cette libération de « décision 
éminemment regrettable ». 

L'affaire René Bousquet 

René Bousquet, plus jeune préfet de France en 
1940, est secrétaire général de la police de Vichy 
d'avril 1942 à décembre 1943. Il est condamné 



179 La France LICRAtisée 

en 1949 à cinq ans d'indignité nationale, con- 
damnation qui sera aussitôt annulée pour « faits 
de résistance ». 

Contrairement à Maurice Papon, il disparaît 
ensuite de la scène publique, se consacrant aux 
affaires, ce qui ne l'empêchera pas d'être un ami 
intime de François Mitterrand, qui déclarera à 
son propos : « Ce n'était pas un vichy ssois fana- 
tique, comme on Va présenté... c'était un homme 
d'une carrure exceptionnelle. Je l'ai trouvé plutôt 
sympathique, direct, presque brutal. Je le voyais 
avec plaisir. Il n'avait rien à voir avec ce qu'on a 
pu dire de lui ». 

François Mitterrand éprouvait d'ailleurs un 
plaisir pervers à demander à ses amis socialistes, 
à l'issue de l'un ou l'autre déjeuner auquel Bous- 
quet avait été convié : « Savez-vous avec qui vous avez 
déjeuné ? Savez-vous qui est Bousquet ? ». 

Après quasi cinquante ans d'indifférence, lui 
aussi se voit brusquement poursuivi en 1990, à 
l'âge de quatre-vingt ans, pour crimes contre 
l'humanité. Il est accusé d'avoir aidé à la dépor- 
tation de juifs, notamment lors de la rafle du 
Vel' d'Hiv. 

Pour pouvoir le poursuivre pour crimes contre 
l'humanité, il fallait trouver un fait nouveau. En 



1 80 Politiquement incorrect 

cherchant bien, les avocats de la LICRA, Mes 
Klarsfeld et Libman, finiront par trouver que fin 
août 1942, René Bousquet avait fait annuler 
plusieurs dispositions réglementaires mettant à 
l'abri des rafles certaines catégories d'enfants 
juifs en fonction de leur âge. 

Mais l'instruction traîne en longueur, et la 
LICRA s'impatiente. Le 15 novembre 1990, elle 
appelle à manifester devant le Palais de Justice de 
Paris et devant tous les Palais de Justice des 
grandes villes de France : «A l'heure où certains 
nient ou contestent la réalité du génocide et de la 
solution finale il est important que le procès de 
René Bousquet ait lieu, non pas seulement pour 
punir, mais aussi pour rappeler à l'opinion publi- 
que le rôle criminel de la collaboration du gouver- 
nement de Pétain ». 

Mais il n'y aura pas de procès. René Bousquet 
est assassiné en 1993 par un déséquilibré, ce que 
la LICRA commente en ces termes : « C'est la 
consternation, non parce que Bousquet est mort, 
mais parce que ce meurtre a empêché que le procès 
qui commençait à se profiler ait lieu ». 

Serge Klarsfeld ajoutera en guise d'épitaphe : 
« L'affaire elle-même a été un formidable levier péda- 
gogique. Ne regrettons rien. Si ce n'est un procès qui 



181 La France LICRAtisée 

aurait été une grande victoire pour la société fran- 
çaise. De cela, c'est vrai, nous serons privés ». 

* * 

Un souci d'équité et de justice, s'agissant de 
crimes contre l'humanité, aurait pu conduire la 
LICRA ou d'autres organisations défendant les 
droits de l'homme, à dénoncer pareillement les 
criminels de guerre ayant opéré dans le camp 
communiste et à faire pression pour qu'ils con- 
naissent, eux aussi, un châtiment exemplaire. Ils 
sont au moins aussi nombreux que de l'autre 
côté. Sans remonter jusqu'à la dernière guerre 
mondiale, les bourreaux du peuple cambod- 
gien^, par exemple, non seulement n'ont fait 
l'objet d'aucun jugement, mais plusieurs ex- 
dirigeants khmers rouges ont-ils été reconnus et 
légitimés par la communauté internationale. 
Certes, les crimes communistes n'ont pas été 
commis par « racisme » mais pour d'autres rai- 
sons follement idéologiques. En sont-ils moins 
terrifiants et plus excusables pour autant ? 

Quoi qu'il en soit, la dimension internationale 
dont se targue la LICRA lui aurait permis 
d'exercer une pression, au moins médiatique. On 
a vu en d'autres circonstances que son efficacité 



1 82 Politiquement incorrect 

pouvait être décisive. Il faut reconnaître que rien 
de tel ne s'est produit. 

Ce devoir de mémoire, qui touche pourtant 
des dizaines de millions de victimes du com- 
munisme en général, reste encore à accomplir. 

En France, ces procès à répétition qui inter- 
viennent des décennies après les faits et s'achar- 
nent contre des vieillards, répondent en réalité à 
bien d'autres nécessités que le souci de justice ou 
le devoir de mémoire. 

Ils sont là tout d'abord pour rappeler à 
l'opinion publique la dette de la France à l'égard 
des juifs, et donc d'Israël. 

Mais ils doivent également opposer un 
démenti éclatant aux assertions des révision- 
nistes, qui se font de plus en plus insistants. 



La LICRA et les révisionnistes 



Après la seconde guerre mondiale, un danger 
nouveau et gravissime vient menacer un équili- 
bre vital à la fois pour Israël et la diaspora : d'an- 
ciens déportés, des universitaires, ou même des 
historiens, s'interrogent sur certains aspects de la 
shoah et remettent en question la vérité officielle 
issue en 1945-1946 des délibérations du Tribu- 
nal de Nuremberg. 

Cette vérité officielle concerne essentiellement 
le nombre des victimes juives, que le Tribunal 
chiffrera à six millions, chiffre sacralisé depuis 
lors. 

Tout ce qui entoure le Tribunal militaire de 
Nuremberg est d'ailleurs à ce point sacralisé qu'il 
s'est trouvé une loi en France, votée en 1990, 
pour criminaliser tout questionnement et tout 
doute sur les méthodes et les conclusions du Tri- 
bunal. 

pourtant, lors de son installation, un certain 
nombre d'objections furent soulevées. 



1 84 Politiquement incorrect 

Le Tribunal militaire de Nuremberg 

Ce Tribunal, constitué par les puissances 

s 

victorieuses - Etats-Unis, Angleterre, URSS et 
France - siégea d'octobre 1945 à octobre 1946 
pour juger les criminels de guerre nazis. 

Nahum Goldmann, qui fut, après la guerre, 
président à la fois du Congrès Juif Mondial 
(CJM) et de l'Organisation sioniste internatio- 
nale, écrit dans ses mémoires, The Jewish Para- 
dox, que seuls les efforts redoublés du CJM réus- 
sirent à convaincre les Alliés de convoquer ce 
Tribunal dont la tenue fut loin de faire l'unani- 
mité. 

Un certain nombre de voix de juristes et d'his- 

s 

toriens se firent entendre aux Etats-Unis mêmes 
pour mettre en doute sa validité. 

Le sénateur américain Robert A. Taft, consi- 
déré comme la conscience morale du Parti répu- 
blicain, émit publiquement ce jugement sur le 
Tribunal de Nuremberg le 5 octobre 1946 : « Le 
jugement du vaincu par le vainqueur ne peut être 
impartial quelles que soient les formes juridiques mises 
en œuvre. (...) Tout ce procès se résume à la 
soif de vengeance, et la vengeance est rarement le 
synonyme de justice. La pendaison de onze hommes 
condamnés sera une tache sur la conscience améri- 



1 85 La France LICRAtisée 

caine que nous allons longtemps regretter. A Nu- 
remberg, nous avons accepté le principe soviétique 
qu'un procès sert les intérêts politiques du gouver- 
nement et non l'idéal de justice. Cette conception 
est très éloignée de l'idée anglo-saxonne du droit 
qui est notre héritage. En travestissant la politique 
avec les oripeaux du formalisme judiciaire, nous 
avons discrédité l'idée même de justice en Europe 
pour les années à venir ». 
Cette participation soviétique au procès, avec le 

s 

soutien des Etats-Unis, conduisit d'ailleurs le 
diplomate et historien américain George F. Ken- 
nan à condamner tout le processus de Nuremberg 
comme une « horreur » et une « farce ». 

Le Tribunal introduisit dans le domaine du 
droit international la notion de crimes contre 
l'humanité, ce qui constitue un progrès réel, à 
condition bien évidemment que tous les crimes 
contre l'humanité, sans exception, soient pris en 
compte. 

Son article 6 définissait ainsi ces crimes : 
« L'assassinat, l'extermination, la réduction en es- 
clavage, la déportation et tout autre acte inhumain 
commis contre toutes populations civiles, avant ou 
pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des 
motif politiques, raciaux ou religieux lorsque ces 



1 86 Politiquement incorrect 

actes ou persécutions, qu'ils aient constitué ou non 
une violation interne du pays où ils ont été per- 
pétrés, ont été commis à la suite de tout crime ren- 
trant dans la compétence du Tribunal ou en liai- 
son avec ce crime ». 

Il est clair que cette définition aurait pu s'ap- 
pliquer également aux puissances juges et parties 
au Tribunal. Et en tout premier lieu à l'URSS qui 
siégeait au Tribunal en qualité de procureur, alors 
que les victimes de Staline se comptaient déjà à 
cette époque par dizaines de millions et que, six 
ans auparavant, la France et l'Angleterre avaient 
voté son expulsion de la Société des Nations pour 
avoir agressé sans motif la Finlande. 

s 

Ou aux Etats-Unis, dont le président, Tru- 
man, n'avait pas hésité à envoyer deux bombes 
atomiques, les 6 et 9 août 1945, sur les civils vivant à 
Hiroshima et Nagasaki. 

Ou à l'Angleterre qui avait rasé des villes alle- 
mandes, notamment Dresde, dont le bombarde- 
ment au phosphore, sans aucune raison stratégi- 
que, du 13 au 15 février 1945, fit périr dans les flammes 
des dizaines de milliers de personnes. 

Il est intéressant de noter que les modalités du 
Tribunal de Nuremberg avaient été préalable- 
ment fixées par les Accords de Londres, qui 



1 87 La France LICRAtisée 

avaient également défini les chefs d'inculpation 
nazis. 

Or ces Accords avaient été signés le 8 août 
1945, soit très exactement entre les deux séries 
de bombardements sur Hiroshima et sur Naga- 
saki... Sans apparemment de troubles de cons- 
cience de la part des vainqueurs. 

Mais le Tribunal de Nuremberg n'avait à juger 
que des crimes allemands, et l'article 6 ne s'ap- 
pliquait exclusivement qu'à eux. 

Les preuves requises par le Tribunal faisaient 
l'objet de trois articles ainsi libellés : 

Article 19 : le Tribunal ne sera pas lié par les 
règles techniques relatives à l'administration des 
preuves. Il adoptera et appliquera autant que possi- 
ble une procédure rapide et non formaliste et ad- 
mettra tout moyen qu'il estimera avoir une valeur 
probante 

Article 20 : le Tribunal pourra exiger d'être in- 
formé du caractère de tout moyen de preuve avant 
qu'il ne soit présenté, afin de pouvoir statuer sur sa 
pertinence 

Article 21 : le Tribunal n'exigera pas que soit 
rapportée la preuve de faits de notoriété publique, 
mais les tiendra pour acquis. Il considérera égale- 
ment comme preuves authentiques les documents et 



188 Politiquement incorrect 

rapports officiels des gouvernements des Nations 
unies, y compris ceux dressés par les commissions 
établies dans les divers pays alliés pour les enquêtes 
sur les crimes de guerre, ainsi que les procès- 
verbaux des audiences et les décisions des tribunaux 
militaires ou autres tribunaux de l'une quelconque 
des Nations unies. 

En vertu de quoi l'exécution massive, en mai 
1940, de 4123 officiers polonais à Katyn, une 
forêt près de Smolensk en Russie, fut attribuée 
sans sourciller par le Tribunal de Nuremberg à 
l'« envahisseur fasciste » et ce, sur la foi du 
document soviétique URSS-54. 

Il faudra attendre 1990 pour que les autorités 
russes finissent par reconnaître officiellement ce 
qui était parfaitement connu dès la fin de la 
guerre par les occidentaux, à savoir que la tuerie 
de Katyn avait en réalité été perpétrée par le 
NKVD, la police secrète stalinienne, dans le but 
de décapiter l'intelligentsia polonaise. 

Malgré ces évidents problèmes liés aux preuves et 
aux témoignages plus ou moins fiables, et pollués 
de surcroît par des impératifs idéologiques et poli- 
tiques, il est totalement interdit, aujourd'hui plus 
que jamais, de contester de quelque manière que 
ce soit les conclusions du Tribunal de Nuremberg. 



1 89 La France LICRAtisée 

Pourtant, des années plus tard, en janvier 
1996, le DDV publiera sous le titre « Le TPI », 
un article annonçant la création du Tribunal Pé- 
nal International en ces termes assez étonnants : 

« Deux résolutions de l'ONU, 808 du 22 février 
1993 et 827 du 25 mai 1993, adoptées à l'una- 
nimité, ont créé le Tribunal Pénal International 
pour les crimes commis sur le territoire de V ex- 
Yougoslavie et défini son domaine d'intervention. 
Le conseil de sécurité a rendu ce TPI obligatoire. 
La France y a joué un rôle déterminant sur les 
plans diplomatique et juridique. La création de ce 
TPI est un événement en droit international car il 
rompt avec les expériences précédentes : ce n'est ni 
un u tribunal de vainqueurs" comme ceux de Nu- 
remberg et de Tokyo, ni un tribunal de victimes. Il 
a été conçu pour être impartial et indépendant et 
possède une assise juridique solide ». 
Ainsi donc, selon les propres termes du DDV, le 
Tribunal de Nuremberg n'aurait été qu'un tri- 
bunal de vainqueurs, ni impartial, ni indépen- 
dant et ne possédant pas d'assise juridique soli- 
de ? 

Affirmation pour le moins étrange venant de 
laLICRA... 



190 Politiquement incorrect 

Qui sont les révisionnistes? 

Sous le terme générique de révisionnisme se 
cachent en réalité des notions très diverses, allant 
de la négation pure et simple du génocide nazi 
aux querelles sur les méthodes d'extermination et 
le nombre des victimes, voire sur la définition 
même du terme génocide. 

Et les révisionnistes ne sont pas tous « d'ex- 
trême droite », tant s'en faut. 

Le premier d'entre eux, chronologiquement, est 
d'ailleurs un ancien militant successivement com- 
muniste, puis socialiste et pacifiste, Paul Rassinier. 
C'est en tant que résistant qu'il est arrêté en 1943 
et déporté à Buchenwald et à Dora, deux camps 
nazis qui présentaient la particularité d'avoir une 
véritable « direction parallèle » aux mains des 
communistes, principalement allemands. Les S S 
leur avaient délégué un certain nombre de fonc- 
tions dont ils usèrent à leur gré. 

Paul Rassinier fait paraître en 1950 Le men- 
songe d'Ulysse, dans lequel il conteste l'existence 
des chambres à gaz - qui, de fait, n'existaient pas 
dans les deux camps où il avait été détenu - et 
donne libre cours à sa haine des communistes. 

Ce livre marque le début d'une guerre sans 
merci de la LICRA contre les « faussaires de 



191 La France LICRAtisée 

l'histoire », qu'elle accuse de vouloir effacer la 
shoah de la mémoire de l'humanité. Ou de la 
banaliser, ce qui revient au même. 

La shoah est et doit rester le pire crime qui se 
soit jamais produit sous la voûte des cieux. Rien 
ne lui est comparable, rien ne peut ni ne doit lui 
être comparé. 

Mais le danger est grand, car Paul Rassinier ne 
va pas rester un cas isolé. D'autres auteurs, de plus 
en plus nombreux, vont suivre, y compris à l'étran- 
ger. En Allemagne, Thies Christophersen publie Le 
mensonge d'Auschwitz, et en Angleterre, c'est David 
Irving qui publie en 1977 La guerre d'Hitler. 

David Irving dira plus tard : « En 1977, j'ai 
été l'objet de pressions pour inclure dix pages de 
contre-vérités à propos de ce qui est appelé "holo- 
causte": J'ai refusé. En conséquence, des contrats 
ont été annulés avec le Sunday Times, le Reader's 
Digest et des éditeurs américains ». 

En France, l'un des plus célèbres révisionnistes 
est Robert Faurisson, universitaire lyonnais, qua- 
lifié de « chef de file des détracteurs de l'histoire ». 
Il publie en 1978 une étude, Recherches sur la 
genèse de la légende des chambres à gaz. 
La LIC A l'assigne en justice en 1979 pour 
falsification de la vérité historique et indique 



192 Politiquement incorrect 

subtilement à la justice quelle « marche à sui- 
vre » lui donnerait satisfaction : 

«Si le tribunal admet que "l'historien" a man- 
qué de prudence et de sérieux dans ses assertions, 
qu'il n'a pas fait preuve d'honnêteté intellectuelle et 
de rigueur dans ses recherches, que ses conclusions 
historiques sont fausses parce qu'il a interprété des 
textes ou des témoignages et que, par voie de con- 
séquence, il a travesti la vérité pour tromper l'opi- 
nion, M. Faurisson sera disqualifié et la mémoire 
des victimes des nazis sera respectée ». 

Mais le châtiment judiciaire éventuel ne suffit 
pas à la LIC A. Sans attendre le jugement du 
tribunal, le président Pierre-Bloch écrit au ministre 

s 

de l'Education nationale pour l'inviter à « interdire 
à M. Faurisson d'utiliser sa qualité de maître de 
conférence et le nom de l'Université de Lyon 2 pour 
exposer ses thèses, objet de poursuites judiciaires, et à 
suspendre les enseignements de M. Faurisson qui sont 
en relation avec ces mêmes poursuites, et ce aussi 
longtemps que la justice n 'aura pas statué ». 

En mars 1981, à la veille d'un procès dont l'is- 
sue ne semble faire aucun doute pour la LICRA, 
le DDV justifie son action en ces termes : 

« En faisant comparaître en justice M. Fauris- 
son, la LICRA ne porte pas atteinte à la liberté 



193 La France LICRAtisée 

d'expression. Elle la responsabilise, ce qui est tout 
autre chose. Le tribunal ne sera pas invité à bâil- 
lonner la voix ou à interdire les études de l'accusé, 
mais à constater que M. Faurisson n'a pas dit ni 
écrit toute la vérité, rien que la vérité sur les camps 
d'extermination nazis, les chambres à gaz et l'am- 
pleur du génocide. (...) Condamné, il ne le sera 
pas au détriment de la liberté d'expression mais au 
bénéfice de la vérité qu'il a volontairement malme- 
née pour nuire à la mémoire des victimes du 
national- socialisme et du même coup, tenter de 
réhabiliter les criminels de guerre nazis ». 

La LICRA ne se trompait pas. Robert Faurisson 
est condamné en juillet 1981 à une forte amende 
en dommages et intérêts. 

De l'autre côté de l'échiquier politique, les 
révisionnistes se sont regroupés autour des édi- 
tions d'extrême gauche La Vieille Taupe, autre 
bête noire de la LICRA. Considérant que Roger 
Faurisson a droit à la liberté d'expression, Jean- 
Gabriel Cohn-Bendit, frère de « Dany le 
rouge », fait paraître en 1981 un ouvrage collec- 
tif Intolérable intolérance, qui nie les chambres à 
gaz et les déportations. 

Il est évident que les témoignages, y compris 
ceux des survivants, ne sont pas obligatoirement 



194 Politiquement incorrect 

fiables. Même de bonne foi, des erreurs peuvent 
survenir, s'agissant d'un sujet aussi passionnel et 
sensible. Et les risques d'erreurs augmentent 
lorsque les faits remontent à plusieurs décennies. 
Les exemples suivants en offrent l'illustration. 

Le difficile problème des témoins 

Le DDV consacre en 1985 une page entière au 
film de Claude Lanzmann, Shoah, qui vient de 
sortir et qui dure neuf heures trente minutes. Un 
film qualifié de « projet d'intérêt national » par 

s 

l'Etat d'Israël, qui a participé à son financement. 

Le cinéaste raconte dans cette interview la 
difficulté qu'il a eue à retrouver des témoins et 
la manière dont il les a dirigés, ce que le DDV 
rapporte en ces termes : 

« Lanzmann les a poussés, forcés à revivre l'hor- 
reur, avec pour seule attestation du vrai, les mimi- 
ques du visage, lorsqu'ils racontaient. Ces événe- 
ments sont d'une telle magnitude qu'ils créent leur 
propre mythologie fondatrice. A quel moment le 
mythe intervient-il ? Lanzmann donne pour exem- 
ple un épisode du film où les paysans polonais ra- 
content la routine des navettes des camions à gaz 
qui défilent chaque jour. La routine se brise à par- 
tir d'un événement inouï : un accident : le camion 



195 La France LICRAtisée 

à gaz se renverse, les portes s'ouvrent et les juifs, à 
demi asphyxiés, tombent sur la route. 

Il y a eu un seul témoin qui l'a raconté aux autres, 
et tous l'ont raconté comme s'ils en avaient été les 
vrais témoins : légende et aussi vérité. C'est tout cela 
qui a permis au film de vivre au présent ». 

Le film Shoah sera également diffusé en Polo- 
gne, et à ce propos, Claude Lanzmann déclare 
au DDV : « Pour en revenir aux dirigeants polo- 
nais, ils ont été infâmes en envoyant des journa- 
listes interroger certains paysans qui sont dans mon 
film pour leur faire dire que c'est moi, Lanzmann, 
qui leur avait mis des idées antisémites dans la tête 
mais qu'ils n'étaient pas le moins du monde de cet 
avis. En somme, je les aurais payés pour qu'ils 
disent ce qu'ils ont dit. Extraordinaire! C'est une 
attitude qui les condamne eux-mêmes ». 

Pourtant, André Glucksmann avait déclaré lors 
d'une projection du film à Dijon, et ces propos 
sont quand même assez étonnants : « La force de 
ce film est de montrer non ce qui s'est passé - il s'en 
garde bien - mais la possibilité de ce qui s'est passé ». 

On pourra mesurer une nouvelle fois l'ambi- 
guïté qui s'attache aux témoignages en 1993. Le 
Droit de Vivre annonce la publication, aux éditions 
du CNRS, d'un ouvrage du pharmacien Jean- 



196 Politiquement incorrect 

Claude Pressac^ sur Les crématoires d'Auschwitz, 
ouvrage qui déclenche une polémique. Pour cer- 
tains, en effet, cette enquête « apporte une preuve 
irréfutable de l'existence des chambres à gaz et fours 
crématoires ». Pour d'autres, poursuit le DDV, 
« dont Claude Lanzmann, le danger de cette enquête 
technique est de fragiliser les nombreux témoignages 
de survivants qui ont tout dit en la matière et dont 
la parole n'a pas à être soumise à un quelconque 
doute, y compris scientifique ». 

L ' affaire Dem j anjuk 

Cette affaire, non pas française mais israélo- 
américaine, prouve elle aussi à quel point les 
témoignages peuvent se fourvoyer. Elle trouve 
son épilogue en 1993. L'accusé, John Demj an- 
juk, condamné une première fois à mort, sera 
finalement déclaré innocent des crimes dont on 
l'accusait, car il y eut tout bonnement erreur sur 
la personne. 

Le DDV relate en ces termes plutôt curieux 
son acquittement : «Après l'acquittement par la 
Cour suprême israélienne de John Demjanjuk, dit 
Ivan le terrible, bourreau du camp d'extermination 
nazi de Treblinka, Elie Wiesel déclarait qu'il y a 
«pour la première fois conflit entre justice et 



197 La France LICRAtisée 

mémoire. Je ne doute pas de la sincérité des juges 
en Israël je respecte leur souveraineté, mais quand 
je songe aux six survivants de Treblinka, qui ont 
mis leur mémoire, leur vie, leur expérience sur la 
balance, j'ai mal pour eux et avec eux ». 

En d'autres termes, pour ne pas faire de peine 
aux survivants de Treblinka, il aurait mieux valu 
condamner un innocent et ne pas faire tant 
d'histoires ? 

Car c'est là tout l'extraordinaire de ce cas, sur 
lequel le DDV est fort peu loquace, bien qu'il 
persiste dans son article à qualifier John Demjan- 
juk de bourreau du camp de Treblinka, qu'il n'a 
jamais été. 

s 

Ukrainien émigré aux Etats-Unis en 1952, 
John Demjanjuk est accusé au début des années 
1980 par l'OSI^ d'être Ivan le terrible, bourreau 
de Treblinka, et ce, sur la foi de témoignages. 
Malgré ses dénégations, on lui retire sa ci- 
toyenneté américaine, et il est extradé vers Israël 
en 1986. Là, il est déclaré coupable et condamné 
à mort en 1988. 

Les condamnations à mort en Israël sont 
obligatoirement soumises à la Cour suprême. 
C'est ce qui le sauve, car durant cette procédure, 
l'URSS s'effondre. L'avocat de Demjanjuk aura 



198 Politiquement incorrect 

accès à des archives judiciaires auparavant inac- 
cessibles et y découvre la preuve irréfutable 
qu'Ivan le terrible avait été un autre Ukrainien, 
du nom d'Ivan Marchenko, disparu en Yougos- 
lavie en 1944. Cet avocat, Yoram Sheftel, sera 
d'ailleurs traîné dans la boue et manquera d'être 
aveuglé par un jet d'acide lancé par un ancien 
déporté d'Auschwitz. 

Il faudra cependant attendre 1993 pour que Demjanjuk 
soit définitivement acquitté et puisse 

s 

enfin rentrer aux Etats-Unis, où il sera accueilli 
de très mauvais gré. Après treize années de 
poursuites dont sept années dans une prison de 
très haute sécurité en Israël ! 

Nouvellement créé au début de l'affaire, l'OSI, 
qui tenait essentiellement, pour des raisons de 
crédibilité et de financement, à ce que le procès 
ait lieu et à ce que l'accusé soit condamné, fut 
fortement suspecté d'avoir retenu volontaire- 
ment, bien avant sa condamnation, des éléments 
prouvant son innocence. 

Roger Garaudy et l'abbé Pierre 

Les procès à répétition ne suffisent cependant 
pas à endiguer le flot des parutions révision- 
nistes. Face aux offensives répétées de ces der- 



199 La France LICRAtisée 

niers et à la fragilité évidente de certains témoi- 
gnages, il faut imposer le silence coûte que 
coûte. Frapper plus fort et rendre le sujet 
shoah définitivement tabou. Ce sera le rôle assi- 
gné à la loi Fabius-Gayssot, votée en 1990. 
Cette loi n'empêchera pourtant pas l'ancien 
communiste Roger Garaudy de publier en 1995 
un ouvrage retentissant, Les mythes fondateurs de la 
politique israélienne. 

Il s'agit là d'un nouvel épisode particulière- 
ment marquant de l'histoire du révisionnisme. 
Dès la parution du livre, tout l'establishment 
unanime se déchaîne contre lui. C'est qu'il a 
enfreint le tabou suprême : non seulement 
il remet en cause un certain nombre de vérités 
officielles concernant la shoah, qu'il replace dans 
le contexte meurtrier de l'époque, mais il se 
montre également très critique envers la poli- 
tique d'Israël à l'égard des Palestiniens. 

Le scandale est d'autant plus grand que Roger 
Garaudy se voit soutenu par... l'abbé Pierre, qui 
devient ainsi, à son corps défendant, le plus 
illustre des révisionnistes. 

Qu'est donc venu faire l'abbé Pierre dans cette 
galère ? Son crime est d'avoir accordé sa caution 
morale au livre de son ami « de quarante ans » 



200 Politiquement incorrect 

et, devant le lynchage médiatique, d'avoir persis- 
té et signé. 

Naïveté ou provocation? Dans un courrier de 
soutien à Garaudy, l'abbé Pierre écrit : « II est 
tout à fait normal que nous ayons été portés à des 
exagérations après la guerre. J'étais encore à Ausch- 
witz il y a six mois, là où l'on avait inscrit sur une 
plaque qu'il y avait eu quatre millions de morts. 
Puisqu'on est revenu aujourd'hui au chiffre d'un 
million, c'est que le chiffre de quatre millions était 
exagéré ». 

Il est des comptabilités dangereuses : L'abbé 
Pierre ne va pas tarder à s'en rendre compte. 

Sommé par les institutions religieuses, politi- 
ques et morales du pays de se rétracter, il réaffir- 
me au contraire son soutien à Roger Garaudy 
aussi longtemps que « les erreurs contenues dans 
son livre ne lui auront pas été démontrées » et 
propose de convoquer un colloque d'historiens 
avec les révisionnistes ! 

Une proposition qui se verra repoussée avec 
indignation : « Le jour où l'on accepte un de ces 
messieurs dans un débat public à la télévision ou 
dans un colloque d'historiens, ils ont gagné la 
partie, ils sont considérés comme une école. Il faut 
le leur refuser impitoyablement », dira Pierre 



20 1 La France LICRAtisée 

Vidal-Naquet, historien fortement engagé dans 
la défense des droits de l'homme. 

Autrement dit, il ne faut discuter qu'entre 
gens du même avis. 

Tout comme Roger Garaudy, l'abbé Pierre est 
désavoué par l'establishment unanime et, su- 
prême punition, se voit exclu du comité d'hon- 
neur de la LICRA ! 

Mais il ne sera pas, curieusement, poursuivi en 
justice comme bien d'autres. 

D'ailleurs, loin de faire repentance, il ne tarde 
pas à aggraver son cas. Dans une interview à Libé- 
ration, il déclare : « C'est un terrain sur lequel un 
organisme comme la LICRA déclare d'une manière 
absolument dogmatique qu'il s'agit d'un sujet sacré et 
que toute recherche historique (....) n'est pas néces- 
saire. Ils n'acceptent absolument pas le dialogue, con- 
trairement à Garaudy. Ils considèrent que le débat est 
clos. Qu 'oser le rouvrir n 'est pas possible. Par exemple 
sur la question des chambres à gaz, il est vraisem- 
blable que la totalité de celles projetées par les nazis 
n'ont pas été construites... mais mes amis de la 
LICRA me disent qu'avancer de telles affirmations, 
c'est contester la shoah. Ce n'est pas sérieux ». 

Séjournant après ces péripéties en Italie, il 
confie à la presse : « L'Eglise de France est ensuite 



202 Politiquement incorrect 

intervenue pour me faire taire sous la pression de 
la presse inspirée par un lobby sioniste internatio- 
nal » 

Un lobby sioniste international, mais où va-t-il 
chercher tout ça ? 

Le dernier épisode en date de la lutte de la 
LICRA contre les révisionnistes sera la mise en 
cause de Bruno Gollnisch, député européen FN, 
après que « sans nier les chambres à gaz homici- 
des », il ait déclaré en octobre 2004 qu'il fallait 
laisser les historiens en discuter et que « cette 
discussion devait être libre ». 

A cette occasion, Patrick Gaubert, président de 
la LICRA et lui aussi député européen, ful- 
minera : «Personne ne dit que c'est inacceptable, je 
trouve abject ce silence de tout le monde... La classe 
politique et les députés au Parlement européen sont 
en dessous de tout. (...) Ce qu'il a dit est pire que 
ce qu'avait dit Jean-Marie Le Pen et au Parlement 
européen cette fois, ni le Parti Populaire Européen, 
ni les Verts, ni les socialistes n'ont bougé ». 



Les noms de rue 



Contrairement à ce que l'on pourrait croire, ce 
sujet n'est nullement anecdotique. Nous sommes 
là dans le domaine du symbole, qui revêt une 
grande importance, la LICRA le sait parfaite- 
ment bien. 

Le nom donné à une rue est un nom qui passe 
à la postérité. Et certains noms ne doivent juste- 
ment pas passer à la postérité. 

La Ligue a donc toujours porté une grande 
attention a cette question, et nous verrons que 
le rejet absolu de Vichy a également trouvé à se 
manifester dans ce domaine. 

En avril 1972, Deauville décide d'inaugurer, 
dans un nouveau quartier, une rue du Maréchal 
Pétain. 

s 

Emotion à la LICA, qui laisse poindre la 
menace : « Nous nous refusons encore à croire que 
M. d'Ornano, maire de la "plage fleurie" se prê- 
terait à cette triste comédie au risque de provoquer 
de graves incidents et de compromettre sa saison ». 



204 Politiquement incorrect 

La LICA n'aura pas à mettre sa menace à 
exécution, car heureusement, trois numéros plus 
tard, le DDV annonce que la campagne qu'elle 
a déclenchée a porté ses fruits et que la muni- 
cipalité a renoncé à son projet. 

Par contre, en novembre de la même année, le 
DDV s'interroge: « A quand une rue Vincent 
Auriol ? ». Il faut dire que la mémoire de Vin- 
cent Auriol, ancien président de la Républi- 
que^, socialiste et membre d'honneur de la 
LICA, est spécialement chérie. 

Ce sera chose faite dès 1975. Daniel Benas- 
saya, conseiller de Paris et membre du comité 
central de la LICA, fait adopter par le conseil 
municipal le Boulevard Vincent Auriol, dans le 
XIII e arrondissement. 

Avant les municipales de 1977, la LICA 
demande aux candidats des engagements sur de 
futures rues Bernard Lecache et Jules Isaac à 
Paris. Jacques Chirac devient maire de la capi- 
tale, et la rue Bernard Lecache est inaugurée dès 
octobre 1979. Il y aura par la suite bien d'autres 
rues ou squares Bernard Lecache en France, 
spécialement dans les municipalités socialistes. 

A partir de 1992, l'intérêt porté aux noms de 
rues devient conflictuel. Il ne s'agit plus seule- 



205 La France LICRAtisée 

ment d'empêcher certaines créations inoppor- 
tunes, ou d'en réclamer d'autres, opportunes 
celles-là. La LICRA veut à présent débaptiser des 
lieux publics portant des noms non politi- 
quement corrects. 

Comme celui d'Alexis Carrel, médecin et 
biologiste français, prix Nobel de médecine en 
1912, dont François Mitterrand disait encore en 
juin 1992 : « Ce fut un des esprits les plus clair- 
voyants depuis un siècle et demi ». Le nom de ce 
grand savant, précurseur des greffes d'organes, 

s 

ayant fait l'essentiel de sa carrière aux Etats-Unis, 
va tout à coup faire couler beaucoup d'encre. 

Dans son ouvrage le plus célèbre, paru en 
1935, L'homme, cet inconnu, Alexis Carrel prô- 
nait une certaine forme d'eugénisme, ou 
sélection biologique, théorie alors très en vogue 
dans les pays anglo-saxons et en Europe du 
nord^. Sur cette base, on va faire de lui carré- 
ment le théoricien des chambres à gaz et déchaî- 
ner une cabale devant laquelle presque toutes les 
villes de France s'inclineront. 

Pourtant, durant ces mêmes années 30, en 
URSS, Maxime Gorki, l'un des fondateurs de la 
LICRA en 1927, proposait, lui, des expérimen- 
tations eugéniques sur « les ennemis de classe » du 



206 Politiquement incorrect 

régime, qualifiés d'« êtres de type inférieur, dégé- 
nérés physiquement et moralement ». 

Et en France même, en 1937, sous le Front 
populaire, était édité un timbre-poste représen- 
tant une mère portant son enfant avec le slogan : 
« Pour sauver la race ». 

Pour faire monter la pression, un livre est 
publié en 1992 par Lucien Bonnafé et Patrick 
Tort : L'homme cet inconnu ? Alexis Carrel, Jean-Marie 
Le Pen et les chambres à gaz. Les auteurs 
ne craignent apparemment ni les amalgames, ni 
les raccourcis. Mais il est vrai, précise le DDV, 
que c'est «pour briser le silence sur cette question 
et donner à comprendre (...) Avec cet ouvrage, il 
s'agit de cultiver la mémoire des "faits" afin que 
reste en éveil permanent la conscience humaine ». 

Dans ces conditions, il n'y a évidemment rien 
à dire... 

La campagne d'intimidation menée par la 
LICRA débute à Lyon, dont la faculté de méde- 
cine Alexis Carrel est contrainte, sous la pres- 
sion, de changer de nom. 

En 1993, c'est au tour de Strasbourg de faire 
passer à la trappe sa rue Alexis Carrel. 
Mais là, il faut dire que la municipalité 
socialiste, trop heureuse de complaire à la 



207 La France LICRAtisée 

LICRA, a pris les devants. Dorénavant, à la 
place, on trouve la rue Heidi Hautval, médecin 
psychiatre d'origine alsacienne, déportée à Aus- 
chwitz pour avoir pris la défense d'une famille 
juive. C'est le DDV qui nous l'apprend. 

La campagne nationale anti-Alexis Carrel se 
poursuit sur tout le territoire. Des villes se 
soumettent immédiatement, comme Limoges ou 
Lyon. Suivront Dunkerque, Tours. En 1994, pas 
moins de vingt villes françaises auront retiré ce 
nom honni de la circulation. 

Mais à Paris, la LICRA rencontre de la résis- 
tance. Réclamant en 1994 que la rue Alexis Car- 
rel, dans le xv e arrondissement, soit débaptisée, 
elle se heurte, à son grand étonnement et à sa grande 
fureur, à un refus ainsi motivé : 

« II ne lui apparaît pas [à la commission de 
dénomination des voies, ndla] opportun de dé- 
baptiser toutes les voies qui portent les noms de 
ceux qui, se fondant sur un raisonnement scien- 
tifique et sur la présomption d'une amélioration 
indéfinie de l'espèce humaine, ont vu dans l'eugé- 
nisme, en pleine vague de V idéologie du progrès, 
une suite logique de la sélection darwinienne, sans 
pressentir les conséquences dramatiques de V ap- 
plication radicale de leur thèse ». 



208 Politiquement incorrect 

Bien évidemment, la LICRA ne désarme pas 
et fait monter la pression. Une manifestation va 
solennellement se livrer à un simulacre de « dé- 
baptême » de la rue. 

Malgré les pressions, le maire de Paris, Jean 
Tibéri, n'a toujours pas cédé en 1997. C'est le 
maire suivant, le socialiste Bertrand Delanoë, 
grand ami de la LICRA, qui lui donne enfin 
satisfaction. Ce sera même une de ses premières 
décisions, puisqu'en date du 10 avril 2001, à 
peine élu, il annonce que la rue Alexis Carrel sera 
rebaptisée... rue Jean Pierre-Bloch, du nom de 
l'ancien président de la LICRA ! Coup double ! 

La nouvelle rue est inaugurée en grande 
pompe en mars 2003 devant un parterre de 
personnalités. Bertrand Delanoë déclare à cette 
occasion : « Nous vivons ce moment avec d'autant 
plus d'émotion qu'il traduit aussi la fin d'un 
outrage. Cette rue s'appelait Alexis Carrel. Alors 
nous revient à l'esprit le combat pour refuser le 
nom indigne qui rime avec eugénisme. Ensemble, 
avec la LICRA, la Ligue des Droits de l'Homme, 
le MRAP nous avons lutté pendant toutes ces 
années pour dénoncer l'inacceptable. 

Comment notre ville a-t-elle pu accueillir si 
longtemps sur ses murs ce scientifique antisémite, ce 



209 La France LICRAtisée 

promoteur d'une "aristocratie biologique" alors 
même que chaque semaine, résonnent devant des 
écoles parisiennes, les noms de jeunes juifs, frappés 
au cœur de leur enfance, partis pour un voyage sans 
espoir de retour ? 

Aujourd'hui, réunis rue Jean Pierre-Bloch, nous 
tournons cette page funeste pour en écrire une 
autre, placée sous le signe de l'honneur, du courage 
et de la droiture ». 

Mais il reste encore une poche de résistance : 
Compiègne. Le sénateur-maire UMP de Com- 
piègne, Philippe Marini, refuse longtemps de 
débaptiser sa rue Alexis Carrel et crée une com- 
mission à cet effet, espérant noyer le poisson. 
C'est mal connaître la LICRA et ses méthodes : 

Acte 1 : on dramatise à outrance : « C'est une 
ignominie à la limite du révisionnisme ! Je [Patrick 
Gaubert, président de la LICRA, ndla] l'ai dit au 
sénateur et je vais la dénoncer sur un plan moral et 
philosophique. Alexis Carrel n'est pas jugeable car il 
a déjà été jugé. Cette commission n'a pas lieu d'être ». 

Acte 2 : on va se plaindre en haut lieu : « La 
LICRA a officiellement demandé l'arbitrage de son 
président d'honneur, Jacques Chirac, dans son 
combat pour débaptiser la rue Alexis Carrel à 
cornpiègne. De même, le président de l'UMP 



210 Politiquement incorrect 

Alain Juppé, lui aussi membre du comité d'hon- 
neur, a été contacté il y a un peu plus de huit 
jours », indique le DDV de mars 2003. 

Sans parler bien sûr de la campagne de presse, 
venimeuse à souhait, qui accompagne toutes ces 
péripéties. 

Philippe Marini finit par céder, lui aussi, en 
septembre 2003 et par débaptiser cette fatidique 
rue Alexis Carrel. Mais, afin d'avoir quand 
même le dernier mot, il crée dans la foulée une 
Allée de l'ambulance du docteur Carrel. 

La LICRA fulmine et emploie les grands 
mots : «Personne n'a le droit de toucher à la 
République. Or à Compiègne, elle a été touchée ». 

Compiègne est désormais pour la LICRA la 
« capitale nationale des crypto-pétainistes ». 

En tout cas, toute la France, qui peut-être 
l'ignorait, sait à présent qui était Alexis Carrel. 

Il y aura aussi la rue Pierre-Drieu la Rochelle à 
Saint-Cyprien, dans les Pyrénées orientales, qui 
sera promptement débaptisée en 1992 après une 
campagne de la LICRA. Ce « collaborateur con- 
nu pour ses écrits antisémites » sera désormais 
remplacé par une valeur sûre, Jean Moulin. 

Exit également la pourtant modeste Impasse 
Maurras, à Sainte-Maxime dans le Var, après un 



211 La France LICRAtisée 

courrier courroucé de la LICRA au maire de la 
ville. 

La LICRA se mobilisera aussi en 1992 contre 
le projet d'une rue François-Coty à Montbazon, 
écrivant au maire de la ville pour dénoncer de 
façon très détaillée tout le parcours délictueux 
du parfumeur, qui fut aussi un homme politique 
« d'extrême droite » avant-guerre. Dans son 
courrier, la LICRA n'oubliera pas de fournir 
cette ultime information : « La Nouvelle Répu- 
blique du 12 mai 1990 précisait que lors de ses 
obsèques en 1934, son cercueil était entouré d'hom- 
mes qui faisaient le salut fasciste ». 

L'affaire de la Mort aux juifs n'a, pour une fois, 
rien à voir avec Vichy, mais est assez cocasse : il 
s'agit ou, plutôt, s'agissait d'un lieu-dit dans le 
Loiret, appelé ainsi depuis la nuit des temps. La 
LICA, prévenue par un acquéreur de résidence 
secondaire, s'en émeut dès 1977. Le conseil 
municipal juge cependant inutile de changer la 
dénomination du hameau. 

Mais en 1992, les temps ont changé, la LICRA 
s'est considérablement renforcée, et elle n'a pas 
oublié. Elle demande à nouveau le changement de 

Ce nom qui « représente une insulte aux victimes du 
nazisme », pour poursuivre, sans rire : « J'ai [le 



212 Politiquement incorrect 

président local de la LICRA, ndla] alerté les ins- 
tances nationales afin qu'on envisage que l'affaire 
aille en Conseil d'Etat. Il faut que la grande Histoire 
balaye la petite histoire locale ». 
Dieu merci, l'affaire n'ira pas en Conseil 

s 

d'Etat. En 1993, la mairie, finalement vaincue, 
elle aussi, transforme sa Mort aux juifs en Route 
de Louzouer, nettement moins conflictuelle. 



Vous avez dit racisme ? 



Chalom Aleikhem, écrivain yiddish du début 
du XX e siècle, met en scène dans un de ses livres 
un personnage qui veut se rendre en France et 
qui est mis en garde par ses amis : «Attention, 
vous risquez gros. Là-bas, on a arrêté un capitaine 
juif et la moitié de la France est contre lui ». La réponse 
de l'écrivain par le biais de son person- 
nage est la suivante : « Je veux sans plus attendre 
aller dans ce pays où un juif peut être capitaine et 
où il n'a que la moitié des gens contre lui ! ». 

Cette petite histoire est rapportée dans Le 
Droit de Vivre de mai 1985. 

La France est-elle un pays raciste et antisé- 
mite ? On pourrait très facilement le croire à la 
lecture du DDV, année après année. 

Pourtant, en octobre 1978, le DDV annonce 
le décès du professeur Bernard Halpern en des 
termes qui semblent prouver - même si tel 
n'était pas le but de l'article - que malgré son 
antisémisme et son racisme supposé et perpé- 



214 Politiquement incorrect 

tuellement dénoncés, la France était, et reste 
encore, un refuge et un lieu permettant de vivre 
normalement. Bien mieux, en tout cas, que dans 
le paradis communiste : 

« Notre ami, le professeur Bernard Halpern est 
mort. Il nous avait fait l'honneur de présider un 
de nos derniers dîners de la LICA. 

Né le 2 novembre 1904 en Russie, toute sa vie 
fut jalonnée d'épreuves, de miracles et de triomphes. 
Dans sa jeunesse en Ukraine, il connut la misère 
et les persécutions. 

Par miracle, il échappe à la déportation après la 
révolution soviétique et se retrouve en France où, 
doué de dons exceptionnels, il réussit à faire sa 
médecine en gagnant sa vie comme garçon de 
laboratoire. 

Directeur de recherches en 1948, il obtient en 
1961 la chaire de médecine expérimentale au 
Collège de France et en 1964, il est responsable du 
service d'immuno- allergies de l'hôpital Broussais et 
membre de l'Académie des Sciences. 

Commandeur de la Légion d'Honneur, le pro- 
fesseur Halpern a été l'un des maîtres de l'aller go- 
logie ». 

Dans sa sécheresse, cette chronique nécrolo- 
gique est cependant très révélatrice du parcours 



215 La France LICRAtisée 

que peut réussir un juif ukrainien misérable 
réfugié dans un pays qui n'a pas à rougir de 
l'accueil qu'il réserve aux étrangers, malgré ce 
qu'on essaie de lui faire croire. 

Tout au long de son existence, la LICRA ne 
va pourtant pas cesser de se plaindre d'une 
montée constante, d'après elle, de ces fléaux 
en France, entretenant de la sorte un climat qui 
offre de nombreux avantages, dont celui de se 
placer elle-même au centre de l'intérêt ainsi 
suscité, de réclamer à cor et à cris l'arsenal juri- 
dique antiraciste que l'on connaît. Et d'interdire 
toute critique à l'égard d'Israël, peuplé par 
définition de victimes du racisme. 

En mai 1969, déjà, Le Droit de Vivre titre : 
« Contre la montée du racisme, la vraie démocratie 
reste le meilleur des remparts - si le pogrom n'est 
pas à la porte, les excès de la politique commandent 
la vigilance ». 

Pour lutter contre le racisme, il faut prendre 
exemple, une fois encore, sur la Révolution fran- 
çaise, car, indique le chroniqueur : « C'est la 
Révolution française qui a mis le racisme hors la 
loi, qui a déclaré d'utilité publique cette lutte 
contre le racisme tellement toujours à recommencer 
que nous ne nous voyons pas aujourd'hui dispensés, 



216 Politiquement incorrect 

bien au contraire, de la poursuivre. Dussé-je me 
faire traiter de "passéisme": je tiens que cette révo- 
lution doit être encore pour nous, politiquement, la loi 
et les prophètes ». 

L'année 1971 est consacrée par l'ONU à la 
lutte contre la discrimination sous toutes ses 
formes. Vaste programme ! 

La LICA y participe en organisant à Paris en 
novembre, en collaboration avec l'UNESCO, 
une manifestation à haut niveau qui verra deux 
cents personnalités appartenant au monde politi- 
que et diplomatique, au Barreau, aux lettres et 
aux sciences, à la haute finance, au commerce et 
à l'industrie, décider d'intensifier la lutte anti- 
raciste. 

Pourtant, ni le racisme, ni l'antisémitisme ne 
semblent vraiment à l'ordre du jour dans la France 
de 1971. Cette année-là paraît le Guide juif de 
France. Préfacé par René Cassin, c'est un ouvrage 
officiel très complet sur les divers aspects de la vie 
juive dans notre pays, et même dans le monde. 

Le Guide consacre justement un chapitre inti- 
tulé «Mutations dans la psychologie du juif» à 
l'absence de problèmes de cet ordre en France : 

«D'autre part, dans la société française actuelle, 
le juif peut s'accepter comme juif et cela est pour 



217 La France LICRAtisée 

lui un fait intégré dans l'existence normale d'un 
homme normal s' admettant différent et semblable 
(...) Il ne s'agit pas d'un phénomène mineur ou de 
cas isolés, mais d'un changement radical dans les 
attitudes. 

Si, avant guerre, on avait demandé à cent juifs 
pris au hasard :" Êtes -vous juif ?": on aurait sans 
doute obtenu plus de deux tiers de réponses embar- 
rassées ou de "non-réponses". 

Une enquête sur les étudiants juifs à Paris donne 
plus de 90% de "oui": étonnés que la question se 
pose, sans qu'il y ait de différence sensible entre 
filles et garçons, "européens" ou "nord-africains" » 
[c'est-à-dire askhénazes ou sépharades, ndla]. 

En 1975, Jean Pierre-Bloch dénonce la « recru- 
descence du racisme », à l'issue d'un entretien avec 
le ministre de l'Intérieur de l'époque, Michel 
Poniatowski. 

En 1978, la dramatisation monte d'un cran. 
En février, sous l'énorme titre de sa première 
page, «VAINCRE L'ANTISÉMITISME à n'im- 
porte quel prix pour éviter le pire », le DDV 
dénonce le regain d'antisémitisme qu'il aperçoit 
à l'œuvre en France, et menace : 

« Est-ce que l'antisémitisme auquel nous assistons 
va persister ? (...) La LICA devra-t-elle se faire 



218 Politiquement incorrect 

justice elle-même comme des militants la rendaient 
avant la dernière guerre en rendant les coups que 
leur donnaient les ligues fascistes ? Pour les antira- 
cistes, la question est simple : ou les pouvoirs 
publics réagissent rapidement et efficacement à la 
vague antisémite qui n'est pas étrangère à l'impu- 
nité dont les criminels de guerre nazis ont bénéficié 
et à la mansuétude qui s'est manifestée à l'égard des 
collaborateurs ou bien la LICA demandera à ses 
militants de répondre comme il convient à ceux 
qui n'ont pas compris que les temps ont changé et 
que le crime ne paie plus ». 

Quelques mois plus tard, sous le titre « Néo- 
nazisme et antisémitisme », on peut lire dans le 
DDV ces propos très virulents : 

« On assiste actuellement au développement d'un 
plan concerté du néo-nazisme international, ten- 
dant à recréer un climat de haine raciale dont 
l'aboutissement serait la mise en condition de l'opi- 
nion pour instaurer un système politique s'inspirant 
des thèses du national- socialisme ». 

Pas moins ! Et le journal poursuit en ces ter- 
mes : 

« On constate une recrudescence de l'antisémi- 
tisme avec son cortège d'attentats, de graffitis, de 
profanations et de menaces de mort. On se trouve 



219 La France LICRAtisée 

aujourd'hui plongé dans une atmosphère raciste 
aussi dangereuse que celle que la France a connue 
au moment de l'affaire Dreyfus avec la "Ligue 
antisémitique" et à l'époque des ligues factieuses des 
années 32 à 39, sans parler de la période de 
l'occupation allemande ». 

Le DDV conclut une nouvelle fois par des 
menaces : « S'il devait y avoir défaillance de la 
part des autorités, la LICA ferait appel à ses mili- 
tants et aux démocrates pour qu'ils se constituent 
en groupes d'autodéfense. Cela rappellera des souve- 
nirs aux anciens qui se sont battus avant la guerre 
contre les ligues fascistes ». 

Pourtant, en mai de cette même année (1978) 
Le Droit de Vivre annonce avec beaucoup de 
satisfaction : «Avec l'élection à la présidence de 
l'Assemblée nationale de Jacques Chaban-Delmas, 
député-maire de Bordeaux et président d'honneur 
de la fédération girondine, la LICA est particuliè- 
rement bien représentée au Parlement, car au 
Palais du Luxembourg, le président du Sénat, 
Alain Poher, est également un membre actif de la 
Ligue ». 

La LICA peut donc difficilement se plaindre 
de manquer d'interlocuteurs et d'appuis à haut 
niveau. 



220 Politiquement incorrect 

Cette obsession du racisme omniprésent va se 
nicher dans les endroits les plus inattendus : en 
1979, c'est au tour de la biscuiterie Lu-Brun 
d'être clouée au pilori. Elle commercialise en effet 
un gâteau enrobé de cacao nommé « Papou », 
accompagné du slogan « Papou, c 'est bon des deux 
côtés ». 

Un slogan pourtant bien anodin. Pas pour Le 
Droit de Vivre, qui commente aigrement : « La 
formule nous paraît de fort mauvais goût. Elle recèle 
un danger de racisme évident surtout si l'on sait que 
cette publicité s 'adresse aux enfants ». 

La LICRA crée « SOS racisme » en octobre 
1982. Ce nom, qui sera repris plus tard par 
d'autres antiracistes, est en réalité une création 
de la Ligue qui espère ainsi toucher un maxi- 
mum de jeunes, cibles prioritaires de cette nou- 
velle structure présentée en ces termes : « SOS 
racisme est né de la volonté d'un groupe de jeunes, 
copains de milieux et de couleurs différents, de ne 
pas rester sans réagir face à la vague montante du 
racisme qui n 'épargne plus la jeunesse elle-même. 

C'est à l'opinion publique, à tous et à chacun, 
et plus particulièrement aux autres jeunes que nous 
voulons nous adresser, en dépassant le nombre de 
ceux qui sont déjà mobilisés ». 



22 1 La France LICRAtisée 

C'est que la gauche vient d'arriver au pouvoir 
et qu'il s'agit à présent de mettre les bouchées 
doubles pour enrôler les jeunes sous la bannière 
de l'antiracisme en exploitant à fond, à la fois 
leur générosité naturelle et leur vaste ignorance 
de l'histoire. 

La grande force de SOS racisme sera sa per- 
manence juridique hebdomadaire et gratuite. On 
y guide ceux qui souhaitent engager une action 
judiciaire et on y délivre également d'autres con- 
seils, «particulièrement en ce qui concerne les 
cartes de séjour ou de travail des immigrés ». 

L'avocate responsable de SOS racisme pourra 
affirmer : « La LICRA a ainsi mis en place un 
véritable arsenal extrêmement efficace pour une 
répression rapide des délits racistes ». 

Jamais la pression ne se relâche. En 1991, le 
président de la LICRA lance, à l'ouverture de la 
convention nationale : «Aujourd'hui, nous avons le 
droit 

d'être inquiets. J'ai l'impression d'être en 
1934 ou 38. On me dit que j'exagère, comme on 
me le disait alors ». 

En novembre 1992, lors d'un meeting orga- 
nisé pour commémorer la Nuit de cristal, on 
peut entendre : « L'Europe du fascisme progresse. 
Nous sommes en 1938. Hitler avait commencé par 



222 Politiquement incorrect 

faire matraquer les journalistes, comme viennent de 
le faire les hommes de main de Le Pen. Les hom- 
mes qui entourent Le Pen sont des nazis ». 

En décembre 1992 : « Dans pratiquement tous 
les pays d'Europe, la démocratie est menacée par la 
montée en puissance du racisme, de l'antisémitisme 
et de la xénophobie. Jamais la haine de l'autre n'a 
été aussi forte et l'intolérance raciale aussi impla- 
cable ». 

Ailleurs, on parle de «L'Europe qui s'embrase et 
laisse craindre un déferlement raciste ». 

Vrai ou faux, cela donne en tout cas à la 
LICRA l'occasion d'organiser en février 1993, 
avec ses associés habituels, une manifestation 
monstre à Paris « contre le racisme ». Cette ma- 
nifestation sera très largement relayée en province. 

La date n'a pas été choisie au hasard, car rien 
n'est laissé au hasard, à la LICRA : ce sera le 6 
février, date anniversaire de la « tentative de coup 
d'Etat anti-républicain fomenté par l'extrême 
droite française le 6 février 1934 ». 

La tentative de coup d'Etat est relatée en ces 
termes par Le Droit de Vivre: « Une manifes- 
tation de ligues d'anciens combattants, Croix de 
feu et Camelots du Roi réunis place de la Concorde 
pour protester contre le parlementarisme, avait 



223 La France LICRAtisée 

tourné au drame : le service d'ordre, débordé, avait 
tiré sur la foule, faisant seize morts et une centaine 
de blessés (...) Cet événement, ressenti comme le 
signe d'une grave menace fasciste, a été considéré 
comme le ferment du Front populaire ». 

C'est là une vision pour le moins réductrice de 
l'événement, survenu dans la foulée de l'affaire 
Stavisky^ et de l'énorme escroquerie montée 
grâce aux relations parlementaires du financier 
véreux, dans un contexte de crise économique 
aiguë, suite au krach de 1929. La manifestation 
du 6 février a dégénéré, c'est vrai, mais les 
manifestants débordaient très largement les rangs 
de la droite ou de l'extrême droite. L'Union 
nationale des combattants et la Fédération des 
contribuables y participaient, et l'Humanité avait 
annoncé le matin même une manifestation à 
part sur le même thème. 

Cette journée du 6 février 1934 sera en tout 
cas le prétexte à la réconciliation des commu- 
nistes et des autres partis de gauche, brouillés 
depuis la scission de Tours en 1920. Le 12 fé- 
vrier, lors d'un défilé, ils s'unissent face à 
l'ennemi commun : le « fascisme ». 

Mais revenons à la manifestation unitaire du 
6 février 1993. Insistant dans son compte-rendu 



224 Politiquement incorrect 

sur la forte mobilisation de la province, le DDV 
signale que la Fédération de Bordeaux a, pour se 
rendre à Paris, « obtenu de sa mairie une rame de 
TGV empruntée par quelque 800 Bordelais ». 

Il faut reconnaître que rares sont les associa- 
tions qui jouissent de la part des pouvoirs pu- 
blics - et à fortiori dans un pays autant suspecté 
de racisme - de pareils privilèges... 

En 2001, sous le titre «Sondage inquiétant», 
le DDV s'alarme : 

« Le sondage de la Commission nationale consul- 
tative des Droits de l'Homme recense 60% de Fran- 
çais estimant qu'il y a trop de personnes d'origine 
étrangère. Le sondage appuie les conclusions du rap- 
port annuel qui constate un durcissement des opinions 
à l'égard des questions liées à l'immigration. On re- 
marque également que le nombre de violences racistes 
et antisémites a augmenté de façon importante ». 

Le DDV conclut, avec une logique imparable : 

« La lutte contre le racisme est donc plus que 
jamais une priorité ». 



Une pluie de décorations 

Chaque numéro du Droit de Vivre comporte 
depuis l'origine un Carnet où sont annoncées, 



225 La France LICRAtisée 

outre les naissances, mariages, décès, etc, toutes 
les distinctions et décorations attribuées aux 
membres de la LICRA. Elles s'accompagnent à 
chaque fois des chaudes félicitations du journal. 
Tout au long des années, alors qu'à en croire 
les pages principales du DDV, racisme et anti- 
sémitisme sévissaient en France, une véritable 
pluie de décorations s'est pourtant abattue sur 
les membres de la LICRA : Légion d'Honneur à 
tous les grades, Palmes académiques, Ordre des 
Arts et des Lettres, Mérite national, etc, on 
trouve dans ce Carnet un catalogue complet de 

s 

toutes les distinctions imaginées par l'Etat fran- 
çais pour honorer ses membres les plus émi- 
nents. Distinctions dont il n'a jamais été avare 
envers la LICRA, c'est le moins que l'on puisse 
dire. Les membres de la famille du président 
Pierre-Bloch n'étant bien sûr pas oubliés. Ainsi, 
sa femme Gaby et son fils Jean-Pierre auront 
droit, eux aussi, à leur Légion d'honneur. 

N'est-ce pas extraordinaire, dans un pays aussi 
raciste ? 



L'arsenal des législations antiracistes 
se met en place 



« II s'agit de voter pour les antiracistes, de ne 
voter et faire voter que pour eux. Il s'agit de voter et 
faire voter contre tous les autres ! » 

Tel est le mot d'ordre de la LICA apolitique 
aux électeurs lors des législatives de 1967. 

A peine élus, tous les députés reçoivent un 
questionnaire leur demandant notamment : 
« Croyez-vous que les lois actuelles soient suffisantes 
pour endiguer la résurgence du racisme et de l'anti- 
sémitisme dans notre pays ? » 

Nous sommes en 1967, et que les Français 
aient à cette époque d'autres préoccupations 
qu'un supposé racisme ou antisémitisme impor- 
te peu ! 

L'essentiel n'est pas là. L'essentiel est de 
contribuer à créer un climat dont l'exploitation 
permettra de tracer le chemin du pouvoir pour 
la gauche, même si cet objectif apparaît encore 
lointain. 



228 Politiquement incorrect 

Pour y parvenir, il faudra travailler les esprits 
et arriver à accoucher, au forceps s'il le faut, 
d'une France nouvelle. Une France qui ne 
pourra cependant être vraiment nouvelle que si 
sa population subit des modifications sensibles. 

L'immigration de peuplement, essentiellement 
afro-maghrébine, sera donc à partir de ce mo- 
ment-là systématiquement soutenue et encoura- 
gée. 

Il était inévitable que cette pression immi- 
grationniste rencontre des oppositions. Notam- 
ment de la part de la droite, par nature plus 
soucieuse d'identité et de cohésion nationales^. 
Ou du moins, dont on s'attendrait à ce qu'elle 
le soit. 

Dès le départ, ces oppositions vont donc être 
délégitimées et même criminalisées. Toutes les 
questions sensibles vont sortir du champ 
politique, trop dangereux car il autorise le débat, 
pour entrer dans la sphère morale, forteresse à 
peu près inexpugnable, dont la LICRA se fera 
gardienne vigilante. 

Seront désormais stigmatisés sous le vocable de 
racistes tous les opposants à ce qui deviendra très 
vite la pensée unique. Faute d'applaudir sans 
réserve à la multiculturalité obligatoire et au métis- 



229 La France LICRAtisée 

sage^ - nouvel horizon radieux offert aux masses 
- on sera lynché et exclu de la vie publique. 

Pour punir et dissuader les esprits forts, rien 
de plus efficace qu'un arsenal juridique renforcé. 

Celui de la France va vite devenir, en matière 
d'antiracisme, l'un des plus répressifs qui soient 
au monde. 

Il ouvrira toutes grandes à la LICRA les portes 
du combat judiciaire, et très vite, dans la foulée, 
politique. 

La loi antiraciste de 1972 

1972 est une année faste pour la LICA et la 
première année noire pour la liberté de pensée et 
d'expression en France, car cette loi va offrir à la 
Ligue un levier extrêmement puissant dont elle 
se servira sans relâche au cours des décennies 
suivantes. 

Cette législation antiraciste, la LICA la récla- 
mait depuis l'origine. Elle avait déjà obtenu en 
avril 1939 la promulgation du décret-loi Mar- 
chandeau, qui punissait les injures et diffama- 
tions racistes. Cependant, seules les personnes 
directement visées par les faits avaient la possi- 
bilité de déclencher l'action publique. Les asso- 
ciations en tant que telles ne le pouvaient pas. 



230 Politiquement incorrect 

La LIC A souhaitait beaucoup mieux. Elle va 
l'obtenir grâce à la ténacité de deux membres de 
son comité central, les sénateurs Gaston Mon- 
nerville, radical de gauche, et Pierre Giraud, 
socialiste, qui présenteront, défendront et feront 
voter la loi antiraciste. L'action de Gaston Mon- 
nerville, en particulier, membre de la première 
heure de la LIC A, et président du Sénat de 1948 
à 1968, sera décisive en la matière. 

Dans ses Mémoires, Jean Pierre-Bloch notera : 
« Juillet 1972 marque une date inoubliable dans 
l'histoire du combat antiraciste mené par la LIC A. 
Le projet de loi réprimant le racisme est voté à 
l'unanimité par le parlement français. La nouvelle 
loi réclamée par la LICA depuis sa création, et 
dont j'avais élaboré le texte avec Gaston Monner- 
ville, avant la dernière guerre, alors que nous 
siégions tous les deux à la chambre des députés... ». 

C'est donc assez improprement que la loi de 
1972 est appelée loi Pleven, du nom du garde 
des sceaux de l'époque. Le gouvernement ne 
souhaitait pas cette loi, considérant que la 
législation française était suffisante et que la 
Constitution assurait correctement l'égalité des 
droits et des devoirs de tous les citoyens. Il 
existait déjà de toute manière la loi de juillet 



23 1 La France LICRAtisée 

1881, qui réglementait la liberté d'expression 
dans la presse et en sanctionnait les abus. Le 
gouvernement ne prendra donc pas l'initiative de 
la loi, mais il laissera faire. 

Il est vrai que l'année précédente, en 1971, il 
y avait eu l'affaire de la grâce accordée par Geor- 
ges Pompidou au milicien Paul Touvier, grâce 
qui avait déchaîné les foudres de la LICA. Un 
rééquilibrage s'imposait-il ? 

La loi de 1972 crée un délit nouveau, celui de 
provocation au racisme : « Ceux qui, par l'un des 
moyens énumérés à l'article 23 (discours, cris, 
menaces, écrits, imprimés, affiches ou autres) au- 
ront provoqué à la discrimination, à la haine ou 
à la violence à l'égard d'une personne ou d'un 
groupe de personnes à raison de leur origine ou de 
leur appartenance, ou de leur non-appartenance à 
une ethnie, une race ou une religion déterminée, 
seront punis d'un emprisonnement d'un mois à un 
an et d'une amende de 2 000 à 300 000 FF ou 
à l'une de ces deux peines seulement ». 

La loi autorise par ailleurs les organisations 
antiracistes ayant plus de cinq ans d'existence 
- ce qui est le cas de la LICA, évidemment - à 
se porter partie civile. Elles pourront désormais 
prendre l'initiative des poursuites. 



232 Politiquement incorrect 

La LICA reconnaît modestement à son con- 
grès de décembre 1972 : « Le vote de cette loi 
consacre l'aboutissement de quarante-cinq années 
de lutte conduite à cette fin par l'organisation, ses 
militants, ses amis politiques et ses juristes ». 

Juristes au premier rang desquels figure, il 
convient de le noter, Gérard Rosenthal, ancien 
avocat de Léon Trotski. 

Lors de ce même congrès, Gaston Monnerville, 
sénateur et rapporteur de la loi songe déjà à 
l'avenir : « La loi nouvelle est une arme puissante 
dans nos mains, nous devons veiller à en faire bon 
usage afin que soit respectée la personne humaine. 
Nous devons également user de notre influence pour 
qu'elle devienne la loi du monde car elle a le mérite 
de favoriser la coopération internationale ». 

Grâce à cette loi, la LICA peut désormais 
poursuivre tous ceux qu'elle désigne comme 
racistes. Elle jouit du privilège exhorbitant de 
déclarer qui est raciste et qui ne l'est pas. Qui 
est antisémite et qui ne l'est pas. Elle peut distri- 
buer à sa guise les bons et les mauvais points. 

La liberté d'expression des opposants à l'immi- 
gration massive qui démarre à peu près à ce 
moment-là, va se trouver considérablement res- 
treinte dans la bonne vieille tradition des métho- 



233 La France LICRAtisée 

des de la gauche qui consistent à exclure et à 
diaboliser l'adversaire au lieu de débattre avec lui. 

Cette loi marque véritablement une nouvelle 
étape dans la montée en puissance de la Ligue, 
qui ne se privera pas désormais d'user et d'abuser 
de son nouveau droit de se porter partie civile. 
Sous le titre « Conseil juridique », elle annonce 
dès octobre 1972 : « Tous les adhérents et amis de 
la LICA qui ont éprouvé un acte relevant de la 
discrimination raciale seront heureux d'apprendre 
que, renouant avec une vieille tradition, la LICA 
assurera désormais une permanence juridique (...) 
Les conseils de nos juristes seront donnés tous les 
samedis après-midi de 14h à 16h dans nos bu- 
reaux, 40 rue de Paradis à Paris 10 ». 

D'innombrables procès vont suivre au fil des 
années. Il vaudra mieux désormais éviter d'émet- 
tre la moindre critique, même sur le mode 
humoristique. 

Cela va aller très loin et finir par instaurer un 
véritable filtre idéologique auquel les journalistes 
en tout premier lieu seront priés de se soumettre. 
En témoigne un procès-type qui se déroule à 
Marseille en 1976 et que Le Droit de Vivre relate 
sous le titre : « L 'incitation à la haine raciale, 
même involontaire est condamnable ». 



234 Politiquement incorrect 

Cette fois, la LICA poursuit en justice des 
journalistes « dont on connaissait les sentiments 
antiracistes, mais qui, dans une envolée littéraire, 
avaient écrit un article qui pouvait inciter à la 
haine raciale ». Un article, soit dit en passant, sur 
la vie pittoresque du port de Marseille et sur la cuisine 
locale. « Pour éviter aux journalistes le 
désagrément d'être accusés d'incitation à la haine 
raciale », poursuit Le Droit de Vivre, « la LICA 
a déposé une plainte permettant aux parties en 
présence de s'expliquer et ainsi de dissiper toute 
équivoque sur l'interprétation de l'article afin que 
celui-ci n'apporte pas d'eau au moulin des racistes. 

Les plaidoiries de nos avocats firent donc modé- 
rées mais sans tendresse à l'égard des accusés dont 
les écrits ont dépassé la pensée ». 

Si cet exemple n'est pas une illustration par- 
faite de la police de la pensée que dénoncera 
plus tard l'historienne Annie Kriegel, il y ressem- 
ble très fortement. Il montre en tout cas quelle 
méthode est employée pour imposer la pensée 
unique. Des procès, encore des procès, toujours 
des procès. Le moyen le plus sûr pour intimider 
et faire plier. 

Le problème, c'est qu'aux yeux de la LICA, les 
« racistes » ne sont généralement pas suffisam- 



235 La France LICRAtisée 

ment condamnés. En tout cas, pas à la hauteur 
de l'immensité de leur forfait. 

C'est pourquoi le DDV lance sur une page 
entière, en 1978, « Un appel à la conscience des 
juges chargés de condamner des actes racistes ». 

Car enfin, leur responsabilité est lourde : con- 
damner légèrement, ou pire, relaxer des actes 
racistes, c'est se rendre coupable de complicité 
dans la montée du racisme et de l'intolérance. 
Telle est du moins l'opinion de la LICA qui, 
partant d'une récente agression contre un Algé- 
rien, met clairement en garde la justice : 

« Souhaitons que le tribunal de Toulouse par le 
jugement qu'il prononcera désarmera les racistes 
qui, dépassant le stade de la menace et des injures, 
passent maintenant à l'offensive meurtrière sachant 
qu'ils ne risquent pas de graves peines s'ils se réfè- 
rent à la clémence scandaleuse de certains tribu- 
naux appelés à juger d'affaires similaires (...) 

Le tribunal de cette ville porte aujourd'hui une 
lourde responsabilité : celle de condamner les trois 
racistes inculpés à des peines exemplaires ou de leur 
trouver des circonstances atténuantes. Selon le choix 
qu'ils feront, leur jugement sera dissuasif ou il sera 
un encouragement à renouveler de tels actes barba- 
res ». 



236 Politiquement incorrect 

En 1979, lors de son congrès, la LICRA se 
plaint comme à l'accoutumée du climat d'anti- 
sémitisme régnant en France et avertit : « Contre 
ce renouveau de l'antisémitisme, l'Etat dispose 
d'une législation appropriée. La LICRA exige qu'il 
en soit fait une application rigoureuse et que dans 
ce but une action plus efficace soit obtenue 
des services de police et de répression. La LICRA sera 
partie prenante devant les tribunaux et, s'il le faut, 
dans la rue pour que soit brisée dans l'œuf toute 
tentative de discrimination raciale ». 

Elle tiendra largement parole. 

La Ligue fait preuve d'une extraordinaire 
pugnacité dans les procès qu'elle intente : lors- 
qu'elle se voit déboutée une première fois, puis 
une seconde fois en appel, elle n'hésite pas à se 
tourner vers la Cour de cassation. Même lorsque 
l'affaire est, somme toute, mineure. C'est le cas 
à Dijon en 1983. Elle poursuit Pierre Jaboulet- 
Verchère, directeur de Beaune -Information pour 
incitation à la haine raciale en raison d'un tract 
« Je suis un arabe heureux » vantant les « avanta- 
ges dont bénéficieraient les maghrébins en 
France. Le tribunal correctionnel relaxe le pré- 
venu. Espérant un « jugement plus éclairé » en 
appel, la LICRA perd cependant une seconde 



237 La France LICRAtisée 

fois. Qu'à cela ne tienne. « Après avoir pris con- 
seil auprès de ses avocats, la LICRA de la Côte 
d'Or a résolu de se tourner vers la Cour de cassa- 
tion pour que l'affaire dont elle avait saisi la justice 
soit rejugée », indique Le Droit de Vivre en 
septembre 1983. 

En 1985, le DDV se félicite en ces termes : 
« Poursuivi par la LICRA à Marseille - Le seul élu 
du Front national condamné pour racisme ». Quel- 
ques heures après sa victoire aux cantonales de 
Marseille, l'unique conseiller général du FN, avo- 
cat de son état, est en effet condamné pour incita- 
tion à la haine raciale. Son crime est d'avoir écrit 
dans un tract : « Le centre ville ne peut plus sup- 
porter le trop grand nombre de nord- africains. Cer- 
tains quartiers de notre cité sont, aux dires mêmes 
de la police, invivables pour les Français, le seuil de 
tolérance étant très largement dépassé ». 

Un procès exemplaire du racisme, commente 
un journal local. 

La LICRA parvient même à faire condamner 
des expressions, telles que : internationale juive, 
condamnée à Rouen et à Paris, ou parti cosmo- 
polite, condamné à Paris. 

A Paris, le terme (X internationale juive sera 
considéré comme une provocation raciste, et 



238 Politiquement incorrect 

non comme une diffamation raciste. Le tribunal 
estimera que la provocation est caractérisée 
lorsque « le texte, incriminé tend à inciter le public 
à la discrimination, à la haine ou à la violence 
envers une personne ou un groupe de personnes 
déterminé », mais que la diffamation réclame 
quant à elle « l'imputation ou l'allégation d'un 
fait précis et déterminé, susceptible de faire l'objet 
d'une preuve et d'un débat contradictoire ». 

Arrêtons-nous un instant sur un colloque que 
la LICRA organise en juillet 1992 pour fêter les 
20 ans de la loi de 1972, sur le thème : « Les 
journalistes et la lutte contre le racisme et l'antisé- 
mitisme ». Les journalistes étant considérés com- 
me des partenaires à part entière de la lutte 
antiraciste, sauf ceux de la presse dite d'extrême 
droite, est-il besoin de le préciser ? 

La LICRA le précise elle-même de toute 
façon, dès l'ouverture du colloque, et balise en 
ces termes les territoires respectifs : 

«Mais à la vérité, il n'existe pas d'antagonisme 
entre les médias et les associations de lutte contre le 
racisme, A l'exception bien sûr de ses marges, je 
pense ici à la presse d'extrême droite. Au nom 
d'une éthique à caractère universel, les uns s'em- 
ploient à informer et les autres à assister les victi- 



239 La France LICRAtisée 

mes, à faire cesser les discours d'exclusion et de 
violence. Ensemble, ils débusquent, ils dénoncent 
auprès de l'opinion et des pouvoirs publics, non 
sans risques, non sans bavures, non sans courage » 

Paul Amar, journaliste à FR 3, anime durant 
le colloque une table ronde sur La liberté et la 
responsabilité des médias. Il y évoque ses débuts 
en ces termes : 

« Il y a vingt et un ans, lors de mes premiers 
pas dans ce très beau métier... j'abordais les années 
70 avec l'enthousiasme d'un jeune journaliste prêt 
à couvrir les guerres en Asie du sud-est, l'affaire du 
Watergate, la conquête pour le pouvoir en France, 
les relations difficiles entre le parti communiste et 
le parti socialiste, entre Giscard et Chirac. Il n'était 
jamais question de racisme, en tout cas pas dans le 
cadre de mon métier. J'abordais les années 80 avec 
l'intérêt que pouvait porter un journaliste moins 
jeune à l'arrivée de la gauche au pouvoir. Allait- 
elle réussir ? Comment allaient se comporter les 
communistes ? Que devenait Giscard, etc ? 

Du racisme, il n'en était toujours pas question, 
jusqu'au moment où un certain Jean-Marie Le Pen 
est apparu ou plutôt réapparu ». 

La citation est un peu longue, mais elle per- 
met d'apprendre, de la bouche même d'un 



240 Politiquement incorrect 

journaliste de télévision qui se qualifie lui-même 
de témoin de son temps, une chose stupéfiante : 
selon lui, il n'y avait pas de racisme en France 
dans les années 70 et 80. 

Pour quelle raison une loi antiraciste était-elle 
donc si nécessaire en 1972 ? 

A ce colloque décidément très instructif, une 
angoissante question se pose : doit-on donner la 

s 

parole aux pestiférés de l'extrême droite ? Evi- 
demment, s'ils en profitaient pour se ridiculiser, 
on pourrait la leur laisser, mais l'ennui, c'est 
qu'ils arrivent à convaincre. Donc, danger. 
Démocratie, liberté d'expression ? Pas quand il 
s'agit de ces ennemis du genre humain. On 
pourra donc entendre ce petit florilège très évo- 
cateur des contradictions qui en découlent : 

Paul Amar : « Je veux bien être, comme jour- 
naliste, le spectateur des années qui passent pour en 
rendre compte de la manière la plus fidèle qui soit, 
la plus honnête qui soit, mais lorsqu'il s'agit de 
réhabiliter les années passées, années de haine, d'in- 
tolérance et de racisme, je choisis d'être un u spec- 
tateur engagé" pour reprendre le mot de Raymond 
Aron ». 

Yvan Levaï : « L'enfer est pavé de bonnes inten- 
tions... Je me disais alors : il faut montrer au 



241 La France LICRAtisée 

public que Faurisson est un petit bonhomme, un 
nihiliste, certainement pas un universitaire. On 
entendra sa voix et il sera démasqué. Je me suis 
trompé. On ne montre pas l'ignoble. Il faut faire 
le tri. Du reste, toute l'information est triée, hié- 
rarchisée. Il y a des choses qui ne se disent ni ne se 
montrent ». 

Daniel Bilalian : « Plus on les fait parler et plus 
on a de chance d'éviter que leur propagande prenne 
corps sur la société française. Le tort de certains est 
de les sacraliser en les empêchant de parler. Plus ils 
parlent et plus ils s'enfoncent. Il ne faut pas être 
fasciné par ces gens comme la victime par le 
serpent. Qu'ils déblatèrent ». 

La loi de janvier 1985 

Sous le titre « Une nouvelle arme contre les 
crimes racistes », le DDV se félicite en ces termes 
du vote de cette loi : « Le gouvernement et le par- 
lement ont donc satisfait une demande que la 
LICRA formulait depuis de nombreuses années, 
particulièrement au cours de rencontres avec le gar- 
de des sceaux et avec le président de la commission 
des lois de l'Assemblée nationale ». 

Il n'est pas inutile de préciser que le garde des 
sceaux en question est alors - la gauche est dans 



242 Politiquement incorrect 

l'intervalle enfin arrivée au pouvoir - le socialiste 
Robert Badinter, par ailleurs membre éminent 
de la LICRA, dont il avait été l'avocat durant de 
nombreuses années. 

La loi de 1985 étend le champ d'application 
de la loi de 1972, puisqu'elle permet désormais 
aux associations de se porter partie civile égale- 
ment en cas de meurtre, de coups et blessures et 
de destructions racistes. Jusqu'à cette date, en 
vertu de la loi de 1972, elles ne pouvaient le 
faire que dans les cas d'infractions moins graves. 

La loi antirévisionniste Fabius-Gayssot du 13 
juillet 1990 

Il s'agit là d'une date-clé dans l'histoire de la 
dictature de la pensée unique en France, car elle 
légalise pour la première fois le délit d'opinion. 

Il convient de rappeler que la première loi 

s 

antirévisionniste avait été votée par l'Etat d'Israël 
en 1986. A l'initiative de Laurent Fabius, alors 
député socialiste et membre du comité d'hon- 
neur de la LICRA, une première proposition de 
loi similaire est présentée à l'Assemblée nationale 
en 1988. Mais ce n'est que le 13 juillet 1990 
qu'elle sera finalement votée et portera offi- 
ciellement le nom de Jean-Claude Gayssot, 



243 La France LICRAtisée 

député communiste chargé de la présenter à 
nouveau. 

Entre-temps, Laurent Fabius était devenu pré- 
sident de l'Assemblée nationale, et en cette 
qualité, avait apporté un fort soutien à la loi. 

Il est juste de dire que ce projet de loi, qui 
traînait depuis plusieurs années, avait rencontré 
des obstacles et fait l'objet de vives oppositions. 

C'est dans le cadre de ces oppositions que 
s'inscrit le célèbre article de l'historienne Annie 
Kriegel paru dans Le Figaro du 3 avril 1990 sous 
le titre « Le leurre de l'antisémitisme ». Juive elle- 
même et ancienne communiste, Annie Kriegel 
écrivait : 

« Les effets pervers de cette pratique de l'interdit 
sont éclatants. En confiant au pouvoir judiciaire la 
tâche détestable de paraître traquer le délit d'opi- 
nion et d'expression, en espérant de la concurrence 
entre organisations "antiracistes" une obsessionnelle 
chasse aux sorcières qui présente les mêmes excès que 
n'importe quelle chasse de cette nature, en s' abritant 
derrière des institutions juives inquiètes pour 
légitimer une insupportable police juive de la pen- 
sée - par exemple dans un cas navrant récent où 
on a suspendu un professeur d'université coupable 
d'avoir laissé s'exprimer un jeune collègue qui 



244 Politiquement incorrect 

exposait des énormités (comme si l'université, de- 
puis vingt ans, n'avait entendu que des propos 
équilibrés et raisonnables) - Michel Rocard devrait 
s'interroger en conscience s'il ne se prête pas à une 
assez répugnante instrumentalisation des concepts 
de racisme et d'antisémitisme en vue d'objectifs peu 
avouables ». 

Mais sur ces entrefaites survient le 9 mai 1990 un 
événement qui aura pour effet de balayer 
tous les obstacles et d'accélérer très notablement 
le vote de la loi : le cimetière juif de Carpentras 
est profané. 

« L'acte le plus barbare que la France ait connu 
depuis les affres de l'occupation allemande a eu lieu 
dans la ville qui renferme l'une des plus vieilles 
communautés juives d'Europe. Profanations, exhu- 
mations et sévices corporels sont les effroyables réalités 
de cette tragédie humaine (...) Les mots ne seront 
jamais assez forts pour décrire l'horreur de Car- 
pentras.... » peut-on lire, entre autres, dans le DDV. 

Le retentissement médiatique de cet événe- 
ment est gigantesque. Les coupables sont bien 
sûr désignés d'avance, et le ministre de l'Inté- 
rieur de l'époque, Pierre Joxe, n'hésite pas à 
déclarer : « Il n'y a pas besoin d'enquête policière 
pour savoir qui sont les criminels, coupables de 



245 La France LICRAtisée 

cette abomination raciste ». Il faudra pourtant six 
ans d'enquête pour arrêter finalement quatre 
jeunes skinheads. 

La LICRA est en première ligne pour exploiter 
au maximum le climat créé par la profanation de 
Carpentras. Elle parvient d'ailleurs pour l'oc- 
casion à faire diffuser sur toutes les chaînes de 
télévision le film d'Alain Resnais datant de 1955, 
« Nuit et Brouillard^- 1 ». 

Cette intense exploitation médiatique aura en 
tout cas pour effet de paralyser toutes les velléités de 
résistance à la loi, qui est publiée au Journal 
Officiel du 14 juillet 1990. 

La loi Fabius-Gayssot crée une infraction nou- 
velle : celle de contestation des crimes contre 
l'humanité commis pendant la seconde guerre 
mondiale par les Allemands. En d'autres termes, 
il est dorénavant défendu à tout historien, ou à 
quiconque, de remettre en cause de quelque 
façon que ce soit les conclusions du Tribunal de 
Nuremberg. 

Cette loi couvre donc un champ très précis et 
comme telle, ressemble comme deux gouttes 
d'eau à une loi de circonstance. 

Elle vise directement les révisionnistes qui, tels 
Robert Faurisson, Jean Plantin, Henri Roques et 



246 Politiquement incorrect 

bien d'autres, contestent tout ou partie de la 
vérité officielle relative aux crimes hitlériens issue 
des conclusions du Tribunal militaire interna- 
tional de Nuremberg, en 1946. 

La nouvelle loi y fait du reste explicitement 
référence. A la suite de l'article 24 de la loi de 
juillet 1881 sur la liberté de la presse, elle insère 
un article 24bis ainsi libellé : « Seront punis des 
peines prévues par le sixième alinéa de l'article 24 
ceux qui auront contesté, par un des moyens 
énoncés à l'article 23 l'existence d'un ou plusieurs 
crimes contre l'humanité tels qu'ils sont définis par 
l'article 6 du statut du Tribunal militaire interna- 
tional annexé à l'accord de Londres du 8 août 
1945 et qui ont été commis soit par les membres 
d'une organisation déclarée criminelle en applica- 
tion de l'article 9 dudit statut soit par une per- 
sonne reconnue coupable de tels crimes par une 
juridiction française ou internationale ». 

On a vu que cet article 6 ne faisait référence 
qu'aux seuls crimes commis par les nazis et ne 
prenait en compte aucun autre crime contre 
l'humanité. 

La loi Gayssot - le nom d'un communiste, 
quel symbole ! - introduit donc, dans un pays 
qui fut celui de la liberté de penser, le délit 



247 La France LICRAtisée 

d'opinion.. Dorénavant, et comme aux plus 
beaux jours du communisme triomphant, seule 
la vérité officielle a le droit de s'exprimer et a 
force de loi. 

Un tel dispositif conduit inévitablement à se 
poser la question : toute autre vérité serait-elle à 
ce point dangereuse qu'il faille la protéger par un 
arsenal répressif aussi dissuasif ? 

Cette loi intellectuellement inacceptable sus- 
cite un certain malaise, y compris chez les ma- 
gistrats. 

Dès 1992, la 17 e chambre du tribunal correc- 
tionnel de Paris, ayant à juger Robert Faurisson, 
énonce curieusement ceci : « Des critiques peu- 
vent à juste titre être développées, concernant l'or- 
ganisation la structure et le fonctionnement du 
Tribunal militaire international de Nuremberg, 
tant sur le plan juridique qu'historique ou philoso- 
phique. 

En revanche, l'article 24bis de la loi du 29 juil- 
et 1881 rend délictueuse toute contestation même 
inscrite dans un discours logique et cohérent, dès 
lors qu'elle conduit à contester, en les niant en des 
termes de mépris envers les victimes l'existence d'un 
crime contre l'humanité ayant entraîné des con- 
damnations de ce chef par le Tribunal militaire 



248 Politiquement incorrect 

international de Nuremberg. Tel est le cas en 

l'espèce ... » 

Et la 17 e chambre condamne Robert Fauris- 

son. 

La loi Lellouche du 10 décembre 2002 

Le DDV titre : « Loi Lellouche .. les appels de 
la LICRA entendus ». 

En 2002, les actes antisémites se multiplient 
en France. Ils ne sont pas le fait, hélas, de l'ex- 
trême droite, mais de certains éléments de l'im- 
migration arabo-musulmane. Pour essayer de les 
endiguer, un nouvel étage sera ajouté au dispo- 
sitif antiraciste. 

La loi Lellouche ne crée pas cette fois une 
nouvelle incrimination, mais aggrave davantage 
encore les sanctions pénales pour les crimes 
racistes, antisémites et xénophobes. 
Elle double carrément les sanctions prévues 
pour un délit si ce dernier est commis avec 
une intention raciste. Qui devra. apprécier 
cette intention ? Le juge. La dérive s'accélère. 
Nous ne sommes plus dans le droit objectif, mais 
dans la justice morale, par définition subjective. A 
tout prix, le Bien doit terrasser le Mal, comme 
Saint-Georges a terrassé le dragon. 



249 La France LICRAtisée 

* * 

Ces diverses étapes, où l'on retrouve systéma- 
tiquement la LICRA à l'œuvre, et le plus sou- 
vent au premier rang, ont doté la France d'un 
arsenal de première force pour empêcher toute 
pensée et toute expression déviantes. Ne sont 
plus autorisées que les opinions conformes à la 
ligne décidée par ceux qui mènent le pays. 

Un totalitarisme de la pensée qui, pour être 
moins sanglant que le totalitarisme bolchevique, 
n'en est pas moins extrêmement pesant. 

En fait, cette avalanche de dispositifs répressifs 
et cette escalade dans les lois constituent aussi et 
surtout, pour le système au pouvoir, un formida- 
ble aveu d'échec. Faute de pouvoir remédier aux 
conséquences d'un mal - l'absence de toute 
maîtrise de l'immigration - dont il est totalement 
responsable, il ne sait que tenter de faire taire par tous 
les moyens ceux qui le dénoncent. 

Pour assurer le suivi des lois qu'elle a suscitées, 
la LICRA entretient des contacts étroits avec la justice, 
les institutions politiques et la presse. 

L'exemple de l'Alsace est particulièrement 
significatif à cet égard. 



250 Politiquement incorrect 

Tous complices - le cas de l'Alsace 

La LICRA Bas-Rhin fait preuve de beaucoup 
d'esprit d'initiative dans ces contacts et sait user 
de tous les leviers possibles pour réduire les op- 
posants au silence. 

Le fait que son président, l'avocat Raphaël 
Nisand, soit un élu socialiste, n'est que pure 
coïncidence, et seuls des esprits malveillants 
pourraient contester le parfait apolitisme de cette 
association humanitaire. 

Toujours est-il qu'en 2001, on peut lire dans 
le DDV ces propos pour le moins curieux: 

« Le président départemental de la LICRA 
Strasbourg, Raphaël Nisand, s'est étonné de ne pas 
avoir encore vu de condamnation en matière de 
discriminations dans la région, suite au lancement 
du numéro gratuit 114 permettant à des victimes 
ou à des témoins de signaler ce qu'ils estiment être 
une discrimination. 

Le secrétaire général de la préfecture du Bas- 
Rhin a tenté de calmer la légitime impatience de 
certains en affirmant « être face à un problème qui 
demande du temps et de la volonté ». 

Quelle hâte de voir tomber des têtes ! On songe 
à l'anecdote que rapporte Soljénitsyne dans son 
livre retraçant la saga des juifs et des Russes de 



25 1 La France LICRAtisée 

1800 à nos jours, intitulé Deux siècles ensemble : 
en 1929, un dénommé Silberman se plaint dans 
l'Hebdomadaire de la Justice soviétique de ce que 
trop peu d'affaires liées à l'antisémitisme aient été 
jugées par les tribunaux de Moscou au cours de 
l'année écoulée. Il n'y en a eu que 34 ! Soit tout 
de même un procès tous les dix jours pour 
antisémitisme, rien qu'à Moscou. 

Nous restons exactement dans le même regis- 
tre. 

S 'agissant toujours de l'Alsace, les dessous 
d'une collaboration très étroite avaient déjà été 
révélés en ces termes en décembre 1997 : « Les 
rencontres bimensuelles avec le Procureur de la 
République perdurent dans un très bon climat, qui 
permettent de faire régulièrement le point sur les 
affaires de racisme ». 

En avril 2003, on obtient des précisions 
supplémentaires qui ne manquent pas d'intérêt : 

« La LICRA Bas-Rhin rencontre le Procureur de 
la République de Strasbourg tous les mois depuis 
1996 afin d'échanger les informations et les points 
de vue sur les dossiers judiciaires et sur les questions 
d'ordre public. Depuis quelques années le Parquet 
de Strasbourg nous avise d'ailleurs systématique- 
ment lorsqu'il y a une procédure de racisme de 



252 Politiquement incorrect 

façon à ce que nous puissions nous constituer partie 
civile ». 

Il existe des raisons financières à une telle 
sollicitude auprès du Procureur : il faut savoir 
que si la LICRA entreprend elle-même une 
procédure qui se conclut par la relaxe, elle se voit 
condamnée aux dépens. 

Si par contre la LICRA obtient du Procureur 
que ce soit lui qui enclenche la procédure et 
qu'elle-même se constitue partie civile, elle ne 
risque aucun débours en cas d'échec. Et en- 
grange de substantiels dommages-intérêts en cas 
de condamnation. 

En d'autres termes, à défaut de gagner à tous 
les coups, elle ne perd jamais. 

Si les relations de la LICRA Bas-Rhin avec le 
Parquet sont idylliques, elles sont tout aussi ex- 
cellentes avec la presse locale. Le responsable local 
de la Ligue « souligne qu 'il écrit systématiquement 
à l'AFP et aux Dernières Nouvelles d'Alsace qui 
prennent le relais de manière excellente ». 

Encore plus fort : c'est carrément dans les 
locaux du Conseil Régional d'Alsace que la 
LICRA locale se réunit en juin 2005. Les Der- 
nières Nouvelles d'Alsace en rendent compte très 
abondamment et très complaisamment sous le 



253 La France LICRAtisée 

titre : « La LICRA se pose en partenaire privilégié du 
Conseil Régional ». 

« Vous êtes le président exemplaire d'une région 
exemplaire » dira Raphaël Nisand à Adrien Zel- 
ler, président de la région Alsace. Quel adou- 
bement ! Et quel aveu ! 

Inutile de préciser que cette manière de pro- 
céder est présentée comme un magnifique exemple 
à suivre dans toutes les régions de France. 



Vive l'immigration massive ! 

Les juifs aux premiers rangs pour la défense des 
droits de l'homme 

En 1988, le président de la LICRA rappelle le 
combat inlassable de l'abbé Grégoire en faveur des 
juifs de France pendant la Révolution de 1789. 
Car c'est la Révolution française, dans la foulée de 
sa Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 
qui va faire d'eux pour la première fois des 
citoyens à part entière. A partir de ce moment-là 

- septembre 1791 - les juifs se sont toujours 
trouvés « au premier rang pour la défense des droits de 
l'homme », déclare Jean Pierre-Bloch, qui pour- 
suit en ces termes : « Dans cette Europe jadis meurtrie, 
où la barbarie nazie a cédé au comble de 
l'horreur et du mépris de l'homme, les juifs demeu- 
rent des témoins pour rappeler que V émancipation et 
V intégration - certes réussies en ce qui les concerne 

- sont des conquêtes éphémères lorsque les droits de 
de V homme sont niés, violés. Les juifs de France et 
d'Europe sont là pour le rappeler inlassablement ». 



256 Politiquement incorrect 

Il est pourtant cocasse de rappeler les propos 
de l'abbé Grégoire concernant les juifs, parus en 
1787 dans son Essai sur la régénération physique, 
morale et politique des juifs. Après avoir rappelé 
que le Talmud est un "cloaque où sont accumulés 
les délires de l'esprit humain 7 ', il affirme que « tout 
peuple placé dans les mêmes circonstances que les 
Hébreux, et vexé par la misère qui nécessite presque 
des crimes, leur deviendra semblable (...) Il était 
méprisé, il est devenu méprisable, à sa place, peut- 
être eussions-nous été pires. Les juifs ont produit les 
effets, vous aviez posé les causes., quels sont les 
coupables ? ». 

Curieuse façon a priori de défendre ses pro- 
tégés. En réalité l'abbé Grégoire méconnaît tota- 
lement la nature du judaïsme. Prêtre catholique, 
il vise par son action l'assimilation des juifs, 
pour ne pas dire leur conversion : « L'entière 
liberté religieuse accordée aux juifs sera un grand 

pas en avant pour les réformer, et j'ose le dire, pour 
les convertir », dira-t-il avec quelque naïveté. 
C'est dans cette optique qu'il demande, et ob- 
tient dans une indifférence quasi générale, cette 
fameuse émancipation. 

Reconnaissante malgré tout, la LICRA obtien- 
dra en 1989, à l'occasion du bicentenaire de la 



257 La France LICRAtisée 

Révolution, le transfert au Panthéon des cendres 
de l'abbé, ainsi qu'un timbre à son effigie. 

Deux ans plus tard, en octobre 1991, un 
colloque célèbre le 200 e anniversaire de l'éman- 
cipation des juifs de France. C'est à nouveau 
l'occasion de rappeler le lien étroit existant entre 
les juifs et les droits de l'homme. Robert Badin- 
ter, alors président du Conseil constitutionnel - 
et membre de la LICRA - réaffirme dans ses 
propos de conclusion qu'en raison même des 
circonstances de cette émancipation, les juifs 
sont appelés à exercer une responsabilité parti- 
culière dans la défense de ces droits : « (...) Et 
cela veut dire, mes amis, ne l'oubliez jamais, que 
si nous juifs nous sommes fondés à nous réclamer 
des droits de l'homme, les droits de l'homme sont 
fondés toujours et partout à exiger des juifs leurs 
services. 

Et qu'entre tous les déserteurs, celui d'entre les 
juifs qui déserterait la cause des droits de l'homme 
trahirait et les hommes et les siens ». 

Les juifs se considérant comme des sentinelles 
avancées en matière de droits de l'homme, il n'y 
a rien de surprenant à ce qu'un Français prési- 
dent de l'Alliance israélite universelle de 1943 à 
1976, membre actif de la LICRA, René Cassin, 



258 Politiquement incorrect 

soit en grande partie à l'origine de la Déclaration 
universelle des droits de l'homme, qui sera adoptée 
en décembre 1948 par les Nations Unies. 
Personne ne songerait à nier que la défense des 
droits de l'homme est dans son principe néces- 
saire et qu'elle constitue un réel progrès. Encore 
faut-il s'entendre sur la définition de ces droits 
et sur l'usage politique qui en sera fait. 

En 1998, à l'occasion du cinquantenaire de la 
Déclaration universelle, la LICRA aura l'occasion 
d'en préciser son interprétation, qui est particu- 
lièrement extensive. 

Voire révolutionnaire : « Au lendemain de la 
shoah, elle fut et reste aujourd'hui l'acte fondateur 
d'un nouvel ordre international dont les piliers, 
selon l'expression de René Cassin, sont les droits de 
l'homme. Tous les droits, pour tous les hommes : 
cette déclaration qui engage tous les Etats de la 
planète et tous les êtres humains est donc universelle 
et indivisible. Ses destinataires sont les victimes, 
quels que soient le lieu ou les conditions de leur 
persécution, quelle que soit la nature de celle ci, 
civile et politique, économique, sociale et culturelle. 
La LICRA y demeure fidèle et vigilante, aux côtés : 
de toutes les victimes, pas seulement celles qui 
souffrent du racisme et de la xénophobie ». 



259 La France LICRAtisée 

Tous les droits pour tous les hommes. On perçoit 
immédiatement les conséquences d'une pareille 
définition, notamment en matière d'immigra- 
tion. En vertu de ce droit imprescriptible, cha- 
cun pourrait donc s'installer où bon lui semble 
et y revendiquer l'égalité absolue des droits avec 
les nationaux ? Et ceux qui s'y opposeraient, 
société ou individus, seraient immédiatement 
accusés de racisme? 

Il est intéressant de noter qu'au nom de la 
fraternité universelle, c'est principalement l'Eu- 
rope - et plus particulièrement la France, patrie 
des droits de l'homme - qui est sommée d'accueil- 
lir des populations immigrées de plus en plus 
nombreuses. 

En fait, ce qui était conçu à l'origine pour être 
une base universelle, une reconnaissance des 
droits essentiels liés à la qualité d'être humain, 
va vite se trouver détourné et devenir un instru- 
ment de promotion systématique des minorités. 
Sous couvert de défense des droits de l'homme, 
va se développer un vrai terrorisme intellectuel 
défendant les revendications les plus pernicieuses 
et les plus outrées. 

Alors même que les droits les plus élémen- 
taires et les plus vitaux - en particulier ceux des 



260 Politiquement incorrect 

femmes et des enfants - sont allègrement ba- 
foués sur une bonne partie de la planète, la 
LICRA va se faire le censeur vigilant des droits 
de l'homme en France. Au nom de ce généreux 
principe, argument moral donc inattaquable, elle 
va soutenir l'immigration, essentiellement 

maghrébine et africaine, dès les années 1970. 

A partir de cette période, les articles dans ce 
sens vont être extrêmement nombreux dans les pages du 
DDV. Il sera rarissime qu'un autre type d'immi- 
gration, celle en provenance des pays asiatiques 
par exemple, soit évoquée. Très curieusement, 
elle ne semble nullement intéresser la LICRA. 



Frères ennemis au Proche Orient, mais frères 
en Europe 

Il apparaît clairement à la lecture des DDV que 
juifs et arabes sont fondamentalement considérés 
comme frères. On y évoque à plusieurs reprises 
leur origine commune, les uns et les autres étant 
des sémites, c'est-à-dire des descendants de Sem, 
fils de Noé. Selon la tradition biblique, les arabes 
se seraient ensuite détachés à partir d'Ismaèl, fils 
d'Abraham, et les juifs à partir d'Israël (autre nom de 
Jacob), petit- fils d'Abraham. 



26 1 La France LICRAtisée 

Ces considérations bibliques établies, et avant 
de développer le thème proprement dit de 
l'immigration, il faut prendre en compte deux 
aspects qui lui sont étroitement liés et qui 
permettent de mieux comprendre les actions et 
réactions de la LICRA : 

- Il existe une double vision du monde arabo- 
musulman, selon qu'il est considéré sous l'angle 

s 

des rapports avec l'Etat d'Israël, ou sous l'angle 
de l'immigration vers l'Europe, et par voie de 
conséquence, il existe un double discours adapté à ces 
deux cas de figure. 

- L'assimilation, celle des juifs comme celle 
des arabes, est toujours condamnée en termes 
très virulents. Ce qui amènera la LICRA dans 
un premier temps à défendre bec et ongles le 
droit à la différence. Avant de se rendre compte 
de ses effets pervers, ce qui la conduira à 
infléchir quelque peu son discours. 

Une double vision du monde arabo-musul- 
man et un double discours 
La version « lune de miel » 

C'est la version destinée à faire accepter la 
poussée migratoire massive en direction, notam- 
ment, de la France et de sa communauté juive. 



262 Politiquement incorrect 

Elle nous apprend, à travers les pages du 
DDV, que juifs et arabes ont généralement coha- 
bité pacifiquement. Et qu'en tout état de cause, 
la situation des juifs a toujours été bien moins 
cruelle dans les pays arabes qu'en occident. 
Pas d'holocauste, peu de pogroms antijuifs dans le 
monde musulman. Rien à voir avec ce qui se 
passait dans cette Europe foncièrement hostile. 

André Chouraqui, Français juif né en Algérie, 
installé ensuite en Israël où il devient maire- 
adjoint de Jérusalem, illustre parfaitement cette 
vision des choses dans ces propos tenus en avril 
1969 et rapportés par Le Droit de Vivre : « La 
division est moins profonde qu'il y paraît. Nos deux 
peuples sont frères nos langues sont jumelles, nos 
histoires, depuis la Bible, sont parallèles. Nous 
avons une même vocation... que notre Dieu, celui 
d'Abraham devienne le Dieu des nations. 

En fait, depuis trois mille ans nous avons vécu 
en symbiose : Hérode, le roi des juifs, était idu- 
méen, c'est-à-dire arabe. Mahomet a pris son inspi- 
ration dans l'héritage biblique. Pendant tout le 
Moyen Age, les juifs ont vécu généralement en paix 
au milieu des arabes. Les pogroms eux-mêmes y 
étaient moins graves que les incidents entre tribus 
arabes. L'histoire des juifs dans ces pays ressemble à 



263 La France LICRAtisée 

une idylle par rapport à ce qu'ils ont connu en 
occident, depuis les bûchers jusqu'aux fours cré- 
matoires ». 

Outre cette communauté de destin fréquem- 
ment soulignée, la LICRA insiste également sur 
le fait qu'en protégeant les droits des immigrés, 
elle protège en même temps ceux de la com- 
munauté juive. Elle le fait à plusieurs reprises, 
dans le but assez évident de justifier cette 
pression immigrationniste auprès de certains de 
ses propres adhérents qui pourraient s'en éton- 
ner. Le Droit de Vivre déclare ainsi en mai 1974 
sous la plume de Jean Pierre-Bloch : « S'il [le 
racisme, ndla] s'en prend aujourd'hui aux arabes, 
aux nord-africains, aux travailleurs étrangers, il 
peut désigner demain d'autres victimes. Nul ne 
saurait se flatter d'être à l'abri de ses ravages ». 
L'année suivante, en juin 1975, sous le titre 
«Arabes et juifs... un même combat antiraciste», on 
peut lire : «Aujourd'hui les originaires d'Afrique du 
nord en sont les principales victimes. Demain cette 
haine pourrait se retourner au gré des circonstances ou 
des événements politiques contre n 'importe qui, gens de 
couleur, gitans, arméniens ou juifs. C'est pourquoi 
tous, doivent marquer leur solidarité avec ceux qui 
subissent les conséquences des préjugés raciaux. 



264 Politiquement incorrect 

Certes, entre juifs et musulmans de sérieux dif- 
férends se sont élevés à la suite du conflit israélo- 
arabe. Le déferlement du racisme n'en devrait pas 
moins provoquer la constitution d'un front com- 
mun de défense ». 

Au début du septennat de Giscard, en 1976, 
un décret officialise la religion musulmane en 
France. Un temps d'antenne à la radio et à la 
télévision est désormais réservé à l'islam. 

Il est intéressant de noter que cette décision 
intervient au moment même où l'Algérie natio- 
nalise les écoles privées, notamment catholiques, 
et chasse sans états d'âme les religieux qui y 
enseignaient . 

La LICA réclamait cette reconnaissance offi- 
cielle de l'islam en France depuis trois ans et elle 
s'en félicite en ces termes : 

« Nous sommes heureux et fiers de penser que la 
LICA n'est pas étrangère à ce décret. En effet, 
depuis des mois, son président œuvrait auprès des 
pouvoirs publics pour obtenir pour tous les musul- 
mans vivant sur notre sol des droits égaux pour 
leur religion ». 

Le Droit de Vivre indique - nous sommes en 
1976 - le chiffre de «plus de deux millions de 
musulman en France », ce qui en fait déjà à cette 



265 La France LICRAtisée 

époque, par le nombre, la deuxième religion pré- 
sente sur notre sol, et se prononce pour le respect, 
en particulier de la part des employeurs, des 
grandes fêtes islamiques, allant jusqu'à préciser : 
« Espérons que les communautés musulmanes pour- 
ront dorénavant donner à ces fêtes tout l'éclat qu'elles 
méritent, car bien souvent elles étaient éclipsées par 
les fastes du Noël chrétien et leurs enfants finissaient 
par ne plus les connaître ». 

Pourtant, déjà à cette époque-là, la LICA sait 
parfaitement à quoi s'en tenir sur un certain 
nombre de réalités concernant l'islam. 

Et ceci nous amène tout droit à : 

La version « lune de fiel» 

Sous le titre « La laïcité dans les États arabes », 
le DDV fait, en avril 1975, le tour des constitu- 
tions des pays arabes pour conclure qu'il n'existe 
pas de laïcité dans ces pays, car elle est incom- 
patible avec la doctrine traditionnelle de l'islam 
« qui confond largement l'Etat et la religion mu- 
sulmane mais accorde aux minoritaires un régime 
de tolérance. Cette tolérance n'est jamais que rela- 
tive. Elle dépend des circonstances. Le sort des noirs 
catholiques du Soudan massacrés par leurs conci- 
toyens musulmans de Khartoum, celui des Kurdes 



266 Politiquement incorrect 

d'Irak, la législation d'exception qui frappe les juifs 
dans plusieurs pays arabes et notamment en Irak 
témoignent des caractères que peut parfois revêtir 
cette « tolérance ». L'article rappelle enfin les pro- 
pos tenus par un professeur libanais lors d'une 
conférence en 1969 : « Foncièrement théocratique, 
l'islam est organiquement réfractaire à tout système 
politique ayant pour but la séparation de la 
religion et de l'Etat et donc à toute conception de 
laïcité dans le sens que l'on donne à ce mot en 
Europe » . 

Voilà qui est clair. Il est vrai que le but de 
cette enquête est de démontrer que face à ces 
pays obscurantistes, Israël est, lui, laïque et 
démocratique. Et qu'il est donc exclu d'envisa- 
ger, comme Yasser Arafat l'avait fait, la création 

s 

d'un Etat où juifs et palestiniens vivraient côte à 
côte. 

Pour Le Droit de Vivre, il règne plus de liberté 
en Israël que dans aucun autre pays arabe, et 
dans ce cas : « Pourquoi donc les citoyens d'Israël 
abandonneraient-ils leur liberté, qui est effective, 
en échange d'une liberté qui leur est promise par 
un Etat qui n'existe pas, et par des hommes qui 
n'ont prouvé aucune disposition particulière en vue 
de sauvegarder la liberté des juifs ? ». 



267 La France LICRAtisée 

En 1978, le DDV fait la critique d'un nouveau 
titre de l'Encyclopédie du monde actuel - une 
collection éditée par le Livre de Poche - consacré 
aux Arabes. 

D'emblée il indique, le contraire serait sur- 
prenant, que le conflit israélo-arabe n'est pas 
présenté avec l'objectivité nécessaire et qu'il 
s'inspire souvent des thèses de l'extrémisme 
arabe. Sa critique se poursuit en ces termes : 

« Si l'on montre les arabes, il faut les montrer 
tels qu'ils sont. On ne peut omettre d'analyser leur 
tentative d'asservissement du monde industrialisé 
par le chantage pétrolier. On doit montrer l'ana- 
chronisme et la cruauté de leurs systèmes sociaux : 
la législation barbare qui prévaut encore en Libye 
et en Arabie ; la conduite inhumaine qu'ils ont eue 
en 1967 comme en 1973, quand de nombreux 
prisonniers israéliens ont été torturés et assassinés en 
Syrie et en Egypte. On doit montrer le fanatisme 
religieux qui a conduit, notamment pendant les 
dix-neuf années d'occupation tr ans jordanienne de 
Jérusalem, à la destruction de nombreux lieux 
saints juifs et à leur profanation systématique ». 

En 1979, sous le titre « Des femmes et des 
mœurs », le DDV nous apprend que : « Comme 
chacun sait, maintenant, avec l'arrivée au pouvoir 



268 Politiquement incorrect 

en Iran de la religion islamique, les femmes musul- 
manes ne sont pas à la noce. 

Obligation leur est faite de porter le voile, de se 
soumettre à la seule volonté de leur époux, de se 
consacrer uniquement et exclusivement à la tenue de 
leur maison et aux besoins de leurs enfants. 

Là où l'islam dirige les États, l'émancipation de la 
femme est devenue impossible ». 

En 1980, c'est la critique du livre Le dhimmi 
-Profil de l'opprimé en Orient et en Afrique du 
nord depuis la conquête arabe, ouvrage écrit par 
l'historienne Bat Ye'or - pseudonyme de Giselle 
Littman - qui fournit une fois de plus l'occasion 
au DDV de mettre les choses au point : 

« L'un des mythes les plus tenaces colportés au 
sujet de l'islam et dont la propagande des pays 
arabes se sert abondamment, est celui de la tolé- 
rance dont auraient joui les non musulmans, 
notamment les juifs, en terres arabes (...) 

Basé sur des textes arabes et des témoignages 
d'époque, il [le livre, ndla] établit ce qu'a été 
véritablement la relation de vainqueur à vaincu 
que les musulmans ont imposée à tous les peuples 
ayant vécu, en quasi-esclaves, dans les pays qu'il 
ont conquis par les armes, et aux individus qui 
n'ont pas embrassé l'islam. La loi réglant ces rela- 



269 La France LICRAtisée 

tions, le djihad, doit, selon l'islam, durer jusqu'au 
jour du jugement dernier ! ». 

Le DDV poursuit en ces termes : 

« La prétention d'Israël à l'égalité est réellement 
ressentie par les arabes comme une révolte d'esclaves 
qu'il faut mater sous peine de voir une brèche 
irréparable infligée à l'édifice de l'islam. L'actuelle 
flambée d'intégrisme musulman s'explique bien 
aussi à la lumière du statut du dhimmi. Elle est la 
simple manifestation d'une tradition qui a quinze 
siècles de durée et qui ne pouvait s'épanouir libre- 
ment à l'époque où les arabes ne jouissaient pas de 
l'indépendance politique. Elle ressurgit évidemment 
après la décolonisation et à la faveur du pouvoir 
dont les arabes jouissent dans l'arène internatio- 
nale, depuis l'acquisition de leur richesse pétrodol- 
lar dière. 

L'islam n'a pas pénétré dans la modernité, aux 
temps modernes. Avec le khomeinisme, le khad- 
dafisme et son président séoudien, il continue à se 
mouvoir en plein Moyen Age ». 

Il est tout de même extraordinaire de lire en 
1980 une pareille description de l'islam que, 
bien qu'elle le dépeigne parfaitement rétrograde 
et réfractaire à la laïcité, la LICRA s'emploie 
cependant à promouvoir inlassablement en 



270 Politiquement incorrect 

France. Et que les Français sont invités à accueil- 
lir avec empressement, sous peine d'être traités 
de racistes. 

En 1985, le DDV consacre un dossier à l'escla- 
vage et titre : « Le cheptel humain : l'esclavage 
existe encore en pays musulmans ». Le dossier n'est pas 
tendre pour les pays arabes, détaillant certai- 
nes pratiques sévissant en Arabie Saoudite, terre 
sainte de l'islam : «Aujourd'hui encore, des Afri- 
cains sont incités à faire le pèlerinage à La Mecque 
où, après avoir été vendus dans le souk El Abd, 
désocialisés et dépersonnalisés, ils passeront le reste 
de leurs jours comme esclaves. Lord Maugham a 
rapporté avoir rencontré un cheik parti pour La 
Mecque avec six enfants, revenu seul après les avoir 
tous vendus. Il s'en était servi comme de trave- 
lers'checks humains. De telles pratiques n'appartien- 
draient pas au passé ». 

Durant ces mêmes années, le DDV va égale- 
ment publier à plusieurs reprises des articles 
dénonçant la détérioration des conditions de vie 
des juifs dans les pays arabes, qui s'est accentuée 
après la guerre des Six Jours. Le journal n'hésitera 
pas à parler d'épuration ethnique, qu'il illustre par 
ces chiffres : sur les 900 000 juifs qui vivaient 

s 

dans les pays arabes avant la création de l'Etat 



27 1 La France LICRAtisée 

d'Israël, il n'en resterait plus qu'environ 50 000. 
Tous les autres ont émigré - essentiellement vers 
Israël - soit de leur plein gré, soit contraints et 
forcés. Et beaucoup ont vu leurs biens confisqués. 
Ces articles visent essentiellement à faire contre- 
poids à l'accusation adressée à Israël d'avoir chassé 
des centaines de milliers de palestiniens. Le DDV 
estime qu'il s'est agi dans les deux cas de transferts 
de populations qui finalement s'équilibrent. 

Vingt ans plus tard, une immigration musul- 
mane massive s'est installée en France, avec la 
bénédiction et l'appui de la LICRA. Seulement, 
voilà : elle s'accompagne de plus en plus d'actes 
antisémites dont l'origine ne peut plus être 
pudiquement dissimulée. 

Mais qui ne sont pas, hélas, le fait de l'extrême 
droite. 

Alors - mais uniquement parce qu'un climat 
d'antisémitisme s'est installé - certaines manifes- 
tations de l'islam en France vont quand même 
faire l'objet de critiques de la part de la LICRA. 
On pourra lire en décembre 2003, dans le DDV, 
Une tribune instructive portant le titre « Pour un 
Vatican II de l'islam », qui s'interroge en ces 



272 Politiquement incorrect 

termes : «Peut-on critiquer l'islam? Vaste et 
dérangeante question... Comment y répondre sans 
tomber dans un vulgaire racisme troupier et sans 
être taxé de xénophobie par une certaine intel- 
ligentsia française qui interdit tout débat au nom 
de la pensée unique ? ». 

Qui interdit tout débat au nom de la pensée 
unique ! Voilà donc les arroseurs arrosés qui se 
plaignent d'une pensée unique qu'ils ont très 
largement contribué à imposer au pays, mais qui 
commence apparemment à leur échapper. D'où 
leur trouble. 

Mais revenons aux débuts de l'immigration 
massive. Ces étrangers, largement incités au fil 
des années à s'installer dans notre pays, ont-ils 
au moins été priés de s'assimiler au plus vite à 
nos mœurs et coutumes et invités à se fondre 
dans le paysage ? Surtout pas. La LICRA va 
défendre avec acharnement leur droit de conti- 
nuer à vivre chez nous selon leurs propres coutu- 
mes et considérera qu'il appartient au pays hôte 
- en l'occurrence, la France - de s'y adapter. 

Assimilation ou droit à la différence ? 

L'assimilation est régulièrement présentée dans 
les pages du DDV comme le drame suprême du 



273 La France LICRAtisée 

juif. Car l'assimilation, c'est à terme la dispari- 
tion de l'identité juive. 

La philosophe Simone Weil, d'origine juive 
mais convertie au christianisme, morte en 1943, 
avait eu des mots très durs à l'égard de sa 
communauté d'origine : « Les juifs, cette poignée 
de déracinés, a causé le déracinement de tout le 
globe terrestre... la malédiction d'Israël pèse sur la 
chrétienté... ». 

Le DDV, qui rapporte ces propos en commen- 
tant un ouvrage paru en 1978 sous la plume de 
Paul Giniewski, membre de la LICA, ouvrage 
intitulé Simone Weil ou la haine de soi, considère 
qu'il s'agit d'un « cas-limite, tragique par son 
intensité, des méfaits de l'assimilation des juifs à 
leurs milieux ». 

Il en profite pour faire la leçon : « Les minori- 
taires qui veulent se fondre dans les majorités, 
les majorités qui veulent imposer la totalité de leur 
héritage culturel pourront la méditer. Enseigner 
« nos ancêtres les gaulois » aux malgaches, comme 
aux juifs des bords de la Seine, est la même erreur 
et engendre des maux équivalents ». 

On sent poindre dans ces propos une irri- 
tation marquée à l'égard d'une France centralisa- 
trice et voulant imposer son modèle. 



274 Politiquement incorrect 

Nous sommes en 1978. Le combat que la 
LICA mènera désormais en faveur du droit à la 
différence pour les immigrés, est aussi, et peut- 
être surtout, une façon de revendiquer une 
reconnaissance plus affirmée de sa propre his- 
toire et identité. Et de casser à la fois un schéma 
assimilateur jugé arrogant et une identité « natio- 
nale » trop homogène, perçue en tant que telle 
comme une menace. A ses yeux, tout ce qui 
soude une communauté, dont elle pourrait se 
sentir exclue, doit être combattu. 

On peut lire d'ailleurs, toujours en 1978, dans 
le DDV, ces lignes dénuées de toute ambiguité : 
« L'assimilé, le raciste honteux sont des victimes 
d'une mauvaise démocratie. Toute société qui re- 
quiert ou pousse à l'assimilation est une société raciste. 
La laïcité démocratique, c'est la cœxistence 
de toutes les minorités dans V égalité et la fraternité. 
Ce n'est pas l'abolition des différences et des origi- 
nalités ethniques ». 

Ce thème du refus de l'assimilation revient 
dans un livre paru en 1979 sous la plume d'An- 
dré Harris et Alain de Sédouy, Juifs et Français. 
L'heure est - tout au moins aux yeux de la 
LICRA - au désenchantement et même à l'an- 
goisse des juifs de France en raison de la poli- 



275 La France LICRAtisée 

tique étrangère du pays, jugée pro-arabe. Le 
DDV commente abondamment le livre tout en 
regrettant que ses auteurs n'aient pas dénoncé 
plus explicitement la responsabilité profonde de 
la France dans cette situation, et déplore : «A 
l'époque des auto -déterminations et de la décoloni- 
sation, la France, une certaine France, veut assimi- 
ler les juifs, c'est-à-dire les détruire spirituellement 
et culturellement. C'est un anachronisme. Annie 
Kriegel résume bien cette situation : u Pas d'anti- 
sémitisme, mais pas de culture juive ! et pas de réa- 
lité juive ! plus de juifs ! c'est la solution finale sans 
souffrances, finalement, proposée par l'assimilation 
républicaine et par l'assimilation socialiste" : La 
France est centralisatrice, nivelatrice, elle veut fon- 
dre dans un moule unique ceux qui la composent 
et en cours d'opération, les détruit (...) 

Et ceux qui demandent aux juifs de s'assimiler, 
les exhortent à s'assimiler à eux, c'est-à-dire à un 
particularisme politique ou philosophique, à un 
intérêt momentané à les servir. Mais dans la 
France d'aujourd'hui, qui est en train de perdre son 
âme à cause du pétrole, c'est aux juifs de France 
que tous les Français devraient s'assimiler ». 

La dernière phrase de ce passage éclairant est 
singulièrement révélatrice et lourde de menaces. 



276 Politiquement incorrect 

Toujours en 1979, le chancelier autrichien 
socialiste Bruno Kreisky publie un essai intitulé 
L'Autriche entre l'Est et l'Ouest. Le moins que l'on 
puisse dire, c'est que cet ouvrage déplaît forte- 
ment au DDV, qui se livre à une critique féroce 
de la partie consacrée au sionisme. Là encore, 
c'est la volonté d'assimilation qui est pointée du 
doigt : « Il est inutile de chercher à prescrire à 
autrui ce qu'il devrait être. Il est sans intérêt de 
reprocher au juif Kreisky de se vouloir parfaitement 
assimilé et de réussir le tour de force, quand il 
brosse le tableau des maux qui ont accablé l'Autri- 
che après l'Anschluss de 1938, de ne pas même 
mentionner le pogrom sanglant qui s'abattit sur les 
juifs. Et qui, s' expatriant alors de son pays, com- 
mente : "Je n'ai jamais considéré que mon émigra- 
tion avait été la conséquence de mes origines juives. 
D'autres origines sociales ne m'auraient pas empê- 
ché d'être pareillement poursuivi" ». 

s 

S 'exprimant sur l'Etat d'Israël, Bruno Kreisky 
enfonce le clou. Commentaire du DDV : 

« Quant à l'Etat d'Israël on est obligé de constater 
avec regret, s' agissant du chef d'un gouvernement 
européen en exercice, qu'à part deux ou trois 
compliments de circonstance, il est jugé à l'arabe. 
On est même choqué qu'un chef de gouvernement 



277 La France LICRAtisée 

ait cru pouvoir s'exprimer aussi crûment sur un 
sujet où sa fonction aurait appelé plus de réserve. 
Par exemple : 

« Le sionisme a un intérêt évident à ce que les 
juifs vivant en dehors d'Israël continuent d'être 
soumis à des persécutions ». 

« A mon avis, le sionisme de stricte observance 
représente un racisme ». 

Le DDV en tirera le même type de conclusion 
que dans le cas de la philosophe Simone Weil. 
Toute critique à l'égard d'Israël ou des juifs en 
général est considérée, lorsqu'elle émane d'un 
non-juif, comme de l'antisémitisme, et lors- 
qu'elle émane d'un juif, comme le signe d'une 
quasi-maladie mentale appelée « haine de soi » : 

« Pourtant, son acharnement à se distancer des 
juifs et d'Israël la coloration passionnée donnée à 
l'articulation de ses thèmes indiquent que nous 
sommes aussi - peut-être surtout - en présence d'un 
cas-limite de juif poussé à la haine de soi par 
l 'outrance dans l'assimilation ». 

Ce thème du refus de l'assimilation ne doit 
pas être sous-estimé. Il court tel un fil conduc- 
teur à travers toute l'action de la LICRA. 

Sous le titre « Vichy et les juifs », le DDV rend 
compte très abondamment, en juin 1981, du 



278 Politiquement incorrect 

livre de l'historien américain Robert Paxton sur 
Vichy. Ce sera une nouvelle occasion de flétrir 
l'assimilation, jusqu'à en faire une forme de fas- 
cisme : 

« Est-ce à la décharge de Vichy qu 'on a évoqué 
ce terrain fétide sur lequel Vichy a germé ? Nulle- 
ment. Simplement, les idéologues de Vichy ont été 
aussi coupables, en 1940, que le sont les idéologues 
continuant, en 1981, à prôner des formes "d'unité 
nationale" du même acabit. L'exigence contempo- 
raine de l'assimilation est aussi dangereuse et répré- 
hensible que celle qui a conduit au malheur il y a 
plus de quarante ans. 

Pour faire barrage à l'exigence fasciste de l'assi- 
milation et de l'homogénéité nationale, il faut pra- 
tiquer la différence et le pluralisme. Ce sont des droits 
et des richesses. Ce sont les seules barrières ef- 
ficaces contre un retour du nazisme et de son ava- 
tar français... Vichy ». 

On touche là, exprimé de façon parfaitement 
claire, le ressort fondamental de toute l'action de la 
LICRA. 

A constater l'aversion de la Ligue pour toute 
exigence d'assimilation, et même pour toute 
homogénéité nationale, il n'y a pas lieu de 
s'étonner de son combat acharné pour que les 



279 La France LICRAtisée 

minorités aient le droit de conserver leurs par- 
ticularités, leurs mœurs et puissent éduquer leurs 
enfants comme ils l'auraient fait dans leur pays 
d'origine. 

Loin d'être encouragés à s'assimiler au plus tôt 
à la société française, les étrangers vont donc au 
contraire être incités à vivre chez nous dans leur 
propre contexte culturel. 

En 1985, en plein angélisme, on pourra lire 
dans le DDV cette définition de l'antiraciste : 
«Etre antiraciste, ce n'est pas demander à l'autre de 
devenir soi-même, c'est l'accepter comme il est, 
c'est s'enrichir à son contact, c'est aller vers lui ». 

Le Droit de Vivre va ouvrir toutes grandes ses 
colonnes à ceux qui abondent dans son sens. 
Ainsi le généticien et homme de gauche Albert 
Jacquart est-il invité en mars 1985 à développer 
ses thèses sur une page entière, sous le titre 
« Albert Jacquart fait un éloge de la différence ». 
Les sous-titres sont éloquents: « Pas de races humai- 
nes », « Tous des métis », « Maladie infantile ». Ce 
dernier point concerne le racisme, bien sûr. 

Albert Jacquart aura ces mots empreints 
d'amabilité à l'égard des militants du Front 
national : « Lors d'une émission de télévision à 
laquelle j'ai participé, on avait donné la parole à 



280 Politiquement incorrect 

quelques individus ouvertement racistes dont cer- 
tains du Front national. Je l'ai regretté car norma- 
lement quand on fait une émission sur une 
maladie on ne donne pas la parole aux microbes 
Or, on avait bien donné la parole aux microbes ! », 

Curieuse, cette allusion aux microbes. Exacte- 
ment du même genre qu'une citation de l'écri- 
vain Louis Ferdinand Céline, que le DDV 
reproduit dans le même numéro, deux pages 
plus loin : « Deux qui sortent par la porte, 
36 000 qui rentrent par la fenêtre. Et les demi- 
juifs ? Pourquoi pas les demi-microbes? ». 

Mais Céline est antisémite, tout le monde le 
sait, tandis qu'Albert Jacquart parle des microbes 
réputés racistes. Et ça, c'est permis. Et même 
recommandé. 

Le sacro-saint droit à la différence sera donc le 
credo de la LICRA. Du moins au début de sa 
croisade. Car elle va finir par en découvrir les 
effets pervers. Si l'islam et la religion juive ont 
de lointaines racines communes, leur implication 
dans la vie publique et leur traduction dans la 
vie privée sont néanmoins fort différentes. 

Le droit à la différence mène tout droit au 
communautarisme - à la fois repli et affirmation 
agressive de son identité, lourds tous deux de 



28 1 La France LICRAtisée 

conflits potentiels - dont la LICRA va finir par 
comprendre les dangers. Ne serait-ce que sous 
l'angle d'un différentiel démographique qui lui 
est déjà défavorable à la base et qui ne pourra 
que se creuser encore à son détriment. 

Des années plus tard, en 2003, Patrick 
Gaubert, président de la LICRA, écrira à Jacques 
Chirac pour se plaindre. Cette fois, il n'est plus 
question d'accepter l'étranger « comme il est », ou 
de « s'enrichir à son contact ». 

On entend à présent un autre son de clo- 
che : « La règle de vie commune si particulière à la 
société française, qui en fait un modèle regardé, doit 
être respectée par tous. Une infime minorité, parmi 
les derniers entrés dans la citoyenneté française, ne 
peut imposer une autre règle de vie incompatible 
avec les valeurs que le monde éclairé nous envie. 
Continuer de laisser faire serait désastreux ». 

Mais revenons à nouveau aux débuts de la 
poussée migratoire. La défense agressive du droit 
à la différence ne tardera pas à provoquer les 
tensions qu'il était facile de prévoir, car la 
cohabitation des Français de souche avec une 
forte population arabo-musulmane encouragée à 



282 Politiquement incorrect 

conserver des mœurs et des coutumes fonda- 
mentalement différentes, deviendra de plus en 
plus conflictuelle au fil des années. 

La LICRA ne remettra pourtant nullement en 
cause la pertinence de la poursuite de l'immigra- 
tion, mais elle en tirera une conclusion sans 
appel : les Français sont racistes. 

Elle mettra donc les bouchées doubles pour 
combattre le racisme. 

Les gouvernements successifs tenteront bien, 
au fil de la dégradation de la situation, de mettre 
en place certaines limitations à l'immigration. 
Ces tentatives seront surveillées avec beaucoup 
de vigilance et de suspicion par la LICRA qui, 
la plupart du temps, y mettra tous les freins 
dont elle disposera et jouera à fond sa partition 
d'association morale défendant les droits de 
l'homme. 

Avec ses alliés, et ses nombreux relais mé- 
diatiques, elle saura judicieusement faire monter 
la pression et influencer fortement, dans le sens 
qu'elle souhaite, les décisions prises au niveau 
politique. Car la « droite » sera toujours ter- 
rorisée à la seule idée de paraître raciste, et 
assimilée à Vichy - l'horreur suprême ! - ce dont 
la LICRA saura jouer avec un art consommé. 



283 La France LICRAtisée 

De 1969 à 1974 - Georges Pompidou 

Sous le titre « L'exploitation de l'homme par 
l'homme - le drame des travailleurs étrangers en 
France », le DDV indique en mai 1970 le chiffre 
de plus de trois millions de travailleurs immigrés. 

En juin de cette année-là, des affrontements 
violents opposent des membres des commu- 
nautés juive et musulmane à Belleville, faisant de 
nombreux blessés. Le DDV titre : « Travailleurs 
musulmans et juifs, prenez garde aux provoca- 
teurs ! » et accuse les communistes d'avoir provo- 
qué les incidents. 

Dès juin 1973, il est question d'un « climat 
malsain » dû aux répercussions en France du 
conflit israélo-arabe. Sont visées à ce moment-là 
les organisations gauchistes qui organisent des 
manifestations pro-palestiniennes où l'on peut 
entendre, déjà, « Mort aux juifs ! ». Le DDV 
déplore le climat d'insécurité qui règne dans les 
lycées et universités pour les jeunes juifs parti- 
sans d'Israël, traités par les gauchistes de «fascis- 
tes de la clique impérialiste ». 

La LIC A réclame et obtient en juin 1973 la 
création d'un intergroupe parlementaire antira- 
ciste pour s'occuper du sort des travailleurs 
étrangers. 



284 Politiquement incorrect 

Fin 1973, les attaques contre le gouvernement 
à propos de l'immigration se font plus violentes. 
Sous le titre « Trop d'expulsions arbitraires », le 
DDV accuse : « Depuis plusieurs mois le gouverne- 
ment emboîte le pas aux xénophobes dont les cam- 
pagnes contre les étrangers se font de plus en plus 
violentes ». 

De 1974 à 1981 - Valéry Giscard d'Estaing 

Le candidat naturel de la LICRA, François 
Mitterrand, n'est pas élu. Il s'est pourtant allié 
sans états d'âme aux communistes - imagine-t- 
on les cris d'orfraie de la gauche si la droite 
s'était alliée au FN ? - pour proposer aux Fran- 
çais un Programme commun de gouvernement. 

Mais à ce moment-là, le sillon n'est pas encore 
suffisamment creusé et les temps ne sont pas 
murs. 

Sous la plume de Jean Pierre-Bloch, on peut 
lire ce que la LICA attend du nouveau président : 
« En prenant en charge les destinées de la France, 
M. Valéry Giscard d'Estaing s'est créé des obligations 
dont l'une des moindres n'est pas la réconciliation de 
tous, y compris celle des Français avec les millions 
d'hommes et de femmes d'origines diverses. Nord- 
Africains, Sénégalais ou Portugais, gitans ou apatri- 



285 La France LICRAtisée 

des contribuent à l'enrichissement matériel et intel- 
lectuel de notre pays, terre d'élection des opprimés 
qui ne se nourrissent pas seulement de pain mais 
aussi de liberté, d'égalité et de fraternité ». 

s 

Elle sera entendue. Un secrétaire d'Etat aux 
travailleurs immigrés, dont la création avait été 
réclamée par la Ligue, est installé. Dans une 
interview au DDV, son titulaire, Paul Dijoud, 
est interrogé sur un supposé racisme des Fran- 
çais. Sa réponse est intéressante, car elle donne 
des chiffres : « Notre rôle est donc de faire com- 
prendre aux Français que ces quatre millions 
d'étrangers dont 1 800 000 travailleurs, qui vivent 
en France, sont indispensables ». 

Nous sommes en 1974 et le chiffre officiel est 
déjà de 4 millions d'étrangers. Trois ans plus tard, 
en octobre 1977, la LICA apportera quelques 
précisions : « Le nombre [d'étrangers qui résident 
France, ndla] est évalué à 4 205 000 personnes, 
dont 2 000 000 d'actifs sur lesquels on compte 
100 000 chômeurs environ ». 

La LICA applaudit bien évidemment aux 
mesures de regroupement familial décidées par le 
gouvernement Chirac en 1976, tout en en 
dénonçant « les limitations ». Cette décision his- 
torique et calamiteuse, prise par « humanisme », 



286 Politiquement incorrect 

change radicalement la nature de l'immigration, 
qui devient ainsi, conformément aux plus chers 
souhaits de la gauche, une immigration de 
peuplement. Mais que ne ferait pas la droite 
pour ne surtout pas être assimilée à Vichy ! Des 
années plus tard, Giscard regrettera cependant 
d'avoir laissé la bride sur le cou à Jacques Chirac, 
son premier ministre, à propos de cette mesure 
extrêmement lourde de conséquences. 

Mesure dont nous « fêtons » cette année, dans la 
discrétion la plus totale, le 30 e anniversaire. Il 
serait pourtant intéressant de demander quelques 
comptes à son principal instigateur... 

En 1978, face à la crise économique et à l'aug- 
mentation du chômage, le gouvernement décide 
quand même de réglementer plus sévèrement le 
séjour des étrangers et de réduire progressivement 
le nombre des immigrés, notamment par la réfor- 
me des cartes de travail. Cette nouvelle réglemen- 
tation est jugée « intolérable » par la LICA, qui s'en 
explique en ces termes : « Elle est intolérable parce 
qu'elle rompt avec la tradition française d'hospitalité. 

Parce qu'elle légalise des pouvoirs administratif dis- 
crétionnaires. Parce qu'elle augmente l'insécurité des 
étrangers déjà traumatisés par le racisme, les dis- 
criminations de toutes sortes (...) La LICA, devant 



287 La France LICRAtisée 

cette situation, a alerté ses parlementaires de l'oppo- 
sition et de la majorité, les invitant à amender le 
projet et à défaut, à s'y opposer ». 

Elle organise la même année un forum au Sénat sur 
les « Droits de séjour et d'asile ». Une bonne 
occasion de rappeler qu'en France, « le droit d'asile 
était sacré et que seul le gouvernement de Vichy 
l'avait violé dans des conditions abominables ». 

Nous sommes en mars 1980 - l'échéance prési- 
dentielle s'approchant, le ton se fait plus dra- 
matique. 

« Pour défendre les droits des immigrés, NON aux 
sévices, aux tortures racistes, à la répression des 
travailleurs clandestins, au fichier informatisé pour 
les étrangers », titre le DDV, qui enchaîne : « ... A 
moins de prendre des mesures sévères pour désamorcer 
le courant xénophobe et raciste grandissant, notre pays 
est parvenu à la limite au-delà de laquelle l'irrémé- 
diable pourrait se produire entre une fraction de la 
communauté française et une grande partie de la 
population étrangère ». 

La perspective d'informatiser les cartes des 
résidents étrangers suscite tout particulièrement 
l'ire de la LICRA, qui rappelle le fichier de recen- 
sement des juifs établi par Vichy, pour conclure 
très clairement : « Pour nous-mêmes demain, nous 



288 Politiquement incorrect 

devons donc nous opposer aujourd'hui à l'établis- 
sement de ce fichier pour les étrangers car rien ne 
nous garantit qu'une telle disposition ne puisse servir, 
dans l'avenir, de sombres desseins qui nous feraient 
regretter notre indifférence présente. A l'égard des 
immigrés et de nous-mêmes ». 

Là encore, il est clair que la défense systé- 
matique des étrangers est également considérée 
comme un moyen de se protéger soi-même. 

Juste avant l'élection présidentielle, une fois 
n'est pas coutume, le torchon brûle sévèrement 
entre la LICRA et le parti communiste à propos 
de l'affaire du bulldozer de Vitry. La Ligue va 
jusqu'à porter plainte contre le maire commu- 
niste de Vitry, Paul Mercieca, qui avait démoli 
un foyer de travailleurs maliens. 

Dans un éclair de lucidité, d'inspiration il est 
vrai nettement électorale, le PCF s'en était pris au 
gouvernement, accusé, malgré ses déclarations 
lénifiantes, de poursuivre l'immigration, et avait 
même déclaré : «...Cette politique aggrave les pro- 
blèmes de rapports humains, de charges sociales, de 
scolarité, de chômage ». 

Du coup, le PCF est accusé de passer avec 
armes et bagages dans le camp du racisme et de 
la xénophobie. 



289 La France LICRAtisée 



En janvier 1981, quelques mois avant l'élec- 
tion fatidique, la pression s'intensifie. Le DDV 
publie un dossier alarmiste intitulé « Racisme, 
antisémitisme, xénophobie, respect des droits de 
l'homme... le bilan 1980 reste négatif». On peut y 
lire : « Les murs se couvrent de graffitis appelant 
à la haine ou au meurtre. Des lettres ou des coups 
de téléphone de menaces pleuvent, sous le sceau de 
l'anonymat. Des cimetières sont profanés. Des édi- 
fices religieux sont souillés ». 

Le dossier est illustré de photos qui, indique le 
journal, « témoignent de l'action et des réactions de 
la LICRA qui s'est toujours placée en tête de la 
riposte, de la protestation et de la protection des victi- 
mes, dès lors qu'il s'agissait, en France comme ailleurs, 
de défendre le droit à la différence, le respect de la 
personne humaine et les conditions d'existence des 
travailleurs immigrés et des minorités ethniques ». 

De 1981 à 1988 - François Mitterrand/1 

Cette fois, ça y est ! L'Union de la gauche - 
socialistes, radicaux et communistes réunis sans 
états d'âme ni problèmes métaphysiques - l'a 
enfin emporté ! 

Cette victoire historique plonge la LICRA 
dans l'euphorie. Le DDV titre en gros caractères 



290 Politiquement incorrect 

sur sa couverture de juin 1981 : «Première vic- 
toire pour les travailleurs immigrés : arrêt des 
expulsions des jeunes étrangers nés en France, li- 
berté de regroupement des familles. Un septennat 
antiraciste ? ». 

Pour la première fois dans les pages du DDV, 
sous la plume de son président, la LICRA « adres- 
se ses félicitations les plus vives au nouveau président 
de la République, élu au suffrage universel 

La LICRA le fait avec d'autant plus de respect 
et d'amitié, du fait de l'appartenance de M. Fran- 
çois Mitterrand à son comité d'honneur. 

Point de rencontre de tous les courants démocra- 
tiques, la LICRA souhaite que l'action des pouvoirs 
publics se dirige, avec célérité, vers le châtiment 
exemplaire des actes de racisme et d'antisémitisme, 
qu'une politique humaine envers les travailleurs 
immigrés, et notamment ceux de la deuxième géné- 
ration, soit instaurée et qu'un meilleur équilibre de 
la diplomatie au Proche Orient s 'établisse ». 

Voilà la feuille de route générale que la LICRA 
assigne sans équivoque, dès le départ, au nouvel 
élu de la nation. Au cas où il lui resterait encore 
quelques interrogations, ce même éditorial lui 
précise que la LICRA s'attend à le voir, dans les 
meilleurs délais : 



29 1 La France LICRAtisée 

« - compléter la loi de 1972 en étendant son 
champ d'action aux crimes racistes, en faisant de 
l'injure ou de la diffamation raciste non-publique, 
un délit ; 

- protéger les travailleurs immigrés et leurs 
enfants contre l'arbitraire ; 

- dissoudre les groupuscules 'fascistes et nazis" ». 
Si François Mitterrand est le plus illustre 

membre de la LICRA au pouvoir, il n'est pas le 
seul. Dès juin 1981, Le Droit de Vivre dresse 
avec fierté la liste des membres du gouvernement 
également membres de la Ligue : le premier 
ministre, Pierre Mauroy, Gaston Def ferre, mi- 
nistre de l'Intérieur, Charles Hernu, ministre de 
la Défense, André Delelis, ministre du Com- 
merce, Louis Mexendeau, ministre des PTT, 

s 

Joseph Franceschi, secrétaire d'Etat aux person- 
nes âgées. Ils seront très vite rejoints par Robert 
Badinter, ministre de la Justice. 

Officiellement, à cette date, 4,5 millions 
d'étrangers résident en France. Les chiffres devien- 
dront de plus en plus évasifs par la suite. 

L'un des premiers gestes du nouveau ministre 
de l'Intérieur, Gaston Defferre, est de suspendre 
les expulsions de jeunes délinquants étrangers. 
En effet, aussi surprenant que cela paraisse 



292 Politiquement incorrect 

aujourd'hui, le précédent ministre de l'Intérieur 
du gouvernement Barre, Christian Bonnet, avait 
commencé à expulser les « jeunes » étrangers 
coupables de délits, même nés ou élevés en Fran- 
ce, qui étaient renvoyés dans le pays d'origine de 
leurs parents. Une mesure jugée « impitoyable » 
que la LICRA avait vivement condamnée. 

Avec cette décision de Christian Bonnet, nous 
sommes loin de la suppression de la « double 
peine » façon Sarkozy^. Une décision emblé- 
matique que même la gauche n'avait pas osé 
prendre ! Un exemple, parmi bien d'autres d'ail- 
leurs, du besoin pathétique de la « droite » du 
système de quêter en toutes circonstances l'ap- 
probation de la gauche, et d'en rajouter si 
nécessaire... 

Dès octobre 1981 la loi Def ferre relative aux 
conditions d'entrée et de séjour des étrangers en 
France remplace donc la loi Bonnet de janvier 
1980, qui réprimait l'immigration clandestine 
selon « des moyens et des méthodes en contra- 
diction avec la générosité traditionnelle de notre 
pays ». La LICRA s'en félicite, mais pour cerner 
aussitôt que quelques points négatifs ou demeurés 
flous. Notamment la procédure visant à régler la 
situation des immigrés clandestins. 



293 La France LICRAtisée 

En février 1982, la LICRA est reçue par le 

s 

secrétaire d'Etat chargé des immigrés, François 
Autain, afin d'examiner la nouvelle politique 
d'immigration. Cette rencontre est importante 
car elle marque le point de départ d'une véri- 
table collaboration. Et d'une montée en puis- 
sance de la LICRA dans ce domaine également. 

Le Droit de Vivre relate le déroulement de 
l'entretien sur une page entière. 

La Ligue attaque d'emblée de façon claire : « La 
LICRA est la plus ancienne et la plus connue des 
organisations antiracistes. M. le Président de la 
République fait partie de son comité d'honneur. Nous 
estimons juste que la LICRA bénéficie de la part des 
pouvoirs publics de tous les avantages moraux et 
matériels dus à son influence. Les responsables et les 
membres de la LICRA souhaitent que, dans la lutte 
antiraciste menée par le gouvernement, la LICRA 
soit partie prenante et partie participante ». 

Cette assurance lui sera aussitôt fournie : 
« ...Vous souhaitez participer à l'action antiraciste 
du gouvernement. Nous le souhaitons aussi. Je vous 
indique d'ailleurs qu'en la matière, c'est nous qui 
sommes demandeurs. Nous pensons que la LICRA, 
qui est une organisation connue, méritante, aura 
dans les prochains mois un rôle important à jouer ». 



294 Politiquement incorrect 

Question suivante : « La philosophie de la 
LICRA, c'est le droit à la différence. Pensez-vous 
qu'elle s'inscrira, à brève ou moyenne échéance 
dans la réalité de la société française ? » 

s 

Réponse du secrétaire d'Etat... « Je le crois abso- 
lument. La société multiraciale, on arrivera à la 
faire accepter dans les esprits car elle est déjà une 
expression de la réalité française... Nous avons 
beaucoup à gagner à travailler ensemble. Il y a tout 
à faire encore ». 

S'il est vrai que la LICRA n'a pas ménagé ses 
efforts pour aider la gauche à prendre le pouvoir, 
elle n'a pas affaire à des ingrats. 

Dès la fin de 1982, pointe une revendication 
nouvelle : «L'opinion s'émeut périodiquement du 
problème de l'octroi aux immigrés des droits politiques 
et des droits syndicaux. (..) Un fait est certain., il 
ne serait pas admissible que du point de vue du droit 
individuel les étrangers ne bénéficient pas du même 
sort que celui qui est réservé aux Français ». 

Pierre Giraud, vice-président délégué de la 
LICRA et député socialiste, qui s'exprime en ces termes, 
poursuit en Précisant : « Toutes les politi- 
ques seront mauvaises, sauf celles qui seront inspirées 
par l'esprit de la LICRA : tolérance et respect de la 
différence. (...) L'action de la LICRA est capitale : 



295 La France LICRAtisée 

elle doit s'exercer auprès de la population immigrée, 
auprès des citoyens français, auprès des organismes 
locaux (conseils municipaux, départementaux, régio- 
naux) et auprès des pouvoirs publics ». 

Bref, la LICRA doit intervenir partout et en 
tout lieu. 

Mais hélas, les problèmes sont têtus, même 
avec un gouvernement de gauche et l'angélisme, 
réel ou apparent, peine à les résoudre. 

La LICRA s'interroge donc : « Une grande 
campagne audio -visuelle pourrait être aussi le 
moyen d'ouvrir les yeux aux Français sur le pro- 
blème de l'immigration et dissiper les préjugés et les 
peurs qu'éprouvent nombre de nos concitoyens lors- 
qu'ils sont en présence de travailleurs étrangers ». 

Une campagne audiovisuelle pour régler les 
problèmes de l'immigration ! 

Sans oublier le dernier gadget à la mode : « Vin- 
tercultur alité, source d'enrichissement mutuel pour 
les communautés ». Vingt ans après, on commence 
a en apprécier pleinement les résultats. 

Jacques Chirac et Lionel Jospin sont interrogés 
tous deux par le DDV en décembre 1983. Ce 
sera l'occasion, pour ces deux proches de la 
LICRA, d'énoncer un certain nombre de perles, 
du style : 



296 Politiquement incorrect 

« En ce qui concerne la France d'aujourd'hui, il 
est évident qu'elle compte trop de demandeurs d'em- 
ploi, y compris dans la population immigrée qui se 
trouve déjà chez nous, pour pouvoir envisager l'ar- 
rivée de nouveaux étrangers, arrivée qu'il convient 
résolument d'empêcher » (Jacques Chirac). 

« Notre politique en ce domaine est tout à fait 
claire. L'immigration est suspendue : la France n'ac- 
cueille donc plus de travailleurs immigrés» (Lionel 
Jospin) ... 

De l'art de jouer sur les mots et d'endormir les 
populations... 

Cela n'empêche pas la LICRA de souffler sur les 
braises et de faire monter la pression afin de se 
placer elle-même en situation d'arbitre. De pousser 
à l'immigration tout en criant au racisme. 

En février 1984, on peut lire sous la plume de 
Patrick Gaubert, alors responsable de la Ligue 
pour les Hauts-de-Seine, cette offre de services : 
«Actuellement le racisme est un véritable déto- 
nateur et devant la carence de la classe politique, 
la LICRA qui lutte contre les discriminations ra- 
ciales depuis 1927, est la seule organisation qui 
soit particulièrement apte et indépendante pour ai- 
der à trouver la solution à ces problèmes d'enver- 
gure nationale ». 



297 La France LICRAtisée 

Commence également à se poser avec de plus 
en plus d'acuité le problème de la délinquance liée 
à l'immigration, même s'il s'agit là d'un sujet 
particulièrement tabou. Le journaliste Ivan Levaï, 
membre du comité directeur de la LICRA, se 
plaint en novembre 1984, lors d'un dîner-débat 
sur le droit à la différence, de ce qu'à cause de Le 
Pen, le « terreau de l'insécurité » soit devenu un 
problème politique. Et il cite à titre d'exemple le 
nombre d'interpellations sur la sécurité à l'Assem- 
blée nationale, qui est passé de 7 en 1976 à 83 
en 1982 ! Ivan Levaï y voit d'office l'effet Le Pen, 
qui n'avait pourtant, en 1982, pas encore opéré sa 
grande percée. N'aurait-il pas été plus pertinent 
d'y voir plutôt une montée bien réelle de 
l'insécurité ? Une insécurité qui ne fera que croître 
par la suite, alors qu'il était possible de l'endiguer 
dès ses débuts par une politique de fermeté 
à l'égard des délinquants. 

Un tel refus de voir la réalité en face est assez 
sidérant. Et l'on mesure à quel point Jean-Marie 
Le Pen a joué un rôle essentiel pour la gauche. En 
rejetant tous les problèmes de l'immigration sur lui 
- problèmes dédaigneusement qualifiés de « fonds 
de commerce du FN » - elle a surtout évité 
d'avoir à les affronter et plus encore, à les résoudre. 



298 Politiquement incorrect 

C'est simple, si Le Pen n'avait pas existé, il 
aurait fallu l'inventer. 

L'alarmisme monte d'un cran en 1985 et la 
LICRA accuse certains intellectuels de faire sau- 
ter les tabous et de transgresser des interdits mo- 
raux. On pourrait objecter que c'est justement la 
raison d'être des intellectuels. 

Ailleurs peut-être, mais pas dans ce domaine 
sacro-saint, et surtout pas en France. C'est que 
certains - des journalistes, essentiellement 
osent s'attaquer à l'antiracisme, qui ferait le lit 
du racisme ! Le DDV les accuse de lancer un 
nouveau terrorisme : « Crier au racisme, c'est por- 
ter atteinte à l'honneur de la France », et sous le 
titre «Menacés d'être anti-français», s'alarme : 
« Et c'est ainsi que le tabou raciste pourrait com- 
mencer à sauter. Pas seulement dans le discours de 
la droite, mais aussi dans celui de la gauche, qui 
ne se voudrait pas moins patriote que la première. 
Et alors le piège aurait fonctionné et juifs, arabes, 
immigrés, se trouveraient coupés de la Nation, 
marginalisés pour être mieux exclus ». 

La palme de l'angélisme revient en 1985 à 
Bernard Stasi, alors vice-président centriste de 
l'Assemblée nationale, qui, à l'occasion de la 
sortie de son livre L'immigration, une chance pour 



299 La France LICRAtisée 

la France, a droit à deux pleines pages dans Le 
Droit de Vivre C'est un tout un collier de perles 
qu'égrène pour l'occasion ce membre éminent de 
la LICRA : 

A propos de la délinquance : « J'admets, même si 
l'on tient compte de ce correctif, qu'il y a une sur- 
délinquance étrangère en ce qui concerne la drogue . 

Mais cela s'explique très bien pas les conditions de 
vie difficile des immigrés qui, plus que d'autres, 
peuvent parfois checher une u fuite", une conso- 
lation, un paradis artificiel, dans le dépaysement 
qu 'ils vivent ». 

A propos de la démographie : « C'est d'abord 
une chance au point de vue démographique : au 
cours de ces dernières décennies, la croissance de la 
population en France a été due pour moitié aux 
naissances dans les familles étrangères ». 

A propos d'économie, un petit morceau d'an- 
thologie : « Par ailleurs, il ne faut pas négliger l 'atout 
des jeunes d'origine maghrébine qui, parlant arabe, 
pourraient nous aider à conquérir certains marchés. 
Nos relations avec les pays arabes, qui sont certaine- 
ment appelées à se développer, peuvent être facilités par 
la présence sur notre territoire de jeunes dynamiques, 
connaissant l'arabe, pouvant nous aider à manifester 
notre présence commerciale dans les marchés arabes ». 



300 Politiquement incorrect 

A ce stade, il est franchement superflu de faire 
des commentaires... 

Il n'empêche que les années 1984-1985 mar- 
quent un tournant. Le Front national com- 
mence, logiquement, à enregistrer des succès 
électoraux et le DDV, qui l'ignorait pratique- 
ment jusque-là, va désormais s'y intéresser jus- 
qu'à l'obsession, le diaboliser et l'associer sys- 
tématiquement à Vichy. Dans un premier temps. 
Car devant l'insuccès, on passera au niveau 
d'intimidation supérieur et le Front national sera 
carrément traité de parti fasciste et néo-nazi. 

Avec vingt années de recul, il est extraordinaire 
de constater dans le texte l'arrogance de certains 
journalistes donneurs de leçons à partir de leur 
microcosme parisien. Ainsi, sous le titre « Bana- 
lisation dangereuse du racisme », on peut lire dans 
le DDV ces propos d'Ivan Levaï, encore lui : « Le 
journaliste que je suis est un témoin. Je constate que 
l'immigration est l'un des thèmes forts des élections 
mars 1986. Certains, dans leur logique discrimi- 
natoire, voudraient exclure les étrangers. Je viens de 
déjeuner avec Yves Montand. Faudra-t-il expulser les 
Italiens de cette génération? Demandera-t-on à Isa- 
belle Adjani, Marie- josé Nat et bien d'autres, de 
quitter le pays? ». 



30 1 La France LICRAtisée 

En 1986, c'est la première cohabitation, et 
Jacques Chirac se retrouve premier ministre. Il 
élargit les compétences de la Commission con- 
sultative des Droits de l'Homme, dont il confie la 
présidence à Jean Pierre-Bloch, également prési- 
dent de la LICRA. L'ambition de la Commission 
est, selon les vœux de son nouveau responsable, 
« de devenir une autorité morale indépendante qui 
renforcera la réputation de la France, patrie des 
droits de l'homme ». 

Cette même année, une nouvelle loi régle- 
mente les conditions d'entrée et de séjour des 
étrangers en France. La LICRA y a participé 
activement et a réussi à faire modifier un certain 
nombre de dispositions. Mais elle est loin de 
s'estimer globalement satisfaite. Elle s'oppose en 
particulier à un autre projet, particulièrement 
crucial. Celui de la réforme du code de la 
nationalité. 

Le projet de réforme du code de la nationa- 
lité 

Ce projet - expressément inscrit dans la 
plateforme RPR-UDF de janvier 1986 - prévoit 
notamment que l'acquisition de la nationalité 
devra résulter d'une demande et ne sera donc 



302 Politiquement incorrect 

plus automatique. Une autre disposition vise à 
empêcher les « mariages blancs ». 

La LICRA monte immédiatement au créneau 
et publie un communiqué dont le préalable est 
le suivant : « La LICRA, ayant pris connaissance 
du projet de loi portant réforme du code de la 
nationalité a déploré de ne pas avoir été consultée 
au préalable, lors de son élaboration, sur le projet. 

Elle considère qu'une réforme du code de la 
nationalité dans la situation actuelle de montée du 
racisme et de la xénophobie est inopportune et 
dangereuse. Elle se tient à la disposition de la 
commission des lois pour être entendue ». 

Un peu plus loin dans ce texte, la LICRA sou- 
haite « que soient supprimées du projet de loi soumis 
au parlement toutes causes générales d'exclusion du 
bénéfice de V acquisition de la nationalité française 
fondées sur le défaut "d'assimilation à la commu- 
nauté française" notamment par une connaissance 
suffisante selon sa condition de la langue fran- 
çaise (...) La LICRA fait en tous cas des réserves au 
sujet de l'article 6 du projet de loi qui fait de certai- 
nes condamnations une cause d'exclusion du bénéfice 
de l'accession à la nationalité française ». 

Ainsi donc, sur les points importants que 
constituent la démarche volontaire, le désir réel 



303 La France LICRAtisée 

d'intégration par la langue, le rejet de certaines 
catégories de délinquants, la LICRA tâche au 
maximum de vider le projet de sa substance. 
Devant la levée de boucliers, le gouvernement 
va reculer. La promesse électorale sera jetée aux 
oubliettes. Le projet de réforme du code de la 
nationalité, sujet sensible s'il en est, sera enterré 
et ne réapparaîtra qu'en 1993. 

Cette immuable solidarité entre juifs et arabes 
que défend imperturbablement la LICRA n'est 
pourtant pas vraiment payée de retour. Déjà à ce 
moment-là, en 1986, le DDV dénonce l'antisé- 
mitisme d'une revue publiée en France, Tribune 
musulmane. Dans son 2 e numéro, cette revue ose 
écrire : « Peuples de France ! observez, écoutez, 
lisez, analysez lactualité. Vous y verrez mieux les 
techniques d'infiltration et de manipulation d'une 
opinion désormais contrôlée à merveille par des 
lobbies antinationalistes ». 

Le DDV en tire la conclusion suivante... « On 
ne peut être plus clair., il s'agit de dresser les Fran- 
çais contre d'autres Français, les juifs, en précisant 
que ceux-ci agissent dans le sens opposé à l'intérêt 
de la France ». 

En mai 1988, Le Droit de Vivre consacre un 
autre long article aux tentatives de mobilisation 



304 Politiquement incorrect 

des immigrés arabes contre les juifs, qui se pour- 
suivent, et rend compte très longuement d'un 
éditorial intitulé « Dans le sang et les larmes », 
paru en avril dans l'hebdomadaire algérien 
Actualités de V émigration. Entre autres amabilités, 
cet éditorial accuse : « Israël vote en France 
comme il vote aux Etats- Unis. Il y exerce même un 
vote de première classe, un vote de premier collège. 
Peut-on dès lors appeler nations libres des pays où 
la classe politique pour accéder au pouvoir doit ac- 
cepter le diktat d'un vote qui se dit juif et apparaît 
nécessaire et incontournable uniquement par les 
politiciens qui n'ont ni le courage ni la dignité de 
lui opposer les intérêts nationaux, la souveraineté 
nationale dont ils se prétendent par ailleurs les 
porte-paroles ». 

Il est tout de même troublant de constater que 
malgré la multiplication de faits semblables - qui 
illustrent une montée certaine de l'antisémitisme 
arabe, y compris en France - et leur parfaite 
connaissance par la LICRA, celle-ci continue 
comme si de rien n'était à favoriser l'entrée dans 
notre pays d'une population arabo-musulmane 
toujours plus nombreuse. Et à interdire, sous 
peine de poursuites judiciaires, toute opposition. 



305 La France LICRAtisée 

De 1988 à 1995 - François Mitterrand/2 

Nouveau pas de deux : au début de 1989, le 
nouveau ministre de l'Intérieur, Pierre Joxe, 
annonce un nouveau projet de loi sur les 
conditions d'entrée et de séjour des étrangers en 
France, destiné à abroger les dispositions anté- 
rieures prises par le gouvernement de cohabi- 
tation, jugées trop répressives. 

La LICRA s'en réjouit : « C'est avec satisfaction 
que la LICRA prend acte de la volonté conforme à 
ses vœux, exprimée par le président de la République, 
de voir réviser les règles d'entrée et de séjour des 
étrangers en France. La LICRA souhaite en cette 
année du bicentenaire que soit évité un nouveau 
replâtrage de mesures dépassées et de circonstance, au 
profit d'une réelle codification de l'immigration con- 
forme aux droits de l'homme. En particulier, la 
LICRA insiste pour que le contentieux de l'immigra- 
tion soit confié dans son entier aux juges judi- 
ciaires ». 

Plutôt qu'à la police, réputée moins conci- 
liante. 

D'ailleurs, il n'y a vraiment pas urgence, à ses 
yeux, à limiter l'immigration : à la fin de 1989, 
la LICRA annonce des chiffres précis relatifs au 
nombre d'étrangers en France - des chiffres tirés 



306 Politiquement incorrect 

des statistiques officielles, naturellement - et en 
tire un diagnostic définitif : « Néanmoins, avec 
un flux de près de 100 000 immigrés par an, la 
France n'est ni "envahie ", ni menacée. Elle est en 
mesure de les accueillir, de les aider par une 
politique intelligente d'intégration ». 

En 1990, le gouvernement prend trois décrets 
autorisant les Renseignements Généraux et la 
Justice à constituer des fichiers informatisés 
comportant certaines données sur « les origines 
raciales ou les opinions politiques, philosophi- 
ques ou religieuses ou les appartenances syndi- 
cales ». La Commission Informatique et Libertés 

s 

ainsi que le Conseil d'Etat ont donné leur aval 
à ces décrets, dont l'objectif principal est de 
lutter contre le terrorisme. 

Mais la tempête se déchaîne immédiatement. 
Considérant que « les droits fondamentaux pro- 
clamés par les Pères de notre République sont ba- 
foués », la LICRA et les autres associations anti- 
racistes donnent aussitôt de la voix. Avec un plein 
succès, car les deux décrets relatifs aux Ren- 
seignements Généraux sont prestement retirés. 

Reste celui sur la Justice. La LICRA exige 
également son retrait en s'arrogeant le droit de 
décider de son inutilité : 



307 La France LICRAtisée 

« Le décret du 2 février 1990, toujours en vi- 
gueur, menace la liberté des personnes. Il autorise 
en effet toutes les juridictions de V ordre judiciaire 
et de V ordre administratif à faire apparaître de 
telles données. 

Les informations requises par cette disposition ne 
sont pas utiles au fonctionnement de ces juridictions 
et ouvrent la porte à toutes les dérives. La démocratie 
ne doit pas aller à reculons, mais se développer dans 
la transparence et la garantie des libertés ». 

Arrive l'époque des petites phrases. Nous 
sommes en 1991, les législatives approchent. Les 
Français s'exaspèrent de plus en plus, et les hom- 
mes politiques essaient de récupérer (déjà !) l'élec- 
torat de Jean-Marie Le Pen. Jacques Chirac parle 
des odeurs nauséabondes et des bruits générés par 
les immigrés dans les immeubles à cohabitation 
difficile, Valéry Giscard d'Estaing parle d'inva- 
sion et de rétablissement du droit du sang pour 
l'attribution de la nationalité française. 
François Mitterrand, du haut de son Olympe, 
s'offre le luxe de jouer les pères nobles en dé- 
nonçant « des querelles qui ne grandissent per- 
sonne ». Le président de la LICRA, quant à lui, 
adresse au sénateur Michel Poniatowski une lettre 
pour le morigéner, dans laquelle il considère 



308 Politiquement incorrect 

comme « grave et inadmissible, le parallèle sinon 
l'amalgame que vous faites entre l'occupation alle- 
mande (les lourdes pertes et malheurs qu'elle a en- 
traînés, la perte de notre identité, l'humiliation que 
nous en avons subie) et « l'occupation » - il est vrai 
non militaire - de la France par les immigrés, 
dénoncés comme porteurs du risque du « changement 
de notre identité sous une pression extérieure ». 

Le projet de réforme du code de la nationalité, 
sujet toujours aussi sensible, continue à traîner 
en longueur. Mais il réapparaît en 1993 à la 
faveur de la seconde cohabitation. 

Quelques jours avant sa présentation à l'As- 
semblée nationale, la LICRA « réaffirme avec 
force son opposition à toute remise en cause du 
principe républicain du droit du sol. Pour elle, un 
enfant né en France doit pouvoir acquérir la natio- 
nalité française automatiquement, sans formalité. 

Elle demande le retrait pur et simple du projet 
qui remet ce droit en cause ». 

Elle n'obtient pas satisfaction, car le projet est 
finalement adopté. Sous le titre : « Code de la 
nationalité : une réforme inutile et dangereuse », la 
LICRA n'aura pas de mots assez durs pour 
dénoncer cette réforme « déséquilibrée, adoptée 
dans un contexte de suspicion ». 



309 La France LICRAtisée 

Cette seconde cohabitation est marquée par le 
souci du gouvernement Balladur - Charles 
Pasqua est ministre de l'Intérieur - de s'attaquer 
plus fermement au problème de l'immigration, 
qui empoisonne de plus en plus la vie politique. 

s 

Edouard Balladur en est parfaitement conscient, 
qui déclare au journal Le Monde : « Chacun sait 
qu'une très grande majorité des Français pensent 
qu'il faut adapter nos règles à une situation 
nouvelle caractérisée par l'ampleur des mouvements 
de population (...) Vous ne pouvez pas nier qu'il 
y a dans notre société une inquiétude très grande ». 

Outre la réforme du code de la nationalité, 
sont mis sur la sellette les contrôles d'identité, la 
délinquance des jeunes, le droit d'asile. 

En réponse à une campagne de Charles Pasqua 
sur le thème de la délinquance et de l'immigration, 
la LICRA s'évertue à rejeter systématiquement tous 
ses arguments, pour conclure : «D'une manière 
générale, mettre en évidence ces statistiques de la 
délinquance, en ce moment, c'est jeter une fois encore 
la suspicion sur l'ensemble des immigrés et exacerber 
les réflexes sécuritaires et de peur de la population, et 
par là-même accroître la xénophobie ambiante ». 

En d'autres termes, pour ne pas accroître la 
xénophobie ambiante, il faut pratiquer la politi— 



310 Politiquement incorrect 

que de l'autruche, s'enfouir la tête dans le sable 
pour ne rien voir, et surtout pas ces statistiques 
politiquement très incorrectes. 

De même, la Ligue condamne avec la plus 
grande fermeté le projet de loi sur les contrôles 
d'identité. Elle lance « un appel à tous les parle- 
mentaires pour qu'ils s'opposent à ce texte qu'elle 
considère comme un recul du droit de la personne 
et qui porte atteinte aux libertés fondamentales ». 

Toutes ces mesures, que l'on appellera les lois 
Pasqua, vont être systématiquement rejetées par la 
LICRA, qui n'admet pas en réalité, bien qu'elle 
s'en défende, le moindre contrôle du flux migra- 
toire, et considère que ce n'est jamais le bon 
moment de prendre des dispositions répressives. 
Elle va condamner également les centres de rétention 
administrative et les « conditions particulièrement inhu- 
maines de détention faites aux étrangers et plus 
particulièrement au dépôt de Paris ». Elle annonce 
qu'elle interviendra judiciairement pour que 
soient condamnées « ces pratiques inqualifiables ». 

Le Conseil constitutionnel, présidé par Robert 
Badinter, ancien garde des sceaux, et membre de 
la LICRA, est appelé à la rescousse et relève, à 
propos des lois Pasqua, un certain nombre 
d'« atteintes excessives » aux droits fondamen- 



311 La France LICRAtisée 

taux. Il censure toute une série d'articles, relatifs 
notamment à l'interdiction du territoire pour les 
étrangers expulsés, au délai imposé pour faire 
venir en France un nouveau conjoint, à la lutte 
contre les mariages blancs. 

Charles Pasqua déclarera que le Conseil cons- 
titutionnel empêche le gouvernement d'appli- 
quer sa politique, particulièrement en matière de 
droit d'asile. 

Pourtant, les banlieues dites sensibles ont un 
ministre à l'écoute, membre lui aussi de la 
LICRA, qui plus est : Simone Veil, dont on a 
oublié aujourd'hui qu'elle fut, et d'ailleurs une 
pléthore d'autres avant et après elle, ministre de 
la Ville. 

Pour quels résultats ? Ce n'est pourtant pas 
faute de crédits, car des sommes colossales ont 
été déboursées à cet effet par le contribuable. 

Mais, s'il n'y a effectivement pas de résultats, 
ce n'est pas de la faute des immigrés. C'est de la 
faute des Français, décidément toujours aussi 
racistes. 

C'est en tout cas ce que Le Droit de Vivre af- 
firme explicitement en 1993 : « Cette intégration 
est en marche. De multiples signes l'indiquent : la 
réaction anti-drogue du quartier des Biscottes, dans 



312 Politiquement incorrect 

la banlieue de Lille, la liesse de Marseille unie 
dans la célébration de la victoire de l'O.M ; la 
promotion scolaire et sociale des jeunes filles ; l'aide 
à la scolarité des plus jeunes dans les cités, etc. 

Mais cette intégration, très souvent acquise avec 
plus de difficultés que pour les précédentes vagues 
d'immigration, est fragile. Si la majorité des immi- 
grés ont d'ores et déjà donné la preuve de leur 
volonté de s'intégrer, il n'est pas certain que la 
majorité des Français y soient prêts, fasse l'effort 
d'accueil des immigrés et facilite leur intégration. 
C'est à cette tâche qu'il faut à présent s'atteler ». 

La réforme du droit d'asile 

En 1993, elle entraîne de nouvelles récrimi- 
nations. Un paragraphe de la nouvelle loi re- 
connaît à la France le droit souverain d'accorder 
le droit d'asile à qui elle veut. Il s'agit là d'un 
recul pour la LICRA, qui s'indigne de ce que 
« ce droit de demander le secours et le refuge de la 
France n'est plus absolu et inaliénable. De plus, le 
droit d'asile universellement reconnu et codifié par 
la convention de Genève est désormais lié en France 
aux problèmes de l'immigration et du contrôle des 
flux en un amalgame qui lui fait perdre, dans les 
pratiques, son caractère sacré ». 



313 La France LICRAtisée 

En 1993 et 1994, elle organise donc avec ses 
associés habituels des manifestations monstres à 
Paris et dans toute la France pour exiger le 
retrait des lois Pasqua. Cinq thèmes sont choi- 
sis : contre les exclusions et la régression sociale 
- pour l'abrogation des lois Pasqua-Balladur - 
pour la défense du droit d'asile - pour l'égalité 
des droits - pour le droit de vote des immigrés. 
Associations, partis et syndicats défilent sous les 
banderoles proclamant : « Non aux boucs émis- 
saires », « Halte aux expulsions », « Pasqua, l'apar- 
theid on n 'en veut pas », « Nous sommes tous des 
immigrés ». 

Faute d'avoir pu faire prévaloir totalement son 
point de vue, la LICRA a au moins su indiquer 
les limites à ne pas dépasser. 

Elle mène dès lors une guerre de tranchées et 
s'oppose autant qu'elle le peut à la mise en 
application des lois. Un exemple éclairant : 
début 1994, deux jeunes Algériens sont expulsés 
« en urgence absolue » vers l'Algérie par le minis- 
tre de l'Intérieur, à la suite de leur interpellation 
à l'issue d'une manifestation. Une intense cam- 
pagne médiatique est aussitôt déclenchée et le 
TGI de Lyon ordonne leur retour. Charles 
Pasqua dénonce à ce propos « une tentation de 



314 Politiquement incorrect 

la part de certains juges de créer une jurisprudence 
contraire à la loi ». 

Le DDV de mai 1994, ne cachant pas sa sym- 
pathie pour les magistrats, commente l'affaire sous 
le titre éloquent de : « Mise au pas de Pasqua ». 

Au moment même où, en France, la LICRA 
ne cesse de soutenir autant qu'elle le peut l'im- 
migration arabo-musulmane et dénonce inlas- 
sablement toute tentative d'endiguer le flot, le 
conflit entre Israël et les pays arabes - et le ter- 
rorisme qui en découle - atteint des proportions 
assez gigantesques. Le Droit de Vivre relate en 
septembre 1994, sous le titre « Carnage anti- 
sémite à Buenos Aires », l'attentat contre l'im- 
meuble de l'association juive AMIA. Cet atten- 
tat, revendiqué par le groupe intégriste 
pro-iranien Jihad islamique se solde par le bilan 
énorme de 100 morts et 200 blessés ! 

Un attentat que le premier ministre israélien 
Yitzhak Rabin qualifie de «pire perpétré contre la 
communauté juive depuis la deuxième guerre 
mondiale ». 

Le même groupe avait déjà à son actif l'at- 
tentat de mars 1992 contre l'ambassade d'Israël 
toujours à Buenos Aires, qui avait fait alors 30 
morts et 200 blessés. 



315 La France LICRAtisée 

A côté de ce type d'actions, l'antisémitisme 
français fait quand même pâle figure. Il 
n'empêche que c'est lui qui est dénoncé à lon- 
gueur de colonnes. 

Depuis 1995, Jacques Chirac 

Jacques Chirac élu - on est loin de l'enthou- 
siasme de 1981 - la LICRA exprime immé- 
diatement le souhait que le nouveau président de 
la République « respecte les engagements qu'il a 
pris auprès de nous pour mettre un terme à ces 
agissements ». 

Quels engagements ? Quels agissements ? Sur 
ce second point, au moins, on est vite ren- 
seignés : les agissements du Front national, bien 
sûr, et comme on ne prête qu'aux riches, ses 
« ramifications avec des groupes d'extrême droite 
fascisants ». 

D'ailleurs, la LICRA poursuit en précisant 
qu'elle « rappellera prochainement ses positions au 
président de la République et au gouvernement ». 
A bon entendeur... 

La Ligue poursuit sa lutte opiniâtre contre 
toutes les mesures de fermeté visant à tenter de 
maîtriser l'immigration. Après Pasqua, il s'agit à 
présent de dire non aux lois Debré et Toubon, 



316 Politiquement incorrect 

sous les slogans « Non aux lois racistes » ou « Non au 
racisme et à l'intolérance ». 

Lorsqu'est rendu public en avril 1996 le 
rapport parlementaire Phillibert-Sauvégo, qui 
propose au contraire de durcir les lois Pasqua, la 
LICRA dénonce carrément « des mesures extré- 
mistes, une escalade de mesures qui constituent des 
atteintes graves aux libertés ». 

Là encore, devant la levée de boucliers, le pre- 
mier ministre, Alain Juppé, se hâte de faire machi- 
ne arrière, déclarant que le dossier de l'im- 
migration « n'est pas clos » et que « nous prendrons 
les dispositions législatives ou réglementaires qui 
s'imposent le moment venu ». 

Un test grandeur nature va permettre, dès l'été 
suivant, de mesurer le degré de fermeté du 
pouvoir à l'égard des problèmes d'immigration, 
L'affaire des immigrés clandestins, improprement 



(36) 



». 



mais judicieusement baptisés « sans-papiers 
installés dans l'église Saint-Bernard à Paris, tient 
la France en haleine durant tout l'été 1996. Ils 
en seront finalement expulsés à la fin du mois 
d'août, après bien des atermoiements, expulsion 
que la LICRA juge inadmissible. 

A propos de ce type d'occupation, qui, vue le 
succès médiatique, se renouvellera bien souvent, 



317 La France LICRAtisée 

on peut d'ailleurs se poser la question : pourquoi 
cela se passe-t-il toujours dans une église ? 
Pourquoi pas, pour changer, dans une mosquée ? 
Ou dans une synagogue ? 

A l'automne de la même année, le ministre de 
l'Intérieur, Jean-Louis Debré, présente à nouveau 
un projet de loi sur l'immigration. Tout comme 
les précédents, ce projet est clairement condam- 
né par la Ligue, qui n'y voit qu'un moyen d'ac- 
centuer « la logique de politique restrictive et 
répressive de l'immigration mise en place ». 

Elle prend donc au printemps 1997 la tête des 
manifestations contre la loi Debré. On inaugure 
à cette occasion le terme qui fera florès par la 
suite, de mobilisation citoyenne. Tout ce qui est 
antiraciste devient à présent citoyen. Comme le 
mot raciste - et certains autres, d'ailleurs - le 
mot citoyen prend un nouveau sens, qui n'est 
plus celui du dictionnaire. Il est désormais in- 
vesti d'une charge morale. Cette appropria- 
tion^ est bien sûr un moyen supplémentaire 
d'exclure « les autres », les racistes, ceux qui, for- 
cément, ne peuvent pas être des citoyens nou- 
velle version. Une façon de les pousser un peu - 
plus dans les poubelles de l'histoire chères à 
Trotski. 



318 Politiquement incorrect 

Un certain nombre d'intellectuels et de gens 
du spectacle se croient autorisés à appeler à la 
désobéissance civique, c'est-à-dire au refus pour 
les hébergeants de signaler à la mairie le départ 
de leurs invités étrangers, comme la nouvelle loi 
le prescrit. 

Ils bénéficient évidemment d'un très large 
écho médiatique. 

Lors de la première manifestation, le 22 fé- 
vrier, la LICRA « dénonce avec fermeté les dérives 
dangereuses dans lesquelles le projet de loi Debré 
entraîne notre pays. Sans discernement, en créant 
l'amalgame, au nom d'une politique de l'immi- 
gration, certes nécessaire, ces mesures répressives ten- 
dent à nier le fondement même de notre Etat de 
droit en bafouant les principes fondamentaux de la 
République et en permettant à l'extrême droite la 
justification de son discours raciste et xénophobe. 

La LICRA condamne une politique qui porte 
atteinte à la liberté et à la dignité des étrangers 
vivant en France mais également des Français qui 
les accueillent et les soutiennent (...) La LICRA 
appelle tous ses adhérents et ses sympathisants à se 
mobiliser pour faire barrage à ce projet de loi ». 

Autrement dit, il faut une politique de l'immi- 
gration, mais sans répression... 



319 La France LICRAtisée 

Il est intéressant de noter que la Ligue con- 
sidère que ces mesures «justifient le discours de 
l'extrême droite ». En d'autres termes, serait-il 
possible que l'extrême droite puisse en fin de 
compte avoir raison ? Ce qui signifierait en clair 
que les associations antiracistes pourraient avoir 
tort ? Il s'agirait là d'une catastrophe absolue 
qu'il convient de masquer à tout prix en élimi- 
nant l'extrême droite. Ce qui est de toute façon 
plus simple que d'éliminer le problème qu'elle 
dénonce. 

Avant que « l'irréparable », selon ses propres 
termes, ne soit commis, la LICRA en appelle au 
président de la République, Jacques Chirac, afin 
qu'il décrète un moratoire de six mois pour que 
« la sérénité revienne ». 

La mobilisation « spontanément placée sous le 
signe du civisme et du sursaut citoyen », se poursuit 
en province, notamment à Strasbourg, où le 
Parlement européen se permet d'inviter le gouver- 
nement français à retirer le projet de loi Debré. 

Face à ce tir de barrage, le ministre de l'Intérieur 
fait finalement machine arrière, lui aussi, et dé- 
clare : « Il est hors de question d'envisager, en France, 
une immigration zéro (...) Notre pays a besoin, pour 
son développement culturel pour son développement 



320 Politiquement incorrect 

économique et social, de cet apport d'étrangers. Il faut 
donc continuer à les accueillir en France ». 

La loi est cependant votée avec de nombreux 
amendements et le Conseil constitutionnel, tou- 
jours présidé par un socialiste, mais cette fois par 
Roland Dumas, à nouveau appelé à la rescousse, 
en censure plusieurs dispositions. 

La gauche revient au pouvoir en 1997, à la 
faveur de la dissolution de l'Assemblée nationale 
prononcée par Jacques Chirac. La LICRA rappelle 
immédiatement au parti socialiste, et en particulier 
à Lionel Jospin, ses promesses de campagne : en 
premier lieu, la suppression des lois Pasqua et 
Debré. Elle souhaite également la reprise du projet 
de loi visant à réprimer la propagation des idées 
racistes, ou projet Toubon, et déclare sans amba- 
ges : « La LICRA a souhaité que ces modifications 
législatives importantes puissent être menées rapide- 
ment et que les projets de loi soient déposés sur le 
bureau des Assemblées dès l'automne ». 

Le nouveau gouvernement n'abrogera cepen- 
dant pas les lois honnies, qu'en son for intérieur, 
il sait nécessaires. Elles seront cependant large- 
ment aménagées. 

La LICRA n'est pas vraiment satisfaite, mais 
néanmoins, faute de mieux, « acueille favorable- 



321 La France LICRAtisée 

ment certaines avancées dans les avant-projets de 
loi du garde des sceaux et du ministre de Vlnté- 
ieur ». 

Un sujet scabreux, la préférence nationale : 

En 1932, le Cartel des gauches remportait les 
élections législatives et, à la demande de la CGT, 
faisait voter une loi protégeant la main d'œuvre 
nationale. La préférence nationale est donc bel et 
bien une loi de gauche, qui sera abrogée en 1981 
par François Mitterrand. 

Elle constitue l'une des revendications prin- 
cipales du Front national et, à ce titre, est bien 
évidemment rejetée par la LICRA, pour qui 
« inscrire la préférence nationale dans les discours 
politiques, c'est y inscrire le racisme, la xénophobie, 
l'antisémitisme et la violence ». 

Rappelons au passage que dans pratiquement 
tous les pays du monde existe un traitement 
différencié entre nationaux et résidents étrangers, 
ce que l'on nomme chez nous préférence natio- 
nale. Dans pratiquement tous les pays du mon- 
de, sauf en France depuis 1981. 

s 

Edouard Balladur ose transgresser ce tabou en 
juin 1998. Lors d'une émission de radio, il plaide 
pour la constitution d'une commission de ré- 



322 Politiquement incorrect 

flexion sur la préférence nationale ouverte au FN 
et pose la question suivante : « Est-il normal ou 
anormal légitime ou contraire aux principes répu- 
blicains traditionnels, de réserver certaines prestations 
aux nationaux et de les refuser - pour une durée 
d'ailleurs à déterminer - aux résidents étrangers ? ». 
Il est aussitôt fermement condamné par toute 

V s 

la gauche, et par la LICRA. A ses yeux, Edouard 
Balladur est entré dans le clan des hommes 
politiques de droite prêts à pactiser avec le parti 
de Jean-Marie Le Pen. Le danger est grand, car 
d'autres pourraient lui emboîter le pas. Le dis- 
cours se fait donc mélodramatique : 

« C'est une faute grave qui met en cause les 
valeurs fondamentales de notre République. Aucun 
démocrate digne de ce nom ne peut transiger sur 
cette notion sans remettre en cause le mot "égalité" 
que l'on retrouve sur le fronton des 36 000 com- 
munes de France. S'inscrire dans cette démarche, 
c'est porter un mauvais coup à nos valeurs républi- 
caines ». 

Apparemment, certains membres de la com- 
munauté juive commencent quand même à s'in- 
quiéter de la tournure des événements. Ils seront 
immédiatement condamnés sans ambiguïté par 
la Ligue. 



323 La France LICRAtisée 

En juillet 1998, sous le titre « Pour l'interdic- 
tion d'une association », le DDV révèle que : « La 
LICRA, représentée par M e Jean-Serge Lorach, a 
demandé l'interdiction, pour trouble à l'ordre 
public, d'une association dénommée "Comité Na- 
tional des Juifs Français" dont les statuts précisent 
que son but est de "mettre en garde l'opinion pu- 
blique et plus particulièrement nos coreligionnaires, 
contre l'extrême péril que constitue l'invasion du 
territoire national par une marée musulmane 
qu'encadrent des intégristes fanatiques qui sou- 
tiennent le terrorisme, méprisent les lois et se refu- 
sent à respecter la neutralité politique qui s'impose 
à tout étranger dans un pays qui l'accueille" ». 

Le président de ce Comité, Jean-Charles 
Bloch, avait déclaré dans un communiqué : 

« Avec la meilleure volonté intellectuelle et la plus 
grande souplesse d'esprit dont je suis capable, je 
narrive pas à établir une relation entre le massacre 
délibéré par les nazis de populations juives de l'Eu- 
rope occupée et le refus de voir s'installer aujourd'hui 
en France une marée maghrébine prolifique et 
difficilement assimilable qui va, à court terme, 
bouleverser tous les équilibres de la nation (...) Pour 
besoins de la cause - gauchisme favorable à 
F immigration massive - on met dans le même 



324 Politiquement incorrect 

panier des Israélites, français depuis des générations, 
qui sont parfois professeurs d'universités ou grands 
industriels et qui sont relativement peu nombreux, 
avec les millions d'immigrés attirés par les avantages 
matériels qu'ils trouvent en France ». 

Au cours des années suivantes, la LICRA ne 
cessera à aucun moment de manifester son 
acharnement, principalement judiciaire, à ren- 
contre de tous ceux qui remettent en question 
les dogmes qu'elle impose, notamment en ma- 
tière d'immigration. Elle mène un combat achar- 
né contre le Front national et réussit à établir un 
cordon sanitaire autour de ce parti, dont les 
sympathisants sont exclus sans ménagement de 
la vie publique et traités en pestiférés. 

L'effet dissuasif est remarquable. Le courage 
n'étant pas la vertu première du personnel poli- 
tique de notre pays, pratiquement tous obéissent 
au diktat sans broncher et même adhèrent à la 
Ligue, s'assurant ainsi la paix. Du moins tant 
qu'ils restent sur les rails. 

Une certaine inquiétude, puis une vraie préoc- 
cupation, vont quand même finir par percer à la 
LICRA. L'islamisme radical prend de l'ampleur 
- comme il n'était pas difficile de le prévoir - et 
face à ce phénomène, qui s'accompagne de 



325 La France LICRAtisée 

manifestations d'antisémitisme, le discours de la 
Ligue commence à évoluer. Mais n'est-il pas trop 
tard ? 

Apparemment pas, puisque le DDV de décem- 
bre 2002 se félicite encore de ce que le président 
de la LICRA, Patrick Gaubert, soit un « ami de 
vingt ans » de Nicolas Sarkozy et qu'il l'ait à ce 
titre convaincu d'assouplir sa position sur la 
double peine. Et qu'il serve par ailleurs « d'in- 
terface entre le ministère et les coordinations de 
sans-papiers ». 

Un antisémitisme politiquement très incor- 
rect 

Il n'en demeure pas moins qu'à partir de l'an 
2000, la LICRA s'alarme de plus en plus d'une 
véritable recrudescence des actes antisémites. 

Il ne s'agit plus cette fois d'un « climat » qu'elle 
a l'habitude de dénoncer, mais de faits bien réels, 
fréquents, et qui commencent à toucher tout 

s 

particulièrement les établissements de l'Educa- 
tion nationale. 

Et comble de malheur : ils ne sont pas imput- 
ables à l'extrême droite. Il faut se rendre à une 
évidence des plus désagréables : il s'agit d'un 
antisémitisme arabo-musulman qui provient en 



326 Politiquement incorrect 

droite ligne des quartiers peuplés d'immigrés. 
Ceux-là même que la LICRA défendait avec tant 
de sollicitude. 

Cette fois, finies l'indulgence et la solidarité 
inébranlables ! 

A partir de ce moment-là, dans les pages du 
DDV, le combat contre l'antisémitisme prend à 
nouveau résolument le pas sur le combat anti- 
raciste. Car cette fois, c'est sérieux : 

« Oui, l'antisémitisme est le pire des racismes ! 
(...) Il n'y a pas d'excuses à l'antisémitisme. Les 
antisémites ne sont pas des voyous comme osent le 
dire les dirigeants du MRAP ! Ce sont des barba- 
res ! Des ennemis de l'humanité ! ». 

Ailleurs, on peut lire : «Aujourd'hui, les politi- 
ques ne réagissent pas afin, disent-ils, de ne pas 
envenimer les relations entre juifs et arabes (...) On 
n 'ose pas désigner clairement les petits délinquants des 
banlieues de crainte de les stigmatiser et ils béné- 
ficient en grande partie de l'indulgence des pouvoirs 
publics en raison de leur situation sociale supposée ». 
Ou encore, en mars 2003 : « On assiste, en 
effet, dans certaines banlieues et pas seulement là, 
de la part de certains individus manipulés et 
faibles - et n'ayons pas peur des mots si l'on veut 
éradiquer ce mal - d'origine maghrébine, à des 



327 La France LICRAtisée 

« ratonnades antijuives » d'un autre siècle motivées 
par le désir de faire corps avec le peuple palestinien 
«ployant sous le joug de l'armée israélienne». 

Des voyous ! des barbares ! d'origine maghré- 
bine ! Exactement les mêmes propos qui condui- 
saient peu de temps auparavant - et qui condui- 
ent toujours d'ailleurs - les « racistes » tout 
droit en correctionnelle à l'instigation de cette 
même LICRA. 

Dans la tribune déjà citée, « Pour un Vatican II 
de l'islam », on trouve cette phrase ô combien 
révélatrice : « La République ne peut tolérer que sur 
son sol une poignée de fous de dieu, ou de désœuvrés 
sous l'emprise de prédicateurs enflammés, commet- 
tent des actes anti-juifs sous le prétexte fallacieux de 
protester contre la politique de Sharon ». 

Des actes anti-juifs ! Tout le problème est là. 

Du coup, la France est accusée de revivre « les 
heures les plus sombres de son histoire, de l'affaire 
Dreyfus à l'antisémitisme d'Etat sous l'Occupa- 
tion ». 

On est bien loin de l'époque où, en mai 1982, 
le DDV publiait une très longue « Lettre ouverte 
à un lecteur antiraciste... mais », en réponse à un 
lecteur qui se plaignait justement, entre autres, 
de la délinquance des « jeunes ». 



328 Politiquement incorrect 

Le DDV lui répondait alors doctement : « Si 
aujourd'hui conscience a été prise d'une situation 
devenue explosive, il faudra des années pour remédier 
à un état de choses déplorable sur tous les plans et 
sortir de l'engrenage violences-répression, répression-, 
violences, là où il faut apporter de la compréhension, 
du cœur, de la patience et... du travail ». 

Lorsque la violence n'était pas antisémite, mais 
dirigée simplement contre les Français dits de 
souche, il convenait d'y répondre par la com- 
préhension, le cœur et la patience... Ce temps- 
là est révolu. 

Alors qu'autrefois il était strictement défendu 
de s'attaquer aux « jeunes » des banlieues, éter- 
nelles victimes de la société, voilà que le langage 
change du tout au tout. 

En février 2002, dans une tribune libre, le 
DDV fait l'éloge du Royaume-Uni, qui ne 
recense aucun acte antisémite malgré une forte 
population musulmane. Et pour quelle raison ? : 
« Mais [parce que] la fermeté des convictions et 
la lutte implacable contre les sauvageons ont 
davantage payé que la frilosité coupable de nos 
responsables politiques et technocrates de ministères 
plus soucieux de se ménager les casseurs - campagne 
électorale oblige - et d'éviter d'improbables jacque- 



329 La France LICRAtisée 

ries banlieusardes. Le courage malheureusement, 
n'est plus l'apanage de la République ». 

Un comble, alors que lorsque des voix 
s'élevaient pour demander la fermeté, elles se 
trouvaient immédiatement réduites au silence ! 

L'éloge du Royaume-Uni est du reste largement 
revu à la baisse dès l'année suivante. Dans un 
article sur la résurgence de l'antisémitisme en 
Europe, Le Droit de Vivre se plaint en juin 2003 : 
« En Grande- Bretagne, il y a eu une augmentation 
de plus de 75 % d'incidents antisémites ». 

Au cours de cette même année 2003, c'est une 
responsable locale de la LICRA qui adresse ses 
doléances au DDV : « Je n'ai pas peur du risque, nos 
enfants sont adultes mais c'est tout de même amer. 
Plus de cinquante ans après la deuxième guerre mon- 
diale, n'ayant pas connu la plus grande partie de ma 
famille, gazée par les nazis, d'entendre à nouveau, 
comme lorsque j'étais toute petite, des insultes anti- 
sémites... et même des menaces d'anéantissement, pro- 
férées quelquefois par ceux-là mêmes pour qui je mène 
un combat contre la discrimination à l'emploi au 
logement, contre le "délit de faciès"... 

Malgré mes blessures, je continue mon combat 
j'entends beaucoup de découragement autour 
de moi ». 



330 Politiquement incorrect 

En mai 2003, le Centre Simon Wiesenthal et 
l'UNESCO organisent une Conférence interna- 
tionale sur la résurgence de l'antisémitisme, dont 
Le Droit de Vivre se fait largement l'écho. Sous 
le titre «L'évolution de l'antisémitisme dans la 
société française », le journal cite notamment l'un 
des intervenants à la Conférence : 

« M Sammy Ghozlan a une lecture très inté- 
ressante de l'évolution de l'antisémitisme en France. 
Pour lui, dans les années soixante la communauté 
arabe était calme, composée essentiellement de tra- 
vailleurs et de harkis. Le premier tournant eut lieu 
avec la guerre des Six Jours où des collectifs se sont 
mis en place pour soutenir la cause palestinienne. 

Tout a véritablement basculé en 2000, avec la 
deuxième intifada. Les actes antisémites se sont 
multipliés : synagogues incendiées, gens agressés, en- 
fants battus, etc. ». 

Pour intéressante qu'elle soit, cette lecture est 
néanmoins très incomplète. 

Elle fait totalement l'impasse sur un fait pri- 
mordial qui s'est produit entre les années 60 et 
l'an 2000 et qui est essentiel à la compréhension 
de la situation actuelle. Car enfin, elle oublie de 
préciser que si les événements au Proche Orient 
ont pu avoir une telle répercussion en France, 



331 La France LICRAtisée 

c'est uniquement en raison de l'arrivée massive 
sur notre territoire, durant toute cette période, 
d'une très forte population arabo-musulmane. 

Et qui s'est installée avec le soutien total et 
très actif de la LICRA ! 

La vérité, c'est qu'une trop forte pression 
migratoire a été imposée à un pays qui n'était pas 
capable de l'encadrer, de la gérer, et surtout de la 
digérer, car elle était trop massive et trop étrangère 
pour cela. Le résultat, on le voit aujourd'hui : la 
multiplication des banlieues dites sensibles, nou- 
veaux ghettos qui sont autant de bombes à retar- 
dement commençant à exploser et laissant augurer 
un avenir plus sombre encore. 

Pendant plusieurs décennies, la LICRA a favo- 
risé autant qu'elle l'a pu cette immigration et a 
traité de racistes ceux qui s'y opposaient. 

Ne récolte-t-elle pas aujourd'hui ce qu'elle a 
abondamment semé ? 



La mise hors circuit du Front national : 
une fatwa implacable... et intéressée 



Jusqu'en 1983, la LICRA se préoccupe assez 
peu du Front national. 

Jean-Marie Le Pen n'est pas encore l'ennemi 
public numéro un que l'on inventera un peu plus 
tard dans le but de stériliser toute une branche de 
la droite et de la mutiler irrémédiablement. 

On le retrouve même dans le très officiel 
Guide juif de France paru en 1971. Deux pages 
de publicité particulièrement élogieuses y sont 
en effet consacrées à la promotion d'un album 
de trois disques, Histoire d'Israël, qualifié d'« His- 
toire sonore du peuple juif et de la renaissance de 
L'État d'Israël », édité par la SERF, société d'édi- 
tions phonographiques créée par Jean-Marie Le 
Pen en 1963. Les commentaires cités par le 
guide Sont flatteurs : « Un digne hommage rendu 
par la France à Israël... » (Nouvelle Revue de 
Lausanne), « Un travail honnête, impartial. On 
ne pouvait faire mieux et nous avons le devoir d'en 



334 Politiquement incorrect 

féliciter M. Le Pen et ses collaborateurs » (L'infor- 
mation d'Israël). 

Or, dans sa collection « Hommes et Faits du 
XX e siècle », la SERF avait déjà publié en 1963 
« Philippe Pétain, Maréchal de France », et en 
1965, « Le III e Reich, voix et chants de la révolu- 
tion allemande ». 

Ce dernier album avait d'ailleurs valu des 
poursuites judiciaires à Le Pen, intentées par des 
associations de résistants et déportés, en raison 
du commentaire suivant figurant sur la pochette 
du disque : « La montée vers le pouvoir d'Adolf 
Hitler et du parti national- socialiste fut caractérisée 
par un puissant mouvement de masse, somme toute 
populaire et démocratique, puisqu'il triompha à la 
suite de consultations électorales régulières, circons- 
tances généralement oubliées ». 

Le Pen va finalement perdre son procès, et 
dans son numéro de février 1972, le DDV pour- 
ra se réjouir sous le titre : « Après trois ans de 
procédure - Le Pen condamné pour apologie de crimes 
de guerre ». 

Le président du Front national se présente à 
l'élection présidentielle de 1974. Cette candida- 
ture déchaîne les sarcasmes du DDV qui, sous le 
titre « Jean-Marie Le Pen, candidat de choc », 



335 La France LICRAtisée 

ironise : « Notre vieil adversaire Jean-Marie Le Pen a 
décidé de travailler dans l'humour. Aban- 
donné, tour à tour, par ses différents supporters, 
Pierre Poujade, Jean-Louis Tixier-Vignancourt, les 
animateurs d'Ordre Nouveau, tous ses candidats 
blackboulés aux élections de 1973, condamné pour 
la diffusion par disques de chants et de discours 
hitlériens, le fondateur du Front national supporte 
mal le silence qui s'épaissit autour de sa tumul- 
tueuse personne. Il croit avoir trouvé une occasion 
de refaire surface à l'occasion de l'élection prési- 
dentielle où il se présente comme candidat de la 
« droite populaire et sociale ». On peut lui assurer, 
dès à présent, un gros succès... de rire ». 

De fait, Le Pen fera un score de 0,74 %. A ce 
stade, il ne présente encore aucun danger. Ni 
surtout, aucun Intérêt. 

La LICRA surveille par contre très étroitement 
les « groupuscules d'extrême droite », comme 
Ordre Nouveau, dont elle demande, et obtient 
en 1973, la dissolution. 

s 

Ou comme le GRECE (Groupe d'Etudes et 
de Recherches sur la Civilisation Européenne), 
créé en 1968 et considéré comme le plus dange- 
reux de tous, car composé d'intellectuels. Le 
DDV lui consacre en 1979, sous le titre « Les 



336 Politiquement incorrect 

p s eudo- scientifique s du GRECE à la conquête du 
Pouvoir culturel », une étude très détaillée : 

« Ce dossier qui a valeur de document, montre 
comment ce groupe de recherches et d'études place 
ses théoriciens à des postes névralgiques d'où ils 
peuvent agir sur l'opinion, l'orienter et l'intoxi- 
quer ». Des paroles d'orfèvre. 

C'est l'époque, 1977-1979, où une certaine 
liberté règne encore dans la presse et où des 
membres du GRECE collaborent au Figaro Ma- 
gazine de Louis Pauwels. La Ligue s'en indigne 
et, surtout, s'en inquiète, car elle sait bien - le 
marxiste italien Antonio Gramsci l'a clairement 
démontré - que la prise du pouvoir culturel 
constitue le préalable à la prise du pouvoir poli- 
tique. 

Mais ce qui est chaudement recommandé à la 
gauche est strictement défendu à la droite. 

Le 3 octobre 1980, l'attentat visant la synago- 
gue de la rue Copernic fait quatre morts. Il est 
immédiatement considéré. comme « la consé- 
quence de la passivité gouvernementale, de la com- 
plicité de certains policiers et de la faiblesse de la 
justice à Végard des groupuscules d'extrême droite 
nazie encouragés par l'impunité». On le voit, les 
coupables sont désignés d'office sans hésitation : 



337 La France LICRAtisée 

l'extrême droite forcément, forcément nazie. Et 
la LICRA, parlant de vengeance, ne recule pas 
devant les menaces précises : « La machine à 
rendre la justice doit se mettre en marche sans délai 
si l'on veut éviter que la colère des antinazis se 
transforme en vengeance devant l'incurie des pou- 
voirs publics ». 

En réalité, une enquête difficile débouchera 
sur les véritables coupables: des terroristes liés 
au groupe palestinien Abou Nidal. 

Durant ces années, si le DDV parle bien de 
temps à autre de Jean-Marie Le Pen, en des 
termes évidemment peu flatteurs, et volontiers 
moqueurs, il ne considère cependant pas encore 
que le FN présente un intérêt électoral. C'est 
« l'inquiétante leçon de Dreux », en 1983, qui 
change la donne. Avec 17,6 % des suffrages 
exprimés^, le FN fait une percée décisive. À 
partir de ce moment-là, il va être instrumentalisé 
par la gauche, qui va subtilement s'employer à le 
diaboliser tout en lui permettant de s'exprimer et 
d'entrer à l'Assemblée nationale. En tout cas, il 
ne laissera plus indifférent. 

En mars 1984, Le Pen est invité à l'émission 
politique de grande écoute L'heure de vérité. S'il 
est invité, c'est à François Mitterrand qu'il le 



338 Politiquement incorrect 

s 

doit. Le chef de l'Etat est intervenu personnelle- 
ment pour que le Front national ait lui aussi 
accès à la radio et à la télévision. Est-ce réelle- 
ment le souci de démocratie qui le guide ? N'est- 
ce pas plutôt celui de renforcer le FN en affai- 
blissant d'autant la droite parlementaire, tout en 
diabolisant ce mouvement, rendant ainsi impos- 
sible tout front commun de la droite ? Une 
stratégie tout à fait cohérente avec la cynique 
intelligence politique de Mitterrand. 

L'analyse politique que tire la LICRA de cette 
émission décisive va en tout cas servir de fil 
conducteur à toute son action future à l'égard du 
Front national. 

Le constat d'abord : «U émergence d'une extrê- 
me droite organisée, structurée, disposant de moyens 
financiers importants, d'une audience grandissante, 
a singulièrement perturbé le train-train quotidien 
auquel nous étions habitués. L'apparition à la 
télévision à une heure de grande écoute de M. Le 
Pen, reçu comme un chef de parti à l'égal de MM 
Chirac ou Jospin dénote un changement important 
à l'égard d'un courant de pensée jusqu'à présent 
marginal et quasi-clandestin, mais dont on vient 
de découvrir que les suffrages qu'il rassemblait sont 
d'autant plus intéressants qu'ils provenaient aussi 



339 La France LICRAtisée 

bien de la droite que de la gauche et qu'au niveau 
local ou national ils pouvaient faire et défaire des 
majorités dans un sens ou dans l'autre ». 

Bigre. Faire et défaire des majorités dans un 
sens ou dans l'autre, voilà qui devient sérieux et 
exige des mesures. En cas d'entente du FN avec 
la droite, c'en est fini de la gauche au pouvoir. 
Il faut à tout prix empêcher cela. 

Les mesures à prendre d'urgence sont claire- 
ment esquissées dès la fin de l'analyse : « Mais 
notre rôle est d'arracher le masque de vertu dont 
M. Le Pen s'est couvert pour banaliser l'extrême 
droite dont il est devenu le porte-parole tout com- 
me il revient à la LICRA de mettre en, garde les 
Français contre la tentation de succomber au char- 
me populiste d'un homme qui a appris à flatter les 
faibles, les aigris et les déçus pour assouvir ses am- 
bitions politiques. Même si elles doivent troubler la 
paix civile pour imposer un régime discrimi- 
natoire ». 

Mettre en garde les Français, c'est bien joli 
mais pas vraiment fiable. De quoi les Français ne 
sont-ils pas capables ? Il est plus sûr de faire 
pression sur les partis politiques de droite qui 
seraient tentés par des accords avec un parti qui 
doit à tout prix devenir tabou. 



340 Politiquement incorrect 

La LICRA - et la gauche dans son ensemble - 
vont donc s'employer à faire le nécessaire pour 
interdire définitivement tout rapprochement. 
Cette tâche sera poursuivie sans relâche et avec 
plein succès. 

La manœuvre est assez limpide et reçoit bien sûr 
l'assentiment de François Mitterrand. Diviser pour 
régner, c'est vieux comme le monde. Mitterrand 
joue d'ailleurs à cet égard un jeu des plus troubles. 
Outre l'accès aux médias, il permet au FN d'entrer 
à l'Assemblée nationale en 1986. Cette année-là, à 
l'occasion des législatives, il change le mode de 
scrutin. Sous prétexte de démocratie, il introduit 
la proportionnelle, espérant empêcher ainsi la 
droite de l'emporter. La manœuvre ratera de peu, 
mais elle ratera, car la droite gagne quand même. 
Mais de justesse. Et 35 députés FN sont élus. 
Autant de sièges perdus pour la droite. 

Il s'agit là d'un événement inouï, resté sans 
exemple dans un pays comme la France ! 35 élus 
du Front national à l'Assemblée^ ! En 1986 ! 
On pourrait donc s'attendre de la part de la 
LICRA à des protestations véhémentes, à une 
indignation à la hauteur d'un événement aussi 
extraordinaire et révoltant, de son point de vue, 
naturellement. Eh bien, pas du tout. Le DDV se 



34 1 La France LICRAtisée 

contente d'un petit titre, en page 7 de son nu- 
méro d'avril 1986 : « Le Pen et l'extrême droite 
font leur entrée officielle sur la scène politique ». 
Difficile de faire plus soft. 

C'est que François Mitterrand a agi pour la bonne 
cause : introduire une épine de taille dans 
le pied de la droite pour l'affaiblir durable- 
ment^. Et ce, au grand bénéfice de la gauche. 
D'ailleurs, l'expérience ne se renouvellera pas, 
c'est désormais inutile. Le but est atteint. Le FN 
est à présent solidement implanté dans le pay- 
sage politique, et ses suffrages, parfaitement sté- 
rilisés par la diabolisation, ne peuvent plus servir 
à rien ni à personne. Dès son arrivée au pouvoir, 
le gouvernement Chirac de cohabitation revient 
immédiatement au mode de scrutin antérieur - 
il l'avait annoncé durant la campagne des 
législatives - ce qui fermera à nouveau et défini- 
tivement cette fois les portes de l'Assemblée 
nationale au FN. Toujours au nom, cela va sans 
dire, de la démocratie. 

Mais revenons à 1984, date charnière. En 
juin, le FN fait un carton aux élections euro- 
péennes, obtenant 10,9 % de voix et dix élus, 
pour la première fois, un groupe dit d'« extrême 
droite » peut se constituer au Parlement euro- 



342 Politiquement incorrect 

péen. Le DDV rapporte la réaction du député 
européen socialiste Jean-Pierre Cot, qui qualifie 
ce regroupement de « groupe néo-fasciste » qui 
cherche à « ressusciter les thèmes sur lesquels les 
régimes odieux de Hitler et Mussolini ont été 
établis ». Rien que ça. 

Il n'est pas inintéressant de rappeler que Jean- 
Pierre Cot est le fils de Pierre Cot, ancien 
ministre radical (et ancien admirateur de Pétain, 
comme nous l'avons vu), qui avait produit en 
1944, après un voyage d'études à Moscou, un 
rapport chantant les louanges de Staline et du 
modèle soviétique. Un « stalinien-progressiste », 
qui s'illustrera d'ailleurs une nouvelle fois lors du 
procès Kravtchenko^, au lendemain de la 
seconde guerre mondiale. A son décès en juillet 
1977, la LIC A rappellera qu'il était membre de 
son comité d'honneur. 

Qu'est-il au juste officiellement reproché à Le 
Pen ? Principalement de diriger un parti national, 
donc forcément « raciste », et de s'opposer à 
l'immigration massive qui est imposée au pays. 
Pour la LICRA en tout cas, aucun doute n'est 
permis : nationalisme égale racisme. Egale anti- 
sémitisme. Egale régime de Vichy. L'amalgame 
est immédiat. Il est évident que dans ce contexte, 



343 La France LICRAtisée 

le mot de racisme prend un sens tout particulier 
et ne correspond plus à sa définition normale. 
Quant à ce qui est reproché officieusement au 
Front national, c'est de constituer une menace 
pour la gauche au pouvoir en cas d'entente avec 
la droite. Entente qu'il faut empêcher par tous 
les moyens, la diabolisation étant le plus efficace. 
Aux yeux de la gauche, il y a en effet un réel 
danger au milieu des années 80 de voir la droite 
s'allier, au moins ponctuellement, au FN. Après 
tout, les socialistes ont-ils craint de s'allier aux 
communistes pour accéder au pouvoir ? La 
gauche de la gauche ne fait-elle pas tout naturel- 
lement partie de la gauche ? Oui, mais en face, 
ce n'est pas pareil. La droite de la droite doit être 
exclue par la droite. Ainsi en a décidé la LICRA. 
Un certain nombre d'hommes politiques de 
droite, tels Michel Poniatowski, député européen, 
ou Jean-Claude Gaudin, alors président du groupe 
UDF à l'Assemblée, ne font pas mystère de ce 
souhait de rapprochement, estimant que leurs vrais 
adversaires sont les socialo-communistes. Michel 
Poniatowski déclare ainsi à Paris-Match : « S'il faut 
les [socialo-communistes, ndla] battre avec Le Pen, 
nous les battrons avec lui, qui est moins dangereux 
qu 'eux pour la démocratie ». 



344 Politiquement incorrect 

Jacques Chirac lui-même, à cette époque-là, se 
montre circonspect et se contente de déclarer. 
« Il ne faut pas que la France se libère du secta- 
risme et de l'intolérance des socialistes pour retom- 
ber dans une autre forme d'intolérance et de secta- 
risme ». 

Simone Veil, alors député européen, est char- 
gée de monter au créneau et de dénoncer haut 
et fort l'idée même d'une telle alliance. Elle est 
vite relayée par Laurent Fabius, alors premier 
ministre et membre de la LICRA : «A tous ceux 
qui voudraient mettre les horloges de la France à 
l'heure de la haine, nous opposerons une réponse 
déterminée : sous ce gouvernement, l'intolérance et le 
racisme ne passeront pas ». 

Toute l'intelligentsia de gauche est mise à 
contribution, même la veuve de Pierre Mendès- 
France. Interrogée par Jean-Pierre Elkabach sur 
Europe n°l, Marie-Claire Mendès-France^ 1 y 
va elle aussi de son couplet alarmiste : « Nous 
revivons actuellement la période de 1938. Prenons 
garde, sinon nous reverrons le fascisme. Nous ver- 
rons Le Pen réveiller la France du racisme et de 
l'antisémitisme ». 

Tous les ingrédients de la diabolisation sont 
là : dramatisation à outrance, comparaison avec 



345 La France LICRAtisée 

les « heures les plus sombres » de notre histoire 
- argument magique s'il en est - et surtout, glis- 
sement du politique vers le moral. 

A partir de cette date, Jean-Marie Le Pen ne 
sera plus considéré comme un adversaire 
politique parmi d'autres, avec lequel on débat et 
dont on réfute les arguments. Il est devenu à lui 
tout seul l'archétype du raciste, l'ennemi du 
genre humain, celui avec lequel on ne débat pas 
et qu'on a le droit et le devoir d'insulter et de 
diaboliser à tour de bras. Le tout en exploitant 
à fond, avec un art consommé, une vieille cul- 
pabilité née du régime de Vichy, auquel il n'est 
pourtant aucunement lié, contrairement à Fran- 
çois Mitterrand. 

Magistral tour de passe-passe qui perdure 
aujourd'hui. 

D'ailleurs, à partir de cette période, le cliva- 
ge droite/gauche va peu à peu s'estomper pour 
faire place au clivage racistes/antiracistes. Cela 
fonctionnera si bien qu'à l'heure actuelle, même 
les Français les plus éloignés de la politique 
sentent confusément que « droite » et « gauche » 
n'ont plus aucune signification, le pouvoir étant 
confisqué par un système composé d'hommes et 
de femmes parfaitement interchangeables, prati- 



346 Politiquement incorrect 

quant la même politique et obéissant servilement 
aux mêmes mots d'ordre. Et d'aucuns font mine 
de s'étonner du niveau qu'atteint l'abstention... 

Ce nouveau dogme convient parfaitement à la 
gauche, qui l'a imposé. Car cette évacuation de 
la politique au profit de la morale la favorise, 
bien évidemment. François Mitterrand l'a fort 
bien compris, qui déclare en mai 1985 dans un 
discours devant la Ligue des Droits de l'Hom- 
me : «La ligne de partage n'est plus entre la droite 
et la gauche, mais entre tous ceux qui veulent faire 
prévaloir partout et en tout lieu les droits de tous 
les hommes quelles que soient leur couleur, leur 
religion, et les autres ». 

En attendant, s'agissant de ses liens avec le parti 
tabou, c'est la zizanie dans les rangs de la droite - 
qui a encore quelque existence à ce moment-là - 
entre les pour, les contre, les peut-être. 

Le tout sous les yeux goguenards de la gauche, 
qui fait la morale. Au nom de la défense de la 
démocratie et des droits de l'homme. Du beau 
travail, vraiment ! 

Le DDV enfonce le clou, toujours en 1985 : 
«Non, la voix d'un raciste n'a pas le même poids 
que celle d'un antiraciste... Les racistes - hommes 
politiques ou simples citoyens - doivent rester là où 



347 La France LICRAtisée 



l'Histoire les a mis, au fond des é goûts ou rasant 
nuitamment les murs. Malheureusement, aujour- 
d'hui... leurs groins pointent au grand jour. La 
démocratie leur offre une tribune à partir de 
laquelle ils feront des adeptes pour épurer l'armée, 
la police, la magistrature, limiter le droit de grève, 
renvoyer les immigrés, chasser les métis afin d'éta- 
blir un ordre nouveau dictatorial dont l'objectif le 
plus pressant sera d'écraser la démocratie, celle 
justement qui leur fit la courte- échelle ». 

Le programme attribué généreusement à Le 
Pen par la LICRA ressemble étonnamment, en 
plus soft, à celui que le camarade Trotski fit 
réellement subir à ses compatriotes, et qu'il au- 
rait bien voulu exporter. 

Et la terminologie employée rappelle les plus 
belles heures du communisme triomphant. 

A partir de ce moment-là, ce sera la curée, et 
la pression, jamais relâchées. 

A aucun moment, la diabolisation ne faiblira 
désormais. Il serait fastidieux d'énumérer tous les 
diktats du genre : 

« Tous les membres de la LICRA qui se réclame- 
ront du Front national ou feront alliance avec le 
Front national se verront systématiquement exclus 
de notre association ». 



348 Politiquement incorrect 

On pourrait croire cet avertissement superféta- 
toire, mais ce serait oublier que la Ligue, offi- 
ciellement apolitique, compte un très grand 
nombre d'élus en son sein. Des élus majoritai- 
rement de gauche bien sûr, mais aussi de droite. 
se situant « au-dessus » des partis politiques, elle 
se doit d'occuper le maximum de terrain. 

Les responsables politiques qui reçoivent le FN 
dans leur ville sont publiquement dénoncés, et 
des manifestations de protestation sont organisées. 
Le maire de Toulon est le premier à en faire les 
frais. Au début de 1985, il reçoit Jean-Marie Le 
Pen dans sa ville, à la veille des élections canto- 
nales. Indignation de la LICRA : « Faite au nom 
de la démocratie, cette visite et cet accueil constituent 
en réalité un danger pour ladite démocratie. C'est 
une véritable honte pour Toulon et sa région ! ». 

Elle organise derechef une manifestation au 
cours de laquelle son président local énonce : 
« Nous savons que le maire de Toulon est un ami de 
la communauté juive mais nous n'acceptons pas qu'il 
reçoive en même temps un homme comme Jean- 
Marie Le Pen et nous lui demandons des comptes ». 

En décembre de la même année, c'est au tour 
du maire de Clichy d'être sur la sellette. Il aurait 
prêté une salle au FN. La LICRA, rapporte le 



349 La France LICRAtisée 

DDV, « s'est adressée au maire de Clichy pour avoir 
des explications sur une étonnante affaire (...) La 
LICRA lui a indiqué qu'elle ne pourrait accepter 
que la municipalité donne un marche-pied au parti 
de M. Le Pen qui dans sa mouvance draine toute 
une fange raciste, antisémite et xénophobe ». 

Et le maire de Clichy se dépêche de donner 
satisfaction à la Ligue^. 

Parfois, la LICRA fait chou blanc. Ainsi, en 
1990, elle intervient « fermement » selon ses 
propres dires, auprès du député-maire d'Angou- 
lême, Georges Chavanes, afin qu'il refuse une 
salle au Front national. Refus du maire, qui 
déclare à la presse : « J'estime ne pas avoir de 
leçon à recevoir de la LICRA dont je suis membre. 
Etre démocrate, c'est d'abord pour moi autoriser 
l'expression des autres ». 

Mais c'est là une belle exception qui mérite 
d'être relevée et saluée. 

Le DDV de décembre 1985 fait état d'un 
Sondage « inquiétant » : 78 % des sondés esti- 
ment que les immigrés sont racistes envers les 
Français, 66 % que les immigrés ne sont pas une 
chance pour la France, 68 % que si rien n'est fait 
pour limiter le nombre d'étrangers, la France 
risque de perdre son identité nationale, 65% 



350 Politiquement incorrect 

pensent que les immigrés sont un facteur de 
délinquance, 56% estiment qu'il y aura des dif- 
ficultés à intégrer les « beurs ». 

En 1985, il apparaît donc déjà clairement que 
les Français commencent à souffrir et à 
s'inquiéter des conséquences de l'immigration. 
Vingt ans plus tard, peut-on dire qu'ils ont eu 
tort dans leur jugement d'alors ? 

Mais la conclusion du DDV est tout autre : 
les Français deviennent de plus en plus racistes. 
Il faut donc intensifier la lutte contre le racisme 
et son expression électorale aux yeux de la 
LICRA, le Front national. 

En janvier 1986, Jean-Marie Le Pen est invité 
à participer à une émission politique de la télé- 
vision suisse, le Défi. D'autres responsables poli- 
tiques français, dont Valéry Giscard d'Estaing et 
Georges Marchais, ont déjà participé à cette 
émission dans ce même pays. Mais, sur la pres- 
sion de divers groupements de gauche, le con- 

s 

seiller d'Etat suisse chargé de la justice, le 
socialiste Bernard Ziegler, exhume une vieille loi 
de 1948 jamais utilisée jusque-là pour empêcher 
le président du FN de s'exprimer sur le sol hel- 
vétique. L'émission aura lieu quand même, en 
duplex depuis la France, et fera un tabac : les 



351 La France LICRAtisée 

opinions favorables à Le Pen passent de 14% 
avant le débat à 3 1 % après ! 

Le DDV déplorera bien entendu ce succès, et 
sous le titre « Le boycott de la LICRA », fera savoir 
à ses lecteurs : « La section suisse de la LICRA, 
ordinairement très discrète car préférant le travail de 
coulisses (parlementaire notamment) s'est ouvertement 
affichée lors de « l'affaire Le Pen ». En appelant au 
boycott de rémission. Plus encore : la LICRA recom- 
mandait à ses amis d'allumer une bougie qui, posée 
à la fenêtre, devait brûler pendant l'émission ». 

Apolitisme ou culot ? 

On peut lire les lignes suivantes en première 
page du DDV de février 1986 : 

« Dans la campagne électorale de mars 1986 
pour les élections législatives et régionales, la 
LICRA a adopté une attitude de neutralité absolue. 
Elle n'a pris part à aucune réunion électorale, n'a 
apporté son soutien à aucun parti, à aucune liste, 
à aucun candidat (...) Et cela non pas parce que 
la LICRA se désintéresserait de la vie publique du 
pays... Mais parce qu'elle est, par tradition, apo- 
litique ; c'est son honneur et sa force ». 

Ce petit intermède vertueusement posé, on 
arrive dans le vif du sujet : le questionnaire 



352 Politiquement incorrect 

détaillé que l'association apolitique a soumis aux 
six principales formations politiques « républicai- 
nes » avant les élections, à savoir : RPR, UDF, 
Parti radical, MRG, PS, PC. Le DDV ajoute avec 
un rien de coquetterie : « Toutes nous ont répondu, 
ce qui démontre la place importante que notre 
organisation occupe dans la vie publique du pays ». 

Bien évidemment, les questions posées, dont les 
réponses s'étalent sur plusieurs pages, n'ont rien, 
mais vraiment rien à voir, avec la politique : 

l re question : Quelle position adoptez- vous à 
l'égard des thèses et du Parti national de Jean- 
Marie Le Pen, particulièrement en ce qui con- 
cerne d'éventuelles alliances durant et après les 
élections de mars 1986 ? 

2 e question : La communauté juive de France 
s'inquiète du terrorisme antisémite. Quelles 
mesures préconisez-vous pour lutter contre le 
terrorisme qui se manifeste sous couvert d'anti- 
sionisme ? 

3 e question : Quelles sont vos principales pro- 
positions sur l'immigration : place des immigrés 
dans le pays, droits politiques et sociaux ? Sont- 
ils facteurs de délinquance et d'insécurité ? 

4 e question : Quelles dispositions envisagez- 
vous de prendre : pour améliorer l'appareil lé- 



353 La France LICRAtisée 

gislatif réprimant la haine raciale ? pour une 
meilleure éducation civique contre le racisme et 
l'antisémitisme ? 

S'y ajoutent un certain nombre d'autres ques- 
tions concernant la politique internationale, au 
Proche Orient notamment. 

Question non posée, mais brûlante : existe-t-il 
un vote juif ? Dans ce même numéro, le DDV 
l'évoque sous le titre : « Vote juif de défense des 
droits de l'homme ». Il cite Jean Kahn, vice-pré- 
sident du Conseil Représentatif des Institutions 
juives de France (CRIF), qui constate que oui, il 
existe bien « une sensibilité vigilante... particulière 
qui fait que l'électeur juif est par le conditionne- 
ment de l'histoire un électeur avec un supplément 
d'âme ». Et qui poursuit : « La sensibilité juive est 
davantage qu'un projecteur égoïste braqué sur les 
seuls événements de la vie juive. Nous aimons à rap- 
peler ce que dit Hillel l'Ancien : « Si je ne suis pas 
pour moi, qui le sera ? Et si je ne suis pas pour moi, qui 
suis-je ? ». 

« Justement, ajoute le DDV, une devise que les 
militants de la LICRA appliquent depuis soixante 
ans » . 

Ce même scénario du questionnaire adressé aux 
formations politiques - une pratique qui remonte 



354 Politiquement incorrect 

aux premiers temps de la Ligue - se reproduit lors 
de chaque consultation électorale, quelle qu'elle 
soit. Des mois avant le jour J, numéro après 
numéro, on peut lire les mêmes appels : 
« En cette veille de scrutin électoral, chaque 
citoyen, chaque homme politique attaché à la démo- 
cratie, quelles que soient ses opinions politiques, reli- 
gieuse ou philosophique, se doit de prendre conscience 
que le Front national est porteur de tous les dangers 
et que toute alliance avec lui est un coup porté à la 
démocratie et aux droits de l'homme »... 

Ou encore : « Chacun vote bien entendu en 
conscience pour ses choix politiques, mais nul ne 
peut faire le lit de l'extrême droite dont la LICRA 
connaît bien la véritable nature, elle qui a traversé 
des périodes historiques au cours desquelles le chant 
des sirènes de l'extrême droite a plongé le pays dans des 
heures noires ». 

Le mot d'ordre part de Paris, mais toutes les 
fédérations régionales s'y mettent de bon cœur et 
font pression sur les élus locaux. Les exemples 
surabondent. Ainsi, en mai 1992, le DDV rapporte 
que « La fédération des Yvelines a adressé une lettre 
aux candidats aux régionales leur demandant s'ils 
accepteraient ou refuseraient "toute alliance, accord, 
désistement avec ou au profit du Front national" ». 



355 La France LICRAtisée 

« Nous ne voulons pas intervenir dans le débat 
politique », explique le plus sérieusement du mon- 
de M e Philippe Bataille, avocat au Barreau de 
Versailles et président de la fédération LICRA des 
Y vélines, « mais nous voulons être la conscience, la 
bonne ou la mauvaise, des hommes politiques. Pour 
cela, nous allons commencer par interpeller tous les 
candidats aux prochaines élections afin qu'ils pré- 
cisent publiquement - leurs réponses seront diffusées 
dans la presse - les attitudes qu'ils entendront pren- 
dre avec le Front national ». 

Voilà ce qu'entend la LICRA par « ne pas 
intervenir dans le débat politique ». Et il y en a 
des pages entières. Car ce scénario se reproduit 
dans toutes les régions de France. 

En février 1987, Jean-Marie Le Pen réussit un 
joli coup : il rencontre à New- York vingt des plus 
importants dirigeants de la communauté juive 
américaine. Ces derniers justifient leur invitation 
en déclarant qu'il « est important d'écouter ses 
points de vue » et que d'ailleurs, le FN soutient 
Israël et milite en faveur de la fermeture du bu- 
reau de l'OLP en France. La LICRA dénonce ce 
qu'elle considère comme un scandale. 

En 1987, il est également question d'une invi- 
tation de Jean-Marie Le Pen en Israël. 



356 Politiquement incorrect 

Mais ce voyage ne se fera pas, certaines organi- 
sations, et notamment la Ligue, craignant essen- 
tiellement qu'un tel rapprochement ne donne à Le 
Pen une crédibilité lui permettant de faire exploser 
le cordon sanitaire qu'elles se sont échinées à mettre 
en place et qu'elles entretiennent sans relâche. 

Cette même année - 1987 - Jacques Chirac 
réaffirme devant le CRIF qu'il ne contractera 
jamais d'alliance ni à titre personnel, ni en tant 
que responsable d'un mouvement politique avec 
tel ou tel parti d'extrême droite. Par la même 
occasion, il souligne que « l'ouverture aux autres est 
en soit une richesse ». 

Ce qui ne l'empêche pas de perdre les prési- 
dentielles l'année suivante. 

Tout le monde a en mémoire le séisme du 21 
avril 2002, mais qui se souvient encore dans ce 
pays qui a la mémoire courte, du tremblement de 
terre du 24 avril 1988, et du score inattendu 
- 14 % - du FN au premier tour des présiden- 
tielles ? Inattendu Pour la droite peut-être, mais 
l'était-ce vraiment pour la gauche ? En tout cas, 
Barre éjecté, Chirac battu, c'est François Mitter- 
rand qui se fait réélire. 

Pendant la campagne présidentielle, en février 
1988, l'association apolitique avait organisé un 



357 La France LICRAtisée 

meeting électoral à Lyon sur le thème « Rôle du 
racisme dans la campagne électorale ». Parmi les 
invités figurait Charles Fiterman pour le parti 
communiste. 

Aucun représentant du Front national n'était 
présent, bien entendu, au motif qu'« on na pas 
invité un parti qui tient un discours raciste et 
antisémite ». Sur un sujet pareil, il aurait pour- 
tant été utile au débat... 

Il est intéressant de souligner que la LICRA 
est alors en pleine brouille avec l'Union sovié- 
tique, accusée de persécuter les juifs vivant sur 
son territoire et de mener une politique antisé- 
mite. Trois ans auparavant, en 1985, l'écrivain 
Alain Finkielkraut, membre de la LICRA, avait 
d'ailleurs été expulsé d'URSS, où il s'était rendu 
pour rencontrer des « refuzniks », citoyens juifs 
russes empêchés d'émigrer. A son retour, dans 
une longue interview, il avait déclaré sans amba- 
ges au DDV : «L'URSS est le pays de l'esclavage 
et du servage ». Pas moins. 

Malgré ces faits, qu'elle dénonce par ailleurs, 
la LICRA n'hésite cependant pas à inviter à son 
meeting électoral le représentant d'un parti com- 
muniste qui n'a jamais totalement rompu ses 
liens avec Moscou... 



358 Politiquement incorrect 

Toujours en 1988, à la veille des élections 
législatives, la Ligue lance à nouveau solennel- 
lement l'appel suivant : « La LICRA, forte de la 
diversité politique et spirituelle de ses dirigeants et 
de ses membres, forte de son apolitisme puisqu'elle 
s'est toujours interdit de donner des consignes de 
vote, peut aujourd'hui faire entendre sa voix pour 
adjurer les hommes politiques qui entrent en lice 
dans la campagne législative et tous les démocrates 
du pays de ne contracter aucune alliance avec le 
Front national, de ne se laisser tenter par aucune 
compromission ou complaisance envers des thèses de 
l'extrême droite qui sont le déshonneur de la 
France, pays des droits de l'homme ». 

Elle adresse personnellement à 3 600 candi- 
dats aux législatives une lettre leur demandant de 
ne réaliser aucune alliance avec le FN et annonce 
clairement : « Ceux qui traiteront avec le Front 
national seront dénoncés par nous ». 

Ce ne sont pas des menaces en l'air. 

Aperçoit-elle des velléités d'entente avec les 
pestiférés ? C'est aussitôt l'anathème : « Devant 
la gravité exceptionnelle de cette démarche, la 
LICRA, qui s'interdit traditionnellement toute con- 
signe de vote, appelle les électeurs des Bouches-du- 
Rhône qui d'habitude portent leurs voix sur les 



359 La France LICRAtisée 

candidats du RPR et de l'UDF à faire échec à ces 
candidats. 

La LICRA demande aux responsables des partis 
politiques concernés, qui ont toujours déclaré qu'ils 
n'accepteraient aucune alliance avec le Front 
national, de sanctionner ceux qui n'ont pas respecté 
cet engagement ». 

Au lendemain des élections présidentielles et 
législatives de 1988, la Ligue réunit un comité 
directeur exceptionnel consacré - il n'est pas 
difficile de le deviner - au Front national, et 
invite le journaliste Alain Duhamel à lui faire 
part de son analyse. 

A l'issue de cette réunion, une décision sera 
prise : « Cet exposé a été suivi d'un long débat avec 
les membres du comité directeur, portant princi- 
palement sur le rôle militant de la LICRA et son 
poids moral, et sur la responsabilité de rétablir les 
tabous autour des thèmes du Front national ». 

La voilà donc, la solution retenue : rétablir les 
tabous. Le terme rétablir paraît d'ailleurs fort 
peu adéquat. Ont-ils jamais sauté ? Dans ce 
contexte, rétablir signifie plutôt renforcer. 

La LICRA va donc réactiver pour l'occasion 
son Appel commun à la fraternité, lancé une 
première fois en 1985 en collaboration avec les 



360 Politiquement incorrect 

loges maçonniques, la Ligue des Droits de 
l'Homme, le MRAP et les églises constituées^. 

L'objectif de cet appel n'est pas, bien sûr, de 
s'attaquer au fond du problème, à savoir alléger 
une pression immigrationniste trop forte et de 
moins en moins gérable, mais de réprimer, répri- 
mer encore, réprimer toujours les racistes. 

Pour y parvenir plus efficacement, la LICRA 
annonce son programme en janvier 1989 : 
« Nous proposerons notre collaboration au ministère 
de la Justice pour assurer une meilleure connais- 
sance des mesures de lutte contre les discrimina- 
tions. Nous demanderons une publicité accrue des 
décisions de justice sanctionnant les infractions à 
caractère raciste. Nous demanderons l'affichage des 
décisions judiciaires. Nous demanderons que le juge 
soit autorisé à ordonner l'insertion dans la presse 
des condamnations de caractère raciste. Nous de- 
manderons au gouvernement de présenter chaque 
année devant le parlement un bilan de l'ap- 
plication de la loi de 1972. Et nous demanderons 
au ministre de V intérieur de faire afficher systéma- 
tiquement dans tous les commissariats de France la 
loi de juillet 1972 ». Ouf ! 

On se demande ce que deviendrait la LICRA 
sans Jean-Marie Le Pen. Il est à ce point obses- 



361 La France LICRAtisée 

sionnellement présent dans toute sa littérature, 
dans toutes ses actions, il joue si bien son rôle de parfait 
repoussoir, il constitue à lui seul une telle 
justification de l'existence de la Ligue antiraciste, 
qu'on tremble à l'idée qu'il vienne à lui manquer. 
En tout cas, la stratégie de diabolisation a parfai- 
tement fonctionné. Elle a définitivement mis au 
pas une « droite » tétanisée à la seule idée de pa- 
raître raciste, donc fasciste et d'être dénoncée 
comme telle par la presse. Jean Daniel, directeur du 
Nouvel Observateur, fera à cet égard une déclaration 
des plus révélatrices, reproduite dans le DDV de 
septembre 1995. Constatant les succès électoraux 
du FN malgré la pression des antiracistes, mais 
voulant quand même consoler ces derniers, il écrit : 

«D'autre part, et surtout, ne faut-il pas mettre 
à l'actif des mouvements antiracistes et même de 
leur diabolisation du Front national le fait qu'une 
droite culpabilisée, devenue morale et républicaine 
en la circonstance, ait rompu avec l'extrême droi- 
te ? Sans cette rupture ainsi obtenue, n'aurions- 
nous pas aujourd'hui des ministres lepénistes dans 
un gouvernement qui aurait été porté au pouvoir 
grâce à leurs voix ? » 

Une droite culpabilisée, une rupture ainsi 
obtenue, des ministres lepénistes, donc déterminés 



362 Politiquement incorrect 

à appliquer une autre politique que celle décidée 
et imposée par la gauche. Peut-on être plus clair ? 
Il faut reconnaître quand même, et ce n'est pas 
le moins troublant, que Jean-Marie Le Pen a 
prêté la main, volontairement ou non, à cette 
diabolisation, en fournissant quelques munitions 
à ses ennemis. 

Il avait commencé en 1987 avec les fameuses 
« chambres à gaz, point de détail de l'Histoire ». 
Des propos qui lui avaient valu une condam- 
nation confirmée en appel. 

Il récidive en 1988 avec le jeu de mots dou- 
teux « Durafour-crématoire », qui va provoquer 
la tempête. C'est le dérapage de trop. 

Le DDV en fait bien évidemment ses délices 
et en tire la conséquence : « Bien plus que la 
première, cette nouvelle affaire Le Pen devait avoir 
des répercussions dans la vie politique française, à 
la veille d'échéances électorales (...) Après le parti 
socialiste et le parti communiste, les différentes 
composantes de la droite ont décidé d'isoler com- 
plètement et de marginaliser le Front national et 
Le Pen, enfin devenus non fréquentables pour 
l'ensemble de la classe politique française ». 

En s'abandonnant à son goût de la provo- 
cation, le président du FN a-t-il vraiment rendu 



363 La France LICRAtisée 

service à son mouvement et à ses idées ? Ou a- 
t-il décidé délibérément de rendre tout rappro- 
chement avec la droite désormais impossible ? 

En 1989, Jean-Marie Le Pen se voit traité 
publiquement de « fasciste, nazi, raciste » par Jean- 
Pierre Pierre-Bloch, conseiller de Paris et fils du 
président de la LICRA. Il porte plainte, mais se 
voit débouté de sa plainte pour diffamation au 
motif emberlificoté que : « On ne saurait, dans le 
domaine de la polémique, subordonner le bénéfice de 
la bonne foi à la prudence dans l'expression de la 
pensée lorsque, comme en l'espèce, les propos incri- 
minés portent sur la doctrine exprimée par le chef 
d'un parti politique et sur sa conception du rôle de 
l'État, en particulier à V égard des étrangers ». 

Le Droit de Vivre qui relate l'affaire, conclut 
avec beaucoup de satisfaction : 

« Un jugement exemplaire qui fera jurisprudence 
et qui permettra à tout un chacun de dire ce qu'il 
pense de Le Pen, sans la moindre crainte ». 

Sans la moindre crainte. Car on n'est jamais 
trop prudent lorsque l'on s'attaque à la bête im- 
monde. Il est préférable de procéder anonyme- 
ment et obliquement. 

En témoigne cette information qui avait paru 
dans le DDV en octobre 1985 : « Par ailleurs, de 



364 Politiquement incorrect 

nombreux adhérents de la LICRA qui avaient posé 
des questions à « L'heure de vérité » se sont inquié- 
tés de constater que leurs nom et adresse avaient été 
transmis à Jean-Marie Le Pen, sans leur con- 
sentement. La LICRA a protesté. La Commission 
nationale Informatique et Libertés a été saisie », 

Cette hargne et cet acharnement judiciaire 
systématiques à rencontre du président du Front 
national ne font pas forcément l'unanimité dans 
la communauté juive. M e Bernard Cahen, prési- 
dent du Rassemblement des avocats juifs de 
France, interviewé par Actualité juive à la fin de 
1989, déclare : « La LICRA a tort de vouloir faire 
condamner Le Pen tous les jours », estimant que 
« A la longue, les gens vont finir par croire que la 
Justice est contrôlée par les juifs, alors que c'est loin 
d'être le cas ». 

Le Droit de Vivre rapporte ces propos sous le 
titre de « Stupéfiante déclaration ». 

Il n'empêche que les années suivantes sont 
marquées par la mobilisation permanente contre 
un parti présenté comme la réincarnation du 
national- socialisme et du fascisme réunis et autour 
duquel tourne toute la vie politique française. 

C'est également une façon de faire tourner 
toute la vie politique française autour du racisme 



365 La France LICRAtisée 

et de l'antiracisme et d'en faire un point de fixa- 
tion incontournable. 

A ce petit jeu, la LICRA excelle, car c'est elle 
qui dicte les règles du jeu. 

Elle annonce en 1992 : « Le danger d'un Front 
national arbitre de la vie publique est à nos portes. 
L'heure est venue pour les partis républicains et 
leurs représentants de faire front en ne se trompant 
pas d'ennemi. Les divisions entre gauche et droite 
sont subalternes comparées à la menace d'un dis- 
cours démagogique, simplificateur et réducteur sur 
le chômage, l'immigration, la sécurité ou l'identité 
française ». 

Cette fois-ci, c'est consommé et officiel: la 
droite, la gauche, tout cela est définitivement 
dépassé ! S'installe à la place le système que nous 
connaissons, qui, quels que soient les acteurs du 
moment et leur étiquette politique, poursuit à 
peu de choses près la même politique immigra- 
tionniste, donc « antiraciste », et mondialiste. 

Le B'nai B'rith, ou « Fils de l'Alliance » 

Il s'agit d'une association de solidarité exclu- 
sivement juive et très influente, calquée sur le 
modèle des organisations maçonniques. Elle a 
été fondée aux Etats-Unis en 1843, et a large- 



366 Politiquement incorrect 

ment essaimé depuis lors. Il en existe une bran- 
che en France depuis 1932. 

Ses liens avec la LICRA sont évidents, puisque 
ces deux associations humanitaires et philanthro- 
piques ont eu le même président, Jean Pierre- 
Bloch, à différentes reprises, et notamment de 
1974 à 1981. 

Début 1992, sous le titre « L'obsession de Le 
Pen », on peut lire dans le DDV : « Une fois 
encore, Le Pen accuse "l'internationale maçonnique 
juive" d'avoir "réussi à faire accepter aux partis de 
la droite classique un pacte interdisant tout accord 
avec le FN" ». Le Pen accuse Jacques Chirac de 
s'être « engagé auprès d'une organisation étrangère, 
les B'nai B'rith, à nous combattre ». 

La conclusion du DDV est la suivante : « Le 
B'nai B'rith, organisation humanitaire juive en 
France, est régulièrement prise à partie par les jour- 
naux d'extrême droite sur le thème du complot juif. 
Une obsession classique de l'antisémitisme ». 

Une obsession, peut-être, mais qu'en est-il en 
réalité ? En tout cas, le DDV ne récuse en aucune 
façon les accusations de Le Pen, qui faisait là 
allusion au « serment des B'nai B'rith » : un ter- 
me plutôt grandiloquent et propre à frapper les 
imaginations pour désigner en fait un engage- 



367 La France LICRAtisée 

ment qui remonterait à 1986, au moment de 
l'entrée historique du groupe des 35 députés 
Front national à l'Assemblée. 

Cet engagement avait d'ailleurs été clairement 
évoqué par Le Monde le 26 mars 1986. Sous le 
titre « Inquiétude dans la communauté juive », le 
quotidien révélait ceci : « Enfin, les associations 
B'nai B'rith u lancent un appel à la vigilance, 
attirent l'attention des partis de la nouvelle majo- 
rité^ 1 contre toute tentation de vouloir reprendre 
les slogans extrémistes sur l'insécurité et les idées 
xénophobes à V encontre des immigrés" et "rappel- 
lent aux représentants de ces partis leurs engage- 
ments pris, au cours des forums du B'nai B'rith, 
devant la communauté, déclarations reprises après 
proclamation des résultats du vote, de ne s'allier en 
aucun cas au Front national " ». 

Si pareil engagement a effectivement été pris 
par la droite, il prouve en tout cas une bêtise 
politique manifeste et une étonnante propension 
au suicide. Non contente de se voir privée d'un 
certain nombre de députés au bénéfice du FN en 
raison du changement de scrutin totalement 
instrumentalisé par François Mitterrand - acces- 
oirement membre d'honneur de la LICRA - elle 
aurait persévéré dans l'échec et le masochisme en 



368 Politiquement incorrect 

refusant toute alliance, même limitée, avec ce 
même Front national ? Victime d'un côté des 
manœuvres politiques de la gauche, pilotées par 
Mitterrand et de l'autre, du chantage moral aux 
droits de l'homme exercé par les antiracistes, elle 
aurait donc capitulé sur toute la ligne ? 

En tout cas, après les élections présidentielles 
de 1995, la frénésie anti Le Pen tourne à l'obses- 
sion et à l'idée fixe. Tous les numéros du DDV 
bruissent de colloques, réunions, réflexions di- 
vers et variés où toute l'intelligentsia du pays, 
tous les experts et spécialistes lepénologues et 
lepénophobes, sont invités à délivrer qui sa dé- 
claration, qui son analyse. 

Avec, en filigrane, une angoissante question : 
comment faire échec au Front national et aux 
15% de « racistes » qui votent pour lui ? 

Le racisme, précisément, est décortiqué sous 
toutes ses coutures, mais personne ne songe un 
seconde à évoquer le fond du problème, qui 
explique à lui seul l'essor, puis le maintien du 
FN : à savoir l'inquiétude que suscite la présence 
en France d'une population immigrée nombreu- 
se et majoritairement musulmane. Une inquié- 
tude et un rejet que traduit très exactement ce 
vote. 



369 La France LICRAtisée 

Le DDV rapporte religieusement tous les pro- 
pos de ces spécialistes, dont certains sont fran- 
chement hilarants. 

Ainsi, le numéro de novembre 1995 présente 
l'analyse du psychanalyste Gérard Miller qui, 
sous le titre « Le Pen et l'innommable », nous 
apprend que : 

« La psychanalyse en témoigne : il y a une part 
d'innommable en chacun. Le Pen lui donne con- 
sistance. 

D'où la fascination qu'il exerce, et bien au-delà 
de ses propres partisans. Il présentifie « La Chose », 
(« Das Ding », comme l 'évoquait Freud) qui est en 
eux. Quitte à les horrifier. 

Puisque précisément - c'est cela V innommable du 
monstre inassouvi de chaque ventre - ils ne pen- 
saient pas être là où Le Pen les a précisément trou- 
vés. 

Le Pen, comme d'autres déterrent les cadavres, 
déterre les mots, les signifiants. » 

Etc, etc. 

Cette même année, la LICRA demande pour 
la première fois la dissolution du Front national. 
Sans doute a-t-il suffisamment servi à la gauche, 
et ses inconvénients sont-ils à présent plus im- 
portants que ses avantages. 



370 Politiquement incorrect 

Elle revient à la charge en décembre 1997 : 
«Notre combat prioritaire aujourd'hui, c'est la 
lutte implacable contre le Front national. Aucune 
concession, aucune compromissio n'est acceptable 
envers ce parti fasciste, raciste et antisémite. Il faut 
véritablement se poser la question de l'existence 
même dans notre pays d'un parti qui met en dan- 
ger la démocratie et bafoue les valeurs de la Répu- 
blique (...) 

Regardons avec lucidité ce qui se passe déjà dans 
certaines municipalités^ 1 où les valeurs de la Répu- 
blique sont piétinées, bafouées. « Pas de liberté pour 
les ennemis de la liberté » comme le disait Saint- 
Just ». Nous revoilà à la Révolution française, déci- 
dément une source inépuisable d'inspiration. 

En 1997, à nouveau, certains responsables de 
droite souhaiteraient une alliance ou au moins un 
dialogue avec le Front national. Ces « manœu- 
vres » sont immédiatement dénoncées et con- 
damnées. La LICRA demande à Philippe Seguin, 
à la veille d'accéder à la présidence du RPR, de 
clairement réaffirmer son « refus de toute compro- 
mission avec un parti raciste, antisémite et xéno- 
phobe ». Elle réclame, par ailleurs, des sanctions 
contre tous les responsables politiques qui pas- 
seraient des accords avec le FN. 



37 1 La France LICRAtisée 

Cette vertueuse indignation n'empêche cepen- 
dant pas la gauche, aux législatives de 1997 jus- 
tement, de gagner 47 élus, sur 76 triangulaires, 
grâce au maintien du «parti raciste, antisémite et 
xénophobe ». Autrement dit, lorsque la gauche 
utilise à son profit les voix du FN, c'est de la 
politique, si d'aventure, la droite en fait autant, 
c'est évidemment du fascisme. 

En 1998, aux régionales, la LICRA aura une 
nouvelle occasion de se déchaîner contre ce 
qu'elle nomme « les alliances électorales indignes ». 
Pour l'occasion, elle invente un slogan : « Qui 
s'allie se salit ». 

Elle gourmande Ambroise Roux, président de 
l'Association française des entreprises privées, qui 
a eu le malheur de préconiser des accords 
avec le Front national, et lui rappelle solennellement 
ceci : « En 1932, les représentants du grand patro- 
nat allemand ont pris la responsabilité historique 
de Soutenir le parti national- socialiste, qui, sans ce 
soutien politique et financier n'aurait sans doute pu 
accéder au pouvoir ». 

Peut-être, mais sans le soutien des financiers 
juifs new-yorkais, Trotski et ses camarades 
auraient-ils pu, eux aussi, accéder au pouvoir en 
Russie ? 



372 Politiquement incorrect 

Dommage que personne n'ait songé à lui poser la 
question. 

La Ligue continue imperturbablement à distri- 
buer ses bons et ses mauvais points : « C'est dans 
cet esprit que nous avons condamné l'initiative 
d'Alain Madelin d'accepter à Démocratie Libérale 
M. Jacques Blanc, élu avec les voix du Front natio- 
nal en Languedoc -Rous sillon. Dans le même esprit, 
nous avons félicité M. Gilles de Robien pour son 
attitude courageuse et sans ambiguité ». 

Gilles de Robien sera une nouvelle fois chau- 
dement félicité par la LICRA, fin 1998, pour 
avoir quitté Démocratie Libérale, « qui se com- 
promet avec un parti raciste et antisémite ». 

Les années se suivant et se ressemblant, la 
LICRA inscrira prioritairement, dans son pro- 
gramme de lutte contre le Front national, « la 
surveillance et la dénonciation systématique des 
hommes politiques ayant eu un lien avec le FN ou 
assimilé » et, pour faire bonne mesure, « la créa- 
tion d'un répertoire national des proches du FN ». 

Des esprits malintentionnés pourraient appeler 
ça un fichier. 

En 1999, Patrick Gaubert accède à la pré- 
sidence de la Ligue. Il annonce immédiatement : 
« Grâce à une nouvelle organisation de nouveaux 



373 La France LICRAtisée 

moyens de communication et une série d'initiatives 
juridiques, politiques médiatiques, nous parvien- 
drons, je le sais, à susciter un nouvel élan. Notre 
adversaire principal, le Front national, ainsi que 
ses réseaux, ses moyens de communication, ses sou- 
tiens de tous ordres, savent déjà comme en témoi- 
gne l'effervescence qui se manifeste à travers leurs 
journaux, que nous disposons désormais d'une 
détermination farouche pour les combattre. Je vous 
le dis., ils ont raison de nous craindre ». 

Il n'y avait donc pas eu de détermination farouche 
jusque-là ? 

L'ingérence permanente et la volonté implaca- 
ble d'exclure systématiquement une partie im- 
portante de la population française et de la 
priver de représentation nationale, au mépris de 
toute démocratie, ne sont pas nouvelles et se 
poursuivent sans relâche. Avec peut-être un 
degré supplémentaire dans la haine, car, hélas, 
les événements semblent donner raison à ceux 
qui sonnent le tocsin. 

Sûre de son pouvoir, la LICRA se permet 
donc de plus en plus d'interventions directes. 
Un exemple parmi bien d'autres : en avril 2000, 
son président adresse un courrier au président 
du Souvenir Français de Grasse pour lui deman- 



374 Politiquement incorrect 

der de ne plus dorénavant faire représenter son 
mouvement lors des cérémonies commémora- 
tives officielles par le colonel Pauvert, qui a com- 
mis un crime inexpiable. Il est en effet « connu 
pour avoir été candidat à diverses élections locales 
sous l 'étiquette Front national » ! 

Arrive le séisme du 21 avril 2002 : Jean-Marie 
Le Pen propulsé par la volonté du peuple fran- 
çais au deuxième tour de l'élection présidentielle, 
Lionel Jospin renvoyé à l'île de Ré. Quel choc 
extraordinaire pour un système qui faisait 
tranquillement rouler des dés pipés et qui affron- 
te tout à coup une situation inédite et non pré- 
vue au programme ! 

« La LICRA a immédiatement réagi, dès 20h05 
le 21 avril par un communiqué appelant à la 
mobilisation républicaine et citoyenne pour repousser 
le Front national son programme raciste et xéno- 
phobe, catastrophique pour l'avenir de la France. 

Nous avions prévu de longue date d'organiser un 
grand meeting contre l'antisémitisme le 28 avril au 
Panthéon, pour interpeller sur ce sujet, entre les 
deux tours, les deux candidats restants. 

Sans hésiter, nous avons changé notre mot d'ordre 
et appelé à un grand rassemblement républicain, 
contre Le Pen. Nous sommes sortis de notre neutralité 



375 La France LICRAtisée 

politique historique pour inciter à voter Jacques 
Chirac, seul candidat républicain en lice », écrira 
son président dans le DDV de juin 2002. 

« Nous sommes sortis de notre neutralité politi- 
que historique ». Il fallait oser. 

Il ajoutera : « Partout dans mes déplacements, 
mes interventions publiques ou médiatiques, j'ai 
affirmé la position de toujours de la LICRA : pas 
d'alliances, pas d'accords, où que ce soit, avec les 
candidats de l'extrême droite aux législatives de 
juin 2002. Le temps des arrangements type Millon, 
Soisson ou Blanc doit être banni. 

Dans l'hypothèse, plus que probable hélas, de 
triangulaires, le candidat républicain (de droite ou 
de gauche) le moins bien placé doit se désister en 
faveur du candidat républicain (de gauche ou de 
droite) le mieux placé ». 

Au moins, les choses sont claires, et la LICRA 
a donné des instructions précises. Qui seront 
scrupuleusement suivies. 

A ce fameux meeting du 28 avril 2002 
au panthéon, toute la fine fleur de l'antiracisme 
aura l'occasion d'exprimer son exécration à 
l'égard d'un parti qui, malgré la diabolisation, a 
l'outrecuidance de se retrouver au 2 e tour de 
l'élection présidentielle et qui plus est d'en évin- 



376 Politiquement incorrect 

cer les forces « de progrès ». Bien que largement 
de gauche et d'extrême gauche, elle se résigne 
à voter Chirac qui, de toute façon, fait partie de 
la famille. 

Ce qui donnera lieu à bien des déclarations 
rejouissantes : 

« ... Je tiens à dire à tout le monde que le 5 mai, 
tous ceux qui ne voteront pas, ceux qui voteront 
blanc, tous ceux qui ne veulent pas voter Jacques 
Chirac seront des déserteurs » (Patrick Klugsman, 

s 

président de l'Union des Etudiants Juifs de Fran- 
ce). 

« Votez tous pour Chirac. Voter Chirac, c'est 
voter républicain, au moins le débat reste possible. 
Voter Chirac, c'est voter le pluralisme où la cohabi- 
tation reste possible » (Sokeib Bencheikh, mufti de 
Marseille). 

« Mais dimanche prochain, sans hésitation, cest le 
devoir de toutes et de tous non seulement ceux con- 
vaincus qui sont ici, nous devons voter pour le prési- 
dent sortant Jacques Chirac » (Gilles Bernheim, 
grand rabbin de la synagogue de la Victoire). 

« Vous devez voter dimanche, ne pas vous abste- 
nir car si jamais ils accédaient au pouvoir, croyez 
bien que vous perdriez rapidement vos libertés et 
que la terreur s 'installerait et je ne dis pas cela pour 



377 La France LICRAtisée 



instiller la crainte et la peur dans vos âmes » Jac- 
ques Lanzmann, cinéaste). 

« ...Mes enfants qui ont 4 et 2 ans peut-être 
qu'un jour dans une quinzaine d'années ou même 
avant ils me diront papa qu 'est-ce que tu as fait dans 
cette période-là. Papa qu'est-ce que tu as dit dans 
cette période-là. Je ne veux pas avoir honte, je ne 
veux pas baisser les yeux ce jour-là et leur dire que 
je ne suis pas sorti de la maison, que je n'ai pas quitté 
mon théâtre et je ne veux pas plus tard pleurer en 
cachette parce que je n'ai pas eu le courage de dire 
qu 'il fallait voter, qu 'il fallait voter Chirac au second 
tour » (Michel Boujenah, humoriste). 

«Nous avons le choix entre deux systèmes qu'on 
nous propose. Dans la démocratie chacun pourra 
s'exprimer, manifester sa sensibilité politique. Et de 
l'autre côté un système autoritaire sorte de Pino- 
chet. Le Pen a parlé dernièrement, vous l'avez en- 
tendu, de camps d'internement. Imaginez tout de 
suite le grand stade de France à Saint-Denis où 
nous nous trouverons tous comme dans le stade de 
Santiago » (Marek Halter, écrivain). 

« Le 5 mai, au-delà de nos convictions person- 
nelles et de nos différences, nous appelons à voter 
pour le seul candidat républicain. Il a un nom et 
nous n'avons à ce sujet aucune pudeur particulière, 



378 Politiquement incorrect 

il sappelle Jacques Chirac » (Alain Bauer, grand 
maître du Grand Orient de France). 

« Si j'appelle sans réserves en tant qu'homme de 
gauche à voter Jacques Chirac, c'est parce que 
contrairement à ce que j'entends, jamais on ne doit 
faire de renvoi dos à dos entre d'une part ceux qui 
sont des républicains, des démocrates, et ceux qui 
sont des dictateurs et c'est aujourd'hui une respon- 
sabilité de nous expliquer que tout cela est du 
pareil au même » (Fodé Sylla, député européen). 

« Nous sommes allés avec Fodé Sylla dans les villes 
gérées par le FN, nous sommes allés à Vitrol- 
les, à Marignane, à Orange, c'est le règne des poli- 
ces privées, des milices parallèles, c'est le règne des 
morts suspectes, des manifestants qui se suicident 
d'une balle dans le dos comme le 1er mai 1995 à 
Paris, le FN il faut le dire, le répéter, c'est plus de 
violence, c'est plus d'insécurité, c'est plus de guerre 
civile et pas moins » (Bernard- Henry Lévy, philo- 
sophe). 

« Avec ma conscience je poserai un acte diman- 
che. Je poserai un acte qui dira oui à la France, 
oui à la république, oui à la démocratie, non au 
racisme, non à V antisémitisme, non à la régression 
morale et sociale et cet acte, mesdames et messieurs, 
ce sera un bulletin de vote, sur ce bulletin de vote 



379 La France LICRAtisée 

il y aura écrit le nom de Jacques Chirac » (Ber- 
trand Delanoë, maire de Paris). 

« J'entends ça et là des voix s 'élever pour dire « il 
n'y a pas de différence entre la droite et l'extrême 
droite » et ne pas appeler à voter. D'autres préfèrent 
inviter à voter blanc pour rejeter Le Pen et Chirac. 
Je le déclare ici sans ambages, tous ceux-là sont 
des irresponsables qui font le lit de l'extrême droite. 
Une abstention, un vote blanc seront autant de 
coups de poignard qui assassineront la République 
et plongeront nos enfants dans le désespoir et la 
désespérance (...) 

Pour que chaque mère, chaque père, chaque 
grand-parent puisse continuer à regarder ses enfants 
et petit s -enfant s droit dans les yeux et leur dire je 
vous aime, dimanche 5 mai par notre vote, 
BALAYONS LE PEN !» (Patrick Gaubert, prési- 
dent de la LICRA). 

Cet extraordinaire échantillonnage donne un 
petit aperçu du terrorisme verbal auquel les 
Français ont été soumis sans une minute de 
repos pendant quinze jours, entre les deux tours 
de scrutin. 

Un matraquage éhonté et une pression unique 
dans les annales, que les historiens du futur 
auront sans doute à cœur de décortiquer. 



La LICRA et ses alliés 



La LICRA a toujours travaillé en étroite 
symbiose avec les organisations attelées à la 
même tâche qu'elle-même. Même si, çà et là, des 
dissensions ont pu survenir, notamment avec le 
Parti communiste ou ses satellites, à propos du 
conflit au Proche Orient ou de la situation des 
juifs en URSS, tout ce monde de gauche et 
d'extrême gauche a toujours su le moment venu 
- pour conquérir le pouvoir et tâcher de le 
garder - faire front commun contre la droite, et 
surtout contre les « fachos ». 

Les Francs-maçons 

Les liens entre la LICRA et la franc-maçon- 
nerie sont indéniablement étroits et anciens 
puisque les deux premiers présidents de la Ligue, 
de 1928 à 1993, ont également été Francs- 
maçons. 

Bernard Lecache, président de 1927 à 1968, 

était membre du Grand Orient de France, dont 



382 Politiquement incorrect 

il fonda la loge Abbé Grégoire, du nom de 
l'émancipateur des juifs en 1791. 

Il est. intéressant de rappeler les sujets des 
conférences^ qu'il présente en loge dans les 
années avant-guerre : 

Que fait la franc-maçonnerie devant l'antisé- 
mitisme hitlérien ? (loge Locarno, 21 avril 1933). 

La vérité sur l'hitlérisme. Ses dangers pour la 
démocratie et la paix (loge Les Zèles Philanthro- 
pes, 20 juillet 1933). 

La vérité sur l'incendie du Reichstag (loge 
Locarno, 14 novembre 1933). 

La France va-t-elle perdre l'Afrique du nord ? 
(loge Paris, 12 octobre 1937). 

Le racisme derrière les cagoulards (loge La Rai- 
son, 1er février 1938). 

Le racisme contre la France (loge Garibaldi, 21 
décembre 1938). 

Le racisme, voilà l'ennemi ! (loge Agni, 27 jan- 
vier 1939). 

Le racisme contre la république (loge l'Huma- 
nité Future, 12 mars 1939. 

La franc -maçonnerie et le racisme (loge Locar- 
no, 27 juin 1939). 

Ces thèmes mettent en évidence deux points 
importants : ils sont politiques, ce qui semble 



383 La France LICRAtisée 

contradictoire avec les finalités spirituelles, voire 
ésotériques, de la franc-maçonnerie, et ils s'in- 
téressent exclusivement au nazisme. Jamais, au grand 
jamais, au communisme. 

Trois sujets rien que sur Hitler en 1933, année 
de son accession au pouvoir. C'est pourtant égale- 
ment l'année où Staline et ses sbires organisent la 
grande famine en Ukraine et condamnent délibé- 
rément six millions de personnes à mourir de faim. 
Une horreur connue en France à l'époque, on l'a 
vu. On aurait pu s'attendre, de la part du dirigeant 
d'une association défendant les droits de l'homme, 
à ce qu'il dénonce hautement ce crime et traite en 
loge, au moins une fois, le sujet suivant : Que fait 
la franc -maçonnerie devant la sauvagerie stalinienne 
en Ukraine ? Rien de tel, pourtant. 

Quant à Jean Pierre-Bloch, second président 
de la LICRA, il est tout d'abord membre du 
Droit Humain dès février 1929, puis sera affilié, 
lui aussi, au Grand Orient de France à partir de 
1932. Il poursuit une intense activité maçon- 
nique dans ces deux obédiences. 

Ses conférences d'avant-guerre^ portent sur 
les sujets suivants : 

s 

Discours sur l'impérialisme religieux. L'Eglise 
contre la démocratie (loge Liberté, 5 mars 1929) 



384 Politiquement incorrect 

Religion et socialisme. Peut-on être chrétien et 
socialiste ? Attitude des socialistes envers le commu- 

s 

nisme (loge Vers l'Emancipation, 7 mai 1930), 

Comment organiser la paix (loge La Liberté, 5 
janvier 1932). 

Un coup d'œil sur l'horizon politique. La presse 
au service du capitalisme (18 juillet 1933). 

Le statut des étrangers en France et V avenir de 
la France (loge Le Mont Sinaï, 19 juin 1939). 

Là encore, des thèmes à dominante politique 
ou d'inspiration anti- catholique. 

Après la guerre, Jean Pierre-Bloch deviendra 
également président du B'nai B'rith France à plu- 
sieurs reprises, et notamment de 1974 à 1981. 

En 1971, la LICA et l'Unesco, dirigée à l'épo- 
que par le Français René Maheu, organisent à 
Paris une grande manifestation antiraciste. La 
Grande Loge de France y participe, et déclare : 
« Son passé, le lourd tribut qu'elle a payé au régime 
de Vichy sont les garants de V adhésion sans réserve 
de la Maçonnerie au combat antiraciste ». 

En avril 1972, le DDV fait part d'une grande 
nouvelle : « Nous sommes heureux d'annoncer que 
M. Fred Zeller, Grand Maître du Grand Orient 
de France, a accepté de siéger au comité d'honneur 
de la LICA ». 



385 La France LICRAtisée 

Ses conférences seront désormais annoncées 
régulièrement. 

L'engagement de Fred Zeller dans les rangs de 
la gauche la plus déclarée n'est un secret pour 
personne. Né en 1912, il a dans sa jeunesse 
milité à la SFIO avec les socialistes révolution- 
naires. En 1935, il rencontre Léon Trotski en 
Norvège et devient son secrétaire. 

Jusqu'à la fin de sa vie, il gardera des liens avec 
la Ligue Communiste Révolutionnaire. 

Ce même Fred Zeller avait dit en 
1958 : « L'avenir sera à un grand parti socialiste 
démocratique moderne qui ouvrira toutes grandes 
ses portes (...) Ce parti socialiste devra réussir à 
tout prix la synthèse entre la tradition social-démo- 
crate, dans ce qu'elle a eu de valable, et celle du 
communisme léniniste en ce qu'elle a eu de posi- 
tif ». 

Que pensaient à cette époque-là les peuples 
concernés de l'apport du communisme léni- 
niste ? A t-on jamais posé cette question politi- 
quement incorrecte à Fred Zeller ? 

En juin 1973, le Grand Orient de France fête 
son bicentenaire. Le DDV y consacre un article 
en soulignant la similitude des idéaux communs 
à la LICRA et à la franc-maçonnerie. 



386 Politiquement incorrect 

Rappelant à cette occasion le combat antira- 
ciste de Fred Zeller, grand maître du GOF et 
membre de la Ligue, le DDV souligne : « C'est 
donc tout naturellement que de nombreux Francs- 
maçons sont adhérents de la LICA comme aussi 
naturellement des ligueurs sont entrés en maçon- 
nerie pour y trouver, sur le plan philosophique, le 
prolongement de leur action antiraciste ». 

Le DDV ose poursuivre : « La tolérance repré- 
sente un autre aspect commun du comportement 
des Francs-maçons et des membres de la Ligue. En 
effet, la bataille que nous menons passe par le 
respect des opinions, des croyances et des goûts que 
chacun d'entre nous peut avoir (...) La maçonnerie 
comme la LICA se sont toujours élevées contre les 
mesures qui tendaient à restreindre les libertés 
fondamentales ». 

Inouï ! La tolérance façon « soviet » consiste 
apparemment à tolérer exclusivement les gens de 
son propre camp et à refuser la parole, et même 
l'existence, aux autres... 

En 1977, c'est au tour du nouveau grand maî- 
tre de la Grande Loge de France, également 
membre de la LICA, de recevoir les félicitations 
du DDV. 



387 La France LICRAtisée 

L'Appel commun à la fraternité 

« Ce fut d'abord comme un sourd murmure, une 
annonce timide dans quelques journaux et sur les 
antennes d'une radio. Puis la voix se fit plus forte et 
se précisa, comme si l'Appel ne pouvait rester tu plus 
longtemps. Enfin, la veille de la date prévue, comme 
impatiente, toute la presse (nationale et étrangère), 
toutes les radios et les télévisions diffusaient et 
commentaient l'Appel commun à la fraternité ». 

En ce 15 novembre 1985, la LICRA frappe un 
grand coup : pour stopper l'élargissement des fis- 
sures apparues, selon elle, dans la conscience 
nationale, elle organise un Front antiraciste réu- 
nissant toutes les autorités spirituelles et morales 
du pays, à savoir, outre elle-même, le MRAP, la 
Ligue des Droits de l'Homme, les obédiences 
maçonniques et les églises constituées. Un Front 
antiraciste considéré comme « un événement 
exceptionnel dans la vie de la nation ». 

Elle est, bien sûr, chaudement félicitée par un 
certain nombre de politiques, au premier rang des- 
quels l'ancien trotskiste Lionel Jospin qui, en tant 
que premier secrétaire du parti socialiste, la félicite 
«personnellement pour cette initiative historique qui 
témoigne de la force, de la permanence et de la con- 
ception ouverte de votre combat contre le racisme ». 



388 Politiquement incorrect 

De quoi s'agit-il en réalité ? De rassembler 
tous les efforts et d'unir toutes les énergies pour 
réduire au silence les opposants à l'immigration 
massive qui provoque les premiers craquements 
dans la société française et les premiers succès 
électoraux du Front national. 

Va-t-on à ce stade s'interroger sur le bien- 
fondé de la poursuite de l'immigration ? 

Va-t-on se pencher sur les problèmes de coha- 
bitation que connaissent les Français les plus 
modestes ? 

Va-t-on au moins demander aux nouveaux 
arrivants de s'intégrer à leur nouvelle société ou, 
du moins, de la respecter, comme le font les im- 
migrés asiatiques notamment, qui, bien que 
nombreux, ne font jamais parler d'eux et ne re- 
vendiquent aucune transformation de leur nou- 
vel environnement ? 

Surtout pas. Ce qu'il est urgent de faire, la 
LICRA et ses associés sont heureusement là pour 
en informer les Français : 

«Affirmer le respect de l'autre - se solidariser 
avec les personnes et les minorités victimes de dis- 
crimination, leur reconnaître les mêmes droits à la 
Justice, à la liberté et à l'égalité - vivre ensemble 
dans la tolérance des différences et l'enrichissement 



389 La France LICRAtisée 

mutuel pour une société meilleure de laquelle les 
immigrés ne sauraient être exclus ». 

Nous sommes en plein angélisme et le fameux 
droit à la différence, sur lequel la LICRA évo- 
luera par la suite, est alors défendu bec et ongles. 
Il n'y a pas de problème de l'immigration, il n'y 
a que des racistes. Qu'il faut réduire au silence par tous 
les moyens. 

Dans ce combat, LICRA et franc-maçonnerie 
sont parfaitement solidaires. 

Le MRAP - Mouvement contre le racisme, 
l'antisémitisme et pour la paix qui deviendra en 
1978 Mouvement contre le racisme et pour 
l'amitié entre les peuples 

Le MRAP est classé dans la rubrique « alliés », 
car bien qu'étant fortement opposé à la LICRA sur 
certains sujets brûlants, comme les retombées du 
conflit israélo-palestinien ou, autrefois, la situation 
des juifs en Union soviétique, les deux associations 
savent fort bien s'entendre quand c'est nécessaire 
sur le dos de l'extrême droite tant exécrée. 

Le MNCR, Mouvement national contre le 
racisme s'était créé pendant la guerre pour sauver 
les enfants juifs. Tout naturellement, une fusion 
entre la LICA et le MNCR, souhaitée par les 



390 Politiquement incorrect 

militants, a lieu en février 1946 et s'intitule Al- 
liance antiraciste. Mais ce nouveau mouvement 
va avoir une vie éphémère, car les communistes 
le quittent en juin 1947 pour fonder le MRAP. 

Le MRAP est donc d'obédience communiste 
ce qui n'est pas un problème pour la LICRA, 
mais il est fortement suspecté d'antisémitisme, ce 
qui en est un. Malgré cela, les passerelles et les 
points de convergence vont rester nombreux 
entre les deux officines antiracistes. 

Il y aura cependant des périodes de crise aiguë. 
Notamment en 1967, après la guerre des Six 
Jours. 

Les hostilités sont déclarées et, en janvier 
1968, le DDV précise la position de la LICA à 
l'égard du MRAP : « Disons nettement, une fois 
pour toutes, que, de près ni de loin, nous n'avons 
rien de commun avec le MRAP, à qui nous n'avons 
cessé de reprocher son attitude pour le moins neutre 
lors du procès des blouses blanches à Moscou, lors 
du procès de Prague et de l'exécution de Rudo 
Slanski, secrétaire du PC, faussement accusé 
d'avoir trahi son pays en faveur d'Israël lors 
des campagnes antijuives de Kischko en Ukraine, avec 
son « Judaïsme sans fard », lors enfin de l'agression 
commise contre les Israéliens voici quelques mois » 



391 La France LICRAtisée 

Les griefs, on le voit, sont extrêmement ciblés. 

En 1972, la situation des juifs en Union 
soviétique et en Syrie se détériorant, le DDV fait 
mine de s'interroger : « Existerait-il, pour cette 
organisation, un antisémitisme bon ou mauvais 
selon le pays où il sévit ? Existerait-il un racisme 
intolérable et un racisme toléré selon l'endroit où il 
est perpétré ? ». 

En 1979, sous le titre « Quelles sont les vérita- 
bles raisons d'exister du MRAP ? », le DDV l'ac- 
cuse d'être sourd, aveugle, muet, amnésique et 
de mauvaise foi, pour conclure : « Au moment 
où le racisme se développe de façon inquiétante, 
nous estimons très regrettables les attaques inces- 
santes du MRAP contre notre Ligue. Se tromper de 
cible par les temps qui courent est impardonnable 
pour une association qui se prétend antiraciste ». 

Mais lorsque le Front national apparaîtra sur 
la scène politique, les adversaires d'hier mettront 
leurs querelles en sourdine et joueront de con- 
cert la partition attendue. 

Cette belle entente vole à nouveau en éclats à 
partir de l'an 2000. On peut entendre des cris 
de « Mort aux juifs » proférés lors de manifes- 
ations de soutien aux palestiniens organisées par 
le MRAP, les Verts et le parti communiste. Mou- 



392 Politiquement incorrect 

loud Aounit, secrétaire général du MRAP, met 
trois jours pour dénoncer ces dérapages antisé- 
mites, aux dires de la LICRA, qui porte plainte. 

En février 2002, le DDV livre un constat acca- 
blant « II y a désormais un antisémitisme d'extrê- 
me gauche incontrôlable, difficilement repérable et 
virulent ». 

C'est que le conflit au Proche Orient, qui s'en- 
venime et ne laisse pas apparaître de solution, a fait 
éclater les alliances anciennes et creuse des haines 
qui s'expriment sans détour : « Ces gens-là préfèrent 
faire les yeux doux à des républiques bananières 
rongées par la corruption dans lesquelles les élections 
sont escamotées, truquées, arrangées, et soutenir aveu- 
glément la cause palestinienne, non pas par passion, 
mais par réaction à l'Etat d'Israël comme c'est cas 
pour une partie de la presse gauchiste en France (Le 
Monde Diplomatique, Télérama)... ». 

La LICRA, membre et soutien du Réseau 
Voltaire . 

En 1994, Charles Pasqua, en sa qualité de mi- 
nistre de l'Intérieur, tente timidement de s'op- 
poser à la déferlante de la pornographie et d'en 
protéger en particulier les enfants. Mais il s'at 
taque là à de gros intérêts financiers et à une 



393 La France LICRAtisée 

puissante nébuleuse d'associations, dont la 
LICRA fait partie : le Réseau Voltaire. Ces asso- 
iations et mouvements politiques divers et 
variés ont en commun d'être de gauche et d'ex- 
trême gauche, d'être violemment anticatholi- 
ques, et bien évidemment de lutter comme un 
seul homme contre la bête immonde. 

Issu du Projet Ornicar, groupement homosexuel 
présidé par Thierry Meyssan, le Réseau Voltaire - 
qui est également soutenu par le Grand Orient de 
France - veut lutter pour la liberté d'expression et 
la laïcité, contre l'intégrisme moral et la censure, 
c'est du moins ce qui est inscrit dans ses statuts. 
La vérité est qu'il constitue un puissant lobby, 
financé principalement par la pornographie, et que 
rien ne doit venir contrecarrer un commerce aussi 
juteux, dont tous les membres profitent. Pendant 
des années, et jusqu'à une époque très récente, le 
trésorier du Réseau sera en effet Michel Sitbon qui 
se trouve, avec son père Guy, à la tête d'un vérita- 
le empire de publications et messageries porno- 
graphiques rapportant gros. 

Rien non plus ne doit venir contrecarrer le 
dynamitage des valeurs morales et traditionnelles 
qu'à entrepris le Réseau Voltaire sous couvert de 
défense, une fois de plus, des droits de l'homme, 



394 Politiquement incorrect 

décidément mis à toutes les sauces, y compris les 
moins ragoûtantes. 

C'est pourquoi toutes les associations mem- 
bres, y compris la LICRA, vont se mobiliser 
d'un même élan contre Pasqua. Tout ce beau 
monde crie au retour à l'ordre moral et à la cen- 
sure, et pétitionne à tour de bras. 

Sous le titre : « Contre la censure », le DDV an- 
nonce en mai 1994 : « La LICRA a signé une péti- 
tion lancée par le Réseau Voltaire et Act Up contre "la 
restauration de la censure" dans les médias, à la suite 
de l'entrée en vigueur du nouveau code pénal. L'article 
contesté est le suivant : "Le fait que soit fabriqué, 
diffusé par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit 
le support un message à caractère violent ou porno- 
graphique est puni de trois ans d'emprisonnement et 
de 500 000 FF d'amende lorsque ce message est suscep- 
tible d'être vu ou perçu par un mineur" ». 

Comme d'habitude, la droite, complètement 
tétanisée à la seule idée de paraître « réac » aux 
yeux de la gauche, va s'aplatir. Les mesures 
contestées vont vite tomber dans les oubliettes. 
Tant pis pour les enfants. D'ailleurs, il y a plus 
urgent à faire : les éduquer contre le racisme. 

Ce soutien de la LICRA, pour le moins inop- 
portun, pour ne pas dire nauséabond, n'a pas été 



395 La France LICRAtisée 



que ponctuel ou épisodique. Membre à part 
entière du Réseau, la Ligue y était d'ailleurs en 
très bonne compagnie. Qu'on en juge : 

Le Monde publie en date du 26 mai 1996, l'an- 
née de la venue du pape Jean-Paul II en France, 
un article intitulé « La mobilisation laïque et répu- 
blicaine des anti-Clovis », dans lequel on peut lire : 

« Des réunions se tiennent dans la prestigieuse salle 
du Conseil de l'Ordre, au Grand Orient de France, à 
Paris. Sans plan de table ni protocole, des membres du 
parti socialiste, du parti communiste français, de Radi- 
cal des Verts, retrouvent à l'heure du dîner, des repré- 
sentants de la Ligue communiste révolutionnaire, de la 
Fédération anarchiste, du Parti des travailleurs, un 
Journaliste de Charlie-Hebdo, et, bien sûr, un chape- 
let "d'assoces" comme la Ligue des Droits de l'Homme, 
le MRAP, la LICRA et Ras V Front. Vendredi 24 mai, 
pour leur troisième rencontre, à l'initiative du Réseau 
Voltaire - un collectif de la mouvance franc-maçonne 
qui u défend les libertés collectives et individuelles " - ils 
devaient discuter autour d'un texte intitulé "Tous et 
toutes citoyens, la France c'est nous, Clovis, on s'en 
fout": de leur engagement dans les manifestations con- 
tre la venue du pape en septembre ». 

Hélas, même les plus beaux romans d'amour 
ont une fin. En février 2005, Michel Sitbon et 



396 Politiquement incorrect 

ses millions quittent le Réseau Voltaire, accusé 
de... dérive antisémite ! 

Il est notamment reproché au Réseau d'être 
devenu une officine hostile aux États-Unis^ et 
complaisante envers les intégristes musulmans. 
Ainsi qu'envers les révisionnistes. Le crime absolu. 

Tous membres de la LICRA 

La grande habileté de la LICRA sera, dès sa 
création, de faire en sorte de compter parmi ses 
membres quasiment toute la classe politique et 
même, plus généralement, toutes les personnes 
d'influence. Cela lui permet de se déclarer apo- 
litique sans états d'âme, ses membres se char- 
geant largement de faire de la politique - et la 
politique qu'elle souhaite - à sa place. 

Se proclamant par ailleurs association morale, il 
lui est facile et même nécessaire de solliciter égale- 
ment des membres dits de droite. C'est un hon- 
neur qu'il est difficile de décliner, car un refus se- 
rait suspect et risquerait de vous classer illico dans 
le camp des racistes. Ou dans celui des ennemis 
d'Israël. Un risque dont la seule évocation fait fris- 
sonner le courageux personnel politique français. 

Un homme politique allemand, Helmut 
Schmidt, va pourtant décliner l'honneur de 



397 La France LICRAtisée 

devenir membre de la LICRA. Le fait devait être 
si rare qu'il est relaté en détails et avec quelque 
dépit, en 1993, dans le DDV. L'ancien chancelier 
allemand, en effet, « (a) décliné la demande de 
patronner ou de soutenir une section allemande de 
la LICRA (...) Conclure dans ces conditions par 
des souhaits de succès pour les activités de la 
LICRA, alors que le développement inquiétant de 
la xénophobie, du racisme et de l'antisémitisme en 
Allemagne exigeait un engagement significatif ne 
peut que faire douter de la volonté d'assumer 
clairement les leçons du passé nazi », assène en 
conclusion le DDV. 

Si la LICRA compte dans ses rangs, pour la 
vitrine, des responsables politiques de toutes 
tendances républicaines, ses dirigeants, quant à 
eux, ont toujours été de gauche. On objectera 
que ce n'est plus forcément vrai aujourd'hui si 
l'on se réfère à la seule étiquette politique, son 
président actuel, Patrick Gaubert, ayant été élu 
en 2004 député européen d'Ile-de-France sous 
l'étiquette UMP. 

C'est vrai, mais la pensée unique et totalitaire 
étant passée par là, cela n'a plus aucune impor- 
tance. Il y a belle lurette, comme on l'a vu, que 
les notions de droite et de gauche se sont diluées 



398 Politiquement incorrect 

à l'intérieur d'un même système de confiscation 
du pouvoir. Soigneusement entretenues cependant 
par les médias, ces notions fallacieuses n'existent 
plus que pour la façade pseudo-démocratique et 
pour entretenir l'illusion d'un choix aux yeux 
d'une opinion publique bien facile à berner jus- 
qu'à présent. 

Il serait extraordinairement fastidieux d'énumérer 
tous les responsables politiques, nationaux et locaux, 
et toutes les célébrités membres de la LICRA. 
Citons simplement parmi les plus connus : 

Au niveau le plus élevé de la République: les 
présidents François Mitterrand, membre de son 
comité d'honneur dès 1974, et Jacques Chirac. 

Un bon nombre de premiers ministres : Jac- 
ques Chaban-Delmas - Pierre Mauroy - Alain 
Juppé - Laurent Fabius - Lionel Jospin. 

Des présidents du Sénat : Gaston Monnerville 
(de 1948 à 1968) - Alain Poher. 

Et une pléthore de ministres, députés, maires, 
dont : Charles Hernu - André Malraux - Lucien 
Neuwirth - Gaston Defferre - Dominique 
Strauss-Kahn - Georgina Dufoix - Robert Ba- 
dinter - Jacques Delors - Bernard Kouchner- 
Jack Lang - Bernard Stasi - Jean Lecanuet - 
André Santini, qui déclarait en novembre 1986 



399 La France LICRAtisée 

à propos de la LICRA : « Elle est ma conscience 
quotidienne dans mon action de maire à Issy-les- 
Moulineaux » - Philippe Seguin - François Léo- 
tard - Simone Veil - François Bayrou - Ber- 
trand Delanoë - George Sarre. 

Sans oublier les académiciens : Maurice Schu- 
mann - Michel Droit - Jean Dutourd - le pro- 
fesseur Leprince-Ringuet - Léopold Sedar Sen- 
ghor - Alain Decaux - le professeur Georges 
Charpak - Bertrand Poirot-Delpech - Jacques 
Soustelle, qui écrira cependant à la LICRA en 
1988, avec beaucoup de perspicacité : « Je suis 
énervé en voyant le DDV transformé en pamphlet 
politique au profit de la gauche avec propagande 
obsessionnelle contre le FN. Et cela au moment où 
la " guerre des pierres" sert de prétexte à V anti- 
sionisme et à l'antisémitisme qui progressent à pas de 
géant dans les milieux de gauche grâce aux médias, 
au moment où les socialistes du Parlement européen 
invitent officiellement Arafat à Strasbourg ! Il est 
clair, pour moi, qu'on se trompe d'adversaire ». 

Et sans oublier non plus les journalistes, écri- 
vains, philosophes, publicitaires, personnalités 
diverses : Jean-Paul Sartre - Maurice Siegel - 
Jean Ferniot - Nathalie Sarraute - Alain Finkiel- 
haut - Y van Levaï - Marcel Bleustein- Blanchet 



400 Politiquement incorrect 

- Bernard-Henri Lévy - Marek Halter - Jacques 
Attali - Johnny Halliday - Guy Béart - Régine 

Roger Hanin - Costa-Gavras - Bertrand 
Tavernier - Enrico Macias - le professeur Pierre- 
Gilles de Gennes - Axel Kahn - Gilbert Trigano 

- Alain Bauer - le professeur François Jacob 
Les artistes sont particulièrement chéris par la 

LICRA, qui a parfaitement compris leur rôle 
d'identification. Johnny Halliday, « membre actif et 
combatif» de la LICA depuis 1972, écrit cette 
année-là, pour marquer son adhésion à la Ligue, 
une chanson intitulée « Le droit de vivre ». Ce 
phénomène va peu à peu s'amplifier. En mai 
1985, le DDV s'interroge : « Et pour que ce "mes- 
sage" passe [le message antiraciste, ndla], princi- 
palement dans la jeunesse, notre société montre que 
les "médiateurs " les plus efficaces sont les éducateurs 
et ces baladins modernes que sont les vedettes de la 
chanson et du cinéma. Ces derniers se trouvent 
maintenant en tête de nos cortèges, de nos mani- 
festations, portant le drapeau de V antiracisme, face 
aux appareils de photos et aux caméras des médias de 
masse. Est-ce un bien? Est-ce une erreur ? C'est un 
fait de société que notre combat ne peut ignorer. ». 

En vertu de ce principe, la LICRA attribue 
régulièrement son Prix antiraciste à des artistes. 



40 1 La France LICRAtisée 

Seront ainsi primés : Sheila en 1971, Enrico 
Macias en 1979, Gilbert Bécaud en 1985, Char- 
les Aznavour en 1987, Michel Fugain en 1995, 
Pierre Perret en 1998. 



La LICRA et les médias 



Ses deux premiers présidents, de 1927 à 1993, 
ayant été journalistes, la LICRA est bien placée 
pour connaître l'importance cruciale des médias, 
qui ont toujours fait de sa part l'objet d'une 
attention sourcilleuse. 

Globalement, elle n'a pas eu à s'en plaindre, la 
presse étant dans son ensemble largement ralliée, 
pour des raisons diverses, à la cause de l'anti- 
racisme et du politiquement correct réunis. Ses 
interventions, on l'a vu, ont été, la plupart du 
temps, largement et complaisamment relayées. 

Elles l'ont été d'autant plus qu'il est difficile- 
ment niable que les juifs soient fortement 
présents dans le monde des médias. Ce phéno- 
mène n'est certes pas nouveau. Il est intéressant 
de constater que le Guide juif de France paru en 
1971 se livre au petit exercice de Who's who ? 
suivant : il recense avec beaucoup de satisfaction 
et de précision les juifs français qui se sont 
illustrés et s'illustrent à l'époque dans les domai- 



404 Politiquement incorrect 

nés suivants : politique - littérature et sciences 

humaines - science - arts plastiques - musique - 

spectacle - sports. 

On le voit, l'éventail est large. Pourtant, pas 

un mot sur les journalistes. Ils sont totalement 

absents de ce palmarès, ce qui est tout de même 

curieux. 

serait-ce parce qu'il n'y en avait pas, ou au 
contraire parce que leur nombre aurait étonné, 
déjà à ce moment-là ? 

En 1978, les journalistes Jean Dutourd et Yves 
Mourousi sont victimes d'agressions revendi- 
quées par une organisation palestinienne. Ils ont 
eu le tort d'écrire des articles favorables à Israël. 
A cette occasion, le président Pierre-Bloch prend 
sa plume des grands jours pour fournir une 
noble définition de ce métier qu'il connaît bien : 
«(...) Il y va du droit pour chaque citoyen de s'ex- 
primer librement et diversement, sans contraintes ni 
dangers. Il y va aussi du droit d'exercer sa 
profession de journaliste avec pour seul critère 
d'informer selon sa propre conscience, d'écrire ou de 
dire ce qu'on pense sans craindre pour sa vie, parce 
que ce qu'on aura écrit ou dit pourrait déplaire ». 

Cette définition vertueuse et ces trémolos ne 
sont bien sûr valables que pour ceux qui défen- 



405 La France LICRAtisée 

dent Israël ou qui sont favorables à la gauche. 
Parce que pour les autres... 

Si la LICRA fut donc généralement bien servie 
par la presse, il y eut néanmoins des exceptions et 
des circonstances qui donnèrent lieu à des 
démêlés épiques, et même à des procès. Les pages 
du DDV sont ainsi émaillées du récit des inter- 
ventions de la LICRA auprès des dirigeants de 
médias ou de maisons d'édition, le plus souvent 
sur le mode de l'indignation ou de la menace. 

Citons quelques interventions plus caracté- 
ristiques ou plus mémorables que les autres : 

En octobre 1972, la LICRA apprend que Gal- 
limard envisage, à l'occasion de la mort de 
Lucien Rebatet, de rééditer l'un de ses livres à 
succès, Les Décombres, et réagit en ces termes : 
« Il est intéressant de noter que cet ouvrage n 'avait 
jamais été remis en circulation depuis la Libéra- 
tion. Sa réédition serait une provocation que nous 
ne saurions tolérer ». 

Les quotidiens 

En avril 1974, L'Est républicain informe ses 
lecteurs qu'une troupe de gitans a envahi Saint- 
Dié, qu'ils campent aux abords de la cité et qu'ils 
s'y comportent comme d'habitude. 



406 Politiquement incorrect 

Dans le feu de la nouvelle loi antiraciste votée 
deux ans auparavant, la LICRA considère qu'il y 
a là volonté de nuire à un groupe social et 
incitation à la haine raciale, et indique qu'elle a 
saisi sa commission juridique pour d'éventuelles 
suites à donner. 

C'est le Parisien libéré qui détient la palme des 
interventions. Qualifié de feuille libérée de tout 
scrupule, tout, selon le DDV, lui est bon pour 
« expectorer un racisme viscéral ». Un exemple parmi 
d'autres : en octobre 1973, le Parisien libéré écrit 
à propos de Marcel Dassault, alors député de la 
majorité : « M. Marcel Dassault produisait avant la 
guerre des avions sous le nom de Marcel Bloch... 
notamment la cellule du bimoteur Bloch 210 que la 
faiblesse de son moteur fit baptiser u cercueil volant'' 
durant la guerre de 1939-40 ». 

Commentaire du Droit de Vivre : « Le Parisien 
libéré comme on le voit n'est pas encore libéré des 
légendes pétainistes et miliciennes selon lesquelles la 
défaite de 40 avait pour auteurs les communistes, 
les juifs et les Francs-maçons ». 

Mais Le Monde lui-même n'est pas à l'abri et 
se voit assez souvent mis en cause, bien que sur 
le mode mineur. Ce sera le cas en juin 1980 à 
propos d'un article paru sous le titre « Double 



407 La France LICRAtisée 

nationalité, double allégeance », qualifié d'article 
calomniateur sur les juifs français. L'auteur, 
M. Snoussi, y accuse notamment les juifs de 
« trahison », de « duplicité », de « mainmise sur 
les mass média ». Il fera naturellement l'objet 
d'une vive riposte de Jean Pierre-Bloch dans les 
colonnes du DDV sous le titre « Pourquoi ? ». 

Qualifié de grossière provocation, cet article ne 
fait pourtant pas l'objet de poursuites judiciaires. 

Ce fait est d'autant plus étonnant que quelques 
mois plus tard, en décembre 1980, la LICRA se 
félicite de la condamnation du Figaro Maga- 
zine qu'elle a poursuivi pour provocation à la hai- 
ne raciale. Le critique gastronomique du magazine, 
Robert Courtine, avait en effet suscité l'ire de la 
Ligue en raison d'un article sur la cuisine chinoise 
intitulé : « Chinois : l'appétit à la baguette », dans 
lequel il était question de « l'invasion des petits 
hommes jaunes » et de leur « prolifération bacil- 
laire ». Il est vrai qu'aux yeux de la Ligue, Robert 
courtine, en sa qualité d'ancien Camelot du Roi, 
avait un passé quelque peu chargé... 

Revenons au journal Le Monde. Nous sommes 
en janvier 1981, donc en pleine période électo- 
rale. La LICRA ne cesse de se plaindre du climat 
antisémite et des attentats /ac/zo -raciste s. 



408 Politiquement incorrect 

C'est dans ce contexte que Le Monde publie 
deux articles intitulés « Lettre à mes amis juifs » 
- qui laisserait entendre, selon la LICRA, que les 
juifs sont eux-mêmes responsables du racisme 
dont ils se plaignent - et « Les pires racistes ». 

La Ligue réagit par une Lettre ouverte au 
Monde. Elle accuse les auteurs des articles de 
reprendre les thèmes traditionnels à l'égard des 
juifs « dominateurs, exaspérant les populations, 
maniaques de la persécution, parfois inspirés par 
quelque diable sadique ou malin génie masochiste » 
et des immigrés «parasites, envahisseurs, généra- 
teurs de chômage ». Et elle accuse Le Monde d'ou- 
vrir ses colonnes « à une manière de traiter les 
hommes et les problèmes qui n'est pas toujours 
agressive mais qui est fondamentalement raciste et 
discriminatoire et qui veut insidieusement s'imposer 
de plus en plus en France, dans une période 
favorable aux pires déviations ». 

Elle termine sa diatribe en attirant solennelle- 
ment « l'attention de cette rédaction sur sa lourde 
responsabilité face au développement complexe du 
processus raciste dans notre pays ». Aucune plainte 
n'est cependant déposée. 

D'ailleurs, l'auteur de la Lettre à mes amis juifs, 
l'écrivain catholique Jean-Marie Paupert, fait une 



409 La France LICRAtisée 

semi-repentance qui est publiée en avril 1981 par 
le DDV. Dans son droit de réponse, il note 
cependant ceci : «J'admets aussi qu'on puisse me 
reprocher un excessif optimisme... je continue en effet 
à ne pas croire en la réalité aujourd'hui d'un anti- 
sémitisme français. Tout au plus, quelques petits 
nazillons épars sans lien avec l'âme populaire. D'ail- 
leurs, la liste des "43 attentats facho -raciste s en 43 
jours" figurant en bas de la page qui m'incrimine, 
pratique un amalgame peu loyal entre des attentats 
racistes et d'autres qui ne le sont point ». 

D'autres polémiques suivront, dont l'une des 
plus intéressantes met aux prises le DDV et 
Gilbert Comte au sujet d'un article publié à 
nouveau dans Le Monde en janvier 1982 et 
intitulé « Le grand défi de Maxime Rodinson ». 

Vivement pris à partie par le journal de la 

LICRA, Gilbert Comte riposte dans son droit de 
réponse : 

« Je me suis efforcé de rendre compte du livre de 
M. Maxime Rodinson en conscience, sans vouloir 
solliciter ni trahir la pensée de l'auteur... Le sujet 
[la question juive, ndla] me « dérange » fort peu 
et aucune "force magnétique" (!) ne m'y ramène. 
Henry Bulawko^- 1 me conseille, néanmoins, de 
« m' occuper d'autre chose». De quel droit ? J'écris 



410 Politiquement incorrect 

sur tout sujet de mon choix sans lui demander son 
autorisation et selon ma seule conscience ». 

Il est vrai que Maxime Rodinson, juif spé- 
cialiste de l'islam et antisioniste, est un sujet sca- 
breux. 

C'est également en 1982 que se situe un 
épisode mettant aux prises, déjà, l'écrivain Roger 
Garaudy, le journal Le Monde et la LICRA. Le 
17 juin 1982, après les massacres du Liban, pa- 
raît dans le quotidien alors dirigé par Jacques 
Fauvet une page entière achetée par les signa- 
taires - outre Roger Garaudy, il s'agit du Père 
Michel Lelong et du pasteur Matthiot - et criti- 
quant l'agression israélienne. 

La LICRA leur intente l'habituel procès pour 
« provocation à la discrimination raciale ». Elle 
perd. Elle perdra une seconde fois en appel. 
Qu'à cela ne tienne, elle se pourvoit en cassa- 
tion. Elle perdra une troisième fois. Dans un 
silence médiatique assourdissant, car ses échecs 
ne sont généralement pas relatés par la presse. 
Ce qui n'est pas le cas de ses succès. Roger 
Garaudy, en revanche, paiera la note. Il consi- 
dère qu'à partir de ce moment-là commencera 
pour lui ce qu'il appelle « l'asphyxie média- 
tique » ou « la mort littéraire ». 



411 La France LICRAtisée 

En 1983, la LICRA intente un procès à Libé- 
ration pour diffamation raciale et provocation à la haine 
raciale, et le gagne. 

Ce procès fait suite à la parution dans le courrier 
des lecteurs, d'une lettre signée J.P. Kamel, intitulée 
« Français, arabe de France et fier de l'être » parue 
dans Libération le 31 juillet 1982, en pleine guerre 
du Liban. La lettre dit notamment ceci : 
« Dimanche 18 juillet, Paris se réveille couvert 
d'affiches blanc et bleu sur les panneaux du groupe 
Avenir à 1 000 FF par jour et par affiche. Que 
disent ces affiches? u Liberté pour les juifs d'URSS". 
Mon sang me monte à la tête, armé de mes seuls 
ongles j'arrache, casse et détruit l'une de ces affiches 
prise en pleine gueule dès le matin. Un peu de 
pudeur SVP, messieurs les juifs de France (...) L'ar- 
mée fasciste d'Israël est aujourd'hui aux portes de Bey- 
routh pour repousser l'ennemi et avoir une "ceinture" 
de sécurité autour d'Israël (...) Tant qu'il restera un 
seul palestinien, aucun juif ne sera en sécurité dans 
ce monde après le massacre de Beyrouth... Nous, les 
arabes de France, ne resterons pas les bras croisés. Le 
sang des martyrs réclamera vengeance ». 

Serge July, directeur de Libération, reconnaît le 
dérapage et le caractère antisémite de la lettre. 
Ce qui ne l'empêche pas d'être condamné. 



412 Politiquement incorrect 

Le DDV consacre un dossier très important à 
cette affaire et en profite pour rappeler ceci : 
« En effet, le journal Libération se fait le porteur 
depuis de longues années de certains thèmes, de cer- 
taines démarches intellectuelles, de certains dévelop- 
pements dans lesquels un lecteur averti pourra dé- 
celer sans peine le même ferment fétide, celui que 
l'on retrouve de façon certes exacerbée, extrémiste 
dans le courrier Kamel, mais porteur du même vi- 
rus : celui, n'ayons pas peur des mots, de l'anti- 
sémitisme le plus viscéral. 

Nous constaterons à travers l'étude de quelques cas 

exemplaires, que sans ressembler à celui d'autres 

journaux, passés ou présents, de droite ou d'extrême 

droite, il existe réellement un antisémitisme façon 

"Libé": différent certes, mais tout aussi dangereux ». 

Sans ressembler, quand même, à d'autres jour- 
naux de droite ou d'extrême droite. Ouf, on 
respire ! Libération ayant été racheté en 2004 par 

s 

Edouard de Rothschild, pareille mésaventure ne 
devrait plus survenir. 

Les films 

Scandale en février 1977 : le film L'ombre des 
anges est retiré des écrans parisiens sur interven- 
tion de la LIC A. Ce film d'un auteur suisse 



413 La France LICRAtisée 

d'extrême gauche, tiré d'une pièce de théâtre de 
Fassbinder, met en scène un « juif riche » qui 
domine et corrompt une ville, mais dont les 
agissements sont tolérés en raison de la mauvaise 
conscience des Allemands à l'égard des juifs. 
Encensé par les intellectuels de gauche, mais qua- 
lifié de violemment antisémite par la LICA, le 
film fait l'objet d'une polémique dans les colon- 
nes du Monde entre cinéphiles et intellectuels, 
d'une part, qui vont jusqu'à taxer l'action de la 
Ligue de « néo-fasciste », et représentants de la 
LICA, d'autre part, qui parlent de terrorisme in- 
tellectuel. Son président, Jean Pierre-Bloch, fait 
paraître dans Le Monde une lettre où l'on peut lire 
notamment les phrases suivantes : « Le mot Juif 
ne nous fait pas peur. Ce n'est plus l'antisémite qui 
désigne le juif C'est maintenant le Juif qui se 
revendique comme tel et qui désigne qui est anti- 
sémite ou provoque l'antisémitisme. L'intellectualis- 
me de certains ne nous fait pas peur non plus. Ceux 
qui ont souffert dans leur chair de l'antisémitisme 
ont aussi droit à la liberté d'expression ». 

La télévision 

En octobre 1978, la LICA s'oppose avec suc- 
cès au passage d'Albert Speer sur Antenne 2, 



414 Politiquement incorrect 

invité à la suite de la publication de ses Mémoi- 
res. 

Elle le revendique sous le titre « Le nazi Albert 
Speer interdit de télévision française » et com- 
mente : « Si la LIC A n 'était pas intervenue pour 
faire supprimer cette émission qui mettait en 
vedette Albert Speer, il est possible que des âmes 
sensibles aient trouvé l'occasion de s'apitoyer sur le 
sort de ce personnage dont le rôle néfaste fut suffi- 
samment important pour qu'il soit jugé par le Tri- 
bunal international de Nuremberg ». 

Condamné effectivement par le Tribunal de 
Nuremberg à vingt ans de prison, Albert Speer 
avait largement purgé sa peine en 1978 ... 

Apostrophes et Bernard Pivot vont être, à plu- 
sieurs reprises, dans le collimateur de la LICRA. 
En 1979, il est reproché à l'animateur d'avoir 
invité dans son émission des intellectuels de la 
Collaboration, en particulier l'écrivain Marcel 
Jouhandeau^, ce qui est qualifié d'« indé- 
cence ». 

En 1984, un article intitulé « Pivot intoxi- 
qué ? » laisse entendre que le critique littéraire 
réécrirait l'histoire à propos des chambres à gaz 
de Buchenwald, et s'inquiète en ces termes : « Si 
un esprit averti comme celui de Bernard Pivot a 



415 La France LICRAtisée 

pu se laisser « intoxiquer », qu'en est-il du « lecteur 
moyen ? ». 

Cela vaudra au DDV une réponse virulente de 
Bernard Pivot qui, après avoir qualifié l'article en 
question d'ignominieux et de calomniateur, con- 
clut : 

« Dans ces conditions, me faire passer pour un 
naïf qui se laisse intoxiquer par u les thèses révi- 
sionnistes ,y relève de l'infamie. A tout autre journal 
que le vôtre, je demanderais réparation devant les 
tribunaux ». 

Peu après cette séance d'échauffement, c'est 
l'attaque directe. Une pleine page du DDV de 
mars 1985 titre en caractères gras « Propos diffa- 
matoires et antisémites à Apostrophes ». L'article est 
sous-titré « Réaction de milliers de téléspectateurs ». 

Que s'est-il passé le 15 février 1985 ? L'invité 

s 

d'Apostrophes se nomme ce soir-là M arc -Edouard 
Nabe et présente son livre Au régal des vermines. 

Au cours de l'émission, il déclare notamment : 
« Les gens de la LICRA se servent des monceaux 
de cadavres d'Auschwitz pour faire fructifier, sur le 
fumier, leur fortune ». 

La LICRA se déchaîne sous la plume de 
Georges-Marc Benamou et parle d'un « nouvel 
antisémitisme à visage découvert ». 



416 Politiquement incorrect 

En 1995, c'est Philippe Bouvard, déjà épingle 
à d'autres reprises, qui fait l'objet d'une pour- 
suite de la LICRA devant les tribunaux pour des 
propos qualifiés de diffamatoires tenus à rencon- 
tre des arabes lors d'une émission « Les grosses 
têtes ». 

Il sera suivi quelques mois plus tard par TF1 
et Patrick Sébastien, poursuivis pour propos 
racistes sous la forme d'une chanson, au cours de 
l'émission « Osons ». 

La LICRA justifiera ces actions en ces termes : 
« Il faut que ces animateurs soient totalement 
coupés des réalités du monde et ignorent les angois- 
ses des plus petits pour ne pas comprendre que la 
plaisanterie, proférée paraît-il au second degré, les 
atteint précisément au premier degré et ajoute un 
effroi supplémentaire au sentiment qu'ils ont déjà 
de leur exclusion matérielle et morale. 

C'est le rôle de la LICRA que de contraindre ces 
inconséquents à ouvrir les yeux et leur conscience ». 



Conclusion 



Nous venons de faire la démonstration d'une 
France « licratisée », ô combien! Dominé par les 
dogmes immigrationnistes, eux-mêmes protégés 
par un antiracisme totalement instrumentalisé, le 
système au pouvoir est englué dans une pensée 
unique dont il s'est fait complice et dont il ne 
veut et ne peut plus sortir. Tenter d'en sortir 
équivaudrait à admettre qu'il a fait fausse route 
depuis trente ans, qu'il a trompé les Français et 
piétiné la démocratie en vain. Qu'en définitive il 
avait tort et que ses adversaires avaient raison. 

C'est bel et bien le cas, mais inutile de rêver, 
jamais le système ne l'admettra. Il est condamné 
à poursuivre sa fuite en avant, colmatant une 
brèche ici, épongeant à grands frais les dégâts là. 
Cachant partout et toujours son crime. Le mot 
est fort, certes, mais est-il excessif pour désigner 
la destruction identitaire d'un pays qui était, il y 
a quelques décennies encore, riche, fier de son 
histoire et de sa culture. Et homogène ? 



418 Politiquement incorrect 

Petites ou grandes, cocasses ou éhontées, tou- 
tes les interventions, pressions ou mises en de- 
meure dont nous venons de retracer les grandes 
lignes ont en tout cas puissamment contribué, 
au fil des années, à façonner la France d'au- 
jourd'hui. 

La LICRA peut donc se targuer sans exagé- 
ration d'avoir atteint son objectif, qui était de 
transformer notre pays en territoire multiculturel 
et multiethnique. 

Au terme de cette longue marche, menée de 
concert avec la gauche politique, la LICRA a réussi 
à diaboliser la droite « nationale », qui représente 
tout de même 20 % des électeurs, et à obliger la 
droite dite « républicaine » à s'aligner sur les valeurs 
et concepts de la gauche. Pour réussir cette 
opération, elle a imposé l'amalgame Front national 
égale Vichy égale Collaboration, tout en faisant 
peser sur toute la droite, et sur la France, l'oppro- 
bre et la culpabilité liés à cette période. 

Enfin, elle a su magistralement parachever son 
œuvre en vidant les notions de « droite » et de 
« gauche » de tout contenu pour imposer à la 
place le clivage racistes/antiracistes, et en assimi- 
lant toute démarche de défense identitaire à du 
racisme. 



419 La France LICRAtisée 

Elle a fait tout cela pour permettre aux idées 
de gauche de s'emparer du pouvoir, et de le 
conserver, quelle que fût la couleur du gou- 
vernement. 

Mais elle l'a fait aussi et peut-être surtout, 
pour punir un pays coupable d'avoir produit le 
régime de Vichy. Ce régime exécré ayant revêtu 
une coloration « nationale », il fallait éradiquer 
et diaboliser à l'avenir toute référence « natio- 
nale ». Par principe et par précaution. Ce qui fut 
mené à bien avec constance et sans jamais faiblir. 

Une action rendue d'autant plus aisée par la 
forte osmose de la LICRA avec le monde des 
médias, qui ont joué un rôle décisif dans ce 
montage. Un rôle d'endoctrinement des masses 
bien davantage qu'un rôle d'information. 

La promotion inlassable de l'islam en France 
par la LICRA s'inscrit elle aussi dans son obses- 
sion anti-identitaire. Pour avoir les coudées 
franches, elle a inspiré une législation antiraciste 
extrêmement dissuasive et réussi à exclure de la 
vie publique le seul parti qui s'opposait réelle- 
ment à ses objectifs. Les raisons d'une telle solli- 
citude envers l'islam, pourtant assez mal payée 
de retour, sont nombreuses et convergent toutes, 
là aussi, vers le même but : l'affaiblissement d'un 



420 Politiquement incorrect 

pays jugé coupable, dont il fallait transformer la 
population pour lui faire perdre sa cohésion et, 
par conséquent, préparer avec plus d'efficacité 
l'arrivée des idées de gauche au pouvoir. 

On a vu les origines communistes de la 
LICRA. Or, les points de convergence entre le 
communisme et l'islam ne manquent pas : tous 
deux sont fondamentalement internationalistes, 
et à ce titre combattent ou veulent transcender 
les nations. Et tous les internationalismes sont 
par essence destructeurs d'identité nationale. 

Communisme et islam sont en outre animés 
l'un et l'autre d'un prosélytisme sectaire et entre- 
tiennent la confusion entre le politique et le 
religieux. Car le communisme a toujours fonc- 
tionné à la manière d'une religion nouvelle des- 
tinée à remplacer toutes les autres. Cette con- 
fusion est parfaitement incompatible avec le 
système de valeurs correspondant à la tradition 
européenne et ne peut entraîner à terme que des 
conflits. 

Enfin, communisme et islam ont un point 
commun supplémentaire : ils combattent tous 
deux la démocratie. Même s'ils s'en défendent en 
s'emparant du terme pour mieux le vider de son 
contenu. 



42 1 La France LICRAtisée 

Le génie de la LICRA aura d'ailleurs été de 
mener son combat partisan au nom de la « dé- 
mocratie » et des « droits de l'homme ». Alors 
même que jamais ces notions n'ont en réalité été 
autant bafouées en France que durant ces trente 
dernières années. 

Oui, la France a bel et bien été licratisée, c'est- 
à-dire soumise à un lavage de cerveau et à un 
chantage permanent aux droits de l'homme, 
sous couvert d' antiracisme, religion obligatoire 
de l'homme universel, elle a été sommée d'ac- 
cueillir sur son sol une population arabo-musul- 
mane massive. Dont une fraction importante fait 
aujourd'hui partie de la communauté nationale. Du 
moins par les papiers. 

Mais si l'islamisme, comme il était inévitable 
qu'il le fasse, progresse chaque jour davantage, 
doit-on pour autant reprocher aux musulmans 
de pratiquer une religion dont la caractéristique 
est justement de n'avoir jamais évolué et d'être 
aujourd'hui encore, dans son essence et son 
expression, ce qu'elle était à l'origine ? Une reli- 
gion dont nos « élites » connaissaient parfaite- 
ment la nature et les manifestations dans sa zone 
géopolitique naturelle. Quelle arrogance, quelle 
illusion d'imaginer que l'islam pût être différent 



422 Politiquement incorrect 

par la vertu de l'air miraculeux respiré en 
Europe, de ce qu'il est depuis 1300 ans partout 
dans le monde ! 

Si les musulmans sont aujourd'hui installés 
chez nous en nombre sans cesse grandissant, 
c'est bien parce que des politiques irresponsables 
et veules, sous la pression d'associations dites 
antiracistes, mais en réalité antinationales et anti- 
identitaires, leur ont ouvert toutes grandes les 
portes sans même leur demander en contrepartie 
de faire l'effort de s'adapter à notre société. 

Pointer aujourd'hui ces responsabilités premières, 
en refusant de confondre causes et conséquences, 
c'est pratiquement courir le risque de tomber sous 
le coup de la loi. La société de connivence qui nous 
gouverne a bien verrouillé le débat et mis en place 
les dispositifs pour se défendre et empêcher toute 
contestation et toute liberté d'expression, si ce n'est 
de pensée. Le système entend bien se perpétuer. 

L'élection présidentielle de 2007 peut-elle 
changer quoi que ce soit à une situation qui im- 
poserait un regard totalement inédit et débar- 
rassé de ses œillères antiracistes? 

En l'état actuel des choses, il est permis d'en 
douter. Que l'an prochain, sorte des urnes la 
« droite » ou la « gauche », ne présentera en réa- 



423 La France LICRAtisée 

lité qu'un intérêt extrêmement limité pour le 
pays. Pour ne pas dire nul. 

Car pour se faire élire, il faut appartenir à ce 
système qui n'hésite pas à manipuler les modes 
de scrutin pour assurer sa totale hégémonie et à 
faire donner ses orgues de Staline si nécessaire : 
médias, justice, éducation nationale, etc. Et lors- 
qu'on appartient à ce système, il est impossible 
de s'écarter des rails, sauf à risquer l'excommuni- 
cation, et donc la fin de sa carrière politique. 
Les têtes peuvent changer, la politique, elle, ne 
change jamais réellement. 

Pour « délicratiser » notre pays, qui en a pour- 
tant un urgent besoin, pour le faire émerger de 
cette chape de plomb sous laquelle il étouffe 
depuis trente ans, il faudrait que soit enfin dyna- 
mité le cordon sanitaire - unique en Europe - qui 
empêche, au nom de la défense de la « démo- 
cratie », un parti licite de représenter ses électeurs. 
Il faudrait que la France parvienne à se libérer 
de la pensée unique imposée par la gauche et se 
convertisse enfin au pluralisme politique. Mais 
un pluralisme et une démocratie réels, et non 
d'apparence. 

Il ne s'agirait pas là d'une réforme, mais bel et 
bien d'une révolution. Peut-on seulement ima- 



424 Politiquement incorrect 

giner pareille transformation de notre pays ? Le 
bourrage de crâne a été si efficace, le rouleau 
compresseur de la pensée totalitaire, sans cesse 
relayé par les médias, a si bien pénétré les esprits, 
qu'on peut en douter. 

Pourtant l'histoire démontre que des situations 
désespérées ont pu être redressées, des combats 
qui paraissaient perdus ont pu être gagnés par la 
volonté inflexible et le courage sans faille de 
quelques résistants. 

Aidés, peut-être, par un coup de pouce du 
destin ? 



Notes 



(1) En 1897, la population juive de Palestine 

s 

s'élevait à 55 000 personnes. L'Etat d'Israël compte 
à l'heure actuelle environ 5,4 millions de juifs, soit 
près de 40 % de la population juive mondiale. 

(2) La famille Warburg ne manque pas d'intérêt. 
Jacques Attali écrit en 1985 la biographie d'un 
de ses membres les plus éminents, le banquier 
Sir Siegmund G. Warburg (1902-1980). Le 
DDV en parle longuement sous le titre éloquent 
de : A la croisée du judaïsme, de l'influence et de 
l'argent. Si l'on en croit l'article, Attali « est fas- 
ciné par les liens que Siegmund entretenait avec le 
pouvoir - il était l'homme de l'influence, notam- 
ment sur le premier ministre Harold Wilson appar- 
tenant au Labour ». 

(3) Un juif qui se convertissait voyait se lever 
pour lui toutes les restrictions et limitations qui 
frappaient ses anciens coreligionnaires. 

(4) Une révolution qui se voit, elle aussi, large- 
ment contestée à l'heure actuelle. 



426 Politiquement incorrect 

(5) Non sans que de nombreux témoignages 
d'indignation ne se manifestent. Notamment 
celui du général Georges Tabouis, ancien com- 
missaire de la France auprès de l'Ukraine en 
1918, qui écrivit : «Dire que Petlura était anti- 
sémite ! Quelle sinistre plaisanterie ! ». 

(6) Bernard Lecache rencontrera en tout cas 
la mère de Samuel Schwartzbard, à Odessa en 
Ukraine, durant cet été 1926. Il relate l'entretien 
dans son livre, en précisant qu'on lui cachait 
soigneusement le crime de son fils : « Le meurtre, 
la prison, les Assises prochaines, on lui a tout caché. 
Les lettres - on les lui lit - ne lui apprennent que 

des mensonges ». 

(7) Paru en 1886, cet ouvrage connut cent-qua- 
torze éditions en un an. 

(8) Pierre Laval avait été président du Conseil du 
7 juin 1935 au 22 janvier 1936. 

(9) Louis Oscar Frossard avait été secrétaire 
général de la section française de l'Internationale 
Communiste. 

(10) Citée par Ralph Schor dans son ouvrage, 
L'antisémitisme en France dans l'entre-deux- guerres. 

(11) Du nom d'Isaac Adolphe Crémieux, créa- 
teur de l'Alliance Israélite Universelle en 1863 et 
ministre français de la Justice en 1869. 



427 La France LICRAtisée 

(12) Marcel Bleustein-Blanchet crée l'entreprise 
de publicité Publicis en 1927. En 1938, il crée 
Régie Presse qui assurera la régie de la publicité 
des plus gros tirages de la presse française. Sa 
fille Elisabeth, philosophe, est l'épouse de Robert 
Badinter, ancien ministre de François Mitter- 
rand. 

(13) Jean Pierre-Bloch est président de la LICRA 
au moment où Marcel Bleustein-Blanchet écrit 
son livre. Il ne l'était pas encore lors de l'épisode 
relaté. 

(14) Chef du parti radical français et membre du 
comité d'honneur de la LICA. 

(15) Après la guerre, cet antisémitisme d'Etat ne 
faiblira d'ailleurs pas. Seule la mort de Staline, 
en mars 1953, sauvera les juifs soviétiques des 
terribles persécutions annoncées par le pseudo 
« complot des blouses blanches », médecins juifs 
ayant soit-disant tenté d'empoisonner Staline. 

(16) A la suite de tensions accrues depuis le 
début de l'année, Israël attaque « préventive- 

s 

ment » l'Egypte le 5 juin 1967. La Jordanie et 
la Syrie sont également impliquées dans cette 

s 

guerre-éclair qui permettra à l'Etat hébreu 
d'annexer les territoires suivants : Sinaï, Golan, 
Cisjordanie, Gaza, Jérusalem-est, quadruplant 



428 Politiquement incorrect 

ainsi sa superficie initiale. L'implantation des co- 
lonies, source de conflits permanents, va débuter 
dans la foulée. 

(17) C'est durant son mandat que fut votée la 
fameuse résolution assimilant le sionisme au 
racisme et que Yasser Arafat fut invité à venir 
s'exprimer devant l'ONU. 

(18) Né en décembre 1918, Kurt Waldheim 
était sous-lieutenant d'état-major de la Wehr- 
macht sans autorité de commandement. 

(19) Des mains de Jean Pierre-Bloch, qui pré- 
sidait alors à la fois la LICA et le B'nai B'rith 
France. 

(20) La LICA modifie son sigle et se transforme 
en LICRA en 1979. 

(21) Félix Gouin, Gaston Def ferre et André 
Philip. Les deux derniers étant membres de la 
LICA. 

(22) Lui aussi membre de la LICA. 

(23) Cité dans Histoire de Vichy de François- 
Georges Dreyfus, p. 206. 

(24) Le premier convoi partit de Compiègne le 
27 mars 1942, et le dernier de Drancy le 17 
août 1944. 

(25) Le général De Gaulle fit déposer une gerbe 
sur la tombe du Maréchal une seule fois, le 10 



429 La France LICRAtisée 

novembre 1968, pour le 50 e anniversaire de la 
victoire de 1918. Valéry Giscard d'Estaing le fit 
une fois également, en 1978 pour le 60 e anni- 
versaire de l'armistice. 

(26) Un génocide qui a fait deux millions de 
morts entre 1975 et 1979. De retour dans la vie 
publique cambodgienne, deux des responsables 
de ce qui a constitué une horreur absolue se sont 
déclarés très désolés. Cela a suffi à leur réintégra- 
tion. Leur jugement n'est toujours pas à l'ordre 
du jour. 

(27) Qui avait été révisionniste au début des 
années 80 aux côtés de Robert Faurisson. 

(28) Office of Spécial Investigations, officine 
américaine chargée de la traque des « nazis 
cachés », créée en 1979. 

(29) De 1947 à 1954. Il fut élu par le Congrès 
réuni à Versailles, puisque le suffrage universel 
n'était pas encore instauré pour l'élection prési- 
dentielle. 

(30) Notamment dans la Suède sociale-démo- 
crate, qui mettra ces théories en application avec 
zèle. 

(31) Serge Alexandre Stavisky, juif d'origine 
russe, déjà poursuivi dans le cadre de plusieurs 
affaires, avait monté une vaste escroquerie au 



430 Politiquement incorrect 

Crédit Municipal, avec la complicité ou la 
protection d'élus. Il sera retrouvé mort dans des 
circonstances mystérieuses le 9 janvier 1934. 
Cette affaire provoquera dans l'opinion un vif 
mouvement d'antiparlementarisme. 

(32) C'est pourtant cette droite qui, en 1976, 
autorisera pour des motifs « humanistes », sous 
Giscard président et Chirac premier ministre, le 
regroupement familial qui marquera véritable- 
ment le départ de l'immigration de peuplement. 
Il est vrai qu'au début les conditions sont très 
strictes, n'ouvrant pas droit en particulier aux 
prestations sociales. Ces conditions strictes ne le 
resteront pas longtemps, comme chacun sait, et 
le mince ruisseau du début va très vite devenir 
un torrent incontrôlable. 

(33) Un métissage présenté comme une richesse 
pour les autres. Mais est-il également considéré 
comme tel par et pour les juifs ? 

(34) Il s'agit d'un documentaire de 32 minutes 
sur l'univers concentrationnaire réalisé en 1955 
à la demande du Comité d'Histoire de la Secon- 
de Guerre Mondiale. Nuit et Brouillard indique 
le chiffre de 9 millions de morts dans les camps. 

(35) Cette formule de « double peine », propre 
à émouvoir les foules, s'apparente à la novlangue 



43 1 La France LICRAtisée 

politiquement correcte chère à George Orwell. 
Adoptée en novembre 2003 à l'instigation de 
Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur, cette dis- 
position interdit l'expulsion hors du pays des 
délinquants étrangers. 

(36) Un des mots « signifiants » de la novlangue 
politiquement correcte. 

(37) Cette appropriation des mots dont le sens 
est modifié au gré de la nouvelle morale (la 
novlangue qu'évoque George Orwell) mériterait 
une analyse linguistique approfondie comme 
celle réalisée par Victor Klemperer dans son 
remarquable ouvrage sur la sémantique nazie 
(LTI - Lingua Tertii Imperii). Tout totalitarisme 
prend le contrôle des mots, donc de la pensée. 

(38) Score réalisé par le candidat du FN, Jean- 
Pierre Stirbois, lors du premier tour de l'élection 
municipale partielle de Dreux. 

(39) Le socialiste Roland Dumas est d'ailleurs 
élu en 1986 président de la commission des 
affaires étrangères de l'Assemblée avec les voix 
des députés FN. Il les acceptera sans états d'âme. 

(40) Pourtant, en 1981, les réseaux RPR ont 
appelé à voter pour Mitterrand contre Giscard. 
Philippe Dechartre, ancien ministre du général 
de Gaulle et de Pompidou, adressera dans ce 



432 Politiquement incorrect 

sens un courrier parfaitement clair aux militants 
et sympathisants RPR : « Je vous appelle sans 
hésitation à voter François Mitterrand, d'autant 
plus que le danger communiste est pour longtemps 
écarté. L'élection de François Mitterrand ne repré- 
sente donc pas le risque d'un changement de société 
ou une menace pour nos libertés ». 
Jacques Chirac permettant au RPR de tirer con- 
tre « son » camp a donc largement contribué à 
l'installation des socialo-communistes. 

(41) Victor Kravtchenko est le premier haut- 
fonctionnaire soviétique à passer à l'ouest. Il 
intente en 1949 un procès pour diffamation à la 
revue communiste d'Aragon, Les Lettres français- 
ses qui l'avait traîné dans la boue à la suite de la 
parution de son livre J'ai choisi la liberté dans 
lequel il dénonçait la terreur stalinienne. Il ga- 
gnera son procès. 

(42) Marie-Claire Mendès-France, décédée en 
2004, était la fille de Robert Servan-Schreiber, 
fondateur du journal Les Echos, et de Suzanne 
Crémieux, sénateur radical du Gard. Elle sera 
présidente du comité de soutien à Lionel Jospin 
pour la présidentielle de 1995. 

(43) En juin 2003, la LICRA s'étonnera de ce que 
des organisations réclament l'annulation d'un gala 



433 La France LICRAtisée 

au profit des soldats israéliens prévu à Levallois- 
Perret et appellera à cette occasion « au respect de 
l'autre » en déclarant : « La LICRA, dans un con- 
texte national et international difficile et conflictuel, 
appelle à un peu plus de retenue, de modération, 
d'esprit de tolérance et de respect de chacun »... 

v s 

(44) A savoir : le Conseil permanent de l'Epis- 
copat, le Conseil de la fédération protestante, le 
Comité inter-épiscopal orthodoxe, le Conseil su- 
périeur rabbinique et la Grande Mosquée de 
Paris. 

(45) La majorité « de droite » issue des législa- 
tives de 1986, qui composera la première coha- 
bitation, de 1986 à 1988, avec Jacques Chirac 
comme premier ministre. 

(46) Il s'agit des villes de Toulon, Orange et 
Marignane qui ont porté à leur tête en 1995 des 
maires appartenant au Front national. 

(47) Informations tirées de l'ouvrage de Yann 
Moncomble, Les professionnels de V antiracisme, 
paru en 1987. 

(48) Informations tirées de l'ouvrage de Yann 
Moncomble, Les professionnels de V antiracisme. 

(49) Le Président du Réseau Voltaire, Thierry 
Meyssan, avait publié, au lendemain des actes 

s 

terroristes du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, 



434 Politiquement incorrect 

un ouvrage intitulé L'effroyable imposture, dans 
lequel il conteste la version officielle de l'atten- 
tat. 

(50) Journaliste au DDV et président de 
l'Amicale des anciens déportés juifs de France. 

(51) Marcel Jouhandeau n'avait, au demeurant, 
jamais eu d'engagement politique dans la Colla- 
boration. La LICRA lui reprochait surtout des 
propos peu amènes à l'égard des juifs dans son 
Journal des années 40. 



Bibliographie 



Quand Israël meurt... Au pays des pogroms, 
Bernard Lecache, 1926. 
Les Terroristes, Roland Gaucher, 1965. 
Ô Jérusalem, Dominique Lapierre et Larry Col- 
lins, 1972. 

Les Professionnels de V antiracisme, Yann Moncom- 
ble, 1987. 

Boris Souvarine - le premier désenchanté du com- 
munisme, Jean-Louis Panne, 1993. 
Mystères et secrets du B'nai B'rith, Emmanuel Ra- 
tier, 1993. 

Le livre noir du communisme, ouvrage collectif, 
1997. 

La face cachée de Nuremberg, Mark Weber, tra- 
duction 1998. 

L'industrie de l'Holocauste - Réflexions sur l'exploi- 
tation de la souffrance des juifs, Norman G. Fin- 
kelstein, 2001. 

Historiquement correct - pour en finir avec le passé 
unique, Jean Sévillia, 2003. 



436 Politiquement incorrect 

Histoire de Vichy, François-Georges Dreyfus. 
2004. 

L'affaire Waldheim ou le déshonneur de la démo- 
cratie, Harold Tittmann, 2004. 



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dirigée par Philippe Randa 




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Le Guide du collectionneur politiquement incorrect - Francis Bergeron 

Profanation - Chard, préface de Philippe Randa 

Le Racisme anti-français - Henri de Fersan 

Délit et rature - Rolandaël 

Martin Heidegger, philosophe incorrect - Jean-Pierre Blanchard 

Aux sources du national-populisme - Jean-Pierre Blanchard 

Écrits politiquement incorrects - Jean Silve de Ventavon 



aux éditions Déterna 



La faim justifie les moyens - Jean-Pierre Blanchard, préface de Philippe Ramla 
Mythes et races - Jean-Pierre Blanchard, préface de Philippe Gautier 
Les chemins de la victoire - Jacques Bompard 
Les nouveaux nationalistes - Christian Bouchet 
Les testament d'un Européen - Jean de Brem 

Des rêves suffisamment grands - Pierre Descaves, préface de jean-C/4ude Martinez 
Désacralisée, la France devient folle - Georges Dillinger 
La France LICRAtisée - Anne Kling, préface d'Alain Soral 
Écrits païens - Bruno Favrit 
Aux Voleurs! - Konk, préface de Philippe Randa 

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La Torche et le glaive - Jean Mabire 

La Germanophobie - Philippe Gautier, préface de jean-Pierre B/4nchard 
Le Racisme anti-allemand - Philippe GaUtier 

Quand grossissent les têtes molles - Pierre Monnier, préface de Philippe Rilnda 
Les Avenues de la V e - Béatrice Péreire 

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Le Dilemme, les jeunes face à la vocation du mariage - Marie-Claude Sarrot 
Comme une veillée d'armes - Jean-François Touzé 



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Les Faux Amis de l'Amérique - Patrick Brunot, préface de Dimitri O. Rogosin 

Lettres enfin ouvertes au directeur du Monde - Gilbert Comte 

Jacques Chirac ou l'homme en fuite - Gilbert Comte 

Carnet d'un Réfractaire - Jean Curutchet, préface de Philippe Randa 

Banlieues en feu - Gilles Falavigna, préface de Nicolas Tandler 

Être royaliste - Thiery Jolif (présente) 

Diverses droites - Patrick Gofman 

Retour au réel - Maxime Laguerre, préface d'Alain de Bmoist 

Interpellations (Questionnements métapolitiques) - Jacques Marlaud, préface d'Anne Brassié 

Vers la société multiraciste - Jean-Jacques Matringhem et Philippe Randa (présentent) 

Tables d'hôte - Franck Nicolle, avec la collaboration de Wilfried Da Costa Oliveira 

Chroniques Barbares 1993-2001 (tome I) - Philippe Randa 

Le Bien va mal (Chroniques Barbares - tome II) - Philippe Randa, préface de Christian Bouchet 

Nous, les Insurgents ! (Chroniques Barbares - tome III) - Philippe Randa 

Quand l'islam frappe à la porte - Jean-Claude Rolinat, 

préface d'Olivier Pichon; postface de Christian Bouchet 
Génération et évolution humaines - Francis Verdavoine-Bourget 
Le Génie du judaïsme - Dominique Zardi, préface de Philippe Randa 
L'Algérie des miracles - Dominique Zardi, préface de Jean-Claude Rolinat